Article L. 631-18 nouveau du code de commerce
Cession partielle ou globale de l'entreprise au cours du redressement

Introduit par l'Assemblée nationale, avec l'avis favorable du Gouvernement, à l'initiative de sa commission des lois et de son président, M. Pascal Clément, cet article tendrait à ouvrir la possibilité d'opérer une cession totale ou partielle de l'entreprise dans le cadre de la procédure de redressement , sans nécessiter l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire comme le prévoyait initialement le présent projet de loi.

L'une des principales innovations juridiques apportées initialement par le projet de loi consistait en effet à replacer la cession des éléments d'actif de l'entreprise dans le cadre d'une procédure purement liquidative. Selon l'exposé des motifs, cette réforme avait « pour objet de rétablir la rigueur trop souvent absente lors des cessions d'entreprises tout en encourageant et en facilitant leur mise en oeuvre par un régime juridique rénové . »

D'un point de vue juridique, il n'est certes pas contestable que la cession d'un élément d'actif ou d'un ensemble d'éléments, constitue une opération de nature liquidative. Sans doute, le choix, fait par le législateur en 1985, de prévoir l'issue d'un redressement de l'entreprise par sa cession à un tiers pouvait-il apparaître, en stricte logique juridique, quelque peu déroutant, puisque le débiteur perd, au final, tout ou partie de la propriété des éléments de production de l'entreprise.

Pour autant, la solution retenue en 1985 valorisait la dimension économique de l'entreprise, comme outil de production, postulant que l'entreprise peut être redressée et peut subsister en tant qu'outil de production, nonobstant sa cession à un tiers. En outre, d'un point de vue psychologique, ce choix permettait d'éviter la « liquidation » de l'entreprise, terme dont l'acception strictement juridique reste chargée, pour bien des chefs d'entreprise, d'une dimension péjorative, voire infamante.

La restauration de la possibilité de prononcer la cession de l'entreprise au cours de la procédure de redressement s'est en définitive imposée, recueillant d'ailleurs une quasi-unanimité à l'Assemblée nationale. Le dispositif retenu à cet effet puise son inspiration dans les dispositions figurant actuellement à l'article L. 621-83 du code de commerce.

Ainsi, le tribunal serait seul compétent pour ordonner une cession de l'entreprise . Il devrait néanmoins se prononcer au vu du rapport de l'administrateur.

Le prononcé de la cession de l'entreprise ne pourrait intervenir que si le débiteur est dans l'impossibilité d'assurer lui-même son redressement . Il s'agirait donc bien d'assurer un redressement économique de l'entreprise passant par un transfert de ses éléments d'actifs à des tiers.

Compte tenu du renvoi effectué par la présente disposition à la section 1 du chapitre II du titre IV du livre VI du code de commerce, le régime juridique applicable serait celui de la cession dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire. Celui-ci, qui reprendrait, pour l'essentiel, les actuels² articles L. 621-83 à L. 621-101 du code de commerce, serait désormais fixé aux articles L. 642-1 à L. 642-17 du même code, dans leur rédaction issue de l'article 124 du présent projet de loi.

Toutefois, le I de l'article L. 642-2 du code de commerce, dans sa rédaction résultant de l'article 124, serait expressément rendu inapplicable dans le cadre d'une cession opérée au cours de la procédure de redressement. Cette exclusion est logique, dès lors que cette dernière disposition prévoirait les conditions dans lesquelles le tribunal pourrait ordonner la poursuite de l'activité aux fins de recueillir les offres de reprise émanant des tiers. Or, dans le cadre de la procédure de redressement, l'activité est par principe poursuivie, tandis que les tiers sont admis à présenter des offres de reprise dès le jugement d'ouverture de la procédure.

La cession pourrait être totale ou partielle . Contrairement à l'article L. 621-83 dans sa rédaction actuelle, le texte proposé pour rédiger l'article L. 631-18 ne définirait pas ces deux notions. Toutefois, cette dernière consisterait en la cession d'un « ensemble d'éléments d'exploitation qui forment une ou plusieurs branches complètes et autonomes d'activités », selon les termes de l'article L. 642-1 dans sa rédaction issue de l'article 124 du présent projet de loi, qui serait d'ailleurs applicable en ce cas.

La dernière phrase du texte proposé pour rédiger le présent article prévoirait que le mandataire judiciaire exercerait les missions dévolues au liquidateur par la section 1 du chapitre II du titre IV.

En conséquence, en vertu de cette disposition, il reviendrait au mandataire :

- d'informer, en application du IV de l'article L. 642-2, le débiteur, le représentant des salariés, ainsi que les contrôleurs, du contenu des offres reçues. Il convient cependant de rappeler que ces offres auront été recueillies, au cours de la procédure de redressement, par l'administrateur, en application de l'article L. 631-13 du code de commerce ;

- de donner au tribunal, en vertu de l'article L. 641-4, les éléments permettant de vérifier le caractère sérieux des offres de reprise présentées ;

- de notifier les licenciements pour motif économique, pris sur le fondement de l'article L. 642-5 ;

- de passer « tous les actes nécessaires à la réalisation de la cession », en application de l'article L. 642-8 ;

- et de solliciter auprès du tribunal, en vertu de l'article L. 642-11, la résolution du plan de cession pour inexécution.

La solution retenue par l'Assemblée nationale se justifie pleinement par le caractère liquidatif de la cession, qui implique en conséquence la réalisation d'actifs qui, en principe, relève de la compétence du liquidateur.

Les deux professions nées de la réforme opérée par la loi n° 85-99 du 25 janvier 1985, et dont le statut a été modifié récemment par la loi n° 2003-7 du 3 janvier 2003 modifiant le titre VIII du code de commerce, exercent des missions complémentaires mais distinctes. Il s'agirait de mettre fin à la profession de syndic issue de la loi de 1967.

Il apparaît donc tout à fait cohérent d'organiser, de la manière suivante, la répartition des compétences entre les deux auxiliaires de justice appelés à participer à la procédure de redressement :

- l'administrateur judiciaire est chargé de recueillir les offres de reprise, de préparer le plan, d'informer le tribunal, de notifier les licenciements et de passer l'ensemble des actes nécessaires à la cession ;

- le mandataire judiciaire est chargé de donner son avis jusqu'à la cession, puis d'en recevoir le prix afin de procéder à sa répartition entre les créanciers en fonction de leur rang.

Afin d'éviter toute ambiguïté sur cette répartition, votre commission vous soumet un amendement tendant à préciser que l'administrateur reste en fonction tant qu'il n'a pas achevé de passer les actes nécessaires à la réalisation de la cession.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 102 ainsi modifié .

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