N° 206
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002
Annexe au procès-verbal de la séance du 6 février 2002 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation de l' accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne relatif au contrôle de la circulation dans les tunnels du Mont-Blanc et du Fréjus ,
Par M. Philippe FRANÇOIS,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Xavier de Villepin, président ; MM. Michel Caldaguès, Guy Penne, André Dulait, Michel Pelchat, Mme Danielle Bidard-Reydet, M. André Boyer, vice-présidents ; MM. Simon Loueckhote, Daniel Goulet, André Rouvière, Jean-Pierre Masseret, secrétaires ; MM. Jean-Yves Autexier, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Jacques Blanc, Didier Borotra, Didier Boulaud, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Robert Del Picchia, Jean-Paul Delevoye, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Philippe François, Philippe de Gaulle, Mme Jacqueline Gourault, MM. Emmanuel Hamel, Christian de La Malène, René-Georges Laurin, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc, MM. Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Louis Moinard, Xavier Pintat, Jean-Pierre Plancade, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Henri Torre, André Vallet, Serge Vinçon.
Voir le numéro :
Sénat : 181 (2001-2002)
Traités et conventions. |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Les questions de sécurité dans les tunnels ont été dramatiquement mises en lumière par le très grave incendie survenu dans le tunnel du Mont-Blanc le 24 mars 1999 qui a causé la mort de 39 personnes.
Depuis cet événement, les gouvernements français et italiens ont réévalué l'ensemble des dispositifs de sécurité et des règles de circulation dans les tunnels transfrontaliers entre les deux pays. L'accord interprétatif sous forme d'échange de lettres des 4 et 6 octobre 2001 s'inscrit dans cette démarche. Il vise à préciser juridiquement les pouvoirs des gendarmes et des carabiniers italiens en matière de contrôle de la circulation dans les tunnels du Mont-Blanc et du Fréjus.
Afin de mieux comprendre l'apport juridique de cet accord, votre rapporteur présentera l'état de droit antérieur résultant des conventions bilatérales franco-italiennes successives sur la construction et l'exploitation des tunnels, avant d'en présenter le dispositif et les modalités d'application.
I. UN DISPOSITIF JURIDIQUE INADAPTÉ AU CONTRÔLE DE LA CIRCULATION ROUTIÈRE DANS LES TUNNELS
L'analyse de l'état de droit régissant actuellement le contrôle de la circulation dans les tunnels du Mont-Blanc et du Fréjus paraît totalement inadapté, ne permettant pas aux forces de police d'assurer convenablement leurs missions.
A. LES RÈGLES DE CONTRÔLE DE LA CIRCULATION DANS LE TUNNEL DU MONT-BLANC
Dans la convention entre la France et l'Italie du 14 mars 1953, relative à la construction et à l'exploitation du tunnel sous le Mont-Blanc, la police de la circulation devait être confiée au concessionnaire (article 7 et 13). La société d'exploitation devait pour cela recruter des agents assermentés qui en seraient spécialement chargés. Le texte prévoyait également que ces agents qualifiés et accrédités de part et d'autre pourraient franchir librement la frontière pour toute enquête de douane et de police dans la limite des concessions (article 14). Ces dispositions ont été ultérieurement confirmées par le cahier des charges de concession du tunnel annexé à la loi n°57-506 du 17 avril 1957 (article 14 et 22).
Cependant, ces dispositions n'ont jamais été appliquées . En effet, par un avenant du 25 mars 1965 à la convention de 1953, la France et l'Italie décidaient de maintenir la compétence de leurs forces de l'ordre respectives en complément des futurs agents de la société. Dans les faits, les deux Etats décidaient de revenir sur le dispositif antérieur. Surtout, la constatation et la répression des infractions devaient être assurées dans les conditions et selon les modalités prévues par la législation de l'Etat sur le territoire duquel elles avaient été commises, réaffirmant la règle de territorialité de la loi applicable (article 5) 1 ( * ) .
En conséquence, et en l'absence de l'établissement d'un règlement de circulation par la société d'exploitation et d'agents assermentés de ladite société (cf. 1-1 ci-dessus), les fonctionnaires de la police de l'air et des frontières affectés à la surveillance du tunnel du Mont-Blanc faisaient application des dispositions du code de procédure pénale et du code de la route sur la partie française du tunnel.
En pratique, les agents français pouvaient intercepter les véhicules des conducteurs venant d'Italie et auteurs d'infraction sur la partie française du tunnel, à la sortie française du tunnel . Par contre, ils n'étaient pas autorisés à se transporter à la sortie italienne du tunnel et de ce fait, ils étaient dans l'impossibilité de verbaliser les conducteurs auteurs d'infractions au code de la route, sauf à interrompre exceptionnellement la circulation des véhicules sur la partie française de l'ouvrage.
* 1 Article 5 : « Chacun des deux gouvernements conservera à sa charge les frais des services de douane, de police et de santé qui lui sont propres.
La police de la circulation dans le tunnel pourra être assurée par des patrouilles mixtes composées soit de personnel de police de chacun des deux Etats, soit partiellement ou même totalement par des agents assermentés de chacune des deux sociétés concessionnaires, conformément à la législation de chaque Etat. La constatation et la répression des infractions seront assurées dans les conditions et selon les modalités prévues par la législation de l'Etat sur le territoire duquel elles auront été commises. »