3. Le rôle essentiel des collectivités territoriales
a) Un rôle important
L'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales prévoit que les collectivités, ou les établissements publics de coopération intercommunale ayant bénéficié d'un transfert de compétence à cet effet, peuvent créer des infrastructures destinées à supporter des réseaux de télécommunications (canalisations, chambres de tirage ou fibres noires destinées à supporter des réseaux filaires, pylônes et alimentation électrique pour les infrastructures de boucle locale radio ou de téléphonie mobile...). Ces infrastructures peuvent ensuite être mises à la disposition d'opérateurs ou d'utilisateurs par voie conventionnelle, dans des conditions « objectives, transparentes et non discriminatoires ».
Ainsi, les collectivités locales sont appelées à jouer un rôle important en matière de financement des infrastructures.
Tel est tout d'abord le cas en ce qui concerne la téléphonie mobile . Ce mouvement devrait s'accélérer, dans la mesure où le CIADT de Limoges a, comme on l'a vu, décidé de mettre en place un système de cofinancement des infrastructures de téléphonie mobile entre l'Etat et les collectivités locales, le Massif central étant considéré comme « zone prioritaire ».
En ce qui concerne l'Internet à haut débit, de nombreuses collectivités locales se sont engagées dans la réalisation de réseaux de collecte à haut débit. Il s'agit de réseaux intermédiaires entre ceux de desserte des clients et les réseaux longue distance. L'objectif est de rendre ainsi possible l'apparition d'offres de services à haut débit de la part des opérateurs.
b) Une simplification du cadre juridique par la loi du 17 juillet 2001
Après une première modification intervenue dans la loi n° 99-533 du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, les modalités d'intervention des collectivités locales ont été simplifiées par la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel.
La loi du 17 juillet 2001 a supprimé les conditions jusqu'alors exigées par l'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales, qui limitaient, à l'excès, leurs initiatives en ce domaine :
- obligation pour la collectivité locale d'établir, par « constat de carence », que France Telecom n'était pas en mesure de lui fournir le service demandé ;
- amortissement sur huit ans des infrastructures réalisées par une collectivité locale.
La possibilité est également reconnue aux collectivités territoriales de mettre les infrastructures concernées à la disposition, non seulement des opérateurs de réseaux, mais également d'utilisateurs finaux.
En outre, les collectivités territoriales ont désormais l'autorisation de déduire, du coût de location facturé aux opérateurs, les subventions publiques qui peuvent être consenties « dans certaines zones géographiques ». Ainsi, les collectivités territoriales des zones rurales devraient pouvoir subventionner les infrastructures de télécommunications.
c) Permettre aux collectivités locales de jouer un rôle d'opérateur ou de subventionner des opérateurs ?
Dans son rapport sur l'adaptation de la régulation publié en juillet 2002, l'ART estime nécessaire d'aller plus loin.
En effet, le dispositif actuel présente un double inconvénient :
- un manque de clarté du cadre juridique : selon l'ART, les débats qui ont entouré la rédaction d'un projet de circulaire d'application ont mis en lumière les difficultés de mise en oeuvre du dispositif, notamment lorsqu'il s'agit d'établir une frontière entre « réseaux de télécommunications » et « infrastructures passives », débat qui se heurte selon elle à « des difficultés techniques insurmontables » ;
- l'impossibilité pour certaines zones d'être desservies par les opérateurs dans des conditions de rentabilité suffisante, même avec une aide des collectivités locales.
Ainsi, l'ART propose de permettre aux collectivités locales :
- de subventionner les opérateurs (afin de respecter les principes de la concurrence, établis au niveau européen, il sera vraisemblablement nécessaire de définir les zones dans lesquelles cette intervention se justifie) ;
- de jouer un rôle d'opérateur dans les zones les moins desservies (les collectivités territoriales devant respecter certaines règles afin de ne pas fausser la concurrence).
Les collectivités locales ne pourraient cumuler ces deux types d'intervention sur une même zone géographique.
d) Expérimenter diverses solutions techniques
Plusieurs solutions techniques pourraient être expérimentées afin de démocratiser l'accès à l'Internet à haut débit. Ainsi qu'on a eu l'occasion de le souligner, les technologies radio et satellitaire constituent des solutions d'accès potentiellement économiques.
Lors de son audition par la mission commune d'information sur la montagne, le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire a indiqué que « plusieurs expérimentations de grande ampleur permettant de tester des technologies alternatives fixes et sans fil pourraient être lancées : un campus universitaire, un ensemble de résidences, une gare, un aéroport, un ensemble de communes... (...) Ces expérimentations pourraient s'appuyer sur des dispositifs de coopération entre entreprises, établissements de recherche-développement et acteurs publics locaux, l'Etat intervenant par un abondement financier jouant un effet levier (...) et, au besoin, en levant les obstacles réglementaires » .
En conclusion, on peut souligner que les collectivités locales doivent faire preuve de patience et de prudence en matière d'investissements dans les infrastructures de télécommunication. En effet, elles engagent des initiatives qui pourraient être dépassées sur le plan technologique, alors qu'elles devront rembourser des annuités d'emprunt durant de nombreuses années. En particulier, le Conseil d'administration de France Télécom a décidé d'ouvrir le haut débit par le biais de l'ADSL, qui permet d'utiliser les fils existants, alors que certaines technologies permettront de disposer d'un débit supérieur (fibre optique, boucle locale radio, satellite).