ANNEXE
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RÉPONSE DE LA COUR DES COMPTES
AU QUESTIONNAIRE DE LA
COMMISSION
Equilibres financiers
QUESTION 1
En l'absence de la publication du décret créant le FOREC, l'ACOSS a procédé, pour l'exercice 2000, à la répartition des recettes affectées à ce fonds sur la base d'une lettre du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et de la ministre de l'emploi et de la solidarité au directeur de l'ACOSS en date du 22 février 2001 (cf. p. 212 du rapport).
Quelle appréciation la Cour porte-t-elle :
- d'une part, sur la régularité de cette procédure, notamment au regard des règles de la comptabilité publique ?
- d'autre part, sur les modalités de répartition desdites recettes entre les différents régimes bénéficiaires (et entre les différentes branches du régime général) ?
RÉPONSE 1
En l'absence de la publication du décret créant le FOREC, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie était fondé à demander à l'ACOSS d'encaisser les recettes affectées au FOREC par le LFSS et lui indiquer la répartition entre les différentes caisses.
Ces recettes ayant pour objet de compenser les exonérations de cotisations sociales dont le FOREC assure la prise en charge, la répartition entre les caisses est indépendante de l'organisme qui l'assure et découle directement de la répartition qui résulte de RACINE.
QUESTION 2
La Cour met en évidence les effets pervers, sur les comptes 1999 et 2000 de la CNAMTS (et, par contrecoup, sur ceux du régime général), de la convention comptable selon laquelle, en droits constatés, les règlements de l'année n qui excèdent le montant de la provision pour prestations correspondante sont comptabilisés comme des charges de l'année n+1 (cf. p. 114 du rapport).
a) La Cour a-t-elle observé des effets similaires pour les autres branches du régime général et les autres régimes obligatoires de sécurité sociale ?
b) D'une manière générale, quelle appréciation la Cour porte-t-elle sur le bien fondé de cette convention comptable, contraire au droit commun du plan comptable général ?
RÉPONSE 2
La Cour a repris les observations de la commission des comptes de la sécurité sociale de juin 2001 relative aux provisions 1999 de la CNAM.
Les conventions comptables ont été parfaitement respectées par la CNAM. Mais comme l'indique le rapport p. 142, la méthode d'évaluation des provisions utilisées par la CNAM est performante mais ne garantit pas l'entière fiabilité des résultats comptables.
Compte tenu de l'incidence de l'erreur de provision 1999 sur le résultat de l'année 2000, il est apparu logique à la Cour de procéder à cette correction de façon à avoir une représentation aussi fidèle que possible des comptes de l'année 2000.
Cette difficulté n'est pas propre à la branche maladie. Mais elle revêt une importance d'une toute autre ampleur que dans les autres branches, de nature à changer la signification du solde du régime général.
QUESTION 3
La Cour relève que, dans les comptes en droits constatés du régime général pour l'exercice 2000, la créance sur l'Etat au titre du FOREC n'a pas été provisionnée (cf. p. 43 du rapport).
a) La Cour pourrait-elle expliciter les conséquences de cette absence de provision sur les comptes des exercices 2001 et suivants ?
b) D'une manière générale, quelle appréciation la Cour porte-t-elle sur le recours, de plus en plus fréquent, aux versements et aux régularisations rétroactives (ex. : prélèvement sur les excédents 1999 de la branche famille au titre du fonds d'investissement sur les crèches, versement de la CNAVTS au fonds de réserve pour les retraites) qui tendent à modifier les comptes (clos) d'exercices antérieurs ? Selon la Cour, quelles règles devraient-elles être impérativement respectées en ce domaine, tant au regard de l'orthodoxie comptable que de l'exigence de la sincérité des comptes ?
RÉPONSE 3
La Cour a écrit dans son rapport que les caisses du régime général ont enregistré normalement la créance sur l'Etat au titre du FOREC en produits à recevoir. Les comptes ayant été approuvés par les conseils d'administration avant que la ministre annonce la décision du gouvernement de laisser cette créance à la charge des régimes sociaux, cette décision n'a pas pu faire l'objet d'une écriture de passage en créance irrécouvrable. Autrement dit, les caisses ne pouvaient pas passer de provisions sans anticiper sur la décision des pouvoirs publics. Elles ont appliqué le droit commun du plan comptable général.
Les organismes devront donc passer une écriture pour charge exceptionnelle en 2001 pour tenir compte des décisions intervenues après la clôture de l'exercice. Cette charge, si elle n'est pas neutralisée dans la présentation des comptes 2001, grèvera ceux-ci d'un montant de 10 MdF.
Dans son rapport, la Cour a voulu attirer l'attention du Parlement sur le caractère permanent de cette situation dès lors que le FOREC ne serait pas équilibré chaque année.
Ce problème est sans rapport avec les versements mentionnés au b) du point 3 du questionnaire qui sont sans effet sur les exercices comptables. Les décisions relatives au fonds d'investissement sur les crèches ou aux relations entre la CNAVTS et le F2R ont été prises en application de la LFSS et sont normalement enregistrées dans les comptes.
QUESTION 4
La Cour souligne que le déficit cumulé du régime général atteint, pour les années 1998 à 2000, 10,3 milliards en encaissements/décaissements et 12 milliards de francs en droits constatés (cf. p. 118 du rapport).
La Cour peut-elle évaluer le coût (charges de trésorerie, frais financiers) de cette dette pour le régime général (ACOSS), et pour chacune de ses branches, au 31 décembre 2000 ?
RÉPONSE 4
La Cour n'a pas procédé à une évaluation du coût de la dette cumulée depuis 1998, mais celle-ci pourrait être effectuée en appliquant la convention entre l'ACOSS et la caisse des dépôts qui fixe les conditions de rémunération des avances et des excédents de trésorerie 2002.
Assurance maladie
QUESTION 5
Le protocole d'accord sur la modernisation du service public hospitalier du 14 mars 2000 prévoyait le versement par le budget de l'Etat, chaque année pendant trois ans, d'une enveloppe de 2 milliards de francs destinée au remplacement des agents absents. Cependant, comme le relève la Cour (cf. p. 80 du rapport), le financement de cette opération n'a pas été prévu dans la loi de finances pour 2001 alors que les personnels sont en place dans les établissements. La Cour constate que « désormais, la somme ne peut être que dégagée en gestion ou inscrite dans le collectif de fin d'année. Dans cette dernière hypothèse, il sera trop tard pour la répartir en 2001 ». Peut-on, dans ces conditions, considérer d'ores et déjà que l'assurance maladie devra supporter une charge supplémentaire de 2 milliards de francs en 2001 et que l'ONDAM 2001 réalisé sera majoré d'autant ?
RÉPONSE 5
Comme l'indiquait la Cour dans son rapport, les 2 MdF ne pouvait qu'être inscrits en collectif en fin d'année ou dégagés en gestion. C'est la première solution qui pourrait prévaloir pour 2001 : la ministre a demandé l'inscription de cette somme en collectif de fin d'année.
Les ARH ont eu pour instruction de répartir ces 2 MdF en 2001. Les hôpitaux ont inscrit la recette en groupe 3, comme en 2000. En attendant de percevoir l'argent, ils utilisent des solutions de trésorerie avec beaucoup de difficultés dans certains cas.
Si la disposition est votée en LFR 2001, l'argent devra être reporté et versé en 2002, mars ou avril au mieux, compte tenu des procédures habituelles d'engagement. Dans ce cas, la somme relèvera bien de crédits d'Etat de 2001 et non de l'ONDAM réalisé.
QUESTION 6
La Cour recommande (cf. p. 85 du rapport) d'effectuer « un bilan de l'emploi du crédit de 2.000 MF accordé en 2000 sur le budget de l'Etat pour financer le remplacement des personnels hospitaliers absents : nombre d'agents embauchés, modalités de recrutement. ». La Cour est-elle en mesure de fournir ce bilan à la commission ?
RÉPONSE 6
L'exploitation des informations sur l'utilisation des 2 MdF, en provenance des ARH, n'est pas achevée. Donc le bilan n'est pas encore disponible.
QUESTION 7
La Cour relève (cf. p. 370 du rapport) que les recettes du fonds de financement de la protection complémentaire maladie « échappent très largement à l'examen du Parlement. (Celui-ci) est peu informé des ressources fiscales affectées à l'établissement public et ne vote annuellement que la subvention d'équilibre. » La Cour souligne à cet égard qu'il « conviendrait que soit mieux assurée la coordination entre l'examen de la loi de finances et celui de la loi de financement de la sécurité sociale ». Quelles propositions la Cour formule-t-elle pour assurer cette coordination et améliorer l'information du Parlement ?
RÉPONSE 7
Pour la première fois, le bleu « évaluation des voies et moyens » annexé au PLF 2002 comporte le résultat 2000, les évaluations 2001 et les estimations de recettes 2002 de la contribution des organismes de protection sociale complémentaire à la couverture universelle du risque maladie (c'est-à-dire le rendement de la cotisation de 1,75 % à la charge de ces organismes, soit 247 MF en 2000, 144 MF en 2001, 91 M€ en 2002, affectés au fonds CMU), répondant ainsi en partie à la préoccupation exprimée dans le rapport de la Cour sur la sécurité sociale.
Seul le net recouvré, déduction faite des abattements opérés par les organismes gérant des CMU complémentaires, est récapitulé dans ce document qui traduit donc imparfaitement la réalité. Une présentation du montant brut, éventuellement en complément du « net », traduirait mieux le poids du prélèvement opéré par cette contribution de 1,75 % et les moyens mobilisés.
Assurance vieillesse
QUESTION 8
La loi de financement pour 2000 avait inscrit dans l'objectif de dépenses de la branche vieillesse-veuvage un montant de 2,9 milliards de francs représentant un versement de la CNAVTS au fonds de réserve pour les retraites « à titre de provision pour acompte sur le versement de l'excédent de la branche » pour l'année 2000. Cette « mesure », découlant de l'application de l'article 16 de la loi, était chiffrée par le tableau de la page 30 de l'annexe c) du PLFSS 2000.
La Haute juridiction fait apparaître, après le rapport présenté à la commission des comptes de la sécurité sociale de juin 2001, un excédent 2000 de la CNAVTS, en comptabilité d'encaissement-décaissement, de 976 millions de francs, « avant tout versement au fonds de réserve pour les retraites au titre de 2000 » (cf. p. 55 du rapport de la Cour) et un excédent 2000 de la CNAVTS, en droits constatés, de 3,3 milliards de francs. Mais ce dernier résultat doit être relativisé, compte tenu de la compensation déficiente des allégements « trente-cinq heures ».
a) La Cour des comptes peut-elle indiquer si le versement de 2,9 milliards de francs lui apparaît désormais possible ? Quelle remarque appellerait un versement au fonds de réserve qui aurait pour conséquence un déficit de la branche vieillesse du régime général ?
b) Quelles observations en tire-t-elle sur la technique de la « provision pour acompte sur le versement de l'excédent de la branche » ?
c) Les recettes du fonds de réserve au 31 décembre 2000 étaient estimées en septembre 2000 à 23,28 milliards de francs (cf. annexe f) du PLFSS pour 2001) et se sont finalement établies à 20,74 milliards de francs (cf. p. 373 du rapport de la Cour). Si le versement de la CNAVTS au fonds de réserve ne se vérifie pas, la Cour peut-elle conclure que la non compensation des allégements de cotisations sociales par l'Etat ou le FOREC au titre de la réduction du temps de travail se traduit par une perte de recettes de 2,9 milliards de francs (ou tout au moins de 2 milliards de francs) pour le Fonds de réserve ?
RÉPONSE 8
S'agissant d'abonder un fonds à horizon de 20 ans, la technique de provision pour acompte ne paraît pas s'imposer. Le mieux serait de verser l'excédent qui apparaît (éventuellement) lors de la clôture annuelle des comptes et pas avant, ce qui aurait l'avantage supplémentaire de ne pas risquer de mettre le régime en déficit sous prétexte d'abonder le fonds de réserve.
La non compensation, par l'Etat, des allégements de cotisations sociales liées à la réduction du temps de travail ne peut être avancée comme une des causes de la réduction des versements de la CNAMTS au fonds de réserve, puisque les comptes de 2000 ont, en réalité, enregistré, comme une créance, cette compensation.
QUESTION 9
Les recettes de l'année du fonds de réserve apparaissent dans les prévisions de recettes votées en loi de financement de la sécurité sociale. Une telle inclusion présente plusieurs inconvénients :
- elle fausse la pertinence de « l'indicateur d'équilibre » de la loi de financement, consistant à rapprocher les prévisions de recettes par catégorie des objectifs de dépenses par branche ;
- elle pose le problème du respect des prévisions de recettes, compte tenu du caractère quelque peu aléatoire de certaines (exemple des licences UMTS) ;
- elle conduira à compter « deux fois » les recettes du fonds de réserve, celles-ci étant censées être versées à partir de 2020 aux régimes concernés. Elles apparaîtront ainsi, à partir de cette date, dans la catégorie « Transferts reçus ».
Quel pourrait être, pour la Cour, un « traitement comptable satisfaisant » du Fonds de réserve ?
RÉPONSE 9
Si l'on considère « la sécurité sociale » comme un ensemble (dont le fonds de réserve fait partie), les recettes externes du fonds de réserve sont bien, en termes de flux, des recettes de la sécurité sociale apparaissant dans ce qui serait un compte consolidé de cet ensemble. En revanche, les versements provenant d'excédents de régimes ou autres organismes de sécurité sociale sont de simples transferts internes. En termes de stock, le bilan doit comporter à l'actif la valeur des réserves accumulées. Dans cet esprit, un « traitement comptable satisfaisant » pourrait s'inspirer de ce qui est retenu dans les comptes de l'EDF pour les provisions relatives au démantèlement des centrales nucléaires où, là aussi, les sommes sont très importantes et à très long terme.
Famille
QUESTION 10
La Cour considère dans son rapport (cf. page 183 du rapport) que « la mise en place de transferts entre branche ou transitant par le FSV, s'ils rendent moins immédiatement visible la nature réelle des financements qu'ils apportent, permettent d'imputer à chacun les charges qui lui incombent ».
a) La Cour estime-t-elle que, compte tenu de ses propres critères, la majoration de pension de retraite accordée aux retraités ayant élevé trois enfants ou plus constitue une prestation relevant par nature de l'assurance vieillesse ou, à l'inverse, de la politique familiale, au titre par exemple « de la solidarité du monde du travail avec ceux qui font le choix de se consacrer pendant une période plus ou moins longue à l'éducation de leurs enfants » (cf. p. 183 du rapport) ?
b) La Cour estime-t-elle que, dans cette dernière hypothèse, les ressources de la branche famille ont fait l'objet, dans leur nature et leur montant, d'une réorientation et/ou d'un complément qui prennent la mesure d'un tel transfert ?
c) Au regard des réponses apportées aux questions ci-dessus et du contexte financier dans lequel cette mesure a été décidée, la Cour estime-t-elle que la mise à la charge de la branche famille de cette prestation a été guidée par le souci de rationalisation des charges et des ressources des différentes branches de la sécurité sociale ?
RÉPONSE 10
L'essentiel des ressources du fonds national des prestations familiales (FNPF) est consacré aux familles qui ont des enfants à charge.
Néanmoins le FNPF finance depuis 1972 les charges de l'assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) qui s'élèvent à 21 MdF, soit plus de 10 % des dépenses de la branche famille (hors AAH).
L'AVPF bénéficie aux 1,7 millions de familles ayant un enfant de moins de trois ans ou au moins trois enfants dans lesquelles un des parents n'a pas d'activité professionnelle ; une condition de ressources exclut de l'AVPF environ 15 % des familles de l'espèce. La CNAF est leur « employeur fictif » et verse à ce titre à la CNAVTS une cotisation calculée au taux normal du régime général et assise sur le SMIC. En contrepartie, les années cotisées sont validées pour la liquidation de la retraite ; les bénéficiaires - des femmes à plus de 98 % - atteignent ainsi plus facilement , ou plus tôt, le nombre des annuités requises pour bénéficier de la retraite à taux plein. L'AVPF fait ainsi partie des avantages familiaux à côté des majorations accordées aux retraités ayant élevé au moins trois enfants (40 MdF) et des bonifications (25 MdF en 1996) (deux annuités validées « gratuitement » - c'est-à-dire sans cotisation - par enfant élevé dans le régime général par exemple) ; mais ces deux dernières sont financées soit par les régimes de retraite eux-mêmes, soit par le FSV.
Ainsi alors que ces trois avantages (AVPF, majoration et bonifications) peuvent être classés de façon conjointe sous un objet commun (amélioration des retraites des familles ayant élevé des enfants), ils sont financés sur des fonds et avec des logiques différents.
La prise en charge progressive et partielle par la CNAF des majorations - à terme, 20 MdF - va modifier de façon sensible cet état de choses.
Si cette logique était poursuivie, il y aurait lieu d'accroître le transfert des charges en cause en imputant à la CNAF les bonifications. Mais la poursuite de cette logique supposerait de modifier les ressources de la branche.
La Cour n'a pas porté d'appréciation sur la logique ni de l'état actuel ni de celui qui résulte de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2000. Mais elle remarque que la réforme entreprise - et a fortiori celle, éventuelle, consistant à faire financer par la CNAF les bonifications - pose deux problèmes :
un problème d'équité dans la mesure où les ressources de la CNAF - prélevées sur tous de façon identique et consacrées à des prestations égales pour toutes les familles - sont désormais pour partie affectées à des avantages de retraite « inégaux » puisque le FSV ne prend en charge les majorations que pour le régime général, les régimes alignés et celui des exploitants agricoles, et que les bonifications varient selon les régimes ;
un problème de cohérence dans les arbitrages de la politique familiale, entre les familles qui ont des enfants à charge et celles, retraitées, ayant eu charge d'enfants. Le poids de l'AVPF et des majorations transférées du FSV mobilisent ainsi - dans une enveloppe budgétaire fortement contrainte - des marges croissantes de financement qui ne peuvent être affectées aux familles ayant des enfants à charge.
Le reclassement opéré par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 a pour effet de « neutraliser » l'excédent de la branche, ce qui interdit d'améliorer les prestations familiales proprement dites.
QUESTION 11
Examinant les aménagements successifs des modalités d'indexation de la base mensuelle d'allocations familiales, la Cour constate (cf. p. 50 du rapport) « qu'indépendamment de ces aménagements, la pratique a consisté à s'aligner sur les prix sans donner de contenu effectif aux références à la richesse nationale, aux salaires ou au SMIC évoquées dans la loi de 1978. Ainsi la base mensuelle des allocations familiales se situe-t-elle à l'indice 99,5 en francs constants, base 100 au 1er janvier 1979 ».
a) Dans quelle mesure la Cour estime-t-elle que la branche famille bénéficie des « fruits de la croissance » ?
b) Quel bilan la Cour tire-t-elle de l'incidence du dernier cycle de croissance qu'a connu la France depuis 1998, tant sur le plan des recettes que sur celui des prestations servies par la branche famille ?
RÉPONSE 11
La valeur des prestations familiales a évolué dans l'ensemble comme les prix. Les plafonds des prestations sous condition de ressources sont, depuis le plan Juppé, indexés sur les prix.
Il n'y a donc pas pour les familles allocataires de participation aux fruits de la croissance. Cette option - quasi constante sur les trente dernières années - est fondée sur le principe que les familles - dont le revenu primaire croît plus vite que les prix - sont progressivement mieux à même d'assumer directement la charge de leurs enfants. Elle se traduit donc par un appauvrissement relatif des familles dès lors que la valeur des prestations diminue en « équivalent salaire » et que le nombre de familles exclues par les plafonds de ressources s'accroît.
Cette indexation est un des facteurs qui contribuent à l'apparition régulière d'excédents à la CNAF. Ces excédents sont consacrés
à des améliorations du systèmes des prestations sur d'autres objets que la valeur des prestations : allongement de la durée de service des prestations, développement de l'effort fait en faveur des familles ayant de jeunes enfants, alignement des prestations familiales des DOM sur celles servies en métropole...
à des transferts (prise en charge des majorations de retraite jusque là portées par le FSV, prélèvement de 5 MdF prévu par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 au profit du fonds de réserve des retraites).
Au total, pour des recettes qui évoluent à peu près comme la richesse nationale, une partie seulement de ce potentiel est affecté aux familles ayant des enfants à charge.
QUESTION 12
La Cour constate (cf. p. 53 du rapport) que « la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 a abrogé l'article 22 de la loi du 25 juillet 1994 qui prévoyait le recul progressif de l'âge limite retenu pour l'octroi des prestations familiales et l'achèvement de ce processus au 31 décembre 1999. (...) Au total, du fait de ces allongements, les familles ayant de grands enfants ont vu leur situation s'améliorer de 0,9 MdF (0,1 Md€), avec un glissement de l'effort financier vers les plus âgés de ces enfants ».
a) L'article 22 de la loi de 1994 prévoyait le relèvement jusqu'à 21 ans du versement des prestations familiales. La Cour estime-t-elle significatif « le glissement de l'effort financier vers les plus âgés de ces enfants » ?
b) Comment la Cour interprète-t-elle ce glissement dans le contexte du débat de « l'accès des jeunes à l'autonomie » ?
RÉPONSE 12
L'article 22 de la loi du 25 juillet 1994 qui prévoit le relèvement de l'âge limite de service des prestations familiales ne fixe pas l'âge cible mais arrête les principes et la date d'achèvement de ce relèvement. C'est dans le schéma de financement annoncé par le Gouvernement au printemps 1994, au moment de la préparation de la loi, que l'âge de 22 ans avait été fixé.
La situation financière du régime général n'a pas permis d'avancer en ce sens en début de période. A partir de 1998 en revanche le relèvement s'est amorcé portant en trois ans l'âge limite à 20 ans, et 21 ans pour les aides au logement et le complément familial. Ce relèvement a entraîné une charge financière de 2,8 MdF. Il a été partiellement compensé par le recul d'une année de l'âge d'octroi des majorations des allocations familiales. L'effort net en faveur des familles ayant à leur charge des adolescents et des jeunes adultes est ainsi de 0,9 MdF.
Le Gouvernement a considéré que - indépendamment des éléments financiers qui l'ont amené à privilégier d'autres cibles de politique familiale et les transferts vers la branche vieillesse (prise en charge des majorations portées par le FSV, prélèvement au profit du fonds de réserve des retraites) - on ne saurait confirmer ou infirmer l'option d'un relèvement généralisé à 22 ans de l'âge limite de service des prestations familiales sans avoir mené une réflexion de fond sur la situation des jeunes adultes. Cette réflexion devrait porter tant sur les modalités et montants des différentes aides dont ils bénéficient (bourses universitaires, allocation de logement, subvention au régime maladie des étudiants, prestations familiales, quotient familial...) que sur les choix de doctrine concernant, pour une aide globale donnée, le profil général des aides (l'une des questions centrales évoquées porte sur le choix entre des aides qui tiennent compte des caractéristiques de la famille du jeune adulte et qui sont le cas échéant versées à la famille - c'est le cas pour les prestations familiales, les bourses et le quotient familial - et des aides versées directement aux jeunes adultes sans tenir compte de la taille et des revenus de leurs familles).
Régularisations des opérations
comptables
relatives au FOREC au titre de l'année 2000
38
(
*
)
L'article 5 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 contient la disposition suivante : « Sont annulées les créances sur le fonds créé à l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, enregistrées au 31 décembre 2000 par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale et par les régimes concernés, afférentes aux exonérations visées au 1° de l'article L. 131-9 du même code dans sa rédaction issue de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 précitée. En conséquence, les comptes de l'exercice 2000 des organismes de sécurité sociale concernés sont modifiés pour tenir compte de cette annulation ».
L'exposé des motifs explique l'effet de cette disposition et son origine : « Le II tire les conséquences de l'absence de mise en place de l'établissement public au cours de l'exercice 2000. La mesure proposée vise à valider dans la loi les opérations effectuées par l'ACOSS au titre du FOREC en 2000, et à cette fin à annuler la créance inscrite dans les comptes des régimes de sécurité sociale au titre des montants d'allégements de charges non compensés par les réaffectations de recettes fiscales reçues par le FOREC. Pour tenir compte de l'analyse de la Cour des comptes dans son rapport sur la sécurité sociale joint au présent projet de loi, il est proposé de procéder à cette annulation de créance dans les comptes de l'exercice 2000 ».
Le Gouvernement invoque donc l'analyse de la Cour. Mais la position de la Cour n'est pas exactement celle-là. Il convient de la rappeler, telle qu'elle a été exprimée dans le rapport sur la sécurité sociale et confirmée oralement au Sénat. Elle tient en cinq points :
1. Les comptes des organismes de sécurité sociale sont des comptes au sens des normes comptables et ils sont approuvés par les conseils d'administration de ces organismes ; en revanche, les « comptes » de l'ensemble du régime général, établis par la direction de la sécurité sociale, et présentés à la commission des comptes de la sécurité sociale, ne sont pas des comptes consolidés au sens habituel des normes comptables, même si le mot comptes a été retenu par le législateur et est usuel pour nommer ces agrégats, qui d'ailleurs se déduisent des comptes des organismes.
2. Dans les comptes des organismes pour 2000, la créance sur l'Etat au titre du FOREC a été correctement enregistrée comme une créance. Au 7 juin 2001, date de la commission des comptes où ont été présentés les comptes du régime général pour 2000, ces derniers ont correctement enregistré, eux aussi, le déficit du FOREC (13,3 MdF en encaissement-décaissement, 10,2 MdF en droits constatés) comme une créance sur l'Etat. Depuis cette date, en revanche, le Gouvernement ayant déclaré que l'Etat n'honorerait pas cette créance, cette somme devient une charge pour le régime général.
3. La Cour, dans son rapport, a montré comment le solde du régime général en droits constatés en 2000 évoluerait si cette somme était effectivement considérée comme une charge (ce que l'on a appris après le 7 juin, donc au moment de l'élaboration et de la publication du rapport de la Cour). Il serait diminué de 10,2 MdF, mais comme une erreur importante sur les provisions de la CNAMTS a été faite (4,9 MdF), la Cour a fait masse de ces deux corrections et a effectué l'opération suivante :
+ 4,4 Mdf |
+ 4,9 Mdf |
- 10,2 Mdf |
= - 0,9 Mdf |
solde du RG, en |
erreur de provision |
créance sur le FOREC |
|
droits constatés |
sur la CNAMTS |
devenue une charge |
pour aboutir à une évaluation d'une insuffisance de produits, qui retrace mieux la réalité économique de 2000.
4. La régularisation de cette transformation de la créance en charge sur les comptes des organismes doit se faire, puisqu'elle a eu lieu après la clôture des comptes de l'exercice 2000, suivant les règles comptables ordinaires et dans le respect du Code de commerce qui pose le principe d'intangibilité des écritures comptables, en 2001, en passant une écriture pour charge exceptionnelle. Etant donné la nature incertaine, au regard des normes comptables, des comptes globaux, il aurait pu être envisagé de modifier les comptes globaux du régime général pour 2000, présentés à la commission des comptes. Mais cette solution aurait présenté l'inconvénient de les rendre incohérents avec les comptes des organismes. Aussi la Cour considère-t-elle que la bonne solution consiste à passer toutes les opérations de régularisation la même année, donc en 2001 ou au plus tard dans le cadre de la clôture des comptes 2001. C'est la raison pour laquelle elle n'a pas recommandé une modification a posteriori des comptes présentés à la commission tant le 7 juin que le 20 septembre. On peut ajouter que les comptes globaux prévisionnels pour 2001 présentés à la commission des comptes du 20 septembre ont retenu cette solution. A cette date, les pouvoirs publics qui avaient connaissance de l'analyse de la Cour n'ont pas évoqué la question devant cette instance.
5. D'une façon générale, l'établissement des comptes des organismes en droits constatés, la mise en place progressive des conclusions de la Mission interministérielle de réforme de la comptabilité des organismes de sécurité sociale, le fait qu'à la suite de son examen, qui n'a certes pas été détaillé, la Cour n'ait pas émis de réserves sur les retraitements opérés par la direction de la sécurité sociale à partir des comptes des organismes pour aboutir aux comptes du régime général, tous ces éléments témoignent de l'amélioration de l'établissement des comptes. Le mouvement, très net, doit se poursuivre. Il convient en particulier d'appliquer sans tarder les dispositions du décret n° 2001-859 du 19 septembre 2001 relatif à l'organisation comptable des régimes et organismes de sécurité sociale et modifiant le code de la sécurité sociale.
En conclusion, les dispositions contenues dans l'article 5 du projet de loi ne peuvent être considérées comme reflétant la position de la Cour. Celle-ci estime que les écritures comptables visant à annuler la créance inscrite dans les comptes 2000 des régimes de sécurité sociale au titre des montants d'allégements de charges non compensés par les réaffectations de recettes reçues par le FOREC devraient être passées en 2001 sans modification des comptes adoptés par les conseils d'administration de l'ACOSS et des Caisses nationales.
* 38 Cette note, datée du 5 novembre 2001, est annexée à la lettre du 7 novembre 2001 adressée par M. François Logerot, Premier président de la Cour des comptes, à M. Nicolas About, président de la commission des Affaires sociales, en complément de l'audition du 16 octobre 2001 (Cf. travaux de la commission).