TITRE
IV
-
ACCUEIL ET INFORMATION DES PERSONNES HANDICAPÉES,
ÉVALUATION DE LEURS BESOINS ET RECONNAISSANCE DE LEURS DROITS
CHAPITRE
PREMIER
-
Maisons départementales des personnes
handicapées
Article 26
Modification de l'architecture du code de l'action sociale
et
des familles
Objet : Cet article modifie l'architecture du chapitre VI du titre IV du livre premier du code de l'action sociale et des familles, pour tenir compte de la codification des dispositions introduites par le présent projet de loi concernant les maisons départementales des personnes handicapées.
I - Le dispositif proposé
Le présent article tire la conséquence de l'introduction d'une nouvelle section au chapitre VI du titre IV du livre premier du code de l'action sociale et des familles consacrée aux maisons départementales des personnes handicapées.
Ce chapitre, désormais intitulé « Institutions relatives aux personnes handicapées » , comprendra donc deux sections, la première relative aux conseils consultatifs national et départementaux des personnes handicapées, la seconde consacrée aux maisons départementales.
Cet article achève également la codification de l'article premier de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé : le III de cet article, qui confie au conseil national consultatif des personnes handicapées une mission d'évaluation de la situation des personnes handicapées en France et de propositions en matière d'amélioration de la prise en charge, est ainsi codifié au sein de l'article L. 146-1 qui définit les compétences de ce conseil. Comme l'ensemble des autres dispositions concernant le conseil national consultatif des personnes handicapées, le nouvel alinéa ainsi codifié sera applicable à Mayotte et dans les Terres australes et antarctiques françaises.
Le dernier alinéa de cet article adapte les missions des conseils consultatifs départementaux des personnes handicapées (CDCPH) à la création des maisons départementales : dès lors que les compétences des actuelles COTOREP et CDES sont désormais exercées par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, elle-même rattachée à la maison départementale du handicap, il convenait de prévoit une information des CDCPH sur l'activité des maisons et non plus sur celles des commissions.
II - La position de votre commission
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Article 27
(art. L. 146-3 à L. 146-6 du code de l'action
sociale et des familles
Maisons départementales des personnes
handicapées
Objet : Cet article vise à offrir aux personnes handicapées un accès unique aux droits et aux prestations qui les concernent, grâce à la création de maisons départementales des personnes handicapées, regroupant les compétences aujourd'hui dévolues aux COTOREP, aux CDES et aux sites pour la vie autonome.
I - Le dispositif proposé
« Un véritable « parcours du combattant » attend aujourd'hui les personnes handicapées dans leur vie quotidienne pour faire valoir leurs droits, tant le législateur et le pouvoir réglementaire ont compliqué à l'envi les structures administratives et les procédures de prise en charge du handicap, jusqu'à ignorer la personne handicapée elle-même. »
Tel était le constat dressé par votre rapporteur dans son rapport d'information du 24 juillet 2002.
Pour faire reconnaître leurs droits, les personnes handicapées doivent en effet s'adresser à des structures multiples : COTOREP et CDES pour les décisions relatives aux prestations et à l'orientation, assurance maladie pour la prise en charge des aides techniques, lorsque celles-ci sont remboursables, départements, fonds de secours des organismes sociaux, associations pour les aménagements du logement et du cadre de vie, AGEFIPH pour l'aménagements des postes de travail...
Afin de résoudre la complexité liée à cette multiplicité de financeurs, ceux-ci se sont d'ailleurs regroupés, depuis 1997, au sein de « sites pour la vie autonome » (SVA), dont la généralisation a été décidée en 2000 et s'est achevée 2003. La création de ces structures a représenté un progrès incontestable puisqu'elle a permis un raccourcissement significatif des délais de traitement des dossiers de demande d'aide et la réduction de 22,5 % à 11,9 % du coût restant à la charge des personnes handicapées en matière d'aide technique.
Il reste que les SVA ont une compétence aujourd'hui limitée aux aides techniques et aux aménagements du logement et que l'évaluation des besoins faite par leurs équipes labellisées n'a aucune valeur devant les instances de décision que sont les COTOREP et les CDES.
De nombreuses critiques ont, par ailleurs, été adressées à ces commissions : l'accueil des personnes handicapées et de leurs familles est insuffisant, les délais de traitement des dossiers demeurent excessifs - le stock des dossiers devant la COTOREP atteint l'équivalent d'un an d'activité -, l'absence d'entretien individuel reste trop souvent la règle et le suivi des personnes est réduit a minima , se limitant en général au réexamen obligatoire de la décision d'orientation tous les cinq ans.
C'est la raison pour laquelle le projet de loi propose de simplifier cette architecture institutionnelle en fusionnant au sein de « maisons départementales des personnes handicapées » les compétences aujourd'hui éparpillées entre les COTOREP, les CDES et les sites pour la vie autonome.
Le nouvel article L. 146-3 du code de l'action sociale et des familles, qui crée les maisons départementales des personnes handicapées, confie trois types de missions à ces structures :
- une mission générale d'accueil, d'information et de conseil , tant en amont qu'en aval des décisions de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées 25 ( * ) : cette mission recouvre non seulement un aspect documentaire, mais également une fonction d'accompagnement de la famille dans la découverte du handicap et une fonction de « pré-orientation »
En aval, cette mission consiste à assurer un suivi des décisions de la commission, ainsi qu'un accompagnement et - éventuellement - une médiation pour la mise en oeuvre de ces décisions ;
- un rôle de « guichet unique » : l'accès à l'ensemble des droits et prestations destinées aux personnes handicapées est regroupé au sein des maisons départementales du handicap, qu'il s'agisse de l'attribution de cartes comme la carte d'invalidité ou de la carte « Station debout pénible » , de l'attribution des prestations comme l'AAH, l'AES (devenue « allocation d'éducation de l'enfant handicapé ») ou de la nouvelle prestation de compensation ou de l'orientation vers un établissement ou un service adapté aux besoins et aux capacités de la personne.
Il n'est toutefois pas précisé si ce rôle de guichet unique doit s'entendre comme une simple centralisation des dossiers de demande de prestation, ceux-ci continuant à être instruits par les services compétents aujourd'hui, ou s'il s'étend à la coordination de cette instruction ;
- une mission d'organisation et de coordination : la maison départementale des personnes handicapées est chargée d'organiser le fonctionnement de l'équipe pluridisciplinaire et de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, chargées respectivement - aux termes de la nouvelle rédaction des articles L. 146-4 et L. 241-6 du code de l'action sociale et des familles - d'évaluer les incapacités et les besoins de compensation de la personne handicapée et de décider de l'attribution des droits et prestations et de l'orientation.
La mise en place de ces maisons départementales incombe à l'État qui devra assurer leur caractère de services de proximité.
L'article L. 146-4 place auprès de la maison départementale des personnes handicapées une équipe pluridisciplinaire dont les missions sont les suivantes :
- évaluer les besoins de compensation et l'incapacité des personnes handicapées, sur la base de références définies par la voie réglementaire : l'exposé des motifs du projet de loi précise que cette évaluation ira « au-delà de l'évaluation strictement médicale des incapacités. Il s'agit là en effet de prendre en compte le projet de vie de la personne, ses aptitudes et potentialités et d'élargir l'évaluation aux conséquences sociales du handicap » ;
- traduire ces besoins dans un plan personnalisé de compensation , intégrant - notamment mais pas uniquement - les besoins relevant de la prestation de compensation et les aides techniques pouvant faire l'objet d'une prise en charge par l'assurance maladie.
Cet article précise, en outre, un principe essentiel du fonctionnement de cette équipe pluridisciplinaire, à savoir l'obligation pour celle-ci d'entendre la personne handicapée, ses parents si elle est mineure, ou son représentant légal.
Est également constituée auprès de la maison départementale des personnes handicapées une commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées , chargée de prendre les décisions concernant l'ensemble des droits de la personne handicapée, notamment les décisions d'attribution des prestations et d'orientation.
Si la définition des compétences précises de cette commission et de la procédure applicable devant elle est renvoyée aux articles L. 241-5 à L. 241-11 du code de l'action sociale et des familles, modifiés par l'article 29 du présent projet de loi, le présent article pose d'ores et déjà les principes essentiels qui régissent ses prises de décision :
- la commission se prononce sur la base de l'évaluation et du plan de compensation établis par l'équipe pluridisciplinaire : cette précision constitue un progrès incontestable pour les personnes handicapées car elle consacre une approche globale et non plus morcelée des droits et des besoins de la personne. Elle devrait également contribuer à réduire le nombre de procédures engagées devant la commission dans la mesure où l'état des lieux dressé par l'équipe pluridisciplinaire conduira à rassembler, en un seul dossier de demande, l'ensemble des décisions concernant la personne handicapée ;
- elle se prononce également au vu des souhaits exprimés par la personne handicapée , conformément à la nécessité de motiver les décisions de la commission dans la perspective d'un projet d'insertion sociale et professionnelle, et non plus seulement par référence à la mesure médicale d'une déficience.
II - La position de votre commission
Votre commission approuve la création des maisons départementales des personnes handicapées, puisqu'elle avait appelé de ses voeux la mise en place de telles structures, dans son rapport d'information du 24 juillet 2002. Elle regrette toutefois que le projet de loi n'aille pas plus avant dans la définition de la forme juridique et des modalités d'organisation de ces maisons départementales .
Votre rapporteur avait suggéré, dans sa proposition précitée, la création de ces maisons sous la forme de groupements d'intérêt public entre l'État, les départements, les communes et les organismes de sécurité sociale, cette composition pouvant être élargie en fonction des réalités locales.
La formule du GIP permet en effet la mise en place de partenariats souples et une contribution, y compris humaine et financière, de l'ensemble des acteurs qui participent aujourd'hui aux fonds départementaux de compensation. Elle est sans doute la formule la mieux à même de fédérer les moyens financiers nécessaires à la compensation du handicap, en permettant notamment le maintien des financements extralégaux mis à disposition des actuels sites pour la vie autonome.
Une solution similaire a d'ailleurs été préconisée par M. Denis Piveteau, dans son rapport prospectif, réalisé à la demande du ministère, sur les missions et la structure d'une éventuelle « agence nationale du handicap ».
Le rapport prospectif de M. Denis Piveteau, maître des requêtes au Conseil d'État, sur les missions et la structure d'une « agence nationale du handicap » recense quatre schémas possibles pour la mise en place des maisons départementales du handicap : - un schéma de « renforcement sans transformation » Selon ce scénario, CDES, COTOREP et sites pour la vie autonome pourraient fusionner en une structure unique. Mais cette réorganisation n'entraînerait pas de modification fondamentale dans l'organisation des compétences : l'accueil, l'instruction, l'orientation resteraient le fait d'un organe collégial, dépourvu de personnalité morale, prenant ses décisions au nom de l'État ou du président du conseil général. La création d'une personne morale nouvelle au niveau central serait alors inutile. La coordination pourrait être assurée par une simple mission d'appui interministérielle. - un schéma de « décentralisation de l'instruction et de la décision » Dans ce schéma, l'ensemble des compétences d'instruction et de décision serait confié au département. C'est à lui qu'il appartiendrait d'assurer la qualité de gestion technique et administrative des dossiers. La création d'une agence nationale d'animation et de coordination serait donc difficilement envisageable. Si une structure nationale était créée, elle ne pourrait avoir qu'un rôle documentaire, technique, méthodologique. - un schéma de « centralisation de l'information et de l'instruction » Dans ce système, les COTOREP, les CDES et les sites pour la vie autonome seraient rassemblés sous l'autorité d'un établissement public national, dont elles deviendraient les services déconcentrés. - un schéma de création de groupements d'intérêt public locaux Dans ce scénario, les missions de service à la personne seraient assurées par des maisons départementales, créées sous la forme de groupements d'intérêt public et donc dotées de la personnalité morale, coordonnées et suivies dans leurs résultats par une agence nationale.
Dans cette hypothèse, la création d'une agence
nationale serait justifiée, afin d'assurer l'animation et la
coordination des actions du réseau des maisons.
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Une telle forme juridique serait, enfin, cohérente avec les orientations fixées par le Premier ministre, le 6 novembre 2003, lors de la présentation de la réforme de solidarité pour les personnes dépendantes. Il précisait en effet, à cette occasion, que la future Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie « [déléguerait] les moyens financiers aux départements qui [seraient] responsables de la mise en oeuvre globale de la politique de la dépendance » et que « pour garantir la transparence de l'affectation des fonds issus de la solidarité et de la fraternité et son utilisation au profit des personnes âgées et handicapées, des organes de surveillance [associeraient] les élus, les partenaires sociaux et les représentants des milieux associatifs » .
Pour répondre à la volonté du Premier ministre, votre commission vous propose d'ailleurs de confier la direction de ces GIP aux départements .
Il est vrai, toutefois, que le Premier ministre a confié à MM. Raoul Briet et Pierre Jamet une mission de préfiguration de la future caisse, dont les conclusions ne seront connues qu'en mai prochain. Des missions et des modalités d'organisation de cette caisse dépendront les contours juridiques exacts des maisons départementales des personnes handicapées, celles-ci ayant vocation à être les correspondantes locales de la caisse.
Votre commission estime cependant que les propositions qu'elle a formulées, tant dans son rapport d'information que dans sa proposition de loi, gardent tout leur sens aujourd'hui et qu'elles pourraient utilement servir de base à la réflexion que le législateur devra nécessairement engager, en cours de navette, au vu des prochaines conclusions de la mission de MM. Briet et Jamet, concernant les futures relations de ces maisons avec la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. Elle vous proposera donc d' amender cet article dans ce sens, dans l'attente d'une solution plus définitive en deuxième lecture .
S'agissant des équipes pluridisciplinaires, votre commission observe qu'elles devront mobiliser des compétences très larges, afin de ne pas se résumer, comme les actuelles équipes techniques des COTOREP, à un médecin et une assistante sociale.
Encore une fois, la forme du GIP devrait permettre d'atteindre cet objectif, en mobilisant les compétences existantes au sein de réseaux aujourd'hui dispersés : travailleurs sociaux de l'État, du département ou des CCAS, médecins-conseils des caisses de sécurité sociale, praticiens hospitaliers, médecins de ville, mais aussi personnalités qualifiées mises à dispositions par les associations de personnes handicapées, architectes...
Votre commission estime également qu'il est important de préciser, dès à présent, les conditions dans lesquelles la personne handicapée pourra contester l'évaluation qui aura été faite de ses besoins et - par conséquent - le montant de la prestation qui lui sera accordée.
Il est vrai que l'établissement du plan de compensation par l'équipe pluridisciplinaire est assimilable à un acte d'instruction et que cet acte ne peut dès lors faire grief. Le projet de loi prévoit également des voies de recours pour contester la décision - qui, elle, fait grief - de la commission des droits et de l'autonomie.
Il reste qu'une procédure devant la commission centrale d'aide sociale ou, en cassation, devant le Conseil d'État est une procédure lourde. Il conviendrait donc de mettre en place un dispositif de médiation, plus facilement accessible.
Votre rapporteur avait envisagé, dans sa proposition de loi précitée, la constitution d'une commission de conciliation tripartite, composée de représentants des financeurs, des personnes handicapées et de personnalités qualifiées, chargée d'examiner les litiges relatifs à la prestation de compensation. A la réflexion, un tel dispositif représenterait sans doute une lourdeur administrative supplémentaire qui irait à l'encontre de l'objectif de simplification des démarches qui sous-tend ce projet de loi et que votre commission approuve.
Elle vous propose donc une solution alternative consistant à créer un médiateur , placé auprès de la maison départementale des personnes handicapées, et dont l'indépendance par rapport aux financeurs serait assurée par sa nomination par le président du tribunal d'instance .
Elle vous proposera enfin un amendement rédactionnel et quatre amendements de coordination .
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.
* 25 Sur le rôle de la nouvelle commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, voir le commentaire de l'article 29.