C. UN EFFORT À ACCENTUER
1. La priorité absolue : la réduction des stocks par le renforcement temporaire des effectifs des juridictions les plus chargées
Malgré les efforts entrepris, le stock d'affaires devant certains types de juridiction reste encore trop élevé. Ainsi, en 1999, les cours d'appel en matière civile disposaient d'un stock de 309.610 affaires, pour une capacité de traitement annuel de 199.770. Il en résulte que le délai de traitement s'élève à 18,1 mois.
Or, il convient de remarquer que les trois grandes cours (Paris, Aix-en-Provence et Versailles) traitent près de 40 % des affaires tandis que les huit plus grandes cours (les trois précédentes ainsi que Douai, Montpellier, Lyon et Bordeaux) ont en charge 60 % des affaires. La durée moyenne nationale est donc très dépendante de la situation de ces grandes juridictions.
Pourtant, la localisation des magistrats placés ne témoigne pas de cette préoccupation. Ainsi, La cour d'appel de Paris dispose, pour l'ensemble des juridictions de son ressort, de seulement 8 magistrats placés pour un effectif total de 870, soit 0,92 %. De même, 6 magistrats placés ont été affectés à la cour d'appel de Versailles, qui représentent 1,81 % des effectifs.
Votre rapporteur demande donc que les cours d'appel les plus encombrées bénéficient en priorité de l'affectation de magistrats placés.
Par ailleurs, il rappelle l'urgence de créer une cour d'appel à Nice afin de désengorger celle d'Aix-en-Provence.
Parce qu'elle n'est pas parvenue à juguler le flux des pourvois, la Cour de cassation a accumulé, depuis les années 1980, un nombre de plus en plus important d'affaires en attente de jugement. Or, ce stock de dossiers de pourvois civils non seulement allonge les durées de jugement, mais pèse également sur le fonctionnement de la juridiction.
En outre, l'accumulation des affaires à traiter entretient un climat défavorable à l'exercice d'un pouvoir juridictionnel souverain et d'une production jurisprudentielle aussi sûre qu'il serait souhaitable.
En effet, outre qu'il est préjudiciable aux parties, le retard à juger, donc à fixer la jurisprudence, est défavorable à la sécurité juridique en laissant se développer un contentieux né de l'ambiguïté dans l'interprétation de la loi.
Or, les mesures prises pour réduire le retard cumulé sont trop timides.
Le rapport précité de la Cour de cassation constate qu'entre 1960 et 2000, en matière civile, le nombre des affaires soumis à la Cour de cassation a augmenté de plus de 252 %. Entre ces deux dates, si l'effectif des magistrats en service judiciaire a progressé de 3.500 à 6.500, soit de 84 %, celui des membres de la Cour de cassation n'est passé que de 121 à 179, soit une hausse de seulement 47 %, proportionnellement inférieure de moitié à celle de l'ensemble du corps judiciaire, alors que la croissance du contentieux soumis à la Cour est directement proportionnelle à celle des affaires soumises aux juridictions du fond.
Le règlement des affaires en attente représente 16 mois d'activité des 133 magistrats de la Cour de cassation. La résorption totale de ce retard correspondrait donc à l'activité de 177 magistrats supplémentaires du siège pendant un an, de 35 magistrats pendant cinq ans, ou encore de 18 magistrats pendant dix ans.
En tenant compte du projet visant à accroître le nombre des conseillers référendaires par transformation des postes d'auditeurs à la Cour de cassation, ce sont 28 magistrats supplémentaires qui seraient à prévoir pendant une période provisoire de cinq ans pour rétablir l'équilibre des flux et ramener les délais de jugement à une durée inférieure à un an. Or, le projet de budget pour 2001 prévoit seulement la création de cinq postes de magistrat à la Cour de cassation.
Votre rapporteur regrette que les juridictions les plus chargées ne puissent pas bénéficier d'un renforcement des effectifs suffisant pour réduire rapidement le nombre des affaires en attente.
Il rappelle que l'article 40-1 de l'ordonnance statutaire permet la nomination en qualité de conseillers ou d'avocats généraux à la Cour de cassation en service extraordinaire, si elles justifient de vingt-cinq années au moins d'activité professionnelle, des personnes que leur compétence et leur activité qualifient particulièrement dans l'exercice de fonctions judiciaires à la Cour de cassation.
Jusqu'à présent, le nombre des conseillers et des avocats généraux en service extraordinaire ne pouvait respectivement excéder le vingtième de l'effectif des magistrats hors hiérarchie du siège de la Cour de cassation et le vingtième de l'effectif des magistrats hors hiérarchie du parquet de ladite cour.
Votre rapporteur se félicite que, lors de l'examen de la loi organique modifiant les règles applicables à la carrière des magistrats, le Sénat ait adopté une disposition permettant d'augmenter le nombre de conseillers en service extraordinaire. Désormais, pourra être recruté un nombre de conseillers équivalent au dixième de l'effectif des magistrats hors hiérarchie du siège de la Cour de cassation.
Par ailleurs, la loi organique n ° 95-64 du 19 janvier 1995 avait ouvert la possibilité, jusqu'au 31 décembre 1999, de recruter pour exercer en service extraordinaire les fonctions de conseiller de cour d'appel, les personnes âgées de 50 à 60 ans, titulaires d'un diplôme de niveau maîtrise, justifiant d'au moins quinze années d'activité professionnelle les qualifiant particulièrement pour exercer ces fonctions.
Votre rapporteur regrette que cette voie de recrutement n'ait pas connu le succès espéré, notamment en raison d'un certain corporatisme constaté au sein de la commission d'avancement. Il estime qu'elle mériterait d'être de nouveau ouverte et devrait s'accompagner d'une réforme de la composition de la commission d'avancement pour faciliter les recrutements.