Art. 436 à 438 du code civil : Administration des biens du majeur placé sous sauvegarde de justice et protection de sa personne

Ces articles reprennent les règles qui régissent actuellement l'administration des biens du majeur sous sauvegarde de justice : celui-ci conserve la capacité de gérer son patrimoine, même si son état justifie de prévoir un minimum d'organisation. Trois hypothèses sont prévues.

L'exécution d'un mandat constitué par le majeur

Dans l'hypothèse où le majeur a conféré à un tiers le pouvoir de le représenter, son placement sous sauvegarde ne fait pas obstacle à l'exécution de ce mandat . Le juge a cependant la possibilité de le révoquer. Le principe de l'irrévocabilité d'un mandat ne s'impose donc pas au juge qui peut délier une personne placée sous sauvegarde de justice.

Sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, l'Assemblée nationale a prévu que le juge devait statuer après avoir entendu ou appelé le mandataire.

À la différence du droit actuel, la rédaction proposée ne vise que l'hypothèse d'un mandat déjà constitué, et semble donc exclure la possibilité pour le majeur de désigner un mandataire après avoir été placé sous sauvegarde.

Sont également supprimées les dispositions du dernier alinéa de l'actuel article 491-3 qui permettent au juge d'exiger du mandataire que les comptes de sa gestion soient soumis à son contrôle ou à celui du greffier en chef du tribunal d'instance. Ces dispositions étaient en effet paradoxales : elles permettaient au juge d'ordonner au mandataire conventionnel de remettre ses comptes au greffier en chef, sans obliger le mandataire à établir des comptes. En tout état de cause, compte tenu de la durée de la sauvegarde de justice, soumettre le mandataire à l'obligation d'établir des comptes chaque année n'aurait guère de sens.

L'application des règles de la gestion d'affaires

À défaut de disposition conventionnelle prise par le majeur, les règles de la gestion d'affaires s'appliquent . Ceux qui ont qualité pour demander l'ouverture d'une tutelle ou d'une curatelle et, le cas échéant, la personne ou l'établissement hébergeant le majeur continuent d'être tenus de faire les actes conservatoires nécessaires à la gestion du patrimoine du majeur, dès qu'ils ont connaissance de l'urgence de ces actes et de l'ouverture de la sauvegarde.

Le mandat spécial autorisé par le juge

Si l'exécution du mandat constitué par le majeur ou les règles de la gestion d'affaires ne suffisent pas, le juge, saisi par toute personne intéressée, conserve la possibilité de désigner un mandataire spécial chargé d'accomplir un ou plusieurs actes déterminés .

La désignation d'un mandataire spécial entraîne implicitement la révocation des mandats conventionnels conclus sur le même domaine .

Novation importante du projet de loi, le mandataire spécial pourra désormais être autorisé à effectuer des actes de disposition déterminés : par exemple, la résiliation d'un bail d'habitation, pour une personne qui a intégré une maison de retraite, la vente d'un bien immobilier, dont le prix est indispensable à son entretien, ou encore l'acceptation d'une succession.

Le mandataire spécial pourra également se voir confier par le juge une mission de protection de la personne du majeur sous sauvegarde, dans les mêmes conditions que celles prévues aux articles 458 à 463 pour la curatelle ou la tutelle. Il peut en effet être utile d'étendre la protection à la personne du majeur placé sous sauvegarde, sans pour autant ouvrir une curatelle ou une tutelle, par exemple lorsque la nécessité d'accueillir le majeur dans un établissement suppose des décisions relatives à sa personne (déménagement, relations avec les proches, mise en place d'un suivi médical).

Cette extension des pouvoirs du mandataire spécial vise à éviter de placer systématiquement sous tutelle ou sous curatelle les majeurs incapables de prendre une décision (comme celle de subir une intervention chirurgicale) ou d'accomplir un acte (comme le partage d'une succession ou la vente d'un bien). En effet, certains majeurs bien pris en charge par leur famille n'ont pas besoin d'une protection durable, et la sauvegarde de justice avec désignation d'un mandataire spécial leur offre l'assistance et la représentation nécessaires pour prendre une décision relative à leur personne ou accomplir un acte touchant à leur patrimoine.

Le mandataire spécial pourra exercer les actions en nullité, rescision pour lésion ou réduction pour excès des actes passés et des engagements contractés par la personne protégée.

Par ailleurs, alors que, dans le silence de la loi, la jurisprudence impose au juge de choisir le mandataire spécial en fonction de l'unique intérêt de la personne à protéger, le projet de loi aligne les conditions de désignation du mandataire spécial sur celles prévues pour la désignation du tuteur ou du curateur par les articles 448 à 451. Seront donc applicables au choix du mandataire spécial la primauté du mandataire de protection future si le majeur en a désigné un, l'obligation de désigner un proche du majeur de préférence à un mandataire judiciaire et la possibilité de désigner un préposé ou un service de l'établissement de santé , social ou médico-social hébergeant le majeur.

Sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, l'Assemblée nationale a en outre soumis les personnes chargées d'exercer un mandat spécial dans le cadre d'une sauvegarde de justice aux règles d'incapacité, de retrait et d'empêchement applicables au tuteur et au curateur et définies à l'article 445.

Enfin, le mandataire spécial sera désormais soumis aux mêmes obligations comptables qu'un tuteur . Il devra établir chaque année un compte de gestion et le faire contrôler dans les conditions prévues aux articles 510 à 513, et, en fin de mandat, il devra remettre ses comptes selon les modalités prévues à l'article 514.

Sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, l'Assemblée nationale a soumis les actions contre le mandataire spécial désigné dans le cadre d'une sauvegarde de justice aux règles de prescription applicables en cas de tutelle et énoncées à l'article 515 : l'action en reddition de comptes, en revendication ou en paiement diligentée par la personne protégée ou ayant été protégée ou par ses héritiers relativement se prescrira par cinq ans à compter de la fin de la mesure alors même que la gestion aurait continué au-delà.

Votre commission vous soumet un amendement de coordination.

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