3. Au service de l'autonomie de la France en sciences du vivant
Enfin, tarder à légiférer sur les OGM emporte un dernier coût économique, d'un poids colossal pour l'avenir : en entretenant la confusion, la France a fini par décourager ses chercheurs en sciences du vivant. Même les lignes budgétaires ouvertes pour la recherche en biotechnologies ne sont pas consommées.
Sans doute la première des conclusions consensuelles du Grenelle de l'environnement en matière d'OGM est-elle de renforcer les connaissances et la recherche publique sur les OGM, ce dont votre rapporteur se félicite.
Il est vrai aussi que le Gouvernement a annoncé, le 11 janvier 2008, vouloir consacrer 45 millions de crédits budgétaires à la recherche en biotechnologies végétales, ce qui se traduit en fait par une enveloppe annuelle de 15 millions d'euros en 2009, 2010 et 2011. Mais rien n'indique qu'elle viendra s'ajouter aux crédits déjà engagés par l'agence nationale de la recherche ou par l'Institut national de recherche agronomique (INRA).
En outre, il ne suffit pas d'afficher un consensus en faveur de la recherche : il faut aussi lui assurer un cadre sécurisé pour se déployer. Le besoin de financement n'est pas le premier en cause, puisque, dès à présent, l'appel à projets OGM lancé par l'Agence nationale de la recherche trouve peu de réponses : avec seulement 6 projets de recherche sur les OGM en 2006, les crédits ouverts sont loin d'être consommés. La défiance du public et les incertitudes politiques sur les OGM détournent les chercheurs de ce sujet de recherche.
La recherche sur les OGM ne pourra avancer que dans un climat apaisé et respectueux de ses essais. Adopter ce projet de loi constitue un acte fondateur dans la construction de ce climat de confiance .
L'indépendance de notre pays est en jeu, là encore : si la France persiste dans une attitude défensive à l'égard des OGM et dans une politique de procrastination, elle risque de voir monopoliser par des multinationales étrangères, et surtout non-européennes, la propriété sur les traits génétiques, avec tout ce qu'un tel monopole implique en termes de dépendance, notamment pour les pays en développement, dont les besoins alimentaires explosent.
A titre d'exemple, le maïs développé par Biogemma, structure de recherche française organisée autour de la coopérative semencière Limagrain, également française, devait être capable de consommer 30 % d'eau en moins. Les plantations d'essais ayant été fauchées, l'expérience n'a pu être menée à terme en France et ces variétés résistantes à la sécheresse sont en train d'être développées par Monsanto, entreprise américaine, qui pourra ensuite les commercialiser en Europe comme en Afrique.
En tout état de cause, le processus législatif ne doit pas paralyser les dossiers de demande d'autorisation d'essais en champ et, en attendant qu'aboutisse la mise en place du nouvel organe d'expertise prévu par le projet de loi, votre commission insiste auprès du Gouvernement pour que ces demandes à des fins de recherche soient traitées . Elle suggère de mobiliser à cet effet l'Agence française pour la sécurité sanitaire des aliments, dont l'expertise reconnue en matière d'OGM pourrait utilement être mobilisée en ce sens. Ceci permettrait d'éviter de creuser encore le retard français en matière de recherche sur les OGM.