B. LA PÉRIODE DE FORTE CROISSANCE S'EST RÉVÉLÉE TRÈS FAVORABLE POUR LA RÉFORME DES AIDES À LA PERSONNE
1. Une réforme financée par la diminution tendancielle des aides
En
matière d'aides personnelles au logement, votre rapporteur avait
regretté il y a deux ans qu'il ne soit pas entrepris de réforme
importante, la loi de finances pour 2000 s'étant accompagnée de
simples aménagements des aides personnelles au logement. Il parlait
alors «
d'adaptations marginales
».
Cette réforme a vu enfin le jour à compter du 1er janvier
2001.
Un groupe de travail avait été mis en place suite
à la signature de la convention d'objectifs et de gestion entre l'Etat
et la Caisse nationale d'allocations familiales le 14 mai 1997. Ce groupe,
sous l'égide du secrétariat d'Etat au logement, a remis un
rapport d'étape au gouvernement en avril 1999. Sur la base de ses
travaux, le Premier Ministre a présenté une réforme des
aides personnelles lors de la conférence sur la famille du 15 juin 2000.
Cette réforme poursuit deux objectifs :
- harmoniser et simplifier les barèmes des aides, regroupés dans
un barème unique (hors le cas des logements-foyers) ;
- améliorer l'équité des aides en prenant en compte tous
les revenus de la même manière (revenus du travail, minima
sociaux, RMI).
Elle harmonise et simplifie le dispositif des aides personnelles et permet donc
un traitement équitable et cohérent de l'aide des ménages
ayant de très faibles revenus, qu'ils soient issus du travail ou de
transferts sociaux ; un ménage ayant des revenus du travail de
même niveau que le RMI aura la même aide que le Rmiste alors que
son aide est aujourd'hui nettement inférieure. La réforme est
mise en place en deux étapes :
- au 1er janvier 2001 : un barème intermédiaire permettant le
même niveau d'aide jusqu'à environ 75 % du RMI ;
- au 1er janvier 2002 : le barème définitif avec aide identique
jusqu'au niveau de revenu correspondant au RMI.
La réforme a un coût important, au total 990 millions d'euros
(6,5 milliards de francs), dont une partie seulement est prise en charge
sur les crédits du secrétariat d'Etat au logement (544 millions
d'euros soit 3,56 milliards de francs).
Cependant,
la réforme des aides au logement, malgré
son coût élevé (300 millions d'euros en 2001 et 244
millions d'euros en 2002) aura pu se faire à effort budgétaire
nul puisque la ligne budgétaire inscrite pour 2002 est identique
à celle de la loi de finances pour 2000.
Cette situation exceptionnelle s'explique par l'amélioration de la
conjoncture économique, qui tend à la fois à augmenter les
contributions des entreprises privées au financement des aides et
à diminuer le nombre de bénéficiaires.
La très forte annulation de crédits aux aides personnelles
dans le collectif budgétaire pour 2001 (1,275 milliard de francs),
au-delà des questions qu'elle soulève en termes de transparence,
témoigne de l'ampleur du « gain » engendré
par la croissance économique.
2. Une réforme à parachever
La
réforme des aides personnelles au logement concerne les ménages
locataires en logements ordinaires, hors étudiants. Les aides en faveur
du secteur locatif en foyer, qui concernent des ménages disposant en
majorité de petits revenus, sont exclues, de même que les aides
aux accédants à la propriété.
La réforme concerne donc 4,3 millions de ménages, soit à
peu près deux tiers de l'ensemble des bénéficiaires
d'aides personnelles. Au 31 décembre 1999, le montant de
prestations correspondant était de 57 milliards de francs sur
80 milliards de francs au total. Les aides aux accédants
représentaient 11 milliards de francs de prestations versées
à 1 million de ménages, les foyers représentaient 6
milliards de francs de prestations à 450.000 bénéficiaires
et les aides aux étudiants représentaient 6 milliards de
francs de prestations versées à 650.000
bénéficiaires.
La réforme est donc incomplète
.
Elle ne prend notamment pas en compte les aides à l'accession : on
retrouve là le souci du gouvernement de privilégier la location
plutôt que l'accession à la propriété des personnes
modestes, ce qui se traduit par ailleurs par la réduction des moyens
consacrés au prêt à taux zéro.
D'autre part, il est regrettable que certains hébergements
spécifiques comme les logements-foyers ne soient pas concernés,
alors qu'ils accueillent les personnes les plus fragiles.
Du fait de son caractère incomplet, la réforme d'ensemble des
aides personnelles ne peut être que différée dans le temps.
Les scénarios envisagés par le groupe de travail
interministériel montrent que la réforme entreprise devra
être suivie d'autres aménagements très substantiels.
Selon le scénario n° 2 élaboré par ce groupe de
travail, la réforme aurait pu être complétée
dès juillet 2001 par une réforme des aides à l'accession,
et dès 2002 par une réforme des aides aux foyers puis du
conventionnement. La réforme est en effet inachevée en ce qu'elle
n'aboutit pas à une unification complète des aides, qui
supposerait une réforme du conventionnement : il s'agirait d'avoir
une aide à la personne identique dans le parc privé et dans le
parc social.
Tous les barèmes étant unifiés, avec une aide identique,
la réforme pourrait être achevée par trois
éléments :
- la redéfinition du conventionnement ;
- la refonte des clés de financement des prestations ;
- et une réforme du cadre institutionnel des aides personnelles.
Votre rapporteur regrette que cette progression dans la réforme n'ait
pas été retenue, alors qu'elle aurait permis d'aboutir à
un dispositif d'aides personnelles au logement unifié et
simplifié.
Le financement des aides à la personne est aujourd'hui très
complexe et mériterait d'être simplifié, les relations
entre l'Etat et les caisses d'allocations familiales devraient être en
particulier revues.
Les aides au logement : un financement complexe
Trois
fonds alimentés par diverses contributions, gèrent les aides
personnelles au logement :
1)
Le fonds national des prestations familiales
(FNPF) finance
l'allocation de logement familiale (ALF) et est alimenté exclusivement
par des cotisations employeurs
2)
Le fonds national d'aide au logement
(FNAL) créé par la
loi du 16 juillet 1971 finance l'allocation de logement sociale (ALS) et l'aide
aux organismes qui hébergent à titre temporaire des personnes
défavorisées. Il est alimenté par une contribution de
l'Etat, le produit d'une cotisation à la charge des employeurs assise
sur les salaires plafonnés (0,10%) et le produit d'une contribution
à la charge des employeurs occupant plus de neuf salariés (0,40%)
3)
Le fonds national de l'habitation
(FNH) institué par la loi du
3 janvier 1977 finance l'aide personnalisée au logement (APL). Il
est alimenté par des contributions provenant des régimes de
prestations familiales et une subvention d'équilibre inscrite au budget
du ministère du logement.
Dans son rapport sur l'exécution de la loi de finances pour 1998, la
Cour des comptes a critiqué la coexistence de plusieurs fonds, ainsi que
le taux de rémunération versé aux caisses d'allocations
familiales et de mutualité sociale agricole.
Votre rapporteur rappelle qu'il souhaite que le secrétariat d'Etat au
logement, en lien avec le ministère de l'emploi et de la
solidarité,
recherche une simplification du dispositif.
La
question des frais de gestion, comme en matière de collecte de
l'épargne populaire, ne doit pas être négligée. De
même, les modalités de versements du budget de l'Etat qui ont
abouti à une trésorerie incroyablement excédentaire,
doivent être revues de manière urgente.