VIII. LA VEILLE DU SÉNAT SUR L'APPLICATION DES LOIS
Comme
à l'accoutumée, les
commissions du Sénat
ont
régulièrement
opéré un
contrôle du
suivi réglementaire
.
L'un des meilleurs exemples en est fourni par le long tableau synoptique de
4 pages relatif à la veille sanitaire, reproduit dans un
Avis
de la commission des affaires sociales
15(
*
)
.
A la
commission des affaires sociales
également, M. Jean
Chérioux, rapporteur pour avis pour les crédits consacrés
à la solidarité dans le projet de loi de finances pour 2001, a pu
obtenir, par l'entremise de ses questionnaires budgétaires, de
très riches informations sur l'évaluation de l'application de
nombreuses dispositions législatives.
Mais il faut aussi mentionner le rôle éminent joué, dans ce
domaine, par la commission des affaires économiques (cf. annexe
n° 4).
Par ailleurs, les sénateurs ont posé de très nombreuses
questions écrites
relatives à l'application des lois, dont
on ne donnera que quelques exemples.
M. Serge Mathieu
, en se fondant sur les statistiques du 51
e
rapport (année parlementaire 1998-1999), a posé la
question de
principe
.
Il a reçu une réponse, au terme d'un trop long délai de 6
mois, au contenu, force est-il de le constater, bien peu novateur par rapport
à la doctrine traditionnelle du gouvernement.
Retard dans la parution des textes d'application des
lois
21243. - 16 décembre 1999. - M. Serge Mathieu appelle
l'attention de M. le Premier ministre sur les dysfonctionnements
constatés par le Sénat, dans l'application des lois au cours des
deux dernières années parlementaires. Si 47 lois ont
été adoptées en 1998-1999, dont quinze d'application
directe, il y a lieu de considérer l'application de 32 lois qui
exigeraient explicitement 392 mesures d'ordre réglementaire. Il a
été constaté que moins d'un cinquième d'entre elles
a été pris. Le suivi réglementaire n'a porté que
sur 19 % des textes requis. Ces constatations accablantes illustrent
l'étendue des difficultés rencontrées pour assurer le
plein respect de ses instructions, à caractère permanent, qui
prescrivent la sortie des textes d'application des lois dans un délai
maximum de six mois à compter de la publication de ces lois. Il lui
demande de lui préciser les perspectives de son action afin d'assurer
l'établissement d'un Etat de droit, notamment quant au respect du
Parlement. La Haute Assemblée n'a pas hésité à
évoquer l' " inertie pure et simple " (BIRS
n° 739, 15 novembre 1999).
Réponse
. - L'honorable parlementaire attire l'attention de M. le
Premier ministre sur l'application des lois au cours des deux dernières
années parlementaires. Le Gouvernement est parfaitement conscient de la
nécessité que la publication des décrets
nécessaires à l'application d'une loi suive de près la
promulgation de celle-ci. Des instructions à caractère permanent
qui prévoient que les décrets d'application doivent intervenir
dans un délai maximum de six mois à compter de la publication de
la loi ont ainsi été à plusieurs reprises envoyées
aux membres de l'actuel Gouvernement. Le secrétariat
général du Gouvernement effectue, pour sa part, un travail de
suivi assorti, en tant que de besoin, de réunions
interministérielles permettant d'identifier les difficultés
auxquelles peut se heurter la préparation de certains des textes en
attente. L'installation prochaine de l'intranet gouvernemental permettra
d'améliorer ce suivi et de mieux maîtriser le rythme de production
des textes réglementaires, tout en apportant aux ministères
divers outils susceptibles de les aider dans cette tâche.
(Journal Officiel, Sénat, 15 juin 2000).
Trois autres sénateurs sont intervenus concurremment pour
s'inquiéter des retards d'application de la loi relative au droit et
à la résolution amiable des conflits.
Application de la loi relative au droit et à la
résolution amiable des conflits
23002. - 24 février 2000. - M. Jean Boyer attire l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'absence de décrets d'application de la loi n° 98-1163 du 18 décembre 1998 relative à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits. Plus d'un an étant passé depuis la publication de cette loi et compte tenu des attentes suscitées par celle-ci, il lui demande dans quels délais les textes d'application seront pris afin que cette loi puisse être concrètement mise en oeuvre.
Publication des décrets d'application de la loi
n° 98-1163 du 18 décembre 1998 tendant à favoriser
l'accès au droit et aide financière de l'Etat dans les
procédures de règlement amiable des conflits
23746. - 23 mars 2000. - M. Alfred Foy appelle l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conditions d'accès des justiciables disposant de faibles ressources aux procédures de règlement amiable des conflits. Plus d'un an après la promulgation de la loi n° 98-1163 du 18 décembre 1998 tendant à favoriser l'accès au droit, les décrets d'application relatifs à l'aide financière de l'Etat n'ont toujours pas été publiés. En conséquence, les plus démunis ne peuvent avoir recours financièrement à l'assistance d'un avocat pour ce type de résolution de litiges. Il la remercie de bien vouloir lui fournir les explications d'un tel retard et lui demande de prendre les mesures nécessaires afin que les dispositions réglementaires qui s'imposent soient adoptées dans les meilleurs délais.
Publication des décrets d'application portant sur
l'aide de l'Etat dans les procédures de résolution amiable des
conflits
23811. -
23 mars 2000. - La loi n° 98-1163 du 18 décembre 1998 relative
à l'accès au droit et à la résolution amiable des
conflits a pour objectif d'ouvrir à tous les portes du droit, en
favorisant parallèlement une nouvelle approche de la justice par
l'incitation des professionnels et des justiciables au règlement amiable
des conflits. Pour promouvoir cette politique, la loi a prévu
d'élargir le champ d'application de l'aide juridictionnelle aux
procédures de conciliation, de médiation ou de transaction.
Toutefois, les décrets d'application portant sur l'aide
financière de l'Etat dans les procédures de résolution
amiable des conflits n'ont, à ce jour, pas encore été
publiés. M. Jacques Legendre demande en conséquence à
Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, de bien vouloir lui
préciser l'échéance de publication de ces textes.
Réponse
. - Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait
connaître à l'honorable parlementaire que l'élaboration des
décrets d'application de la loi n° 98-1163 du 18
décembre 1998 relative à l'accès au droit et à la
résolution amiable des conflits est en voie d'achèvement.
S'agissant du volet relatif à l'accès au droit, un premier texte
a été publié au Journal Officiel du 6 janvier 2000 pour
fixer la rétribution des personnes assurant des consultations juridiques
financées par le conseil départemental de l'accès au
droit. Un deuxième décret n° 2000-344 du 19 avril 2000,
publié au Journal Officiel du 21 avril 2000, modifie la composition du
Conseil national de l'aide juridique et du conseil d'administration des
conseils départementaux de l'accès au droit.
Cette publication sera accompagnée dans les toutes prochaines semaines
de la diffusion d'un guide pratique du conseil départemental de
l'accès au droit élaboré par les services de la
chancellerie. Ce document sera un véritable outil de communication et de
développement de la politique partenariale de mise en oeuvre des
conseils. S'agissant des mesures réglementaires d'application des
dispositions de la loi du 18 décembre 1998 consacrées à
l'aide juridictionnelle, les difficultés techniques
générées notamment par la prise en compte de la
transaction avant introduction de l'instance ont nécessité la
constitution d'un groupe de travail au sein de la chancellerie, dont les
travaux seront soumis à la plus large consultation dans des
délais très rapprochés.
(Journal Officiel, Sénat, 3 août 2000).
Il arrive également qu'un rapporteur soit mandaté, par sa
commission, pour rencontrer un membre du gouvernement, afin d'évoquer
les cas de carence du suivi réglementaire. Tel a bien été
le cas, le 27 octobre 1999, de M. Claude Huriet, à la
commission des affaires sociales.
Commission des affaires sociales : compte rendu de
l'entretien du 9 mai 2000
(M. Claude Huriet et Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés)
M.
Claude Huriet, rapporteur, a indiqué qu'il avait particulièrement
mis l'accent sur les textes suivants :
- la loi dite " bioéthique " du 29 juillet 1994, qui
devait être révisée dans un délai de cinq ans, soit
avant la fin du mois de juillet 1999, et pour laquelle le Gouvernement n'a pas
encore déposé de projet de révision ;
- les dispositions de la loi du 28 mai 1996 concernant les
thérapies génique et cellulaire, qui n'ont encore reçu
aucun texte d'application ;
- les nombreuses règles de sécurité sanitaire
contenues dans la loi du 1er juillet 1998, qui n'ont pas encore
reçu de mesures d'application ;
- les trois décrets d'application de la loi du 9 juin 1999 visant
à garantir le droit d'accès aux soins palliatifs, qui n'ont pas
plus été publiés.
M. Claude Huriet, rapporteur, a indiqué que Mme Dominique Gillot avait
affirmé que ses services travaillaient à la préparation du
projet de loi de révision de la loi bioéthique : un
arbitrage devrait ainsi pouvoir être rendu au mois de juin par le Premier
ministre, le texte du projet de loi étant ainsi prêt pour
l'automne. En ce qui concerne les délais d'examen du projet de loi par
le Parlement, Mme Dominique Gillot n'a toutefois pas caché qu'il
pourrait lui être difficile d'obtenir l'inscription à l'ordre du
jour, pour l'automne, à la fois du projet de loi de modernisation
sanitaire et du projet de loi relatif aux questions bioéthique.
Concernant la législation relative à la sécurité
sanitaire, Mme Dominique Gillot s'est engagée à faire
très rapidement le point sur la question, puis à apporter
à la commission une réponse écrite. Elle a
manifesté un réel souci d'accélérer la publication
de ces textes devant poser ou renforcer des règles de
sécurité sanitaire.
En ce qui concerne la loi sur les soins palliatifs, elle a indiqué que
le décret sur l'activité des bénévoles était
en cours d'examen par le Conseil d'Etat et qu'un projet de décret sur la
participation des professionnels de santé libéraux aux soins
palliatifs faisait l'objet d'une étude par la mission juridique du
ministère. Evoquant le décret sur le congé
d'accompagnement, prévu par la loi, elle a estimé qu'il ne
semblait pas nécessaire à l'application du texte, et que l'on
pouvait ainsi considérer que la loi était, sur ce point,
applicable depuis sa promulgation.
On notera, également, l'organisation, par la commission des Affaires
sociales, le 25 mai 2000,
d'auditions publiques
sur la
sécurité sanitaire : les associations de consommateurs ont
insisté sur le défaut de publication de décrets.
Mais l'action du Sénat peut aussi prendre la forme de commentaires,
à l'occasion d'une
conférence de presse
. Le rapporteur de
la commission des Affaires économiques sur le projet de loi relatif
à la chasse, Mme Anne Heinis, a ainsi alerté l'opinion, le 16 mai
2000, sur la carence du gouvernement à prendre les décrets
d'application d'une loi antérieure, datant de 1998, qui, s'ils avaient
satisfait aux demandes de la Commission européenne, auraient
évité la reprise d'un débat très sensible.