C. UNE TENSION SUR LA DÉPENSE QUI EXIGE UNE REPONSE BUDGÉTAIRE ADAPTÉE
Le délai de traitement des demandes d'asile a une incidence budgétaire forte en ce qui concerne l'hébergement des demandeurs d'asile puisqu'un mois de délai supplémentaire par rapport à la prévision représente un coût pour les finances publiques de l'ordre de 24 millions d'euros par an .
1. Une exécution 2008 tendue
La prévision budgétaire liée à l'hébergement des demandeurs d'asile avait été réalisés sur la base d'une baisse des flux de demandes de 10 %, et sur une hypothèse de délai de procédure de 10 mois (13 mois avec le délai légal de sortie des CADA). Cette estimation ne s'est pas réalisée.
Par rapport à une dotation prévisionnelle de 35,3 millions d'euros au titre de l'hébergement d'urgence et de 28,04 millions d'euros au titre de l'allocation temporaire d'attente, des ouvertures de crédits supplémentaires ont été nécessaires sur l'exercice 2008. Le décret d'avance n° 2008-1089 du 24 octobre 2008 portant ouverture et annulation de crédits a en effet ouvert 36 millions d'euros supplémentaires, dont 24 millions d'euros au titre de l'allocation temporaire d'attente et 12 millions d'euros au titre de l'hébergement d'urgence. Ces crédits ont été gagés par des annulations de crédits sur le programme 104 : la subvention pour charge de service public à l'ANAEM ne sera pas versée en 2008 car les recettes propres de l'organisme, et l'importance de son fonds de roulement, excèdent les besoins constatés.
La hausse devrait encore être plus importante : l'exécution prévue est de 52,6 millions d'euros au titre de l'hébergement d'urgence et de 51 millions d'euros au titre de l'allocation temporaire d'attente, soit une augmentation de 63,5 % par rapport à la dotation initiale.
L'hébergement des demandeurs d'asile : écart entre prévision et exécution en 2008
(en millions d'euros)
Prévision 2008 |
Réalisation prévue (gage : non versement de la subvention ANAEM) |
|
Hébergement d'urgence |
35,30 |
52,6 |
Allocation temporaire d'attente |
28,04 |
51,0 |
Total |
63,34 |
103,6 (+ 63,5 %) |
Source : loi de finances 2008 et décret d'avance
Dans son avis sur le projet de décret d'avance précité, en date du 16 octobre 2008, votre commission des finances avait invité le gouvernement « à tenir compte de l'évolution de la demande d'asile en 2008 afin de mieux évaluer son impact sur les dépenses d'hébergement des demandeurs d'asile en 2009 ».
2. Une exécution 2009 qui n'apparaît pas tenable
Votre rapporteur spécial a souhaité obtenir des simulations sur la charge budgétaire prévisible pour 2009 au titre de l'hébergement d'urgence et de l'allocation temporaire d'attente, en fonction d'éléments plus réalistes que ceux figurant dans le projet annuel de performances. Sur la base, prudente, d'une augmentation des demandes d'asile en 2008 de 10 %, et d'une durée actuelle des procédures de 100 jours à l'OFPRA et de 400 jours devant la CNDA, on aboutit aux évaluations de dépense suivantes en 2009 :
- si la demande d'asile se stabilise en 2009, le besoin complémentaire par rapport au projet de loi de finances proposé à votre commission des finances serait de l'ordre de 23,4 millions d'euros au titre de l'hébergement d'urgence et de 21,8 millions d'euros au titre de l'allocation temporaire d'attente, soit un total de 45,2 millions d'euros, représentant 75 % de la dotation initiale ;
- si la demande d'asile progressait encore de 10 % en 2009, le besoin complémentaire par rapport au projet de loi de finances proposé à votre commission des finances serait de l'ordre de 28,8 millions d'euros au titre de l'hébergement d'urgence et de 27 millions d'euros au titre de l'allocation temporaire d'attente, soit un total de 55,8 millions d'euros, représentant 93 % de la dotation initiale .
Besoins supplémentaires de crédits de paiement pour 2009 par rapport à la dotation 2009 en ce qui concerne l'hébergement d'urgence et l'allocation temporaire d'attente
(en millions d'euros)
Exécution 2008 |
Hypothèses d'évolution de la demande d'asile |
Besoin total 2009 14 ( * ) |
Besoin complémentaire/PLF |
|||||||
Stabilité en 2009 |
+ 10% en 2009 |
+ 15% en 2009 |
Stabilité en 2009 |
+ 10 % en 2009 |
+ 15 % en 2009 |
Stabilité en 2009 |
+ 10 % en 2009 |
+ 15 % en 2009 |
||
Hébergement d'urgence |
52,6 |
8.151 |
8.966 |
9.374 |
53,4 |
58,8 |
61,4 |
23,4 |
28,8 |
31,4 |
Allocation temporaire d'attente |
51,0 |
12.638 |
13.902 |
14.534 |
51,8 |
57,0 |
59,6 |
21,8 |
27,0 |
29,6 |
Total |
45,2 |
55,8 |
61,0 |
Source : ministère de l'immigration, de l'identité nationale, de l'intégration et du développement solidaire sur la base des hypothèses de votre commission des finances
La dotation proposée pour 2009 au titre de l'hébergement d'urgence et de l'allocation temporaire d'attente n'est donc pas soutenable. Or, les marges de manoeuvre de la mission « Immigration, asile et intégration » seront plus faibles en 2009 qu'en 2008 car la subvention à l'ANAEM, qui peut ne pas être versée en cours d'année, a été ramenée de 44,6 millions d'euros en loi de finances pour 2008 à 15 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2009.
Un dégel des crédits du programme 303 sera donc indispensable en 2009 conformément à l'exposé général des motifs du projet de loi de finances qui prévoit que « le dispositif [lié à la mise en réserve de précaution] pourra être aménagé en cours de gestion pour tenir compte du caractère obligatoire de certaines dépenses. Pour les programmes d'intervention sur lesquels l'Etat ne dispose pas de pouvoir discrétionnaire d'attribution, les crédits mis en réserve seront libérés, sauf diminution du nombre de bénéficiaires des dispositifs ». Ce dégel ne sera sans doute pas suffisant et devra conduire le gouvernement à ouvrir des crédits supplémentaire sur le programme 303 gagés sur des annulations de crédits d'autres missions du budget général.
* 14 En tenant compte de la réévaluation du coût moyen, soit 17,96 par jour et par personne pour l'HU, et d'une revalorisation de 1,6 % sur le coût de l'allocation temporaire d'attente.