2. Les grandes mobilisations de l'année 2004
a) Un mouvement au départ essentiellement revendicatif
Le malaise des chercheurs s'était déjà manifesté avant le dépôt du projet de loi de finances pour 2004, notamment par la constitution, en mars 2003, du collectif « Sauvons la recherche » (SLR), et l'organisation, ce même mois, d'actions symboliques , telle la manifestation des chercheurs au Panthéon.
Mais c'est l'annonce d'une diminution de la trésorerie des organismes et de la transformation de 550 postes statutaires de chercheurs, ingénieurs et techniciens en emplois contractuels dans la loi de finances pour 2004 qui donne lieu, en janvier 2004, au lancement d'une pétition nationale ainsi qu'à la structuration du mouvement. Celle-ci se doublera ensuite d'une plus grande coordination du collectif SLR avec les syndicats, comme en témoigneront la manifestation du 29 janvier et la conférence de presse du 11 février 2004 marquant le vrai début de la médiatisation du mouvement, à quelques semaines des élections régionales et cantonales.
C'est dans ce contexte que, le 9 mars 2004, le collectif SLR réunit à l'Hôtel de ville de Paris près de mille responsables de laboratoires et d'équipes qui annoncent leur intention de démissionner de leurs fonctions administratives 3 ( * ) si leurs revendications budgétaires et statutaires n'étaient pas entièrement satisfaites. 4 ( * ) Elles le seront moins d'un mois plus tard à l'initiative du nouveau ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, M. François Fillon, qui rétablit les 550 postes statutaires supprimés. Au-delà des demandes des chercheurs, il annonce également la création de mille nouveaux emplois dans l'enseignement supérieur dès la rentrée universitaire suivante et de 700 postes de professeurs et maîtres de conférences pour le mois de janvier 2005.
b) Une volonté de déboucher sur des propositions constructives
Dès la pétition de janvier 2004, le collectif SLR a ajouté à ses deux revendications budgétaires, une troisième demande portant sur l'organisation d'États généraux de la recherche, à l'exemple du colloque tenu à Caen en 1956 5 ( * ) .
Les chercheurs du mouvement avaient d'ailleurs très mal réagi au projet du ministère de la recherche d'organiser lui-même des assises nationales, considérant qu'il revenait à la communauté scientifique de préparer une telle manifestation.
C'est ainsi que fut annoncée le 28 février 2004, la création d'un Comité national pour l'avenir de la recherche 6 ( * ) co-présidé par MM. Etienne-Emile Beaulieu et Edouard Brézin 7 ( * ) et chargé d'organiser les assises nationales des états généraux de la recherche qui se tinrent à Grenoble les 28 et 29 octobre 2004.
Au cours du printemps, des comités locaux d'organisation des États généraux prirent l'initiative de multiples réunions et auditions, qui firent l'objet d'une synthèse diffusée ultérieurement, sur le site Internet du Comité d'initiative et de proposition (CIP). Sans attendre les assises générales, ce travail de synthèse fut l'occasion de nombreux débats dans la mesure où rien ne garantissait, a priori , que les conclusions des différents comités locaux soient en accord avec les propositions du CIP présidé par MM. Beaulieu et Brézin.
Avec le recul, il apparaît qu'un des grands intérêts de cette démarche fut sans doute d'avoir donné une certaine transparence aux débats internes, jusque et y compris dans leur aboutissement lors des journées de Grenoble.
* 3 A l'exclusion de leurs activités de recherche scientifique.
* 4 Le Gouvernement ayant proposé, le 27 février, le rétablissement de 120 postes statutaires et annoncé, le 5 mars, une augmentation d'un milliard d'euros par an des moyens de la recherche entre 2005 et 2007.
* 5 Où fut arrêtée une déclaration en douze points en faveur de l'enseignement scientifique et de la recherche, demeurée un exemple de volontarisme et de programmation à long terme.
* 6 Qui deviendra ensuite le Comité d'initiative et de proposition.
* 7 Respectivement président et vice-président de l'Académie des sciences.