B. L'INCITATION FISCALE EN FAVEUR DE LA LOCATION PRIVÉE « INTERMÉDIAIRE » DOIT IMPÉRATIVEMENT ÊTRE AMÉLIORÉE
1. Les dispositifs fiscaux actuels ne sont pas suffisamment incitatifs
Le
dispositif d'amortissement dit « Perissol » a soutenu le
secteur de la construction pendant plusieurs années, de 1996 à
1999.
En 1996, environ 30.000 logements ont été acquis sous le
bénéfice de ce régime fiscal, puis de 45.000 à
50.000 logements en 1998. En 1999, dernière année d'application
de l'amortissement « Perissol », le secteur de la
construction a progressé de 13 %, et les mises en chantier ont
atteint 317.600 unités.
Le nouveau régime « Besson » a été
adopté dans la loi de finances pour 1999. Toutefois, la transition avec
l'ancien régime fiscal a été relativement longue.
La mise en oeuvre concrète du dispositif montre que celui-ci fonctionne
plutôt correctement pour le logement neuf, même s'il doit encore
monter en puissance, mais il n'apparaît pas performant pour le logement
ancien.
Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie
évalue le coût du statut du bailleur privé dans le neuf
à 8,4 millions d'euros en 2000, 85,4 millions d'euros en 2001 et 224
millions d'euros en 2002. En 2001, la Fédération nationale des
promoteurs constructeurs (FNPC) estime que les ventes dans le neuf devraient
atteindre 75.000 unités, dont 21.000 en 2001 bénéficiant
du statut du bailleur privé, soit 28 % des ventes. Le dispositif est
moins développé en Ile de France (22 %) que sur le reste du
territoire (30 %). A titre de comparaison, le nombre d'opérations
relevant du dispositif dit « Périssol » en 1998
était compris selon les données entre 45.000 et 50.000
unités et son coût est encore estimé à 500 millions
d'euros en 2000, 554 millions d'euros en 2001 et 477 millions d'euros en
2002.
Il est toutefois encore trop tôt pour mesurer pleinement l'effet du
nouveau dispositif dit « Besson » dans le neuf, qui doit
faire ses preuves sur la durée. En revanche, il apparaît d'ores et
déjà que le dispositif pour le logement ancien est insuffisant,
même si le ministère du logement ne dispose pas de chiffres
précis sur sa mise en oeuvre.
Si le dispositif en faveur du logement neuf commence à démarrer,
le régime « Besson » dans l'ancien, ne fait
actuellement preuve d'aucune efficacité
, au point que ni le
secrétariat d'Etat au logement ni le ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie ne peuvent donner de chiffres
sur sa mise en oeuvre. Les fiches statistiques concernant ce régime
fiscal ne parviendraient pas aux services fiscaux...
D'après une étude menée par un cabinet d'expertise
à la demande du secrétariat au logement,
seuls 15.000
propriétaires auraient choisi le « Besson » dans
l'ancien, soit moitié moins que le nombre qui était
attendu, et qui était déjà fort modeste (30.000).
Le tome 1 du fascicule « voies et moyens » du budget 2002
inscrit une nouvelle dépense fiscale de 5 millions d'euros (33 millions
de francs) pour l'application du régime « Besson »
dans l'ancien en 2002 contre 139 millions d'euros (912 millions de francs)
pour les logements neufs. Le tome II évalue, de manière globale,
à 38 millions d'euros (250 millions de francs) le coût total de la
mesure pour l'ancien en 2002, contre 701 millions d'euros (4,6 milliards de
francs) pour l'ensemble des dispositions en faveur du logement neuf. Compte
tenu de l'absence de statistiques dans l'ancien, il est difficile
d'apprécier le réalisme de ces évaluations, mais
force
est de constater que les résultats du « statut du bailleur
privé » dans l'ancien sont extrêmement modestes, pour ne
pas dire très décevants.
On peut d'ailleurs citer le rapport général de l'Assemblée
nationale selon lequel «
les professionnels du bâtiment
estiment pourtant qu'un tiers du parc des logements anciens serait
éligible au
«
dispositif Besson». Plusieurs raisons
pourraient expliquer le faible attrait de celui-ci jusqu'à
présent : la durée exigée quant à l'engagement de
location minimale et le taux de l'abattement sur les revenus fonciers
pourraient se révéler insuffisamment attractifs ; l'insuffisante
adéquation des plafonds de loyers retenus pour Paris avec les conditions
du marché locatif ; l'inéligibilité des baux en cours et,
enfin, le caractère plus attractif du dispositif alternatif
appliqué aux « micro-entreprises », tel que défini
à l'article 50-0 du code général des impôts, qui
permet de bénéficier d'un abattement substantiel sur les revenus
perçus, tout en étant moins contraignant dans les
procédures à respecter. Il permet en outre, en optant pour le
régime réel, de sortir du dispositif librement
»
.
A cet égard, on peut s'interroger sur l'opportunité de
créer un deuxième volet du dispositif
« Besson » pour les locations à des personnes
défavorisées, alors que le premier volet, en faveur du logement
intermédiaire, ne fonctionne absolument pas, au risque d'ailleurs de
compliquer inutilement le dispositif.
2. Les propositions de la commission des finances
Compte-tenu de ces considérations, la commission des
finances
soucieuse d'améliorer le dispositif « Besson » pour
le logement locatif, propose deux amendements au projet de loi de finances
:
- un amendement visant, après l'ouverture créée par
l'article 75 de la loi de finances pour 2001, à ouvrir le régime
« Besson » dans le neuf comme dans l'ancien aux
locations aux ascendants et descendants
(sous la condition d'un non
cumul des avantages fiscaux, en excluant la possibilité de
déduire fiscalement une pension alimentaire).
On pourra observer que cette proposition, formulée à de
très nombreuses reprises par votre commission depuis la création
du dispositif « Besson » et votée par le
Sénat, est
conforme aux souhaits de Mme Marie-Noëlle Lienemann,
secrétaire d'Etat au logement
, qui a déclaré devant la
commission de la production et des échanges de l'Assemblée
nationale (mercredi 24 octobre 2001) : «
contrairement au
ministère des finances, je suis favorable à ouvrir le
bénéfice de la loi Besson en cas de location aux ascendants et
aux descendants. Je ne désespère pas du pouvoir de persuasion du
Parlement à cet égard...
».
-
un amendement visant à relever le taux de la déduction
forfaitaire dans le « Besson » ancien de 25 % à 40
%.
Le coût d'une telle disposition a été estimé par les
services du ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie, à 80 millions de francs pour l'année 2002 et
à 350 millions de francs en « régime de
croisière ». Cela donnerait un « coup de
pouce » utile pour atteindre le nombre de 30.000 locations
intermédiaires privées.
CONCLUSION
En
conclusion,
votre rapporteur spécial souligne que le budget de
l'urbanisme et du logement pour 2002 est un budget de continuité, comme
celui de l'an dernier, qui profite encore d'une conjoncture économique
favorable.
Il regrette pourtant qu'il trahisse les signes d'un affaiblissement toujours
plus grand des aides à la pierre
, particulièrement pour le
prêt à taux zéro et ce qui est plus nouveau, pour la
réhabilitation du secteur locatif privé. A ce titre, il remarque
que l'abondement
in extremis
des crédits de l'Agence nationale
d'amélioration de l'habitat (ANAH) à l'Assemblée
nationale, pour 60 millions de francs en crédits de paiement et 200
millions de francs en autorisations de programme, ne permet pas une remise
à niveau des dotations.
Il déplore que
le gouvernement ait choisi, pour relancer le logement
social, d'employer des méthodes de sanctions à l'égard des
collectivités locales,
alors que la définition de la
politique du logement, excessivement centralisée, nécessite
plutôt une adaptation aux réalités du terrain et un
dialogue avec les élus locaux.
Il souligne
enfin que le budget ne prépare pas l'avenir
notamment
par une aide accrue à la construction privée et au statut du
bailleur privé et se focalise une fois encore sur les moyens de relancer
le seul logement social. Aucune mesure n'est prise en particulier pour
anticiper un retournement de conjoncture et la nécessité, sans
doute dès 2003, de trouver des moyens financiers pour les aides
personnelles au logement.
MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
I.
MODIFICATION DE CRÉDITS NON RECONDUCTIBLES
- 24.400 euros sur le titre IV, chapitre 44-30, article 20 « actions de
concertation, de formation et d'animation dans le secteur du logement et de
l'urbanisme » ;
- 46.000 euros en autorisations de programme et crédits de paiement (AP
et CP) sur le titre VI, chapitre 65-48, article 10 « construction et
amélioration de l'habitat locatif social ».
II. AUTRES MODIFICATIONS DE CRÉDITS
Par voie d'amendement adopté à l'Assemblée nationale, le
gouvernement a procédé à :
- un abondement de 9,15 millions d'euros en crédits de paiement et
30,49 millions d'euros en autorisations de programme sur le chapitre
65-48, article 90 (Agence nationale d'amélioration de l'habitat -
subventions d'investissement) ;
- une annulation de 9,15 millions d'euros en crédits de paiement et en
autorisations de programme sur le chapitre 65-50, article 90 (contribution de
l'Etat au fonds de garantie de l'accession sociale).
Suite au vote par l'Assemblée nationale en première
délibération d'un amendement de réduction de
crédits sur la dotation de l'Etat au fonds de garantie de l'accession
sociale (FGAS), le gouvernement a donc accepté, par un amendement en
seconde délibération, de revaloriser les dotations
d'investissement de l'ANAH. Il a cependant « gagé »
en crédits de paiement, cette revalorisation par une annulation de 9,15
millions d'euros des crédits au FGAS.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 17 octobre 2001, sous la
présidence
de
M. Alain, Lambert, président
, puis de
M. Aymeri de
Montesquiou, vice-président
, la commission a procédé,
sur le
rapport de M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial,
à l'examen des crédits de l'équipement, des transports et
du logement consacrés à l'urbanisme et au logement dans le projet
de loi de finances pour 2002.
A l'issue de la présentation, un large débat s'est ouvert.
Mme Françoise Henneron, rapporteur pour avis de la commission des
affaires sociales
, a fait observer qu'il était regrettable que les
familles modestes perdent le droit à des allocations logement lorsque
l'un de leurs enfants devenait étudiant.
M. François Trucy
s'est interrogé sur les créations
nettes d'emploi au ministère de l'équipement, des transports et
du logement, et notamment sur les emplois en faveur des inspecteurs du permis
de conduire. Par ailleurs, il a demandé si les crédits
destinés à la construction sociale étaient
consommés. M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial, a
répondu qu'il conviendrait d'interroger le ministre sur les objectifs
des créations d'emploi au ministère de l'équipement, des
transports et du logement, tout en soulignant que sur le terrain il constatait
que les directions départementales de l'équipement n'avaient pas
toujours les moyens d'accomplir leur mission de manière satisfaisante.
Il a confirmé que les crédits destinés à la
construction de logements sociaux n'étaient pas consommés
correctement depuis quatre ans en raison du décalage entre les chiffres
de construction annoncés et les réalisations.
M. Yvon Collin
a souligné que les opérations
programmées d'amélioration de l'habitat (OPAH) avaient des effets
très bénéfiques sur le parc immobilier locatif et
constituaient un élément fort d'engagement des
collectivités locales. M. Jacques Pelletier a alors
précisé que 32.800 logements avaient été
rénovés dans le cadre des OPAH en 2000 et qu'il redoutait que la
diminution des crédits de subvention de l'agence nationale pour
l'amélioration de l'habitat (ANAH) freine ces opérations.
En réponse à M. François Trucy, le rapporteur
spécial a expliqué que les collecteurs du 1 % logement avaient
récemment signé une convention avec l'Etat prévoyant
notamment leur contribution pour 3 milliards de francs par an à des
opérations de démolition-reconstruction. Il a estimé que
si ces opérations devaient être mieux financées, les
modalités de versement à l'Etat pour 2002 ne garantissaient en
rien l'affectation de ces sommes aux opérations de renouvellement urbain
et laissaient craindre une simple opération de « bouclage
» budgétaire. La convention signée le 11 octobre dernier va
en effet à l'encontre des termes de la convention du 3 août
1998 qui réduisait à 1,8 milliard de francs le
prélèvement en 2002 et supprimait tout prélèvement
sur le 1 % logement en 2003.
En réponse à
M. Marc Massion
, qui évoquait les
nombreuses demandes de logements sociaux non satisfaites et l'apport positif de
la loi solidarité renouvellement urbains, M. Jacques Pelletier a
indiqué qu'il n'était pas opposé à un
rééquilibrage du parc locatif social, mais que
l'expérience avait montré que la politique de relance de la
construction sociale n'était pas adaptée à la demande des
ménages et aux contraintes de financement des organismes HLM.
En réponse à
M. Aymeri de Montesquiou
, le rapporteur
spécial a confirmé que la stagnation du nombre de prêts
à taux zéro résultait de l'absence de revalorisation des
barèmes de ressources et non d'une désaffection pour ce
dispositif. S'agissant du risque d'aggraver le déséquilibre de la
construction sociale en démolissant des logements HLM, M. Jacques
Pelletier a expliqué que le gouvernement s'engageait dans des programmes
de démolition-construction, par ailleurs très coûteux, qui
devaient maintenir à niveau le nombre de logements.
M. Adrien Gouteyron
a dit craindre que l'aide expérimentale
associée au prêt à taux zéro soit le
préambule à une remise en cause complète du dispositif. Il
a ajouté que la tendance à diminuer les crédits de l'ANAH
était particulièrement inquiétante, notamment pour les
opérations programmées d'amélioration de l'habitat, pour
lesquelles de nombreuses communautés de communes se sont investies.
M. Jacques Pelletier a souscrit à ces observations.
A l'issue de ce débat, la commission a décidé
d'attendre l'audition de M. Jean-Claude Gayssot, ministre de
l'équipement, des transports et du logement, avant de se prononcer sur
les crédits de l'équipement, le président rappelant qu'il
serait procédé à un seul vote sur l'ensemble des
crédits du ministère.
Le mercredi 14 novembre 2001, la commission a décidé de proposer
au Sénat le rejet des crédits de l'équipement, des
transports et du logement pour 2002, le rapporteur spécial regrettant
une nouvelle fois qu'il soit procédé à un seul vote sur
l'ensemble des crédits, en raison de la nomenclature budgétaire.
La commission a confirmé son vote le jeudi 22 novembre après
avoir pris connaissance des modifications adoptées par
l'Assemblée nationale.
Réunie le
mercredi 17 octobre 2001
, sous la présidence de
M. Alain Lambert, président,
puis de
M. Aymeri
de Montesquiou, vice-président
, la commission des finances a
procédé à l'examen des crédits du ministère
de l'Equipement, des transports et du logement
(II. Urbanisme et
logement)
, sur le
rapport
de
M. Jacques Pelletier,
rapporteur spécial
.
Le
mercredi 14 novembre 2001
, la commission des finances a
décidé de proposer au Sénat
le rejet des crédits
de l'Equipement, des transports et du logement pour 2002.
La commission a confirmé son vote le jeudi 22 novembre, après
avoir pris connaissance des modifications adoptées par
l'Assemblée nationale.