B. DES LACUNES INDÉNIABLES SOULIGNÉES PAR LES DIFFÉRENTS ACTEURS DE LA LUTTE ANTIDOPAGE
1. Les attentes de l'Agence française de lutte contre le dopage
Dans son rapport d'activité pour 2006, l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) a estimé que son action pourrait être rendue plus efficace par quelques adaptations de notre législation.
S'agissant des sanctions administratives tout d'abord, elle a souhaité pouvoir prononcer de nouveaux types de sanctions (avertissement, travaux d'intérêt général), déclasser un sportif contrôlé positif en cas d'inaction de la fédération organisatrice de la compétition, propose que la saisine de l'Agence en matière disciplinaire ne soit plus suspensive, et que la détention de produits dopants puisse être sanctionnée.
Concernant les sanctions pénales, ensuite, elle a émis le voeu de pouvoir se constituer partie civile en cas d'ouverture de poursuites judiciaires, et que soit incriminé pénalement le fait de ne pas respecter les décisions de sanction prises par les fédérations.
Enfin, sur la question des autorisations d'usage à des fins thérapeutiques (AUT), elle a souhaité pouvoir reconnaître les AUT délivrées par des fédérations internationales ou d'autres agences nationales.
Votre rapporteur se félicite que plusieurs de ces préconisations aient été reprises dans le projet de loi initial ou aient été adoptées par voie d'amendement à l'Assemblée nationale.
2. Des pouvoirs limités pour les enquêteurs
En l'état actuel du droit, le sportif n'est concerné par aucune incrimination pénale relative au dopage, sauf s'il est lui-même un trafiquant.
Cet état de fait est lié à la volonté française, suite notamment à l'échec de la loi de 1965 précitée, de ne pas stigmatiser les sportifs contrôlés positifs en les condamnant à une peine de prison. Il est indéniable que la mise en place des sanctions disciplinaires, accompagnée du renforcement des contrôles, a été à la fois dissuasive et efficace. Toutefois, aujourd'hui, il est préjudiciable à la lutte contre le dopage que les autorités de police n'aient aucun pouvoir vis-à-vis d'une personne détenant des produits dopants sauf à ce que :
- les produits qu'elle détient soient considérés comme vénéneux au sens de l'article L. 5131-1 du code de la santé publique, qui sont soumis à des règles particulières de détention ;
- les produits qu'elle détient soient des stupéfiants, dont la détention est pénalement réprimée à l'article L. 222-37 du code pénal ;
- des indices sérieux existent que cette personne cède, offre, administre, ou applique des substances ou procédés dopants, ou encore facilite leur utilisation ou incite à leur usage.
Dans la pratique, le bilan judiciaire de la lutte antidopage est très faible et les filières organisées par les trafiquants de produits dopants continuent à prospérer.
Il semble donc qu'une législation pénale spécifique au dopage doive aujourd'hui être mise en place afin de :
- mieux prendre en compte les procédés dopants, tels que les transfusions sanguines ;
- faciliter les pouvoirs des enquêteurs en cas de détention de produits dopants, notamment par les sportifs ;
- et prendre en compte l'ensemble des opérations relatives au trafic de substances et procédés dopants, comme la production, la fabrication, l'importation, l'exportation ou le transport de ces produits.
3. Des évolutions imposées par l'évolution de la situation internationale
Le développement du trafic de produits dopants est aujourd'hui facilité par l'apparition d'Internet. De nombreuses substances ou procédés sont ainsi en vente sur des sites en ligne situés hors du territoire français. En dépit des efforts de la douane, des substances illégales sont ainsi relativement aisées à acheminer sur le territoire français. En outre, il semble que les réseaux de trafic de produits dopants soient de plus en plus structurés.
Face à l'organisation de la filière du dopage, les Etats ont mis en place l'outil du code mondial antidopage qui a valeur contraignante dans les pays ayant adopté la Convention internationale contre le dopage dans le sport.
Les articles 4 et 5 de la Convention précisent ainsi « que les États parties s'engagent à respecter les principes adoptés dans le code mondial antidopage et à prendre les mesures appropriées conformes à ses principes ».
La France, qui a ratifié la convention par la loi n° 2007-129 du 31 janvier 2007, doit ainsi faire évoluer sa législation pour se conformer au code mondial qui préconise notamment que le trafic et la détention de produits dopants soient sanctionnés. Il définit le trafic comme étant l'administration, le transport, l'envoi, la livraison ou la distribution de ces produits. En outre, l'Agence mondiale antidopage doit aussi être explicitement reconnue, ce qui n'est pas encore le cas dans notre législation.