ANNEXE 3 - LES DISPOSITIFS JURIDIQUES ACTUELS DE PRISE EN COMPTE DE LA DANGEROSITÉ EN FRANCE
1. La durée des peines
2. La période de sûreté
3. Les dispositifs de suivi après la privation de liberté
1. LA DURÉE DES PEINES |
Principales infractions punies de détention ou de réclusion criminelle
Perpétuité |
30 ans |
20 ans |
15 ans |
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Crimes contre les personnes |
- crimes contre l'humanité (art. 211-1 à 212-3 ) - participation à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation des crimes d'eugénisme ou de clonage reproductif (art. 214-4) - assassinat (art. 221-3) - meurtre précédant, accompagnant ou suivant un autre crime (art. 221-2) - meurtre préparant ou facilitant un délit, favorisant la fuite ou assurant l'impunité d'un auteur ou d'un complice de délit (art. 221-2) - direction ou organisation d'un groupement ayant pour objet le trafic de stupéfiants (art. 222-34) |
- eugénisme (art. 214-1) - clonage reproductif (art. 214-2) - meurtre (art. 211-1) - empoisonnement (art. 221-5) - violences habituelles sur un mineur de quinze ans ou sur une personne vulnérable ayant entraîné la mort (art. 222-14, 1°) - violences volontaires avec arme sur toute personne dépositaire de l'autorité publique, sur un sapeur pompier ou un agent d'un réseau de transport public de voyageurs ayant entraîné la mort de la victime (art. 222-14-1, 1°) |
- violences habituelle sur un mineur de quinze ans ou sur une personne vulnérable ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente (art. 222-14, 2°)
- violences volontaires avec arme sur toute personne
dépositaire de l'autorité publique, sur un sapeur pompier ou un
agent d'un réseau de transport public de voyageurs ayant
entraîné une mutilation ou une infirmité permanente
- enlèvement ou séquestration (art. 224-1) - détournement d'aéronef, de navire ou de tout autre moyen de transports (art. 224-6) - production ou fabrication illicites de stupéfiants (art. 222-35) |
- tortures ou actes de barbarie (art. 222-1) - violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner (art. 222-7) - 225 - - violences volontaires avec arme sur toute personne dépositaire de l'autorité publique, sur un sapeur pompier ou un agent d'un réseau de transport public de voyageurs ayant entraîné une ITT de plus de huit jours (art. 222-14-1, 3°) - administration de substance nuisible ayant entraîné la mort sans intention de la donner (art. 222-15) - viol (art. 222-23) |
Crimes contre les biens |
- extorsion en bande organisée (art. 312-6) |
- vol en bande organisée (art. 311-9) - incendie de la forêt d'autrui dans des conditions exposant les personnes à un dommage corporel ou créant un risque irréversible pour l'environnement (art. 322-6) |
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Crimes contre la Nation, l'État et la paix publique Crimes contre la Nation, l'État et la paix publique (suite) |
- livraison à une puissance étrangère des troupes des forces de l'armée française ou tout ou partie du territoire national (art. 411-2) - diriger ou organiser un mouvement insurrectionnel (art. 412-6) |
- livraison à une puissance étrangère de matériels ou d'équipements affectés à la défense nationale (art. 411-3) - entretenir des intelligences avec une puissance étrangère en vue de susciter des hostilités ou des actes d'agression contre la France (art. 411-4) - fournir à une puissance étrangère les moyens d'entreprendre des hostilités ou d'accomplir des actes d'agression contre la France (art. 411-4) - attentat (art. 412-1) - usurpation de commandement ou levée illégale de force armée (art. 412-7) - provocation suivie d'effet à s'armer contre l'autorité de l'Etat ou contre une partie de la population (art. 412-8) - diriger ou organiser un groupement ou une entente terroriste (art. 421-6) - contrefaçon, falsification ou fabrication illicite de monnaie (art. 442-1, 442-2)
- en cas d'état de siège ou d'urgence
déclarée, ou en cas de mobilisation générale ou de
mise en garde par le gouvernement, en vue de nuire à la défense
nationale : de provoquer des militaires à passer au service d'une
puissance étrangère, d'entraver le fonctionnement normal du
matériel militaire, de provoquer à la désobéissance
par quelque moyen des militaires ou des assujettis affectés à
tout forme de service national
|
- terrorisme écologique (art. 421-2) - participation à un mouvement insurrectionnel (art. 412-5) - diriger ou organiser un groupement ou une entente en vue de préparer des actes de terrorisme (art. 421-2-1) - sabotage dans le but de servir les intérêts d'une puissance étrangère (art. 411-9) |
- livraison à une puissance étrangère d'informations dont l'exploitation, la divulgation ou la réunion est de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation (art. 411-6) - sabotage (art. 411-9) - participation à un mouvement insurrectionnel (art. 412-4) - 226 - |
- 227 -
1) Les articles cités sont ceux du code pénal. Source : Commission des lois 2) L'infraction de terrorisme sanctionnée à l'article 421-1 consiste à commettre certaines infractions de droit commun avec un dol spécial défini comme l'intention « de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur ». Plutôt que d'en faire une circonstance aggravante, le législateur a choisi de réprimer de façon autonome cette infraction. Les peines encourues sont fonction de l'acte matériel, elles s'échelonnent du double de la peine encourue lorsque l'infraction est punie d'une peine inférieure ou égale à trois ans jusqu'à la réclusion criminelle à perpétuité. |
Ce tableau doit être complété par deux observations :
- d'abord, par le jeu des circonstances aggravantes , les peines peuvent être très significativement augmentées ;
- ensuite, les règles relatives à la récidive légale conduisent aussi à une aggravation de la peine. A titre d'exemple, si une personne condamnée pour un crime ou un délit passible de dix ans d'emprisonnement commet un nouveau crime, quel que soit le temps écoulé entre les deux infractions (dans ce cas la récidive est dite générale et perpétuelle ) le maximum de la peine encourue pour ce crime est alors porté soit à la réclusion criminelle à perpétuité s'il est passible d'une peine de vingt ans ou de trente ans de réclusion criminelle, soit à trente ans de réclusion criminelle s'il est passible d'une peine de quinze ans de réclusion criminelle (art. 132-8 du code pénal).
2. LA PÉRIODE DE SÛRETÉ Au cours de la période de sûreté, le condamné ne peut bénéficier d'aucune mesure d'aménagement de peine (suspension ou fractionnement de la peine (suspension ou fonctionnement de la peine, placement à l'extérieur, permissions de sortir, semi-liberté et libération conditionnelle). En outre, les réductions de peine accordées pendant la période de sûreté ne seront imputées que sur la partie de la peine excédant cette durée (art. 132-23) 111 ( * ) . La période de sûreté est applicable de plein droit en cas de condamnation à une peine privative de liberté, non assortie de sursis, d'une durée égale ou supérieure à dix ans, prononcée pour les infractions spécialement prévues par la loi. Elle est égale à la moitié de la peine ou à 18 ans si la réclusion criminelle à perpétuité a été prononcée. Cependant la juridiction peut soit réduire la période de sûreté -voire la supprimer-, soit, au contraire, l' augmenter : elle peut ainsi être portée jusqu'aux deux tiers de la peine ou en cas de réclusion criminelle à perpétuité à 22 ans. En cas de meurtre ou d'assassinat de mineur de 15 ans précédé ou accompagné de viols ou de tortures et d'actes de barbarie , la cour d'assises peut même « par décision spéciale, soit porter la période de sûreté jusqu'à 30 ans , soit, si elle prononce la réclusion criminelle à perpétuité », décider que le condamné ne pourra jamais bénéficier d'une mesure d'individualisation de peine . En d'autres termes, la réclusion à perpétuité sera effective et le condamné terminera sa vie en prison (art. 221-3 et 221-4 du code pénal). Ces dispositions connaissent néanmoins un tempérament 112 ( * ) : en effet lorsque le condamné manifeste des gages sérieux de réadaptation sociale, le tribunal de l'application des peines peut, à titre exceptionnel mettre fin à la période de sûreté ou réduire la durée (art. 720-4 du code de procédure pénale). Le tribunal de l'application des peines peut être saisi à tout moment mais : - si une période de sûreté de 30 ans a été prononcée, aucun aménagement de peine n'est possible avant que le condamné ait été incarcéré pendant au moins 20 ans ; - si la peine de réclusion criminelle a été déclarée incompressible , la révision n'est possible qu'après une période de 30 ans et après une expertise « réalisée par un collègue de trois experts médicaux désignés par le bureau de la Cour de cassation ». Cette expertise est destinée à apprécier la dangerosité des condamnés 113 ( * ) . Si la période de sûreté n'interdit pas toute mesure d'aménagement, l' expiration de cette période n'implique aucunement l'octroi de telles mesures . Elle donne simplement au condamné la possibilité d'en demander le bénéfice. Plusieurs garanties encadrent d'ailleurs la mise en oeuvre d'aménagements. Ainsi, si la période de sûreté était supérieure à 15 ans, aucune libération ne peut être accordée sans que le condamné ait été placé pendant une période de un à trois ans sous le régime de la semi-liberté (art. 720-5 du code de procédure pénale). |
Tableau simplifié des conditions d'application
de la période
de sûreté de plein
droit
114
(
*
)
Infractions passibles d'une période de sûreté de plein droit (si peine prononcée sup. ou égale à 10 ans) |
Durée légale de la période de sûreté |
Augmentation judiciaire de la période de sûreté |
Conditions de révision de la période sûreté |
Crimes c. l'humanité (211-1 à 212-3) - meurtres aggravés autres que visés in fine (221-2 à 5) - tortures (222-1 à 6) - violences (222-8, 10, 12, 14 et 15) - viol (222-25, 26) ( trafic de stup. (222-34 à 39) - séquestration et détournement de moyen de transport (224-1 à 7) - proxénétisme (225-7 à 10) - vols (311-6 à 10) - extorsions (312-3 à 7) - destructions (322-8 à 10) - atteintes int. de la Nation (411-2, 412-1) - terrorisme (421-3 et 4) fausse monnaie (442-1 et 2) |
LA MOITIÉ DE LA PEINE 18 ANS SI RÉCLUSION A PERPÉTUITÉ (132-23, al. 2) |
DEUX TIERS DE LA PEINE 22 ANS SI RÉCLUSION A PERPÉTUITÉ (132-23, al.3) |
A TOUT MOMENT Si gages sérieux de réadaptation sociale Décidée par juridiction de même degré que celle qui a prononcé la condamnation (720-4, al. 1 du CPP) |
MEURTRE OU ASSASSINAT D'UN MINEUR DE 15 ANS précédé ou accompagné de viol, ou de tortures et actes de barbarie (212-3, 221-4) |
30 ans, quelle que soit la durée de la peine (soit la totalité de la durée de la peine, si peine à temps) (212-3, 212-4) |
Règles ci-dessus. Mais si période de sûreté de 30 ans prononcée, révision possible après exécution des 2/3 de la période de sûreté (720-4, al. 1 du CPP) |
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Peine perpétuelle incompressible (212-3, 212-4) |
Après 30 ans de détention Décidé par une commission de 5 magistrats de la Cour de cassation après avis de 3 experts médicaux (720-4, al. 3-4 du CPP) |
Source : Frédéric Desportes et Francis Le Gunehec, droit pénal général, op. cité, p 987.
3. LES DISPOSITIFS DE SUIVI APRÈS LA PRIVATION DE LIBERTÉ |
Le suivi socio-judiciaire
Institué par la loi du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs, le suivi socio-judiciaire peut être prononcé par les juridictions répressives à l'encontre des personnes condamnées pour certaines catégories d'infractions. Il est le plus souvent prononcé en sus d'une peine privative de liberté.
La mesure de suivi socio-judiciaire ne peut être prononcée que dans les cas prévus par la loi. Initialement encourue pour les infractions à caractère sexuel , elle peut désormais être appliquée, depuis la loi relative au traitement de la récidive des infractions pénales aux autres infractions les plus graves (actes de torture et de barbarie, meurtres, pyromanie...).
Infractions pour lesquelles le suivi socio-judiciaire est encouru
Crimes |
Loi du 17 juin 1998 |
- meurtre ou assassinat précédé
- viol simple ou aggravé
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Loi du 12 décembre 2005 |
- meurtre et assassinat
- torture ou acte de barbarie
- enlèvement ou séquestration
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Délits |
Loi du 17 juin 1998 |
- agression sexuelle et exhibition sexuelle (art. 222-48-1 du code pénal)
- corruption de mineur ; fixation, enregistrement,
diffusion de l'image pornographique d'un mineur ; diffusion
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Loi du 12 décembre 2005 |
- destruction ou dégradation d'un bien
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Loi du 5 mars 2007 |
- violences commises au sein du couple (article 222-48-1 du code pénal). |
Source : commission des Lois du Sénat.
Le suivi socio-judiciaire consiste à soumettre le condamné, sous le contrôle du juge de l'application des peines, pendant une durée fixée par la juridiction de jugement, à des mesures d'assistance et de surveillance destinées en principe à prévenir la récidive. Si la mesure est prononcée en même temps qu'une peine privative de liberté, elle ne commencera à courir qu'à compter de la libération du condamné . Ainsi, dès lors qu'il est prononcé en même temps qu'une peine privative de liberté, le suivi socio-judiciaire permet d'exercer un contrôle post-carcéral du condamné.
La durée du suivi socio-judiciaire ne peut excéder dix ans en matière correctionnelle et vingt ans en matière criminelle. La loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité a néanmoins fixé cette durée à trente ans lorsqu'il s'agit d'un crime puni de trente ans de réclusion criminelle. Elle a également permis à la cour d'assises de ne pas fixer de limite à la durée du suivi socio-judiciaire s'il s'agit d'un crime puni de la réclusion criminelle à perpétuité.
Les obligations du suivi socio-judiciaire qui doivent en principe être initialement fixées par la juridiction de jugement renvoient, d'une part, à celles prévues pour le sursis avec mise à l'épreuve et comportent, d'autre part, des dispositions spécifiques (interdiction de paraître dans certains lieux ; interdiction de rencontrer certaines personnes ; interdiction d'exercer une activité en contact avec les mineurs ...). Le suivi socio-judiciaire comporte également des mesures d'assistance similaires à celles du sursis avec mise à l'épreuve (aide sociale et, le cas échéant, aide matérielle).
Par ailleurs, la personne condamnée à un suivi socio-judiciaire est obligatoirement soumise à une injonction de soins, sauf si la juridiction en décide autrement, dès lors qu'une expertise médicale a conclu qu'elle est susceptible de faire l'objet d'un traitement.
L'inobservation par le condamné des obligations liées au suivi socio-judiciaire est sanctionnée par un emprisonnement dont la durée maximale doit être initialement fixée par la juridiction de jugement et qui, en tout état de cause, ne peut dépasser trois ans en cas de délit et sept ans en cas de crime. Il appartient au juge de l'application des peines d'ordonner, en tout ou partie, l'exécution de cet emprisonnement.
Une étude récente du ministère de la justice 115 ( * ) a permis de dresser un premier bilan de l'application de la loi du 17 juin 1998. Le suivi socio-judiciaire est prononcé pour un millier de personnes chaque année -soit pour 10,5 % des condamnations pour lequel il est encouru. Il est utilisé beaucoup plus souvent en matière criminelle (33 % des condamnations) qu'en matière délictuelle (7 %) 116 ( * ) . En 2004, la durée moyenne du suivi socio-judiciaire est de 5,3 ans pour les délits et de 7 ans pour les crimes 117 ( * ) et la mesure concerne essentiellement les condamnés majeurs aux âges intermédiaires (55 % ont entre 30 et 50 ans) 118 ( * ) .
La surveillance judiciaire
Instituée par la loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive, la surveillance judiciaire (art. 723-29 à 723-37 du code de procédure pénale) permet de soumettre à certaines mesures de contrôle, à l'issue de l'exécution de la peine d'emprisonnement, des personnes dont le risque de récidive paraît avéré.
Elle a ainsi vocation à s'appliquer aux personnes qui n'ont pas bénéficié d'une libération conditionnelle (incompatible en effet avec le risque de récidive) et qui n'ont pas été condamnées à un suivi socio-judicaire 119 ( * ) . Elle est soumise à une double condition : l'intéressé doit avoir été condamné à une peine privative de liberté égale ou supérieure à dix ans pour une infraction pour laquelle le suivi socio-judiciaire est encouru.
La surveillance judiciaire est décidée par le juge de l'application des peines sur réquisition du procureur de la République 120 ( * ) au vu d'une expertise médicale attestant la dangerosité de la personne et après un débat contradictoire 121 ( * ) .
La surveillance judiciaire peut comporter trois types d'obligation : d'abord, certaines des obligations applicables au sursis avec mise à l'épreuve (d'une part, les mesures de contrôle général prévues par l'art. 132-44, d'autre part, plusieurs des obligations visées par l'art. 132-45 : interdiction de paraître en certains lieux, de rencontrer la victime, d'exercer l'activité professionnelle à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise ou de détenir ou porter une arme) ; ensuite, les obligations spécifiques au suivi socio-judiciaire et notamment l'injonction de soins ; enfin, le placement sous surveillance électronique mobile.
La durée de la surveillance judiciaire qui commence à courir à la libération du condamné ne peut excéder celle correspondant au crédit de réduction de peine ou aux réductions de peine supplémentaires dont celui-ci a bénéficié et qui n'ont pas fait l'objet d'une décision de retrait.
En cas d' inobservation par le condamné des obligations et interdictions qui lui ont été imposées, le juge de l'application des peines peut, après un débat contradictoire, retirer tout ou partie de la réduction de peine dont il a bénéficié et ordonner son réincarcération.
Contrairement au suivi socio-judiciaire qui s'est vu reconnaître le caractère de peine complémentaire, la surveillance judiciaire est immédiatement applicable aux condamnés dont le risque de récidive est constaté après la date d'entrée en vigueur de la loi y compris pour les faits commis avant cette date quelle que soit la date de la condamnation 122 ( * ) .
Le fichier judiciaire national automatisé des infractions sexuelles (art. 706-53-1 à 706-53-12 du code procédure pénale)
Le fichier judicaire national automatisé des infractions sexuelles a été institué par la loi du 9 mars 2004 afin de prévenir la récidive des délinquants sexuels par l'enregistrement de l'identité et des adresses de ces derniers. La loi du 12 décembre 2005 a étendu le champ d'application du FIJAIS aux auteurs de meurtres et assassinats commis en état de récidive légale. Ces informations sont conservées dans le fichier pendant un délai de 30 ans s'il s'agit d'un crime ou d'un délit puni de dix ans d'emprisonnement et un délai de 20 ans dans les autres cas.
Surtout, les personnes définitivement condamnées pour un crime ou pour un délit puni de dix ans d'emprisonnement sont tenues de signaler semestriellement leur adresse en se présentant auprès d'un service de police ou de gendarmerie pendant une durée de trente ans.
Cette obligation de « pointage » a été rendue mensuelle par la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance dans deux hypothèses :
- lorsque la dangerosité de la personne le justifie et à condition que la juridiction de jugement ou le juge de l'application des peines en décide ainsi ;
- lorsque la personne est en état de récidive légale -le juge étant alors tenu de prévoir l'obligation de présentation une fois par mois.
Le non-respect de ces obligations constitue un délit puni de deux ans d'emprisonnement.
Selon les informations communiquées par M. Jean-Marie Huet, directeur des affaires criminelles et des peines, 15.977 personnes étaient inscrites au FIJAIS, au 31 mai 2007, parmi lesquelles 19 % étaient astreintes à un régime renforcé semestriel.
Parmi les différentes obligations auxquelles peut être soumis le condamné dans le cadre du suivi socio-judiciaire et de la surveillance judiciaire, deux instruments visent plus particulièrement, quoique dans un esprit différent, la lutte contre la récidive. L'injonction de soins et le placement sous surveillance électronique mobile.
Le placement sous surveillance électronique mobile
Le placement sous surveillance électronique mobile, disposition emblématique de la loi du 12 décembre 2005, consiste pour la personne qui y est soumise dans l'obligation de porter un bracelet GPS destiné à le localiser à tout instant.
Cette mesure a pour objet, d'une part, de prévenir la récidive (par le double effet de surveillance et de dissuasion - l'intervenant étant assuré d'être confondu s'il passe à l'acte) et d'autre part, dans l'hypothèse où, malgré tout, l'infraction a été commise, d'identifier l'auteur et de favoriser son arrestation.
Le placement sous surveillance électronique mobile peut être décidé dans le cadre de la libération conditionnelle, du suivi socio-judiciaire ou de la surveillance judiciaire.
Ces trois modalités de recours au placement sous surveillance électronique mobile concernent un champ d'infractions similaires, celles pour lesquelles le suivi socio-judiciaire est encouru mais obéissent pour le reste à des régimes juridiques distincts que le tableau suivant met en évidence.
Le placement sous surveillance électronique mobile requiert le consentement de l'intéressé. Dans le cadre du suivi socio-judiciaire, en cas de refus, il encourt cependant la peine d'emprisonnement prévue dans la décision de condamnation en cas d'inobservation des obligations du suivi socio-judiciaire (art. 131-36-12 du code pénal). De même, dans le cadre de la surveillance judiciaire, le juge de l'application des peines doit avertir le condamné que le placement sous surveillance électronique mobile ne peut être mise en oeuvre sans son consentement mais que, à défaut, tout ou partie de la réduction de peine dont il a bénéficié pourra lui être refusée (art. 723-35 du code de procédure pénale).
Les modalités d'application du bracelet
électronique mobile
pour les faits commis après
l'entrée en vigueur de la loi
Seuil requis pour quantum de peine prononcé |
Juridiction compétente pour prononcer le PSEM |
Durée maximale d'application de la mesure |
Conditions de mise en oeuvre un an avant libération |
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Libération conditionnelle |
Pas de conditions relatives au quantum |
Juge de l'application des peines |
Deux ans renouvelables une fois en matière délictuelle et deux fois en matière criminelle |
- Avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté - Examen mis en oeuvre par le JAP destiné à évaluer la dangerosité de l'intéressé et le risque de récidive |
Suivi socio-judiciaire |
sept ans d'emprisonnement |
Juridiction de jugement puis juge de l'application des peines ou, de sa propre initiative, juge de l'application des peines |
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Surveillance judiciaire |
Dix ans d'emprisonnement |
Juge de l'application des peines |
Avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté |
Source : commission des lois.
L'injonction de soins
Aux termes de la loi du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive, la personne condamnée à un suivi socio-judiciaire est obligatoirement soumise à une injonction de soins -sauf décision contraire de la juridiction- dès lors qu'une expertise médicale atteste que l'intéressé est susceptible de faire l'objet d'un traitement (art. 131-36-4 du code pénal).
L'injonction de soins prend tous ses effets à la libération du condamné. En vertu du principe du « consentement aux soins », la personne condamnée pourra refuser le traitement médical prescrit par l'injonction de soins mais elle s'expose à la mise à exécution de l'emprisonnement prononcé par la juridiction (article 131-36-4, alinéa 2 du code pénal).
Le juge de l'application des peines doit désigner un médecin coordonnateur sur une liste départementale de psychiatres ou de médecins ayant suivi une formation appropriée, établie par le procureur de la République (article L. 3711-1 du code de la santé publique). Le médecin coordonnateur assume une triple fonction :
- il invite le condamné à choisir son médecin traitant ;
- il conseille le médecin traitant -considéré comme médecin référent- à la demande de celui-ci ;
- il transmet au juge de l'application des peines ou à l'agent de probation les éléments nécessaires au contrôle de l'injonction des soins.
La part des suivis socio-judiciaires assortis d'une injonction de soins n'est pas appréhendée par les statistiques du ministère de la justice. Il semble cependant qu'elle demeure encore faible.
La loi relative au traitement de la récidive a été complétée afin de permettre au médecin traitant de prescrire à la personne condamnée à un suivi socio-judiciaire des médicaments entraînant une diminution de la libido . Cette prescription est naturellement subordonnée à l'accord de la personne sous la forme d'un consentement secret et renouvelé au moins une fois par an.
La loi du 10 août 2007 a prévu que l'injonction de soins pourrait aussi s'appliquer dans le cadre du suivi avec mise à l'épreuve, de la surveillance judiciaire et de la libération conditionnelle, sauf décision contraire du juge de l'application des peines, à la condition qu'une expertise établisse la possibilité d'un traitement.
* 111 En revanche, la période de sûreté ne fait pas obstacle à la suspension de peine décidée au profit des condamnés atteints d'une pathologie engageant le pronostic vital ou dont l'état de santé est durablement incompatible avec le maintien en détention (art. 720-1-1 du code de procédure pénale).
* 112 C'est là sans doute la condition de leur conformité aux engagements internationaux de la France - convention européenne des droits de l'homme et pacte international relatif aux droits civiques et politiques - qui prohibent les traitements inhumains et dégradants.
* 113 Par ailleurs, la période de sûreté est aussi réduite par les commutations et remises de peine sauf si le droit de grâce en dispose autrement (art. 720-2 du code de procédure pénale). Commutations et remises de peine entraînent en effet le maintien de la période de sûreté « pour une durée globale qui correspond à la moitié de la peine résultant de la commutation ou remise sans toutefois pouvoir excéder la durée de la période de sûreté attachée à la peine prononcée ». Cependant, en cas de peine perpétuelle incompressible, la période de sûreté est égale à la durée de la peine résultant de la mesure de grâce.
* 114 Les articles cités sont, sauf indication contraire, ceux du Code pénal.
* 115 Le suivi socio-judiciaire : bilan de l'application de la loi du 17 juin 1998, Infostat justice, mai 2007, n° 94.
* 116 Plus de la moitié des suivis socio-judiciaires pour délit sont prononcés pour une atteinte ou une agression sexuelle sur un mineur. Par ailleurs, les condamnés à un suivi socio-judiciaire ont tous commis un viol.
* 117 Les durées les plus fréquentes sont de 5 ans (44 %) et de 10 ans (21 %).
* 118 24 % ont moins de 30 ans et 21 % ont plus de 60 ans.
* 119 Soit que ces personnes aient été condamnées avant la loi du 17 juin 1998, soit que condamnées après cette date, la juridiction de jugement n'ait pas prévu le suivi socio-judiciaire.
* 120 Pour permettre au ministère public d'exercer cette mission et d'éviter que des personnes soient libérées en fin de peine sans que leur dangerosité ait été détectée, l'article D. 147-32 du code de procédure pénale prévoit une information mensuelle du procureur par le greffe des établissements pénitentiaires des condamnés à une peine privative de liberté supérieure ou égale à dix ans dont la libération doit intervenir entre le sixième et le douzième mois qui suit.
* 121 Lors de ce débat, le condamné est obligatoirement assisté par un avocat choisi par lui, ou, à sa demande, désigné par le bâtonnier.
* 122 La mise en oeuvre de la surveillance judiciaire aux personnes condamnées pour des faits commis avant le 14 décembre 2005 obéit cependant à un régime transitoire particulier présentant une double garantie supplémentaire : d'abord le condamné peut demander une contre expertise, qui ne peut lui être refusée, à la suite de l'expertise de dangerosité ; ensuite, la mesure de surveillance judiciaire doit être prise par le tribunal d'application des peines, instance collégiale de trois juges et non par le seul juge de l'application des peines.