Rapport n° 48 (2007-2008) de M. Pierre HÉRISSON , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 24 octobre 2007
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INTRODUCTION
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EXPOSÉ GÉNÉRAL
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I. LA NÉCESSAIRE ACTUALISATION DU CADRE
NORMATIF RELATIF AUX MANÈGES
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A. UN DOMAINE D'ACTIVITÉ SPÉCIFIQUE
QUI COMPORTE DES RISQUES
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B. L'ABSENCE D'UNE RÈGLEMENTATION
SPÉCIFIQUE RELATIVE A LA SÉCURITE DES MATÉRIELS
D'ATTRACTION
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C. UN PREMIER PAS : LA CONVENTION DU 17 AOÛT
2007
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A. UN DOMAINE D'ACTIVITÉ SPÉCIFIQUE
QUI COMPORTE DES RISQUES
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II. EXAMEN DES ARTICLES DE LA PROPOSITION DE LOI
SOUMISE A VOTRE COMMISSION
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III. LES CONCLUSIONS DE VOTRE COMMISSION
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I. LA NÉCESSAIRE ACTUALISATION DU CADRE
NORMATIF RELATIF AUX MANÈGES
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TEXTE ÉLABORÉ PAR LA COMMISSION DES
AFFAIRES ÉCONOMIQUES
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ANNEXE - PERSONNES AUDITIONNÉES
N° 48
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008
Annexe au procès-verbal de la séance du 24 octobre 2007 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires économiques (1) sur la proposition de loi de MM. Pierre HÉRISSON, Jean-Paul ALDUY, Jean-Paul AMOUDRY, Pierre ANDRÉ, René BEAUMONT, Michel BÉCOT, Claude BELOT, Roger BESSE, Daniel BERNARDET, Joël BILLARD, Mme Paulette BRISEPIERRE, MM. François-Noël BUFFET, Dominique BRAYE, Louis de BROISSIA, Mme Brigitte BOUT, MM. Christian CAMBON, Jean-Claude CARLE, Auguste CAZALET, Gérard CÉSAR, Jean-Pierre CHAUVEAU, Marcel-Pierre CLÉACH, Christian COINTAT, Gérard CORNU, Denis DETCHEVERRY, Michel DOUBLET, Alain DUFAUT, André DULAIT, Louis DUVERNOIS, Jean-Claude ETIENNE, Hubert HAENEL, Hubert FALCO, Jean FAURE, Alain FOUCHÉ, Bernard FOURNIER, Mme Joëlle GARRIAUD-MAYLAM, MM. Alain GÉRARD, François GERBAUD, Michel GUERRY, Paul GIROD, Alain GOURNAC, Adrien GOUTEYRON, Francis GRIGNON, Louis GRILLOT, Georges GRUILLOT, Mme Christiane HUMMEL, MM. Michel HOUEL, Benoît HURÉ, Jean-Marc JUILHARD, Mmes Christiane KAMMERMANN, Fabienne KELLER, M. Marc LAMÉNIE, Mme Élisabeth LAMURE, MM. Robert LAUFOAULU, Jacques LEGENDRE, Mme Lucienne MALOVRY, M. Pierre MARTIN, Mme Colette MÉLOT, MM. Alain MILON, Jean-Luc MIRAUX, Bernard MURAT, Mmes Jacqueline PANIS, Monique PAPON, MM. Jackie PIERRE, Ladislas PONIATOWSKI, Charles REVET, Philippe RICHERT, Louis SOUVET, Yannick TEXIER, André TRILLARD, Mme Catherine TROENDLE, MM. François TRUCY, Jacques VALADE, Alain VASSELLE et Jean-Pierre VIAL relative à la sécurité des manèges , machines et installations pour fêtes foraines ou parcs d' attraction ,
Par M. Pierre HÉRISSON,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Paul Emorine, président ; MM. Jean-Marc Pastor, Gérard César, Bernard Piras, Gérard Cornu, Marcel Deneux, Pierre Herisson, vice-présidents ; MM. Gérard Le Cam, François Fortassin, Dominique Braye, Bernard Dussaut, Jean Pépin, Bruno Sido, Daniel Soulage, secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Gérard Bailly, René Beaumont, Michel Bécot, Jean-Pierre Bel, Joël Billard, Michel Billout, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Jean-Pierre Caffet, Raymond Couderc, Roland Courteau, Jean-Claude Danglot, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Jean Desessard, Mme Evelyne Didier, MM. Philippe Dominati, Michel Doublet, Daniel Dubois, Alain Fouché, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Adrien Giraud, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Odette Herviaux, MM. Michel Houel, Benoît Huré, Charles Josselin, Mme Bariza Khiari, M. Yves Krattinger, Mme Elisabeth Lamure, MM. Gérard Larcher, Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Claude Lise, Daniel Marsin, Jean-Claude Merceron, Dominique Mortemousque, Jacques Muller, Mme Jacqueline Panis, MM. Jackie Pierre, Rémy Pointereau, Ladislas Poniatowski, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Thierry Repentin, Bruno Retailleau, Charles Revet, Henri Revol, Roland Ries, Claude Saunier, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Yannick Texier.
Voir le numéro :
Sénat : 463 (2006-2007)
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Une fois n'est pas coutume et alors que de nombreuses voix s'élèvent pour dénoncer l'excès de législation dans notre pays, aucune loi ou réglementation spécifique n'encadre aujourd'hui la fabrication et l'exploitation des attractions foraines.
Pourtant, avec la place grandissante de l'industrie du loisir dans notre société, les manèges des fêtes foraines et des parcs d'attraction attirent entre 90 et 100 millions de personnes par an. Or, sous le double effet des évolutions technologiques et de la pression des utilisateurs, qui réclament des sensations toujours plus fortes, les manèges vont de plus en plus haut, de plus en plus vite, avec des accélérations parfois considérables.
Ceci expliquant peut-être cela, les accidents de manèges se sont malheureusement multipliés ces dernières années entrainant parfois des blessures graves. Après le dramatique accident survenu le 4 août dernier à la fête des Loges où deux personnes trouvaient la mort, le Président de la République, M. Nicolas Sarkozy 1 ( * ) , s'était solennellement engagé en faveur de l'adoption rapide de dispositions de nature à renforcer la sécurité des manèges et des attractions foraines installés dans notre pays.
Et pour cause, même si le risque zéro est un objectif très difficile à atteindre, la réglementation sur la sécurité des manèges a considérablement vieilli. Jusqu'au 17 août 2007, le seul élément relatif à la sécurité des attractions foraines était un protocole 2 ( * ) signé en 1983 à l'initiative du ministère de l'Intérieur, entre l'ensemble des syndicats de forains et certains bureaux de contrôle. Près de 25 ans après, ce protocole tend à apparaître inadapté aux exigences actuelles de sécurité.
Depuis plusieurs mois, l'Association des Maires de France (AMF) en concertation avec les administrations compétentes et les représentants des forains, travaillait à l'élaboration de textes visant à intégrer une meilleure sécurité des attractions, compte tenu de l'évolution des matériels et des technologies.
A l'issue de ces travaux, il a été décidé d'élaborer une nouvelle convention 3 ( * ) . Votre rapporteur tient, à cet égard, à saluer la très grande qualité des travaux réalisés par l'AMF au sein du groupe de travail « Fêtes foraines 4 ( * ) » qu'il a eu l'honneur de présider.
La nouvelle convention a été signée le 17 août 2007 par les représentants des forains, des organismes de contrôle, l'Association des maires de France et les ministres concernés 5 ( * ) . Elle pose le principe de l'obligation, pour les exploitants d'attractions foraines, de faire effectuer un contrôle technique selon une périodicité qui varie en fonction du type d'attraction. Quatre types d'attractions sont ainsi définis selon l'âge des usagers et le niveau de sensation. La convention engage par ailleurs les professionnels à recourir à des organismes compétents et indépendants pour procéder aux vérifications techniques.
Si votre rapporteur se félicite de ce premier pas, il estime néanmoins qu'une plus grande sécurité des attractions foraines, et par conséquent des personnes qui les utilisent, exige, au delà des engagements des uns et des autres, que le dispositif ait une assise juridique solide et pérenne que seule la loi peut lui conférer.
C'est la raison pour laquelle il a été décidé de présenter la proposition de loi objet du présent rapport.
EXPOSÉ GÉNÉRAL
I. LA NÉCESSAIRE ACTUALISATION DU CADRE NORMATIF RELATIF AUX MANÈGES
A. UN DOMAINE D'ACTIVITÉ SPÉCIFIQUE QUI COMPORTE DES RISQUES
1. Les deux modes principaux d'exploitation des manèges
a) Les fêtes foraines
La fête foraine est une tradition ancienne, gérée par des familles qui possèdent et exploitent un ou plusieurs manèges, le plus souvent transmis de génération en génération. On estime en France à 20.000 le nombre de ces familles (soit un tiers du total européen) dont 60 en région parisienne 6 ( * ) , et à 25.000 le nombre de manèges qu'ils gèrent dans les fêtes foraines.
Installées pour un temps limité sur le domaine public, ces fêtes accueillent de cinq à cent manèges (Foire du Trône, Fête à Neuneu, Fête des Loges, etc.) pour des durées d'une semaine à plusieurs mois. La relégation des fêtes foraines à la périphérie des villes constituerait, selon les forains auditionnés par votre rapporteur, un facteur de désaffection du public. C'est pourquoi la profession plaide pour la reconquête des centres ville 7 ( * ) , citant le succès populaire rencontré par la grande roue installée sur la place de la Concorde à Paris.
Force est de constater que l'exercice du métier de forain devient plus difficile : contraintes de circulation, difficultés de stationnement des convois, coût du transport. Le coût croissant des matériels conduit souvent les exploitants, soit à les faire fonctionner au maximum de leurs capacités pendant toute la saison, soit à conserver des équipements relativement anciens. La sécurité des machines est, à l'heure actuelle, assurée par les forains eux-mêmes lors du montage et du démontage. Le graissage à la main des différentes pièces doit en principe leur permettre d'avoir une vision complète de leur matériel.
C'est une véritable division des tâches qui est à l'oeuvre en matière de contrôle de sécurité. Par la mise en route quotidienne des appareils et les opérations de manutention, les forains en assurent une maintenance courante. Au-delà, les révisons plus approfondies (périodiques ou en cas de panne grave) sont assurées par des bureaux de contrôle.
b) Les parcs de loisirs
Parcs d'attraction, parcs aquatiques ou animaliers, parcs à thème ou parcs à vocation culturelle ou scientifique, les parcs de loisirs s'organisent le plus souvent autour d'une thématique 8 ( * ) . En France, leur développement a été considérable ces vingt dernières années et leur nombre est aujourd'hui estimé à environ 200. Si certains sont de grands opérateurs d'envergure nationale ou internationale, comme Disneyland Paris, 90 % de ces établissements emploient moins de dix salariés 9 ( * ) . Leur fréquentation témoigne de leur succès : 44 % des Français ont visité un parc de loisirs entre novembre 2002 et novembre 2003 et les 83 parcs français les plus importants enregistrent 44 millions de visiteurs par an 10 ( * ) .
Structurellement différents des fêtes foraines, il s'agit d'espaces clos dans lesquels le client ne s'acquitte que d'un seul ticket d'entrée. Sur un périmètre délimité, ils rassemblent des manèges, des spectacles, des aires de jeux, des restaurants, des commerces et parfois des hôtels. Par ailleurs, ce sont des établissements fixes pour lesquels les machines ne sont pas montées et démontées au gré des déplacements. Dès lors que les attractions ne sont pas destinées à être transportées mais à rester sur place, cela autorise à les équiper de matériels plus lourds et souvent mieux sécurisés.
Même si les structures et la gestion des parcs d'attraction se rapprochent plus de celle d'entreprises industrielles que d'entreprises artisanales et familiales, votre rapporteur estime que les exigences de sécurité doivent être identiques quels que soient les lieux de divertissement. Sur ce point, il a pu constater, tant lors de ses auditions que lors de son déplacement sur place à Disneyland Paris, que les gestionnaires avait mis la sécurité au centre de leur développement. Le syndicat national des espaces de loisirs, animaliers et culturels (SNELAC) qui regroupe 155 entreprises de loisir et 95 % de la profession 11 ( * ) , a rappelé à votre rapporteur l'important travail réalisé ces dernières années afin de promouvoir le développement de bonnes pratiques 12 ( * ) en matière de sécurité. Votre rapporteur a notamment pu apprécier cet effort au travers du « livret de sécurité » publié par le SNELAC en direction des exploitants des parcs de loisirs.
Actuellement, ce sont des équipes internes et quelques prestataires extérieurs qui réalisent la maintenance des sites par le biais de contrats d'entretien et de visites périodiques, l'exploitation des attractions faisant l'objet d'une démarche qualité et les personnels bénéficiant de plans de formation.
2. Les défaillances humaines : première cause d'accidents
Si les accidents restent exceptionnels, leur médiatisation n'en demeure pas moins importante. A la différence d'autres domaines concernant les accidents de personnes, il n'existe pas en France de bilan statistique exhaustif des accidents survenus dans les fêtes foraines et les parcs de loisirs. Dans ces conditions, les sources de données sont donc variées et reposent principalement sur les statistiques des professionnels de santé, des gérants de parcs de loisirs et des services de contrôle et d'inspection compétents. Il est donc très difficile de déterminer de façon fiable le nombre et les circonstances des accidents causés chaque année par les matériels d'attraction, de mesurer la dangerosité d'un type de manège, ou encore de procéder à des analyses comparatives entre pays.
Sous ces réserves, en s'appuyant sur les données collectées par la Commission de la sécurité des consommateurs, on relève qu'en France, 458 hospitalisations consécutives à des accidents survenus dans des parcs d'attraction et fêtes foraines ont été recensés entre 1999 et 2003 par l'Institut national de vielle sanitaire (INVS), soit un peu moins d'une centaine par an, ce qui représente 0,2 % des accidents de la vie courante répertoriés sur cette période.
Par ailleurs, la plupart des accidents recensés ne sont pas directement liés aux manèges et relèvent le plus souvent d'un défaut de comportement ou de surveillance des utilisateurs. Selon la Commission de la sécurité des consommateurs, on dénombre en France entre 2005 et 2006 treize accidents graves liés à des défaillances techniques, ayant entrainé deux décès et cinquante blessés. Ces chiffres, qui résultent de données collectées par une autorité administrative indépendante, soulignent, selon votre rapporteur, le faible taux d'accidents par rapport à la fréquentation des parcs de loisirs et des fêtes foraines 13 ( * ) .
Si les causes des accidents sont très variées (chocs sur la structure des attractions, chutes, bousculades dans la file d'accès ou basculement par dessus les barrières de protection, etc.), c'est le comportement des usagers et les défaillances humaines qui sont la première source d'accidents sur les attractions. Ainsi, toujours selon la Commission de la sécurité des consommateurs, parmi les six premières causes d'accidents les plus fréquemment identifiées entre 1985 et 1995, cinq sont comportementales : défaut de surveillance des parents, position dangereuse dans l'attraction, non respect des consignes de sécurité, défaut d'utilisation du système de retenue du passager, erreur de l'opérateur.
Enfin, il est généralement constaté un taux d'accident plus fréquent sur les attractions dont le fonctionnement est commandé par l'usager (auto-tamponneuses, karting, toboggans, « punching machines », etc . ) que sur celles conduites par un opérateur à partir d'une cabine centrale.
S'agissant des défaillances matérielles, une analyse de la Commission de la sécurité des consommateurs, réalisée en 2003 sur 200 accidents graves, montre que la moitié des accidents mettent en cause l'état de la structure (36 %) et le système de retenue des passagers (19 %) alors que 17 % sont attribués à un défaut de maintenance ou à une modification inappropriée de la structure. Enfin, contrairement aux idées reçues, la sécurité apparaît meilleure sur les manèges à forte accélération, plus récents et munis de dispositifs de sécurité et de retenue des passagers, que sur les attractions anciennes.
B. L'ABSENCE D'UNE RÈGLEMENTATION SPÉCIFIQUE RELATIVE A LA SÉCURITE DES MATÉRIELS D'ATTRACTION
1. La fête foraine est par tradition un espace de liberté
Alors que la tendance est au développement d'une protection très avancée dans tous les domaines de la vie sociale, relayant en ce sens la demande de nos concitoyens à davantage de sécurité, voire au risque zéro, aussi surprenant que cela puisse paraître, les manèges et attractions ne sont soumis, en France, à aucun texte spécifique. Cela tient, pour partie, à des raisons historiques qui ont fait de la fête foraine un espace de liberté. En effet, les fêtes foraines ont constitué, dès le XVIII ème siècle 14 ( * ) , une des rares activités échappant aux règles de l'organisation sociale traditionnelle, et en particulier au cloisonnement des catégories sociales.
Parallèlement, les forains ont, quant à eux, toujours chéri une grande indépendance, tant dans l'installation de leurs attractions que dans l'organisation de leur profession. La fête foraine ne s'est progressivement organisée qu'au fur et à mesure de l'encadrement de cet espace par les pouvoirs publics. Ainsi en est-il des contrôles sanitaires ou du maintien de l'ordre.
Aujourd'hui, si la fête foraine s'est effectivement institutionnalisée, comme en témoigne le succès grandissant des parcs d'attraction ou de loisirs, la réglementation relative à la sécurité des machines autour desquelles s'organisent ces attractions n'a pas été adaptée à leur succès.
2. La réglementation française est minimale et dispersée
Comme la Commission de la sécurité des consommateurs l'a souligné à votre rapporteur lors de son audition, la mise sur le marché et l'exploitation des manèges ne sont soumises, en France, à aucune obligation spécifique. La Commission l'avait déjà relevé dans son avis du 7 juin 1995 15 ( * ) qui avait donné lieu à la rédaction, par l'administration, d'un projet de décret sur la sécurité des matériels d'attraction, pris sur la base de l'article L. 221-3 du code de la consommation. Malheureusement, il n'y avait pas été donné suite notamment en raison de l'opposition, à l'époque, d'une partie des exploitants aux mesures techniques proposées. Il est vrai que ces mesures apparaissent particulièrement onéreuses.
Au final, la réglementation concernant la sécurité des manèges n'est prévue que par des textes disparates dont l'application est confiée à plusieurs administrations.
a) Le protocole de 1983
Actuellement, les seules règles relatives aux manèges sont celles du protocole précité de 1983 16 ( * ) . En vertu de cet accord, les attractions doivent subir un contrôle technique tous les trois ans et également à chaque ouverture de fête foraine. Seuls quatre bureaux spécialisés sont aujourd'hui présents sur le marché de la vérification des attractions foraines. Ils n'interviennent qu'à la demande de l'exploitant, la vérification ne s'opérant que sur les éléments de charpente, les mécanismes, les installations électriques hydrauliques et pneumatiques.
Une fois qu'il a été procédé à la vérification, les forains doivent présenter un carnet d'entretien et un certificat de conformité au comité de sécurité de la préfecture ou des communes les accueillant. De l'aval de ces dernières dépend l'exploitation du manège. Ces obligations mises à part, ce sont les propriétaires qui contrôlent eux-mêmes leurs machines.
b) Le code de la consommation
En l'absence d'une réglementation propre, la sécurité des manèges et installations pour fêtes foraines ou parcs d'attraction relève simplement de l'obligation générale de sécurité inscrite dans le code de la consommation à l'article L. 221-1 : « Les produits et les services doivent, dans des conditions normales d'utilisation ou dans d'autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, présenter la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes » .
Dès lors, les professionnels ont l'obligation d'assurer la sécurité de leurs équipements au niveau de la conception et de l'exploitation. La direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) veille au respect de ces obligations et peut, en cas d'accident ou de danger grave et immédiat, suspendre l'activité d'un manège (article L. 221-6 du code de la consommation). Des mises en garde peuvent également être adressées aux exploitants pour leur demander la mise en conformité (article L. 221-7).
Toutefois, faute de compétence technique, les services de la DGCCRF n'exercent qu'une très faible surveillance préventive des manèges. Par ailleurs, leurs interventions à la suite d'accidents ne sont pas systématiques. Quant aux autorisations de reprise d'exploitation, elles se fondent sur des certificats de conformité délivrés par des bureaux de contrôle dans le cadre du protocole de 1983.
c) La police des fêtes foraines
Les maires, au titre de leurs pouvoirs de police généraux peuvent, s'ils l'estiment utile, édicter des obligations relatives à la sécurité des lieux d'installation des fêtes foraines sur le territoire de leur commune, en vertu de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales. Celui-ci dispose que « la police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : (...) le maintien du bon ordre dans les endroits où il se fait de grands rassemblements d'hommes, tels que les foires, marchés, réjouissances et cérémonies publiques, spectacles, jeux, cafés, églises et autres lieux publics ».
Au niveau local, l'arrêté préfectoral 17 ( * ) pris conjointement par le Préfet de police et le maire de Paris en 1984 est réputé être le seul règlement à fixer des règles de sécurité très précises pour l'organisation des fêtes foraines sur le domaine public parisien. Il est notamment prévu que les services techniques de sécurité de la préfecture de police visitent les installations foraines et peuvent, en cas de manquement, exiger une mise en conformité dans un délai déterminé sous peine d'interdiction d'exploitation sur le champ de fête. Des maires se sont inspirés de cet arrêté pour mettre en place une réglementation similaire, parfois en le modifiant afin de prendre en compte les particularités locales. Il en résulte pour les exploitants forains, un cadre réglementaire parfois très différent d'une commune à l'autre, ce qui rend plus difficile l'exercice de leur activité.
Dès lors, même s'il n'existe pas de vide juridique, une réglementation propre aux fêtes foraines en matière de sécurité apparaît aujourd'hui nécessaire. L'uniformisation du cadre normatif représente une demande forte de la part des forains. Elle se justifie d'autant plus qu'en l'état actuel du droit, les maires se trouvent exposés à des risques de responsabilité, en raison de leurs pouvoirs de police sur le domaine public. Votre rapporteur tient, sur ce point, à attirer tout particulièrement l'attention du Sénat, représentant des collectivités territoriales, sur cet aspect de la situation.
3. La réglementation européenne est encore embryonnaire
Malgré plusieurs propositions de la Commission européenne, il n'existe toujours pas de réglementation communautaire relative à la sécurité de la conception et de l'exploitation des manèges. Aujourd'hui 18 ( * ) , une douzaine de pays ont mis en place des dispositifs d'encadrement spécifiques. L'Espagne et le Royaume-Uni ont mis au point des guides de bonnes pratiques en accord avec les professionnels. De son coté, le Luxembourg n'a ni norme ni réglementation.
Toutefois, au niveau européen, le Comité Européen de Normalisation (CEN) a publié la norme EN 13814 « machines et structures pour fêtes foraines et parc d'attraction - sécurité » définitivement adoptée en juin 2004. Elle contient des exigences en matière de conception, fabrication, installation, maintenance, exploitation, examen, et essais des matériels d'attraction. Si l'Italie et la Belgique ont intégré les spécifications de cette norme dans leur réglementation nationale très tôt, la France ne l'a fait qu'en 2007.
D'après les éléments fournis par le ministère de l'Intérieur à votre rapporteur, les projets de textes réglementaires relatifs à la proposition de loi prévoient une référence explicite à cette norme.
4. Les maires sont en première ligne mais n'ont pas les moyens de contrôler la sécurité des attractions
Comme cela été rappelé à votre rapporteur lors de ses auditions 19 ( * ) , les maires ne sont actuellement pas en mesure de vérifier que les manèges sont en bon état de fonctionnement. Les services communaux n'ont, tout simplement, pas les moyens et les compétences techniques pour le faire. Le maire de Saint Germain en Laye reconnaît ainsi que « même si, dans leur grande majorité, les forains sont sérieux, la situation actuelle est défaillante 20 ( * ) , et les contrôles sont peu rigoureux » .
Certaines communes importantes peuvent faire appel à des organismes de contrôle pour vérifier, notamment, la stabilité des terrains et des installations. Pour d'autres communes, le coût onéreux de cette expertise représente un obstacle. Par ailleurs, les maires ne peuvent s'en remettre totalement à ces organismes qui ne font, à l'heure actuelle, l'objet d'aucun agrément de la part de l'Etat. Votre rapporteur s'est vu confirmé, par l'ensemble des élus municipaux auditionnés, qu'il n'existe aucune vérification de la technicité et de la compétence des organismes de contrôle.
Lorsqu'il est confronté à une demande d'installation de manège dans sa commune, le maire exige habituellement de l'exploitant la production de pièces justificatives : le certificat triennal du contrôle du manège par un organisme de contrôle, en vérifiant que les réserves émises par celui-ci ont bien été levées, l'inscription du forain au registre du commerce ainsi qu'une attestation d'assurance. Une attestation de bon montage du manège est également délivrée au maire après l'installation du matériel. Plusieurs communes ont mentionné spécifiquement la production de ces documents dans leur règlement municipal 21 ( * ) de la fête foraine.
Toutefois, les maires, notamment des petites communes, considèrent à juste titre qu'il n'est pas aisé de s'assurer que les réserves émises par les bureaux de contrôle sont bien levées, faute de disposer des services techniques compétents. Et ce, malgré la circulaire du ministère de l'Intérieur du 28 juillet 1982 qui rappelle que les maires peuvent solliciter soit leurs services techniques, soit la direction des services départementaux d'incendie et de secours pour contrôler les matériels d'attraction des exploitants désireux de s'installer sur leur commune 22 ( * ) .
Au final, le système actuel de contrôle repose donc pour l'essentiel sur les forains eux-mêmes, les maires ne pouvant au mieux qu'assurer un contrôle documentaire.
C. UN PREMIER PAS : LA CONVENTION DU 17 AOÛT 2007
1. Répondre à la sophistication croissante des manèges et aux carences des contrôles
a) Des manèges toujours plus rapides
Apparus au XVIIe siècle, les manèges n'ont cessé de se perfectionner jusqu'à atteindre des dimensions et des capacités d'accueil inédites 23 ( * ) . Aujourd'hui c'est l'escalade, ils vont de plus en plus haut, de plus en plus vite, avec des accélérations jusqu'alors réservées aux pilotes de chasse 24 ( * ) . Le perfectionnement des équipements a été rendu possible notamment par l'intégration de diverses technologies de pointe comme l'hydraulique, la pneumatique et l'électronique.
Comme l'a exprimé la Commission de la sécurité des consommateurs, lors de son audition par votre rapporteur, même si le décalage technologique 25 ( * ) sur les équipements de pointe est estimé en Europe à une vingtaine d'années par rapport aux Etats-Unis ou au Japon, on assiste partout au même phénomène de course aux records dans la conception et l'exploitation des manèges à sensations. Ces derniers sont devenus au fil du temps les nouvelles vedettes de la foire, communément appelés les « scream machines » ou les machines à crier.
Pourtant, si depuis une dizaine d'années les manèges ont énormément changé, devenant toujours plus spectaculaires, les procédures de contrôle, elles, n'ont pas évolué. Votre rapporteur estime que, dans ce domaine, le droit a été dépassé par la technique. La sophistication croissante des métiers forains, le recours aux technologies les plus perfectionnées contraste en effet avec l'absence de prescriptions techniques et réglementaires.
b) Un contrôle de la sécurité des manèges aujourd'hui insuffisant
Cela a déjà été souligné : le principal contrôle est réalisé, à l'heure actuelle, par les exploitants de manèges eux-mêmes puisqu'ils démontent leurs attractions régulièrement. Toutes les pièces passant dans leurs mains, notamment lors du graissage, ils sont à même d'apprécier, en principe, la défectuosité de l'appareil et le danger potentiel que celui-ci représente pour la sécurité des personnes.
Pourtant, aujourd'hui, ces procédures de contrôle sont inadaptées, ce qui a été rappelé à votre rapporteur, lors de ses auditions, par les représentants de forains eux-mêmes. Le cahier des charges prévu par le protocole de 1983 est si obsolète que certains bureaux de contrôle technique, sollicités par les forains et les parcs de loisirs, refusent d'intervenir et de délivrer des certificats de conformité, soulignant eux-mêmes que les critères de sécurité choisis à l'époque sont totalement dépassés. De leur coté, des forains ont refusé les contrôles de ces bureaux en raison, selon eux, du coût exorbitant pratiqué par ces derniers. Cette situation explique pourquoi des forains proposent des prestations de contrôle des manèges, ce qui, naturellement, soulève la question de leur indépendance.
Par ailleurs, en raison de la disparition des constructeurs nationaux 26 ( * ) , la maintenance est devenue problématique pour les exploitants forains. Ceux-ci, traditionnellement formés pour effectuer les opérations de maintenance préventive et les réparations de leurs machines en cas de panne ou de casse, sont de plus en plus dépendants des constructeurs, car les pièces se changent et ne se réparent plus. A cela s'ajoute l'importance du marché de l'occasion qui représente plus de 70 % du total des machines en service aujourd'hui. Ces attractions, vendues de forain à forain ou parfois par l'intermédiaire des constructeurs, ne font l'objet, à l'heure actuelle, d'aucune obligation de mise en conformité avec les normes en vigueur.
C'est dans ce contexte que l'Association des Maires de France (AMF) avait interpellé le gouvernement dès 2004 afin de disposer d'un cadre législatif de référence.
2. Une avancée majeure : la Convention du 17 août 2007 relative à la sécurité des manèges
Depuis les années 1980, l'AMF a engagé une concertation avec les organisations professionnelles des forains à travers la constitution d'un groupe de travail permanent « fêtes foraines » présidé par votre rapporteur. La sécurité des matériels forains avait ainsi fait l'objet, dès la fin des années 1990, d'un projet de décret ministériel qui, faute de consensus avec les représentants forains, n'avait pu aboutir. A l'initiative du groupe de travail de l'AMF, les élus et les syndicats de forains avaient renoué le dialogue lors de réunions 27 ( * ) au cours desquelles trois pistes d'action ont pu être dégagées : la modernisation du protocole de 1983, l'instauration de dispositifs de contrôle techniques assis sur des bureaux agréés par l'Etat et la rédaction d'un guide méthodologique de l'organisation de fête foraine à l'attention des maires.
Cet important travail de concertation, mené par l'AMF, a abouti à l'élaboration de projets de texte. Un large consensus s'est ainsi établi sur la nécessité d'adopter une loi pour porter les textes réglementaires, seule garantie pour assurer un contrôle sûr et pérenne.
Après le dramatique accident de cet été, survenu à la fête des Loges 28 ( * ) à Saint Germain en Laye, le ministre de l'Intérieur, Mme Michèle Alliot-Marie a réuni, le 8 août dernier, les professionnels, les organismes de contrôle et les maires pour mettre en place une première série de mesures définies dans une charte. C'est sur cette base, qui a fait l'objet d'une large acceptation par la profession des forains, que la proposition de loi s'appuie. Le choix d'une convention négociée répond ainsi à la nécessité d'agir rapidement afin de rassurer l'opinion publique et montrer l'engagement, tant des élus, que de la profession, en faveur de la sécurité des attractions.
Sept articles forment les dispositions de cette charte. Les mesures retenues visent à multiplier les contrôles portant sur les manèges à sensation. La périodicité de l'obligation de contrôle technique varie selon le type d'attraction. Quatre types sont définis selon le niveau de sensation, les plus rapides appartenant la quatrième catégorie. Par ailleurs, pour les catégories trois et quatre, la charte prévoit un contrôle annuel des manèges, ce qui représente une avancée considérable par rapport au contrôle triennal actuellement exigé.
Une fois que le cadre juridique sera mis en place, par la loi et les textes réglementaires d'application, celui-ci se substituera à la convention du 17 août 2007 dont la valeur juridique 29 ( * ) reste aujourd'hui incertaine à l'égard de l'ensemble de la profession des forains.
II. EXAMEN DES ARTICLES DE LA PROPOSITION DE LOI SOUMISE A VOTRE COMMISSION
La proposition de loi relative à la sécurité des manèges, machines et installations pour fêtes foraines ou parcs d'attraction comprend trois articles.
Elle vise à créer un dispositif juridique spécifique pour encadrer la fabrication et l'exploitation des attractions foraines en proposant de donner une valeur légale et réglementaire aux stipulations de la convention du 17 août 2007 sur la sécurité des manèges, signée par les représentants des forains, des organismes de contrôle, l'AMF et les ministres intéressés (Intérieur, Consommation, Entreprises).
A. ARTICLE PREMIER
1. Le dispositif proposé
L'article 1 er définit en premier lieu le champ d'application de la loi en précisant qu'elle concerne les manèges, machines et installations pour fêtes foraines ou pour parcs d'attraction. Puis, il crée une obligation générale de sécurité pour l'ensemble de ces installations.
Il reprend, dans sa formulation, les dispositions de l'article L.221-1 du code de la consommation mais sans référence explicite à celui-ci. L'article 1 er rend donc applicable, spécifiquement aux matériels d'attraction, les dispositions à caractère général inscrites dans le code de la consommation.
Il dispose ainsi que, dans des conditions normales d'utilisation ou dans d'autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, les manèges et attractions des fêtes foraines et des parcs de loisirs, doivent, être conçus, construits, installés, exploités et entretenus de façon à assurer la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes.
2. La position de votre commission
Actuellement, cela a déjà été souligné, la responsabilité des exploitants de manèges en cas d'accident ressort de l'application de l'article L. 221-1 du code de la consommation qui impose une obligation générale de sécurité des produits destinés à l'usage des consommateurs. En l'absence de risque avéré, les professionnels doivent être en mesure de prouver à l'administration, par tous moyens (certificats de conformité, attestations de sécurité, carnets d'entretien, etc.) qu'ils respectent ces dispositions. Dès lors, en cas de danger grave et immédiat, l'activité d'un manège peut être suspendue par arrêté, pris sur le fondement des articles L. 221-5 et L. 221-6 du code de la consommation.
Par ailleurs, la police des fêtes foraines, relevant de la compétence des maires (ou à défaut des préfets), les autorise à prendre toute mesure qu'ils jugent utile pour assurer la sécurité des usagers des manèges.
Enfin, les fabricants et les exploitants de manèges doivent s'assurer de la sécurité des attractions qu'ils proposent au public. Il en va de leur responsabilité générale. Leur responsabilité pénale est aussi susceptible d'être mise en cause en vertu de l'article 223-1 du code pénal 30 ( * ) au titre de la mise en danger de la vie d'autrui.
Votre commission se félicite donc qu'un dispositif législatif spécifique soit proposé pour encadrer les attractions foraines et les parcs de loisirs. Cela est de nature à répondre aux attentes des élus, des consommateurs et du monde forain.
S'agissant du champ d'application de la loi, votre commission partage le choix de son auteur de ne pas différencier les obligations pesant sur les exploitants en fonction de la nature de ceux-ci. Forains et parc de loisirs doivent donc être contraints par la même obligation générale de sécurité.
Toutefois, votre commission relève que le champ d'application de la loi gagnerait à être élargi, afin d'englober l'ensemble des modalités d'exploitation des manèges. D'aucuns soulignent, à juste titre, selon elle, que des attractions sont, aujourd'hui en France, exploitées hors des fêtes foraines et des parcs de loisirs. Ainsi en est-il des manèges installés sur les parkings des centres commerciaux, ou au coeur des villes à l'image de la grande roue de la place de la Concorde à Paris. Votre commission considère que ces manèges doivent naturellement être soumis aux mêmes règles de contrôle et de sécurité.
C'est pourquoi, elle vous propose, à l'initiative de son rapporteur, de compléter le texte de cet article afin que son dispositif vise tous les lieux possibles d'installation ou d'exploitation des manèges. |
B. ARTICLE 2
1. Le dispositif proposé
L'article 2 crée une obligation de contrôle technique des manèges, machines et installations pour fêtes foraines ou pour parcs d'attraction.
Il impose un contrôle technique initial et des contrôles périodiques. Il précise que ce contrôle porte sur l'état de fonctionnement des manèges, machines et installations, ainsi que sur leur aptitude à assurer la sécurité des personnes. Enfin, il dispose que ces contrôles techniques sont effectués par des organismes agréés par l'Etat et qu'ils sont à la charge des exploitants.
2. La position de votre commission
Votre commission se félicite de l'instauration de ces obligations de contrôles techniques réguliers.
Les manèges et les installations pour fêtes foraines ou parc d'attractions feront donc l'objet de vérifications similaires à celles pratiquées sur les véhicules automobiles ou les remontées mécaniques. Dans tous les cas, il apparaît légitime à votre rapporteur que le transport des passagers soit assuré sans mettre en péril la sécurité des personnes.
Par ailleurs, et c'est un des points importants de la proposition, les contrôles techniques seront désormais réalisés par des organismes agréés par l'Etat. Jusqu'à présent, les exploitants devaient fournir des certificats de conception et de montage, ils avaient le libre choix de l'expert qu'ils jugeaient compétent. Le dispositif examiné fournit aux maires les moyens légaux d'interdire le fonctionnement d'une attraction si l'exploitant n'est pas en mesure de fournir la preuve d'un contrôle technique valide et réalisé par un organisme dûment agréé par l'Etat.
D'après les éléments dont dispose votre commission, les organismes visés par la loi devront être, en vertu du projet de décret d'application, compétents, mais aussi indépendants juridiquement et financièrement de tout constructeur, réparateur, importateur, vendeur, loueur, propriétaire ou exploitant de matériel d'attraction. Votre commission approuve cette mesure qui vise à assurer la totale indépendance des bureaux de vérification à l'égard de ceux qui sont vérifiés.
Par ailleurs, votre commission juge qu'il est logique que le coût d'une telle vérification incombe aux exploitants. Il a à cet égard été souligné, tant par les forains que par les bureaux de contrôle auditionnés par votre rapporteur, que le coût du contrôle technique n'était pas excessif au regard du rendement commercial d'un manège 31 ( * ) .
Enfin, parallèlement aux modifications qu'elle a introduites à l'article premier, votre commission complète l'article 2 afin d'en étendre l'application à l'ensemble des manèges sur le territoire national, que ceux-ci soient dans des fêtes foraines, des parcs d'attraction ou tout autre lieu d'installation ou d'exploitation. |
C. ARTICLE 3
1. Le dispositif proposé
L'article 3 prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat intervienne pour préciser le dispositif légal :
• Ce décret fixera d'abord les exigences de
sécurité auxquelles doivent satisfaire les manèges,
machines et installations pour fêtes foraines ou pour parcs d'attraction.
• Il définira ensuite le contenu et les
modalités du contrôle technique prévu sur les
manèges.
• Il déterminera enfin les modalités
d'agrément des organismes de contrôle technique.
2. La position de votre commission
D'après les éléments dont dispose votre rapporteur, le projet de décret prévoit d'instaurer quatre catégories de manèges pour lesquelles la périodicité des contrôles varierait en fonction de leur dangerosité.
La classification prévue distingue ainsi les manèges et attractions pour enfants de moins de 14 ans (catégorie 1), les manèges à sensations limitées dont la vitesse est inférieure à douze rotations par minute (catégorie 2), les manèges à sensation forte dont la vitesse est supérieure à douze rotations par minute (catégorie 3) et les autres manèges à sensation forte (catégorie 4).
Votre commission approuve le choix de différencier la périodicité des contrôles techniques selon ces types de manèges, en prévoyant un contrôle plus soutenus pour les manèges dits à sensations fortes. Le premier contrôle technique aura lieu, pour toutes les catégories, au moment de la première mise en service du manège. Ensuite, les contrôles techniques périodiques seront réalisés dans des délais variant de six à mois à trois ans selon le type d'attraction. L'examen, tel qu'il est envisagé dans le projet de décret, portera sur l'état général du manège afin de déceler les anomalies susceptibles de créer une situation dangereuse pour les personnes.
Votre commission s'interroge en revanche sur la nécessité de prévoir, ou non, un contrôle différencié selon le caractère fixe ou mobile du manège. En effet, dans la mesure où le montage et le démontage répétitifs peuvent constituer une source de fragilisation du manège, il serait alors nécessaire de soumettre les attractions foraines à un contrôle différent des attractions installées dans les parcs de loisirs.
Sur ce point, votre rapporteur a considéré que la loi, qui a vocation à définir un cadre général applicable tant aux fêtes foraines qu'aux parcs d'attractions, ne devaient pas distinguer les contrôles selon le type d'exploitation des manèges. D'ailleurs, lors de ses auditions, votre rapporteur s'est vu confirmé par les forains l'argument inverse selon lequel le montage et le démontage permettaient de mieux repérer les défectuosités diminuant ainsi les risques d'accident.
S'agissant, de l'agrément des organismes de contrôle, votre commission souligne la pertinence de confier au ministre de l'Intérieur la responsabilité de sa délivrance après l'avis d'une commission de vérification 32 ( * ) , et se félicite de l'instauration d'une telle instance.
Votre commission souhaite enfin attirer l'attention des autorités administratives qui prendront les mesures réglementaires qui s'imposent, afin que celles-ci veillent à prendre en compte la réalité du monde forain, éclaté entre des entreprises économiquement fortes et des artisans modestes aux moyens financiers réduits.
Sur proposition de son rapporteur, votre commission a donc retenu la rédaction initiale de cet article. |
III. LES CONCLUSIONS DE VOTRE COMMISSION
En fonction des observations qui précèdent, votre commission a retenu un dispositif en trois articles ainsi rédigés:
Article 1er
Les manèges, machines et installations pour fêtes foraines ou parcs d'attraction ou tout autre lieu d'installation ou d'exploitation, doivent, dans des conditions normales d'utilisation ou dans d'autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, être conçus, construits, installés, exploités et entretenus de façon à assurer la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes.
Article 2
Les manèges, machines et installations pour fêtes foraines ou parcs d'attraction ou tout autre lieu d'installation ou d'exploitation sont soumis à un contrôle technique initial et périodique portant sur leur état de fonctionnement et sur leur aptitude à assurer la sécurité des personnes. Ce contrôle technique, effectué par des organismes agréés par l'Etat, est à la charge des exploitants.
Article 3
Un décret en Conseil d'Etat définit les exigences de sécurité auxquelles doivent satisfaire les manèges, machines et installations visés à l'article 1 er , le contenu et les modalités du contrôle technique ainsi que les conditions et les modalités d'agrément des organismes de contrôle technique.
*
* *
Lors de sa réunion du mercredi 24 octobre 2007 , la commission des affaires économiques a adopté à l'unanimité, sur proposition de son rapporteur, les conclusions dont le texte suit. |
TEXTE ÉLABORÉ PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
PROPOSITION DE LOI RELATIVE À LA SÉCURITÉ DES MANÈGES, MACHINES ET INSTALLATIONS POUR FÊTES FORAINES OU PARCS D'ATTRACTION
Article 1 er
Les manèges, machines et installations pour fêtes foraines ou parcs d'attraction ou tout autre lieu d'installation ou d'exploitation, doivent, dans des conditions normales d'utilisation ou dans d'autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, être conçus, construits, installés, exploités et entretenus de façon à assurer la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes.
Article 2
Les manèges, machines et installations pour fêtes foraines ou parcs d'attraction ou tout autre lieu d'installation ou d'exploitation sont soumis à un contrôle technique initial et périodique portant sur leur état de fonctionnement et sur leur aptitude à assurer la sécurité des personnes. Ce contrôle technique, effectué par des organismes agréés par l'Etat, est à la charge des exploitants.
Article 3
Un décret en Conseil d'Etat définit les exigences de sécurité auxquelles doivent satisfaire les manèges, machines et installations visés à l'article 1er, le contenu et les modalités du contrôle technique ainsi que les conditions et les modalités d'agrément des organismes de contrôle technique.
ANNEXE - PERSONNES AUDITIONNÉES
I. PERSONNES AUDITIONNÉES AU SÉNAT
- Mme Marie-Claude Serres-Combourieu , Responsable du département action sociale, sportive, éducative et culturelle à l'Association des maires de France (AMF) ;
- M. Sébastien Ferriby , Chargé d'études éducation et culture à l'AMF ;
- M. Patrick Baudot , Maire-Adjoint à la mairie de Nancy ;
- Mme Josette Cheval , Maire-Adjoint à la Mairie de Rouen ;
- Mme Sophie Huberson , Secrétaire général du Syndicat national des espaces de loisirs, d'attractions et culturels (SNELAC) ;
- M. Henri Duclos , Maire-Adjoint à la Mairie de Nantes ;
- M. Arnauld Maille , Chef du bureau E2 à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ;
- M. Patrick Genain , Administrateur à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ;
- M. Patrick Baudot , Maire-Adjoint à la Mairie de Nancy ;
- M. Emmanuel Lamy , Maire à la Mairie de Saint-Germain en laye ;
- M. Denis Beaujard , Directeur technique du bureau de contrôle Preventis ;
- M. Bernard Deleplancque , Sous-Directeur de la Direction de la gestion des risques au Ministère de l'intérieur ;
- M. Jean-Pierre Petiteau , Chef de Bureau « réglementation incendie et risque de la vie courante » au Ministère de l'intérieur ;
- M. Bernard Nouvier , Adjoint au chef du bureau de la réglementation incendie et des risques de la vie courante à la direction de la défense et de la sécurité civiles au Ministère de l'intérieur ;
- M. Luc Machard , Président de la Commission de la sécurité des consommateurs (CSC) ;
- Mme Muriel Grisot , Conseillère technique de la Commission de la sécurité des consommateurs (CSC) ;
- M. René Ayoun , Président de l'association de défense du droit forain ;
II. VISITES SUR SITE
« Fête à Neu-Neu »
M. Marcel Campion , président de l'Institution nationale du monde festif
« Disneyland Resort Paris »
- M. George A. Kalogridis , Directeur général adjoint du groupe Eurodisney et Dominique Cocquet , Directeur général adjoint du développement et des relations extérieures ;
- M. Thierry Leleu , Directeur des relations extérieures
* 1 Lettre au ministre de l'Intérieur, le 6 août 2007.
* 2 Ce protocole avait fait l'objet d'une diffusion par voie de circulaire du ministre de l'Intérieur le 11 janvier 1984.
* 3 « Convention relative à la sécurité des manèges, machines et installations pour fêtes foraines ou parcs d'attraction » du 17 août 2007.
* 4 Ce groupe de travail permanent a été constitué en 1988 par les grandes villes organisatrices de fêtes foraines (Grenoble, Nantes, Tours, Strasbourg, Nancy, Saint Germain en Laye).
* 5 Le ministre de l'Intérieur, de l'Outre-mer et des Collectivités Territoriales, le Secrétaire d'Etat chargé de la Consommation et du Tourisme, le secrétaire d'Etat chargé des Entreprises et du Commerce Extérieur.
* 6 Source : Commission de la sécurité des consommateurs.
* 7 Audition de M. René Hayoun, président de l'association de défense du droit forain. Il préconise notamment d'intégrer les fêtes foraines au patrimoine culturel des villes afin de les sauvegarder.
* 8 Disneyland Paris, le Parc Astérix, Vulcania, le Futuroscope, Walibi, Nigloland, etc.
* 9 Source : Commission de la sécurité des consommateurs.
* 10 Selon une étude réalisée en juin 2004 par l'Agence Française d'Ingénierie Touristique (AFIT).
* 11 Les parcs membres du syndicat représentent : 22 millions de visiteurs, 2 milliards de chiffre d'affaires, et 40.000 salariés.
* 12 Élaboration d'une normalisation signalétique, actions de formation des personnels, etc.
* 13 Selon la Commission de la sécurité des consommateurs, ces trois dernières années la moitié des accidents impliquant des matériels d'attraction se sont produits dans des parcs de loisirs, dont certains appartenant à d'anciens forains sédentarisés qui y exploitaient des matériels d'occasion.
* 14 La fête des Loges qui a lieu, chaque année, en forêt de Saint-Germain-en-Laye dans les Yvelines remonte au XVIIIe siècle.
* 15 Avis du 7 juin 1995 relatif aux matériels d'attractions installés dans les parcs de loisirs permanents ou fonctionnant lors de fêtes foraines.
* 16 Il a été intégré dans une circulaire du ministre de l'Intérieur en date du 11 janvier 1984.
* 17 Arrêté préfectoral n° 84-10054 du 18 janvier 1984.
* 18 « Tableau de la situation réglementaire et normative relative à la sécurité des fêtes foraines et parcs d'attractions dans quinze pays de l'Union européenne », Rapport Risks & Policy Analysts, mars 2005, cité par la Commission de la sécurité des consommateurs.
* 19 Audition de M. Emmanuel Lamy, maire de Saint Germain en Laye, le 16 octobre 2007.
* 20 Les services communaux ont constaté que des forains utilisaient parfois des cales en bois.
* 21 Le règlement municipal précise notamment les conditions d'accueil des forains.
* 22 La possibilité de recourir aux commissions locales de sécurité leur a cependant été retirée par le décret n°95-260 du 8 mars 1995, sauf si les matériels sont exploités dans un lieu clos et couvert et soumis de ce fait à la réglementation relative aux établissements recevant du public.
* 23 Dans un souci de rentabilité, les constructeurs augmentent sans cesse le nombre de passagers pouvant être accueillis par « tour » et abaissent parfois la taille minimale requise pour y accéder.
* 24 Il existe aujourd'hui des attractions qui atteignent des vitesses de plus de 170 km/h et des chutes de plus de 100 mètres.
* 25 La France et l'Europe disposent d'un parc de manèges traditionnels important dont certains ont plus de cinquante ans.
* 26 Aujourd'hui il n'existe quasiment plus de constructeurs français d'attractions foraines. Les constructeurs allemands, italiens, espagnols et néerlandais sont leaders au niveau européen (83 % des parts de marché au niveau européen).
* 27 De septembre 2005 à août 2007, en présence du ministère de l'Intérieur, du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, des élus, des forains et des organismes de contrôle.
* 28 Le 4 août 2007, un accident de manège type « Booster », fabriqué par le groupe italien Fabbri, tuait deux personnes et en blessait deux autres. Cet accident est le plus grave survenu dans une fête foraine depuis plusieurs années en raison de problèmes techniques. L'enquête a mis en évidence un « défaut de fabrication et de conception ». Son activité a été suspendue en France, pour une durée de deux mois, par un arrêté du 10 août 2007 du ministère de l'Intérieur.
* 29 S'agissant de la portée juridique de ce texte, il convient de rappeler que ce dernier ne peut engager que ces signataires, c'est à dire les principaux syndicats de forains et leurs adhérents.
* 30 Article 223-1 du code pénal : « Le fait d'exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement est puni d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende ».
* 31 Audition des professionnels forains selon lesquels le coût d'un contrôle technique varie entre 500 et 1500 euros selon le type de manège pour un chiffre d'affaire de l'ordre de 50.000 euros .
* 32 D'après les éléments dont dispose votre commission, le projet d'arrêté prévoit que cette commission comprenne un représentant du ministre de l'Intérieur, un représentant du ministre chargé de la consommation, un représentant du ministre chargé de l'industrie, deux maires désignés par l'AMF, deux représentants des propriétaires ou exploitants de manèges désignés par le ministre de l'Intérieur, deux représentants d'organismes de contrôle désignés par le ministre de l'Intérieur, deux personnes qualifiées en raison de leur compétence technique.