Article 2026 nouveau du code civil
Responsabilité personnelle du fiduciaire

Dans tout contrat, l'inexécution par l'une des parties de ses obligations l'expose en cas de dommage à voir sa responsabilité engagée vis-à-vis de son cocontractant ou, le cas échéant, des tiers, sans pour autant qu'une disposition spécifique le prévoit. Le fait que, par l'effet de la fiducie, le fiduciaire soit titulaire de plusieurs patrimoines distincts les uns des autres emporte néanmoins la nécessité d'une disposition déterminant le patrimoine -propre ou fiduciaire- sur lequel le fiduciaire sera responsable de ses fautes personnelles.

Votre commission estime logique que le fiduciaire réponde, sur son patrimoine propre, des fautes qu'il commettrait dans l'exercice de sa mission .

La généralité de cette formulation permet de poser le principe de la responsabilité pour faute du fiduciaire sur son patrimoine propre à l'égard :

- du constituant lui-même. Dans ce cas, l'action en responsabilité serait de nature contractuelle, obéissant au droit commun de la responsabilité contractuelle tel que défini aux articles 1147 et suivants du code civil ;

- du bénéficiaire de la fiducie. Le bénéficiaire peut en effet subir un dommage du fait de fautes commises dans la gestion des biens mis en fiducie, qui auraient pour effet de diminuer leur valeur au jour de leur transfert à son profit. La nature de l'action en responsabilité devrait varier selon que le bénéficiaire aura ou non accepté la fiducie 58 ( * ) ;

- des tiers. L'action en responsabilité sera alors de nature délictuelle, fondée sur les articles 1382 et suivants du code civil.

Dès lors qu'elle a souhaité que seul un professionnel ait la qualité de fiduciaire, votre commission juge inutile, contrairement à la proposition de loi, de préciser quelle intensité devra revêtir la faute du fiduciaire pour engager sa responsabilité personnelle. Il appartiendra au juge de se prononcer au cas par cas sur cette question.

Article 2027 nouveau du code civil
Remplacement du fiduciaire et désignation d'un fiduciaire provisoire

L'opération fiduciaire suppose une relation de confiance entre le constituant, le fiduciaire et le bénéficiaire, dans la mesure où le fiduciaire a pour mission de détenir et gérer des biens ou des droits qui reviendront, à terme, au constituant ou au bénéficiaire qu'il aura désigné. Aussi convient-il d'instituer, comme le prévoit du reste la proposition de loi, une faculté de remplacement du fiduciaire ou, dans cette attente, la faculté de désigner un fiduciaire provisoire.

Ce remplacement ou la désignation d'un fiduciaire provisoire pourrait intervenir dans deux hypothèses :

- soit un manquement du fiduciaire à ses obligations . Il s'agirait de sanctionner la méconnaissance par le fiduciaire des obligations découlant tant du contrat de fiducie que des dispositions du nouveau titre XIV du code civil. Il faut toutefois estimer que seule une méconnaissance grave devrait donner lieu au remplacement du fiduciaire, le juge appréciant, au cas par cas, la nature du manquement constaté. Cette disposition n'exclurait cependant pas la mise en jeu de la responsabilité personnelle du fiduciaire dans l'hypothèse où un dommage serait survenu du fait de son manquement ;

- soit la mise en péril des intérêts confiés au fiduciaire . Seraient ici notamment visés par cette disposition les choix opérés dans la gestion des biens et droits relevant du patrimoine fiduciaire qui, bien que non constitutifs d'une faute, pourraient être de nature à faire disparaître le patrimoine fiduciaire. Serait ainsi sanctionnée la perte de confiance du constituant ou du bénéficiaire dans les capacités de bonne gestion du fiduciaire.

Le remplacement ou la nomination devrait être sollicité, séparément ou conjointement, par le constituant ou par le bénéficiaire auprès du juge qui déciderait alors de la pertinence de la demande.

Votre commission a également souhaité que le protecteur de la fiducie , s'il en a été désigné un en application de l'article 2016 du code civil bénéficie d'un droit d'accès direct au juge aux mêmes fins .

S'il existe un accord entre les parties sur l'identité du nouveau fiduciaire, le juge se contentera d'homologuer cet accord et de nommer le nouveau fiduciaire, sous réserve qu'il satisfasse aux critères de qualité fixés par l'article 2014 nouveau du code civil. A défaut, il lui reviendra de nommer un administrateur provisoire dont il déterminera lui-même l'identité, parmi les personnes visées à l'article 2014.

Votre commission estime souhaitable de ne pas déroger aux règles traditionnelles de compétence juridictionnelle. C'est pourquoi la juridiction compétente sera le tribunal de grande instance et, en cas d'urgence, son juge des référés.

En complément de ce dispositif, votre commission vous propose de préciser que la décision judiciaire faisant droit à la demande emporterait de plein droit dessaisissement du fiduciaire. Ainsi, il ne sera pas nécessaire que le jugement prévoit expressément la fin de la mission du fiduciaire initialement désigné.

* 58 Voir, supra, le commentaire de l'article 2028 nouveau du code civil.

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