III. LES AUTRES POLITIQUES : UN DÉVELOPPEMENT MAL MAÎTRISÉ

A. LES POLITIQUES INTERNES

Avec 6,2 % des crédits de paiement du projet de budget pour 2000, les crédits réservés aux politiques internes sont stables par rapport à l'exercice précédent.

Les politiques internes : aperçu général sur l'exécution et le projet de budget 2001

(en Meuros courants)

Exécution 1998

Exécution 1999

Budget 2000

Projet budget 2001

CE

CP

CE

CP

CE

CP

CE

CP

Total politiques internes

5.692

4.729

5.734

4.332

6.050

5.697

6.064

5.735

Marge sous plafond

311

652

(1)

208

dont Recherche

3.435

2.999

3.337

2.446

3.630

3.600

3.920

3.610

dont Réseaux

545

410

580

445

688

537

665

608

dont Autres

1.712

1.320

1.817

1.441

1.732

1.560

1.479

1.517

(1) Pour le budget 2000, la présentation est celle proposée par la Commission dans l'avant-projet de budget 2001 qui modifie le périmètre du budget effectivement voté en 2000. Le budget 2000 effectivement voté s'élevait à 6.026 millions d'euros en CE et 5.674 millions d'euros en CP.

Ces inscriptions traduisent un choix de maintenir le volume de l'intervention européenne en ce domaine, liberté étant laissée par le Conseil au Parlement d'augmenter les crédits (v. supra ).

Les politiques internes : Les perspectives financières de 2000 à 2006

(en Meuros 1999)

Engagements

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Rubrique 3

5.930

6.040

6.150

6.260

6.370

6.480

6.600

Cette évolution au terme de laquelle le plafond de ces crédits progresse de 11,3 % entre 2000 et 2006 est-elle réaliste ?

Une réponse affirmative supposerait que les politiques internes aient démontré leur efficacité dans le passé et qu'elles soient entièrement légitimes du point de vue du principe de subsidiarité qui s'impose tout particulièrement en la matière.

Elle supposerait aussi que les crédits provisionnés correspondent réellement à la communautarisation ou au renforcement des coopérations européennes dans les divers domaines d'intervention publique où de telles évolutions sont attendues et souhaitables.

Or, ces conditions ne sont globalement pas réunies.

Le tableau ci-après récapitule les différentes politiques financées à partir de la rubrique 3 du budget européen.

Les politiques internes : exécution et projet de budget 2001

(En Meuros courants)

Exécution 1998

Exécution 1999

Budget 2000

Projet de budget 2001

CE

CP

CE

CP

CE

CP

CE

CP

Actions agricoles

158

138

148

139

53

82

53

106

Actions régionales

17

21

17

18

15

19

15

15

Transport

19

19

21

16

21

19

21

18

Pêche

56

31

77

54

66

56

61

56

Education, formation

400

277

442

348

482

393

480

406

Culture et audiovisuel

111

97

96

87

113

104

95

94

Information

114

103

97

90

104

97

86

96

Social

148

135

122

92

145

126

135

128

Energie

33

29

39

27

37

35

34

33

Contrôle nucléaire

15

14

15

14

17

15

18

17

Environnement

140

121

181

120

158

138

111

141

Consommateurs

20

19

22

19

23

20

23

20

Reconstruction

3

3

2

2

4

41

1

Marché intérieur

150

135

132

123

146

153

146

152

Industrie

84

42

90

82

pm

87

pm

pm

Emploi et innovation

181

89

196

116

214

108

70

108

Statistiques

30

25

32

27

31

30

33

31

Réseaux

545

410

580

445

688

537

665

608

Justice

28

12

81

63

99

69

94

90

Lutte contre la fraude

5

8

5

4

6

5

5

5

Recherche

3.435

2.999

3.337

2.446

3.630

3.600

3.920

3.610

Total

5.692

4.729

5.734

4.332

6.050

5.697

6.064

5.735

P.F.

6.003

6.386

6.031

6.272

Marge sous les PF

46

652

208

La grande majorité des crédits est concentrée sur la recherche et les réseaux transeuropéens.

Les crédits de recherche concentrent 62,9 % des dotations globales.

Malgré l'affichage d'un resserrement du champ d'intervention européen dans le Ve programme commun de recherche et développement (1999-2002), il reste à craindre que les 98 milliards de francs dont ce programme bénéficie ne soient pas entièrement mis au service d'une politique européenne de recherche.

A ce propos, votre rapporteur ne peut que réitérer ses observations qui sont autant de préoccupations sur :

la légitimité du processus de définition de la stratégie européenne en matière de recherche avec, en particulier, la quasi-absence à ce stade initial des grands opérateurs de recherche que sont les entreprises ;

le manque d'évaluation de l'efficacité des dépenses, même si le quatrième programme-cadre contenait des dispositions visant à corriger cette lacune ;

la légitimité même de nombreuses interventions communautaires au regard du principe de subsidiarité lorsque lesdites interventions ne s'accompagnent pas d'actions concertées entre Etats-membres.

Il faut rappeler qu'une politique communautaire en matière de recherche ne se conçoit qu'en tant qu'elle est susceptible d'apporter une plus-value par rapport aux résultats que peuvent atteindre les politiques nationales.

Il faut aussi souligner que le vrai apport de la Communauté dans ce domaine serait de promouvoir des projets exceptionnels articulés autour de la participation commune de centres de recherche des pays membres.

Il ne semble pas que cette conception anime suffisamment les instances européennes, si bien que se dégage trop souvent l'impression déplaisante de la constitution d'une "tirelire de la recherche" où les plus habiles viendraient puiser au gré de leurs besoins. Le nombre excessif des projets en témoigne. Certains ont pu évoquer à ce propos les "dérives cohésives" de la "politique de recherche" des Communautés européennes faisant observer que, la règle d'adoption des objectifs de recherche faisant place à l'unanimité, une correction systématique était entreprise par la Commission au profit des pays les moins compétitifs. On soulignera que les moyens européens consacrés à la recherche n'ont pas a priori à être orientés en fonction d'objectifs de convergence régionale qui relèvent d'autres instruments et, tout particulièrement, des crédits d'actions structurelles.

Les crédits réservés aux réseaux transeuropéens (608 millions d'euros) s'accroissent de 13,2 % en crédits de paiement, mais diminue de 3,3 % en crédits d'engagement.

Cette situation doit être dénoncée car les programmes de réseaux transeuropéens soutiennent dans l'ensemble des projets réellement européens, pourvoyeurs d'infrastructures favorables à la croissance et à l'emploi.

Il faut toutefois s'attacher à éviter en la matière au moins deux écueils :

- l'un aboutissant à distraire une part excessive des moyens des réalisations opérationnelles au profit d'études préparatoires trop longues dont les prolongements seraient paralysés par des obstacles financiers non anticipés ;

- l'autre consistant à aider des projets d'infrastructure n'apportant un plus qu'à certains Etats au détriment des autres, et se soldant donc par de simples détournements de trafic.

Dans le premier cas, un suivi attentif des travaux préparatoires s'impose et l'exigence d'une programmation financière en amont des projets doit être réaffirmée. Pour résoudre le second type de difficultés, une étude d'impact européenne des projets doit permettre de vérifier toujours que chacun d'entre eux offre l'opportunité d'un gain d'efficience réellement européen. Les évaluations effectuées doivent être systématiques et portées à la connaissance de l'ensemble des Etats membres.

Les moyens consacrés aux autres politiques internes sont constamment rognés. Réduits de 10,5 % en crédits de paiement et de 16,6 % en crédits d'engagement l'an dernier, ils diminueraient de 2,7 % et 14,6 % pour chacune de ces catégories de crédits respectivement en 2001 . Cette diminution devrait conduire à arbitrer entre des moyens globalement modestes (1,4 milliard d'euros) pour centrer l'action communautaire sur des politiques au service d'une Europe-puissance.

Le tableau ci-dessus démontre qu'une telle démarche n'est pas suivie et qu'une logique de dispersion prévaut.

Les rubriques des politiques internes sont un indicateur avancé de l'incroyable saupoudrage des moyens distribués qui s'éclatent entre un trop grand nombre d'interventions.

Celles-ci s'étaient d'ailleurs souvent développées sans aucune base légale autre que l'inscription de crédits budgétaires, manifestation d'une sorte d'existentialisme de l'intervention européenne attirant sur elle une certaine défiance, voire quelques soupçons.

Ces errements doivent être corrigés et il faut pour cela simplifier l'intervention européenne en la centrant sur des projets où la dépense publique peut se justifier et où la dépense européenne s'impose comme répondant au principe de subsidiarité.

L'accent mis sur l'initiative pour l'emploi dans le prolongement du sommet de Luxembourg avec 450 millions d'euros prévus pour la période 1998-2000 (2.970 millions de francs) avait manifestement contrevenu à ces principes. Le sous-emploi observé en Europe n'est en effet pas un problème européen, sauf à considérer qu'il serait le fruit de la construction européenne, mais bien l'addition de problèmes nationaux que les Etats doivent s'attacher à résoudre. La création d'un guichet européen voué à réduire le sous-emploi revient à mutualiser des politiques qui doivent être adaptées aux réalités économiques et sociales nationales sans aucune visibilité sur l'utilisation qui sera faite des moyens. Les sommes en jeu étaient certes dérisoires, raison supplémentaire pour s'opposer à cette initiative, mais cette multiplication des dépenses publiques européennes inadaptées jette le discrédit sur un budget européen dont la contribution à la construction d'une Europe-puissance doit être le "leitmotiv".

Il est d'ailleurs frappant que la Commission n'ait pas proposé de renouveler cette initiative.

Il est à espérer que le Conseil et le Parlement se range à ce début de sagesse. Il est très inquiétant de lire dans le jaune annexé au projet de loi de finances pour 2001 et retraçant les relations financières avec l'Union européenne que la préoccupation du Conseil dans son calibrage des crédits des politiques internes obéit à la préoccupation de " conserver une marge de manoeuvre suffisante pour faire face aux augmentations potentielles que pourraient décider le Parlement, statuant en dernier ressort sur ces dépenses, pour les programmes Life et Initiative Emploi, dont les crédits ont été fortement réduits par la Commission dans l'avant projet de budget 2001, et plus généralement aux besoins qui pourraient découler des programmes en cours d'examen. "

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