d) La loi du 23 décembre 1946
Après la parenthèse de Vichy
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, la loi du 23 décembre
1946 ne constitue pas un retour à la législation d'avant-guerre
et, dans un contexte économique et social il est vrai particulier, place
les conventions sous le signe du dirigisme en consacrant pour l'essentiel leur
nature réglementaire.
Tout en maintenant le monopole de négociation des organisations
syndicales les plus représentatives, elle soumet à un
contrôle de l'État la négociation, le contenu, le champ
d'application et la structure des conventions collectives.
De ce fait, les conventions étaient subordonnées à une
homologation préalable des pouvoirs publics et, strictement
hiérarchisées, elles imposaient que les accords locaux soient mis
en harmonie avec les accords nationaux. En outre, en cas de conflit survenant
au cours de l'élaboration de la convention, l'État était
en droit de se substituer aux parties en déterminant, par décret,
les conditions de travail de la branche intéressée. Enfin, les
conventions, qui ne pouvaient contenir de dispositions salariales, s'imposaient
immédiatement à tous les membres d'une profession.
Cette loi très dirigiste n'obtint qu'une application très
limitée : seule une dizaine de conventions furent conclues dans ce
cadre.
e) La loi du 11 février 1950
Elaborée dans un contexte économique assaini et dans
un climat social apaisé, la loi du 11 février 1950
rétablit, dans une logique proche de celle de la loi de 1936, le droit
de la négociation collective dans son équilibre antérieur
tout en l'approfondissant encore sur quelques points
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et constitue, aujourd'hui
encore, le socle du droit français de la convention collective tel
qu'actuellement codifié dans le code du travail.
Mais elle a également marqué une première étape
dans la décentralisation de la négociation collective - en
reconnaissant pour la première fois les accords
d'établissement - et dans sa généralisation
territoriale et professionnelle - en l'ouvrant au-delà des seuls
secteurs du commerce et de l'industrie.
Sous ce régime, la pratique de la négociation collective s'est
développée : en vingt ans, ce sont 261 conventions
collectives nationales, 184 conventions régionales,
495 conventions locales et 737 accords d'établissements qui
ont été conclus.
f) La loi du 13 juillet 1971
La loi
du 13 juillet 1971 a profondément enrichi le droit issu de la loi du 11
février 1950.
Elle a ainsi reconnu l'existence d'un «
droit des travailleurs
à la négociation collective
», marquant en cela la
transformation d'un droit des conventions collectives en droit de la
négociation collective.
Elle a aussi considérablement accru le champ de la négociation
collective en instituant les accords d'entreprise et d'établissement
sous un régime identique à celui de la convention de branche, en
étendant l'objet des conventions collectives aux « garanties
sociales », en facilitant la procédure d'extension et en
organisant celle d'élargissement.
Cette loi, dont il convient de souligner l'importance, a largement
favorisé la diffusion de la négociation collective et
renforcé la couverture conventionnelle : entre 1972 et 1982, la
part des travailleurs des entreprises de plus de dix salariés couvert
par une convention collective est passé de 75 % à
90,4 %.
* 2 Qui tenta d'imposer une organisation corporatiste et limita, par trois décrets-lois et par la « charte du travail », la portée des conventions collectives existantes.
* 3 Ainsi, même non étendue, la convention collective ne peut être négociée que par les organisations syndicales et doit s'appliquer à tous les salariés.