ANNEXE N° 1 :
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AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DÉFENSE
Mercredi 20 octobre 2010
La commission entend une communication de M. Josselin de Rohan, président, sur le contrôle de la mise en application des lois au cours de l'année parlementaire 2009-2010.
M. Josselin de Rohan , président - Mes chers collègues, l'essentiel de l'activité législative de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées consiste en l'examen de projets de loi autorisant la ratification ou l'approbation de traités ou accords internationaux. Au cours de l'année parlementaire 2009-2010, le Sénat a adopté en séance plénière 37 accords internationaux relevant de la compétence de la commission. Certains de ces accords n'ont pas encore été examinés par l'Assemblée nationale et les lois n'ont donc pas toutes été promulguées. Dans tous les cas, ces conventions et accords ne sont pas pris en compte dans le contrôle de la mise en application des lois.
A côté des conventions et accords, la commission a examiné, en tant que commission saisie au fond, trois projets de loi intéressant des questions de défense. Il s'agit de :
- la loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français ;
- la loi n° 2010-819 du 20 juillet 2010 tendant à l'élimination des armes à sous-munitions ;
- la loi n° 2010-873 du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'Etat .
Sur le premier texte, un peu plus de six mois après sa promulgation, toutes les mesures d'application prévues ont été prises, soit un taux de mise en application de 100 %. La commission se félicite de ce résultat.
Pour les deux autres textes, au 30 septembre 2010, aucun des décrets d'application qu'appellent ces deux lois n'avait été pris. Cependant, ayant été promulguées il y a deux mois, il est encore trop tôt pour en tirer un bilan positif ou négatif.
Concernant les lois antérieures, je vous rappelle que, lors de l'année parlementaire précédente, notre commission avait été saisie au fond de deux projets de loi. Un peu plus d'un an après leur promulgation, la loi n° 2009-971 du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale et la loi n° 2009-928 du 29 juillet 2009 relative à la programmation militaire pour les années 2009 à 2014 et portant diverses dispositions concernant la défense sont applicables respectivement à 80 % et 67 %. La commission se félicite de ce résultat, tout en encourageant le Gouvernement à prendre les mesures manquantes.
Après ces appréciations positives, je voudrais soulever ici un point qui me paraît problématique. En effet, bien que les projets de loi autorisant la ratification de conventions ou traités ne donnent pas lieu à des mesures d'application, la commission relève que des améliorations significatives pourraient être apportées tant sur le dépôt des projets de loi, qui portent souvent sur des accords anciens de plusieurs années, que sur leur date de publication au Journal officiel.
J'en veux pour preuve le projet de loi autorisant la ratification de la convention entre la République française et le Royaume des Pays-Bas, relative à l'assistance mutuelle et à la coopération entre leurs administrations douanières, en vue d'appliquer correctement la législation douanière, de prévenir, de rechercher, de constater et de réprimer les infractions douanières dans la région des Caraïbes, et notamment sur l'île de Saint-Martin. Cet accord a été signé le 11 janvier 2002 mais n'a été déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale que le 7 juillet 2010. D'après les informations recueillies auprès du ministère des affaires étrangères, le nouveau dispositif juridique devait prendre effet le 10 octobre 2010 au plus tard. Le Gouvernement a inscrit l'examen de ce projet de loi en session extraordinaire. Après l'Assemblée nationale, le Sénat a adopté ce projet de loi le 30 septembre 2010 alors que, grâce aux compétences de notre collègue Marcel-Pierre Cléach, il avait été rapporté devant notre commission la veille. Or, au 10 octobre, ce texte n'avait pas encore été officiellement publié, rendant ainsi l'entrée en vigueur problématique à cette date. La loi en question a finalement été promulguée le 12 octobre 2010, et publiée au Journal officiel du 13 octobre 2010.
La commission souhaite donc une meilleure vigilance du Gouvernement sur ce point. Il n'est pas normal que des conventions signées par le Gouvernement restent dans les tiroirs pendant des années, dans l'attente que ces retards se transforment en urgence absolue et qu'on demande au Parlement de traiter la question dans la plus grande précipitation.
Je compte saisir le ministre des affaires étrangères et européennes de cette situation que nous pouvons sans doute améliorer.
Mes chers collègues, je vous invite à vous référer à la note qui vous a été distribuée pour plus de renseignements sur ce contrôle de la mise en application des lois. Si nous ne pouvons que nous féliciter de la prise de ces mesures d'application, la commission restera tout de même très attentive et veillera à ce que les mesures prévues soient effectivement prises.
M. André Vantomme - Concernant la loi relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français , le taux de mise en application est certes de 100 %, mais il y a tout de même eu des problèmes entre la volonté politique exprimée dans cette commission et la déclinaison qui en a été faite au niveau des décrets d'application, notamment dans l'établissement de la liste des maladies reconnues et ouvrant droit à indemnisation.
M. Josselin de Rohan , président - Effectivement, pour certaines maladies, comme le lymphome, nous avions demandé qu'elles soient inscrites sur la liste, mais il y a eu une interprétation plus restrictive. J'ai saisi le ministère à ce propos, il m'a été répondu qu'à ce stade des analyses complémentaires devaient être effectuées afin de vérifier le lien entre ces maladies et les essais nucléaires français.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam - Une conférence sur l'élimination des armes à sous-munitions est prévue prochainement à Vientiane, au Laos. Il serait gênant que toutes les mesures de mise en application de la loi relative à l'interdiction des armes à sous-munitions ne soient pas publiées d'ici là. Serait-il possible d'attirer l'attention du gouvernement sur ce point ?
M. Josselin de Rohan , président - Absolument.
AFFAIRES SOCIALES
Jeudi 28 octobre 2010
Puis la commission entend une communication de Mme la présidente sur la mise en application des lois.
Mme Muguette Dini , présidente . - Conformément aux instructions du Bureau du Sénat, les commissions permanentes présentent, chaque année, un bilan de la mise en application des lois intervenues dans leur domaine de compétences. La synthèse de leurs travaux fait l'objet d'une communication du Président du Sénat en Conférence des présidents et est annexée aux comptes rendus des commissions.
Permettez-moi de rappeler combien cet exercice est fondamental, d'abord pour mesurer le degré de difficulté pratique d'application de la législation que nous votons mais, plus encore, pour savoir si les lois promulguées cette année et au cours des précédentes sessions s'appliquent réellement. Cela devrait aller de soi, mais qu'en est-il exactement ?
Pour la période allant du 1 er octobre 2009 au 30 septembre 2010, c'est-à-dire, pour nous, entre la loi HPST et la loi sur les retraites, le bilan de l'année parlementaire écoulée s'établit ainsi : cinquante-neuf lois adoptées par le Parlement, contre trente-huit l'an passé, notre sentiment d'une activité législative intense était donc bien fondé. Sur ces cinquante-neuf lois, cinq ont été examinées, au fond, par notre commission, c'est-à-dire exactement autant que l'an dernier : la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, la loi créant une allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie, la loi visant à garantir de justes conditions de rémunération aux salariés concernés par une procédure de reclassement, la loi créant les maisons d'assistants maternels et la loi tendant à suspendre la commercialisation des biberons produits à base de bisphénol A.
Pour autant, on ne peut considérer que l'année parlementaire écoulée ait été très paisible, surtout si on ajoute à notre plan de charge les huit rapports que nous publions au titre de notre contribution à l'examen de la loi de finances ; le rapport de mission consacré à la réforme de la couverture assurance maladie par l'administration Obama ; les cinq textes sur lesquels nous étions saisis pour avis - jeux d'argent et de hasard en ligne, récidive criminelle, contrôle de l'action du Gouvernement et évaluation des politiques publiques, dialogue social dans la fonction publique et violences faites au femmes - ; les trois propositions de loi étudiées à l'initiative des groupes : adaptation de la directive services, fiscalisation des indemnités journalières et maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).
Enfin, n'oublions pas que la commission a conduit, seule, une mission d'information sur le mal-être au travail, qu'elle a assuré la commission d'enquête sur la grippe H1N1, qu'elle a publié cette année neuf rapports d'information, dont trois rédigés au nom de la Mecss, parmi lesquels celui établi sur les retraites, et qu'elle a, par ailleurs, organisé un cycle de conférences préparatoire à la prochaine révision des lois de bioéthique.
Après ce petit moment d'autosatisfaction que, j'espère, vous me pardonnerez, j'en viens à la mise en application des lois proprement dite.
Première observation, un peu décourageante car les années précédentes étaient plus favorables : si, sur cinq lois, deux sont déjà pleinement applicables - « reclassement » et « bisphénol A » - c'est uniquement parce qu'elles étaient d'application directe. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 n'est applicable qu'à 22 %, soit dix textes sur quarante-cinq, et les deux dernières n'ont encore reçu aucun décret. C'est ainsi le cas de la loi « accompagnement de fin de vie » pourtant très attendue par les familles ; pour ce qui concerne les maisons d'assistants maternels , l'absence des trois textes réglementaires attendus n'empêche pas la mise en application de la loi car ils ne se rapportent qu'à des dispositifs annexes : la création ou le fonctionnement des maisons d'assistants maternels ne nécessitent aucun décret d'application, contrairement à ce que prétendent certains conseils généraux.
Globalement, les lois votées cette année appelaient soixante et une mesures d'application, ce qui est dérisoire rapporté aux trois cent quarante textes réglementaires attendus l'an dernier, dont cent quatre-vingt-treize pour la seule loi « hôpital, patients, santé et territoires » (HPST).
Sur cet objectif de soixante et une mesures, les services n'en ont publié que dix, soit un taux de 16 % : c'est moitié moins bien que l'an dernier (32 %) et très loin du record de 2008 (45 %).
Enfin, dernier élément décevant : les mesures effectivement publiées n'ont respecté que dans la moitié des cas le délai de six mois prévu par la circulaire du Premier ministre du 1 er juillet 2004. Ce taux était de 76 % l'an dernier, ce dont nous nous étions réjouis.
J'en viens maintenant aux lois plus anciennes pour lesquelles la situation est infiniment plus favorable.
Cette année, cent quatre-vingt-douze nouvelles mesures réglementaires ont été prises pour les lois votées lors de sessions antérieures, soit bien plus que lors des deux années précédentes où l'on en comptait respectivement cinquante-sept et cinquante-huit. Sur ces cent quatre-vingt-douze, cent cinq concernent la loi HPST : cet effort vigoureux a porté son taux d'application à 55 % - contre 1 % au 30 septembre 2009 !... On peut y ajouter deux des sept rapports attendus par cette loi - c'est assez rare pour le souligner - et la production de vingt et une mesures réglementaires non expressément prévues.
Autre satisfecit pour la loi « formation professionnelle », promulguée il y a moins d'un an, en novembre 2009, et déjà applicable à 59 %.
Enfin, des efforts ont été engagés pour écluser le stock, notamment sur les lois de financement de la sécurité sociale pour 2007, 2008 et 2009 , désormais applicables respectivement à 77 %, 92 % et 80 % ; sur la loi Dalo, « droit au logement opposable », dont le taux de mise en application est passé de 61 % à 86 %. Trois lois adoptées, enfin, lors des années parlementaires 2007-2008 et 2008-2009 sont désormais pleinement mises en application : celle relative au revenu de solidarité active (RSA), la loi « rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail » et celle d'avril 2008 ratifiant l'ordonnance d'« adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament ».
En ce qui concerne les délais de parution, la situation est également plus satisfaisante : les textes parus dans un délai d'un an représentent désormais 58 % du total, soit un résultat très supérieur à celui des deux dernières années, où il s'établissait entre 28 % et 34 %. Ce résultat appréciable est, ici encore, le fait de la loi HPST .
A ce constat positif, j'opposerai aussitôt quelques critiques : l'effort semble s'être concentré sur ces lois emblématiques aux dépens d'autres, oubliées.
J'évoquerai la loi « participation et actionnariat salarié », votée le 30 septembre 2006, qui plafonne à 71 % de mise en application depuis octobre 2008, aucune activité nouvelle ne pouvant être décelée sur ce texte. Même encéphalogramme plat pour la loi « organisation de certaines professions de santé » de janvier 2007 ou pour la loi « adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament » de février 2007.
Si l'on étudie la situation de lois plus anciennes encore, la loi « handicap » de 2005 est désormais applicable à 95 % - c'est évidemment presque parfait mais on peut légitimement se demander pourquoi le travail n'est toujours pas achevé cinq ans plus tard - ; enfin, et cela va vous faire sourire, la réforme des retraites de 2003 n'est aussi applicable qu'à 95 % : il manque notamment un décret pour organiser la procédure d'allongement de la durée d'assurance après 2012, dispositif que nous venons entièrement de réécrire. Il était finalement inutile de se presser...
Si cet exercice de statistique n'est pas inutile, permettez-moi tout de même d'en souligner les limites techniques. Notre source principale d'information est l e site Légifrance , qui retrace les échéanciers de parution des textes réglementaires établis à partir des informations transmises par le secrétariat général du Gouvernement. Or, bien que très utile, il demeure imparfait car il ne reflète que l'état de parution des décrets, simples ou en Conseil d'Etat : il faut rappeler que le Gouvernement a, le plus souvent, le choix du bon vecteur, par exemple en recourant à des arrêtés qui ne seront pas recensés. A l'inverse, il arrive parfois que la parution d'une mesure ne corresponde qu'imparfaitement aux souhaits du législateur et ne suffise pas à rendre la loi applicable. Sur le plan pratique, certaines mesures réglementaires ne précisent pas l'article de la loi auquel elles se rapportent, ce qui trouble l'exactitude statistique. Pire encore, il arrive que des décrets soient d'un volume si considérable qu'ils restent d'une appréciation impossible pour les parlementaires que nous sommes, sans parler du citoyen qui ambitionnerait de s'y retrouver. Un décret en Conseil d'Etat du 31 mars 2010 se proclamant, avec orgueil, le moyen de « tirer les conséquences, au niveau réglementaire, de la loi HPST » comporte trois cent soixante-douze articles et plusieurs annexes sur quatre-vingt-quinze pages...
Nous faisions traditionnellement un petit point sur l'urgence - on doit dire désormais « procédure accélérée » -, afin de contrôler si elle produit un effet d'accélération sur les délais de parution des mesures réglementaires et nous en concluions d'ailleurs chaque année qu'elle produisait l'effet inverse avec des performances plus médiocres encore qu'en procédure classique. Cette année, la statistique n'est pas probante car les dix mesures publiées ne portent que sur la seule loi de financement de l'année, pour laquelle la procédure accélérée est de droit.
J'en viens au suivi réglementaire des dispositions législatives issues d'initiatives sénatoriales votées en 2009-2010. La performance de 75 % d'application de 2008 fait définitivement figure d'accident statistique car ce taux, tombé à 19 % l'an dernier, n'est plus que de 12 % cette année. Pour des raisons qui m'échappent, il est d'ailleurs moitié moindre pour les initiatives sénatoriales que pour celles des députés (25 %) sans que je puisse m'expliquer cet écart.
Cela étant, on constatera, pour s'en réjouir, que sur nos cinq lois de l'an dernier, seul le PLFSS était - évidemment - d'origine gouvernementale. Les quatre autres provenaient d'initiatives parlementaires : deux du Sénat (« maisons d'assistants maternels » et « bisphénol »), deux de l'Assemblée nationale (« accompagnement d'une personne en fin de vie » et « reclassement des salariés »). Sans doute est-ce l'effet des nouvelles modalités de répartition de l'ordre du jour résultant de la révision constitutionnelle de juillet 2008.
Je finirai par les fameux rapports régulièrement demandés au Gouvernement. Les statistiques confirment notre sentiment : ils sont bien peu opérants. Sur les cent cinquante-neuf rapports réclamés par les lois adoptées entre 1997 et 2009, soixante-sept seulement ont été effectivement déposés. Ce taux illustre de lui-même l'efficacité de la méthode, même si l'on comprend qu'il s'agisse parfois de la seule façon, pour les parlementaires, d'attirer l'attention du Gouvernement sur un sujet sans encourir les foudres de l'article 40.
Pour cette raison, nous avions réduit nos exigences au fil des ans : les vingt-sept rapports demandés par notre commission en 2004 n'étaient plus que huit en 2009, dont un seul résultant d'un amendement sénatorial. Cela étant, je crains que la loi retraites que nous venons d'adopter ne fasse flamber nos statistiques l'année prochaine.
Telles sont, mes chers collègues, quelques observations générales. Le rapport complet peut être consulté auprès de notre secrétariat.
Mme Catherine Procaccia . - Je suis sensible, madame la présidente, à la tonalité de vos propos. J'observe que ce rapport traite de la loi relative à la formation professionnelle, pour l'examen de laquelle une commission spéciale avait été constituée, dont j'ai assuré la présidence. Mais pourquoi, dès lors, ne pas aborder le cas de la loi sur le service minimum dans les transports , qui avait donné lieu à une commission spéciale à laquelle j'avais également participé ?
Mme Muguette Dini , présidente . - Ce dernier texte, qui relève d'une session précédente, est désormais totalement applicable. Nous n'avions donc pas besoin d'y revenir.
M. Alain Vasselle , rapporteur général . - Je vous remercie de ce rapport que j'attends toujours avec beaucoup d'impatience. Après la révision constitutionnelle, conçue pour conférer plus de pouvoir au Parlement et, en même temps, donner à ce dernier les moyens de se consacrer davantage à sa mission de contrôle et d'évaluation, ne serait-il pas bon de présenter une synthèse de ces conclusions à la Conférence des présidents, afin d'en éclairer les membres, qui ont encore beaucoup de chemin à faire pour satisfaire l'esprit et la lettre de la Constitution nouvelle ? Cela aiderait sans nul doute le Parlement à remplir sa mission.
Sur le terrain, c'est bien nous qui sommes en butte aux remarques parfois acerbes de nos concitoyens, alors que nous constatons ici que la volonté du législateur n'est pas toujours respectée, en particulier à travers la définition de l'ordre du jour, qui est aussi de la responsabilité du Gouvernement. Il mériterait bien d'être destinataire de sa part de doléance...
Mme Annie David . - Je partage l'analyse d'Alain Vasselle. Une question : le texte relatif au dialogue social dans les très petites entreprises a concerné notre commission. Pourquoi n'en est-il pas question dans le rapport ?
Mme Muguette Dini , présidente . - Cette loi a été débattue en septembre mais la loi n'a été promulguée qu'en octobre : l'analyse fera donc partie du champ temporel du rapport de l'an prochain. J'indique à Alain Vasselle que sa suggestion est déjà satisfaite : la direction du service des commissions établit un rapport d'ensemble à partir des rapports de chaque commission, dont la synthèse est présentée à la Conférence des présidents.
La commission donne acte à la présidente de sa communication.
CULTURE, ÉDUCATION ET COMMUNICATION
Mercredi 20 octobre 2010
M. Ivan Renar, vice-président. - Je vais vous présenter au nom du président de la commission le bilan de la mise en application des lois pour l'année parlementaire 2009-2010.
Un premier constat s'impose : la progression de l'initiative parlementaire. Au cours de l'année parlementaire 2009-2010, neuf lois ont été promulguées dans les secteurs de compétence de notre commission : la loi du 28 octobre 2009 relative à la protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur Internet ; la loi du 28 octobre 2009 tendant à garantir la parité de financement entre les écoles élémentaires publiques et privées sous contrat d'association lorsqu'elles accueillent les élèves scolarisés hors de leur commune de résidence ; la loi du 27 janvier 2010 relative aux délais de paiement des fournisseurs dans le secteur du livre ; la loi du 10 mars 2010 relative au service civique ; la loi du 18 mai 2010 tendant à permettre le recours au vote par voie électronique lors des élections des membres des universités ; la loi du 18 mai 2010 visant à autoriser la restitution par la France des têtes maories à la Nouvelle-Zélande et relative à la gestion des collections ; la loi du 9 juin 2010 visant à encadrer la profession d'agent sportif ; la loi du 28 septembre 2010 visant à lutter contre l'absentéisme scolaire ; et enfin la loi du 30 septembre 2010 relative à l'équipement numérique des établissements de spectacles cinématographiques. L'année parlementaire 2009 2010 a ainsi été marquée par une accélération de l'activité législative pour notre commission, puisque l'on avait comptabilisé que trois ou quatre lois au cours des trois précédentes années.
Et l'on peut constater que l'accroissement du nombre de lois votées au cours de cette année résulte essentiellement des dispositions adoptées dans le cadre de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 qui accorde des prérogatives nouvelles au Parlement, en renforçant notamment sa capacité d'initiative. Ainsi, huit des neuf lois promulguées dans les secteurs de compétence de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication sont-elles issues de propositions de lois , soit un taux d'initiative parlementaire de près de 89 % . Il faut également noter que quatre lois ont été adoptées suite à des initiatives exclusivement d'origine sénatoriale, soit un taux d'initiative sénatoriale de 44 % . Ces proportions sont particulièrement remarquables et révélatrices. L'instauration de semaines réservées a permis d'achever la navette sur des propositions de loi en instance d'examen à l'Assemblée nationale. A titre d'exemple, la proposition de loi visant à encadrer la profession d'agent sportif , examinée en première lecture par le Sénat le 29 mai 2008, a pu être adoptée définitivement le 27 mai 2010 à l'issue d'une navette parlementaire de deux ans.
Le deuxième constat est l'apparition de nouvelles modalités pour la mise en application des lois. Trois des lois promulguées sont d'application directe et quatre lois ont été publiées à la fin de l'année parlementaire - entre le mois de mai et fin septembre - et n'ont donc pas encore reçu de mesures d'application. La proportion de lois d'application directe, de l'ordre d'un tiers, est donc assez importante.
Seule la loi du 10 mars 2010 relative au service civique a fait l'objet de mesures d'application moins d'un an après sa promulgation : elle est applicable à 79 % suite au décret du 12 mai 2010 qui permet la mise en oeuvre effective du service civique sur l'ensemble du territoire et le fonctionnement de l'Agence du service civique. Il faut souligner le délai particulièrement rapide de publication des textes d'application pour cette loi d'initiative sénatoriale, dont l'urgence avait été soulignée en séance. Enfin la loi du 28 octobre 2009 tendant à garantir la parité de financement entre les écoles élémentaires publiques et privées sous contrat d'association lorsqu'elles accueillent les élèves scolarisés hors de leur commune de résidence n'a besoin que d'un décret sur les regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI) pour être pleinement mise en application, le reste étant d'application directe. Ce décret, après avoir été validé par le Conseil d'État le 6 juillet 2010, devrait selon le secrétariat général du Gouvernement être publié très prochainement.
Il se confirme aussi que les lois récemment promulguées sont appliquées plus promptement. Depuis le début de la XIII e législature, 29 % des lois votées sont d'application directe et 23,5 % sont désormais mises en application - toutes le sont devenues en près d'un an et la moitié en moins de six mois -, les lois non applicables étant généralement de publication extrêmement récente. Outre les deux décrets sur la loi relative au service civique , vingt textes d'application sont parus dans le secteur de compétences de notre commission. La loi du 7 juillet 2009 portant création d'une première année commune aux études de santé et facilitant la réorientation des étudiants a été totalement mise en application à la fin du mois de juillet 2010, soit environ un an après la date de sa promulgation, confirmant ainsi la célérité du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche sur ce plan. Sept des textes réglementaires parus au cours de l'année parlementaire écoulée ont permis la mise en application des principales mesures de la loi du 12 juin 2009 favorisant la diffusion et la protection de la création sur Internet ; leur publication qui s'est échelonnée sur un peu plus d'un an a organisé le fonctionnement de la Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi), et nous avons pu constater lors d'une récente visite que cet organisme fonctionne.
Après la parution du décret relatif à l'aide aux téléspectateurs permettant la continuité de réception des services de télévision, la loi du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur peut être considérée comme d'ores et déjà totalement mise en application, dans la mesure où le dernier décret prévu devra être pris lors de l'arrêt définitif de la diffusion analogique et le basculement vers le numérique. Enfin la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision est progressivement mise en application : trois décrets modifiant le régime des contributions du secteur à la production audiovisuelle sont parus au cours de l'année parlementaire 2009-2010, ainsi que l'ordonnance modifiant le code du cinéma et de l'image animée.
Troisième enseignement : la résorption des retards dans la mise en application des lois anciennes , promulguées avant la XIIIe législature, ne progresse pas. Se pose donc le problème des dispositions non abrogées mais rendues obsolètes ou inutiles par les évolutions législatives ou techniques. Les retards persistent essentiellement dans les domaines de la culture et de la communication, largement réformés par de nouvelles dispositions législatives dans le secteur audiovisuel ou en matière de droits d'auteur. Le ministère de la culture et de la communication a fait des efforts sur des textes dont il ressentait l'importance vis-à-vis de l'opinion publique, comme la loi Hadopi, mais dans d'autres domaines il est bien lent. Je déplore que l'arrêté et le décret nécessaires pour appliquer la loi relative aux établissements publics de coopération culturelle ( EPCC ) n'aient toujours pas été publiés : le premier concerne le statut des directeurs et le second les conditions de délivrance des diplômes par les établissements supérieur d'enseignement d'arts plastiques. Le ministre nous avait pourtant assuré l'an dernier que la parution de ce décret était imminente ! Nous pourrons lui rappeler ses engagements lors des auditions budgétaires.
Quatrième enseignement : les rapports prévus par la loi ne sont pas toujours publiés. Au cours de l'année parlementaire 2009-2010, seuls trois rapports ont été déposés par le Gouvernement au Parlement en application des lois votées précédemment : le rapport du 20 octobre 2009 relatif au bilan de la mise en oeuvre de la loi instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire ; le rapport d'octobre 2009 pris pour l'application de la loi du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur ; le rapport de décembre 2009 établi par la Halde sur le bilan de la politique de gestion des ressources humaines menée par les sociétés nationales de programme afin de lutter contre les discriminations. Malgré un léger progrès par rapport à l'an dernier, le nombre de rapports en attente de parution - vingt-deux - reste élevé ; c'est particulièrement vrai dans le secteur de la communication audiovisuelle, où deux rapports sur douze ont été publiés à ce jour. Le taux de publication des rapports concernant les lois promulguées depuis 2000 et avant le 1er octobre 2009 est de 45,5 %.
Seuls deux rapports du Gouvernement au Parlement sur la mise en application d'une loi à l'issue d'un délai de six mois suivant sa date d'entrée en vigueur sont parus au cours de l'année parlementaire 2009-2010. Reconnaissons pour le moins que cette nouvelle procédure est peu utilisée...
Je voudrais enfin insister sur le développement de nouveaux modes de contrôle de l'application des lois, et d'abord sur la création de comités de suivi : les lois relatives au service civique , à l'équipement numérique des établissements de spectacles cinématographiques et visant à lutter contre l'absentéisme scolaire ont ainsi créé un comité de suivi composé de députés et de sénateurs chargé de suivre leur mise en oeuvre. En outre, nous avons rendu plusieurs avis sur les contrats d'objectifs et de moyens (COM) des sociétés de l'audiovisuel public en application de l'article 53 de la loi de 1986 : l'un sur le COM de Radio France, l'autre avis sur le COM de l'INA.
Voilà les tendances générales d'un bilan mitigé. Vous trouverez dans la note qui vous sera adressée par courrier le détail des analyses par secteur.
ÉCONOMIE, DÉVELOPPEMENT DURABLE ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
Mercredi 3 novembre 2010
Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée , la commission dresse le bilan de la mise en application des lois relevant de la compétence de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire et désigne des commissaires chargés du suivi de l'application des lois promulguées au cours de l'année parlementaire 2009-2010 .
M. Jean-Paul Emorine, président. - Il nous appartient de dresser, comme chaque année, le bilan de la mise en application des lois relevant de la compétence de notre commission. Au cours de l'année parlementaire 2009-2010, dans les domaines qui nous concernent, 10 lois ont été promulguées, contre 5 au cours de 2008-2009 ; 109 textes d'application ont été publiés, contre 71 en 2008-2009, ils se décomposent en 54 décrets en Conseil d'État, 33 décrets simples, 12 arrêtés, 9 rapports et une ordonnance.
Nous ne pouvons que nous réjouir de cet accroissement ; le Gouvernement a poursuivi ses efforts pour réduire le stock de lois en attente de mesures d'application. Le nombre de lois totalement inapplicables tend à diminuer : 7 en 2007-2008, 4 en 2008-2009, 3 aujourd'hui. La mise en oeuvre des lois partiellement mises en application s'est globalement améliorée : 18 ont fait l'objet d'une mesure d'exécution au cours de l'année parlementaire 2009-2010 - 14 en 2008-2009. Le taux de mise en application des lois partiellement applicables a sensiblement augmenté, ainsi la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion est-elle à présent applicable à 80 %, 16 articles étant désormais totalement applicables contre 4 un an plus tôt. Le nombre de lois totalement mises en application au cours de l'année parlementaire 2009-2010 a augmenté : 6 en 2008 2009, 7 en 2009 2010. Mentionnons à ce titre la loi du 17 février 2009 pour l'amélioration des programmes de construction et d'investissements publics et privés.
Pour les lois que nous suivons, le délai moyen de publication des textes d'application s'est réduit : 70 % des mesures réglementaires ont été adoptées dans les six mois suivant la promulgation des lois et 8 décrets ont même été pris moins d'un mois après.
Ces améliorations indéniables sont malheureusement ternies par plusieurs éléments inquiétants. Le taux d'application global des 10 lois promulguées au cours de l'année parlementaire 2009 2010 est de 8 % : sur les 387 mesures réglementaires d'exécution prévues par ces 10 lois, 31 ont été prises. Il est vrai toutefois que les lois appelant le plus grand nombre de mesures d'exécution ont été promulguées seulement en juillet dernier.
Il faut déplorer aussi le nombre encore trop important de lois, 26, partiellement applicables et n'ayant fait l'objet d'aucune nouvelle mesure réglementaire d'exécution cette année. Je citerai la loi du 9 juillet 2001 d'orientation sur la forêt , dont l'état d'application n'a pas évolué depuis 2007...
Seulement 7 % des mesures réglementaires résultant d'amendements législatifs d'origine sénatoriale ont été prises au cours de l'année parlementaire, contre 15 % pour les amendements déposés par le Gouvernement.
Enfin, cette année encore, la remise au Parlement des rapports demandés au Gouvernement est aléatoire, voire inexistante : 83 demandés depuis 2006, 17 à peine remis. Sur les 7 rapports prévus par la loi du 3 août 2008 dite Grenelle I, nous n'en avons reçu que deux. Un réel effort s'impose.
Je vous remercie tous pour votre implication dans le contrôle de l'application des lois relevant de notre commission, au sein des groupes de travail auxquels vous participez celui relatif à l'application de la loi dite LME, dont le rapporteur a été Mme Elisabeth Lamure, par exemple, ou par le biais des questions que vous posez au Gouvernement, tels M. Charles Revet, sur la loi portant réforme portuaire ou M. Dominique Braye dans une question crible thématique sur la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion.
Je vous propose enfin de désigner des commissaires chargés d'assurer le suivi de l'application des lois promulguées au cours de l'année parlementaire 2009-2010 : MM. Gérard César et Charles Revet, rapporteurs, pour la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche ; M. Gérard Cornu, rapporteur, pour la loi du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires , au commerce, à l'artisanat et aux services ; MM. Dominique Braye, Daniel Dubois, Louis Nègre et Bruno Sido, rapporteurs, pour la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement ; M. Claude Biwer, en remplacement de M. Philippe Dominati qui siège désormais à la commission des finances, pour la loi du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation ; M. Ladislas Poniatowski, rapporteur, pour la loi du 7 juin 2010 autorisant les petits consommateurs domestiques et non domestiques d'électricité et de gaz naturel à accéder ou à retourner au tarif réglementé ; je suivrai, quant à moi, la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris , puisque ce texte a été examiné par une commission spéciale que je présidais et que le rapporteur M. Jean Pierre Fourcade est à la commission des finances ; M. Bruno Sido, rapporteur pour la loi du 9 mars 2010 visant à rendre obligatoire l'installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation ; M. Pierre Hérisson, rapporteur, pour la loi du 9 février 2010 relative à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales ; M. Bruno Retailleau, rapporteur, pour la loi du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique ; M. Francis Grignon, rapporteur, pour la loi du 8 décembre 2009 relative à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires et portant diverses dispositions relatives aux transports.
M. Daniel Raoul. - La révision constitutionnelle devait entraîner une revalorisation du travail parlementaire : ces chiffres suscitent des interrogations... Pourquoi ne pas retenir le principe de lois « biodégradables », caduques au bout de deux ans en l'absence de publication des mesures d'application ? L'idée de loi partiellement applicable ou non applicable me dérange aussi... Les entreprises, souvent, sont dans l'incertitude : on a fait de la communication sur un texte mais il n'entre jamais en vigueur.
L'inflation du nombre de lois est aussi à incriminer. Du reste, quand examinera t on la proposition de loi Warsmann ? Et la proposition Longuet ? J'aimerais aussi avoir une vision globale de la transposition de certaines directives je songe aux services éparpillée entre divers véhicules.
M. Jean-Paul Emorine, président . - La difficulté à publier les décrets d'application ne date pas d'aujourd'hui, elle a touché tous les gouvernements. La désignation de commissaires chargés du suivi nous permettra d'interroger le gouvernement. L'administration est souvent lente et provoquer une réunion avec un ministre, c'est lui rendre service ! Quant à la transposition par ordonnances, il s'agit de rattraper le temps perdu ; mais la lecture des textes correspondants n'est pas toujours aisée, j'en conviens.
M. Michel Teston. - Le Parlement est souverain, la seule limite à l'application des lois qu'il vote est le contrôle par le Conseil constitutionnel. Même en l'absence des mesures d'application nécessaires, une loi reste applicable ! La notion de texte partiellement applicable me laisse perplexe.
M. Jean-Paul Emorine, président. - Nous devons être toujours plus vigilants dans le contrôle du suivi des lois votées.
M. Roland Courteau. - L'article 55 de la loi sur l'économie numérique attend un décret d'application depuis six ans ! Il fait obligation au Gouvernement de publier chaque année la liste des organismes sociaux que l'on doit pouvoir appeler au téléphone gratuitement. Les numéros surtaxés sont en effet pratiqués par les caisses d'allocation familiale ou par Pôle-Emploi : c'est un comble !
M. Pierre Hérisson. - La commission supérieure des communications électroniques et des postes donne un avis sur le budget alloué aux personnes qui bénéficient d'un forfait téléphonique délivré par les CCAS. Les crédits attribués à ce titre à France Télécom ont été sous-consommés. Il y a lieu d'examiner globalement le problème car le système, manifestement, n'a pas fonctionné.
M. Jean-Paul Emorine, président. - Les textes d'application n'ont pas été publiés en raison du coût de la mesure si les personnes appellent depuis un téléphone portable. Un rapport de l'IGAS a ainsi recommandé l'abrogation (sic) de la disposition législative, ou au moins sa limitation à l'urgence sociale.
M. Pierre Hérisson. - Les crédits correspondants n'ont pas été consommés !
M. Paul Raoult. - C'est une cause déterminante du discrédit que nous manifestent les citoyens. Nous votons des textes puis leur entrée en vigueur est toujours repoussée. Nous passons pour des fantaisistes. On nous interpelle sans cesse sur l'application du Grenelle I et II ! Il y a là un problème de fond. Les parlementaires devraient être les chefs de file de la rédaction des décrets. Je siège à la fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) ainsi qu'à la fédération des parcs naturels régionaux : c'est à elles que sont transmis les projets de décrets et mon rôle là-bas semble plus important qu'ici où, comme parlementaires, nous ne savons pas ce que deviennent les textes que nous avons votés !
La qualité variable du travail des hauts fonctionnaires chargés de la rédaction est aussi en cause. Les jeunes énarques se font les dents sur des dossiers auxquels ils ne connaissent rien : heureusement que les fédérations sont là ! Sans compter les chamailleries dès que plusieurs ministères, ou deux au moins, sont concernés, écologie et urbanisme, par exemple. C'est un freinage extraordinaire !
Nommer des rapporteurs chargés de suivre le travail et si nécessaire d'aiguillonner les ministres est donc une excellente idée. D'autant que nous adoptons souvent les lois à la va-vite en nous contentant d'une rédaction un peu floue et en renvoyant lâchement à un décret. Nous laissons alors les hauts-fonctionnaires décider à notre place. Reprenons la main sur les décrets !
M. Jean-Paul Emorine, président . - Il est normal de consulter les fédérations, anormal de ne pas saisir les commissions parlementaires des projets de décret . A nos rapporteurs d'exploiter la semaine de contrôle et de convier si nécessaire le ministre compétent. Les renvois aux décrets sont légitimes, nous ne voulons pas rédiger des lois bavardes ; à nous d'être vigilants sur la rédaction des textes d'application.
M. Pierre Hérisson. - La loi est d'application générale, les décrets concernent les modalités pratiques. En Suisse, ceux-ci n'existent pas et c'est la loi qui dit tout, mais il faut quatre ans pour l'élaborer ! Je vous indique que la commission supérieure des communications électroniques et des postes, composée de sept députés et sept sénateurs, donne un avis sur tous les décrets d'application relatifs à ce secteur. C'est une sorte de CMP permanente ! Cet exemple de fonctionnement me semble intéressant...
La loi postale votée en février 2010 a élargi les compétences de l'Arcep ; un décret qui devait être publié avant le 31 mars ne l'a pas été, mettant en difficulté le président de l'Autorité. C'est que les ministères étaient en conflit sur la rédaction et que Matignon n'avait pas encore rendu d'arbitrage... A nous de dénoncer de tels dysfonctionnements.
M. Hervé Maurey. - La communication présentée par notre président est sans complaisance et utile. Je suis choqué que des textes votés par les représentants du peuple restent inappliqués. Admettons tout de même que nos lois sont souvent mal écrites, compliquant la tâche des rédacteurs des décrets et nous obligeant à voter ensuite des lois de simplification du droit.
Que les dispositions d'origine parlementaire soient moins mises en oeuvre que celles proposées par le gouvernement n'est pas le fruit du hasard. Nous prenons des initiatives auxquelles le gouvernement n'est pas forcément favorable... Quant aux rapports qui ne sont pas produits, c'est d'autant plus choquant qu'une promesse de rapport sert souvent à obtenir le retrait d'un amendement.
Comment mieux faire ? Suivi par les rapporteurs, auditions des ministres, débats en séance plénière pour dresser le bilan d'une année d'application : nous avons des moyens, soyons imaginatifs !
M. Jean-Paul Emorine, président. - Si un rapporteur constate un blocage, nous pouvons faire monter la pression en invitant le ministre, puis si nécessaire en organisant un débat public.
M. Jacques Muller. - Le consensus entre nous est manifeste. Nous ne pouvons pas accepter que les administrations procèdent à des arbitrages loin de nous. Mais les difficultés actuelles sont forcément liées à l'inflation législative, à la prolifération de lois à caractère essentiellement médiatique, comme celle sur les chiens dangereux , loi de circonstance qui n'est toujours pas appliquée.
M. Gérard Bailly. - Les décrets ou les circulaires sont parfois contraires à l'intention du législateur. Le commissaire qui sera chargé du suivi d'une loi devra s'assurer que l'esprit de nos dispositions est respecté dans la rédaction des textes d'application.
M. Jean-Paul Emorine, président. - La rédaction des décrets peut être habile et contourner trop souvent, par le biais de formules alambiquées, ce que nous avons voulu écrire. A nous d'y faire attention.
M. Daniel Raoul. - Il serait bon de disposer des décrets ou du moins de leurs grandes lignes en même temps que du texte sur lequel nous discutons en séance plénière. Nous devrions en prendre connaissance avant le vote sur l'ensemble. L'inertie est la principale force de l'univers et en particulier de certaines administrations centrales. Il convient d'éviter trop d'écart entre la lettre et l'interprétation par les services déconcentrés, ou plutôt les interprétations, variables d'un département à l'autre, je songe à la loi SRU. C'est une très bonne idée que d'élargir les missions du rapporteur chargé du suivi. Inflation de textes dit M. Muller : inflation, aussi, de lois traitant de sujets réglementaires, comme la loi sur le contrôle technique des manèges . Il me semble, enfin, que des présentations sur l'état d'application des textes votés antérieurement seraient plus intéressantes que certains débats récemment tenus dans un hémicycle déserté...
M. Jean-Paul Emorine, président. - Nous pourrions programmer des débats sur l'application des lois qui intéresseraient l'ensemble de nos collègues. J'ajoute que les rapporteurs désignés aujourd'hui appartiennent tous à la majorité. Un binôme pourrait être formé pour le suivi, avec un co-rapporteur choisi dans l'opposition. J'en présenterai l'idée au prochain Bureau. Le travail à deux est plus stimulant.
M. Daniel Raoul. - Cela pourra vous servir l'an prochain...(Rires)
M. Jean-Paul Emorine, président. - Dés maintenant, pour nous habituer !
M. Bruno Sido. - Lorsque je venais d'arriver au Sénat, j'ai présenté une proposition de loi sur l'itinérance locale qui a été votée à l'unanimité et qui ne nécessitait aucun texte d'application. Patatras : les députés ont ajouté un renvoi à un décret...
Sur la proposition de loi portant diverses dispositions d' adaptation de la législation au droit communautaire (DDAC) que nous allons examiner, je vous signale tout de même que le suivi serait une tâche à temps plein pour plusieurs personnes ! Nous légiférons trop et nos administrateurs corrigent nombre d'erreurs matérielles dans les projets du gouvernement : tout le monde est débordé !
M. Jean-Paul Emorine, président. - Globalement nous légiférons bien et nous apportons par voie d'amendement bien des corrections et inflexions aux textes examinés.
M. Gérard Bailly. - J'ai posé une question écrite au ministre de l'écologie sur la sauvegarde des barrages et moulins sur les rivières de France. J'ai reçu en réponse un réquisitoire contre ces ouvrages ! On m'oppose la protection des anguilles ! La réponse ne me semble pas conforme à ce que nous avions dit de la sauvegarde de la production hydroélectrique...
M. Jean-Paul Emorine, président. - Je me souviens parfaitement du débat sur l'effacement des barrages. Plus largement les lois dites Grenelle I et II font l'objet de diverses interprétations possibles. Et certaines associations ont au ministère une influence majeure... Nous avions pourtant cherché à atteindre un équilibre entre des préoccupations économiques, un souci de protection de l'environnement et la volonté de développer les nouvelles énergies.
M. Hervé Maurey. - Les réponses à nos questions écrites sont souvent scandaleuses, un phénoménal exercice de langue de bois. Quand nous attirons l'attention sur un problème réel, on nous décrit par le menu le dispositif, comme si nous ne le connaissions pas. On pourrait dire la même chose des questions orales du mardi et des questions d'actualité au gouvernement.
M. Jean-Paul Emorine, président. - Les lois Grenelle ont requis quatre rapporteurs et elles bouleversent toute l'activité économique, il faut y être très attentifs. Je vous adresserai copie du rapport, plus détaillé que mon exposé. Ainsi la question de l'article 55 de la loi sur l'économie numérique sera-t-elle résolue dans la proposition de loi de simplification du droit.
La commission adopte la liste des commissaires chargés d'assurer le suivi de l'application des lois promulguées au cours de l'année parlementaire 2009-2010.
FINANCES
Mardi 26 octobre 2010
Puis la commission entend une communication de M. Jean Arthuis, président, sur le contrôle de la mise en application des lois.
M. Jean Arthuis , président . - Le rapport que le Sénat publie chaque année sur la mise en application des lois connaît un fort retentissement médiatique... Les commissions permanentes sont chargées d'établir le bilan de la parution des textes règlementaires d'application des mesures législatives votées par le Parlement et dont elles avaient été saisies au fond ; ces bilans sont ensuite consolidés.
Au cours de l'année parlementaire 2009-2010, notre commission a été chargée de contrôler la mise en application de vingt-et-une lois, dont seize en stock et cinq votées au cours de la dernière session. On constate que quatre-vingt-sept textes d'application ont été pris ou sont devenus sans objet, soit plus de la moitié des mesures prévues ; cependant, le stock de textes en attente de parution reste à peu près stable : soixante-sept contre soixante-dix.
S'agissant des lois les plus anciennes , la publication de plus des deux cinquièmes des textes en attente a porté le taux de mise en application du stock à 90 %, trois devenant entièrement applicables. Cependant, l'on n'a que peu d'espoir pour les lois votées avant 2007 ; c'est ainsi que le décret prévu par l'article 24 de la loi de finances rectificative pour 2004 portant réforme de la taxe pour le développement de la formation professionnelle dans le bâtiment et les travaux publics est toujours en gestation.
Les deuxième et troisième lois de finances rectificatives pour 2010 étaient d'application directe ; elles organisaient l'aide à la Grèce, la garantie de l'Etat au mécanisme européen de stabilisation financière et la participation de la France aux accords d'emprunt du FMI. La loi sur le crédit aux PME et le premier collectif pour 2010 sont d'ores et déjà intégralement mises en application. La loi sur les jeux en ligne a reçu plus de 80 % de ses textes d'application, mais moins de la moitié des mesures attendues pour les textes financiers de l'hiver dernier ont été publiées. Dans le cas de la loi de finances pour 2010 , cela est dû à certains aspects de la réforme de la taxe professionnelle - nous y reviendrons dans le cadre du PLF pour 2011.
Le taux global de mise en application reste stable à 82 %. Attribuable à la vigilance du Sénat et au suivi du travail législatif, ce constat relativement satisfaisant n'est pas contradictoire avec le souhait que les situations de blocage les plus anciennes connaissent leur épilogue et qu'une initiative parlementaire permette l'abrogation des dispositifs abandonnés de fait : l'applicabilité de huit lois n'a pas évolué depuis un an.
Je vous invite à prendre connaissance de la note qui vous a été distribuée comme du rapport général. Je vous encourage surtout, dans le cadre de vos prérogatives, à identifier les difficultés et à interroger les administrations défaillantes.
La commission donne acte à M. Jean Arthuis , président, de sa communication.
LOIS
Mardi 9 novembre 2010
Puis la commission entend la communication de M. Jean-Jacques Hyest, président, sur la mise en application des lois au 30 septembre 2010.
M. Jean-Jacques Hyest, président. - Voici, en ne prenant en compte que les décrets prévus par une disposition législative, l'état de mise en application des lois dans les domaines de compétence de notre commission.
Après une année d'intense activité législative, la majorité des lois sont totalement mises en application. 23 lois examinées au fond par notre commission, sur 59 lois au total, ont été promulguées au cours de l'année parlementaire 2009-2010, contre 15 l'année précédente. Un grand nombre de textes ont été achevés à un rythme soutenu et d'autres sont restés en navette. La mise en oeuvre de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 s'est accélérée avec huit des 23 lois promulguées, dont sept lois organiques.
Si cette année la commission n'a rendu aucun rapport sur avis autre que les onze avis budgétaires, elle a rendu trois rapports d'information, adopté quatre propositions de résolution et examiné 21 projets ou propositions encore en navette au 1er octobre 2010, dont quinze sont d'origine parlementaire, contre sept en 2008-2009 : l'augmentation de l'activité législative de la commission traduit l'enracinement de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.
L'amélioration constatée l'an dernier dans la mise en application des lois promulguées se poursuit : quinze sont d'application directe, quatre sont partiellement mises en application et quatre seulement n'ont encore fait l'objet d'aucune des mesures d'application prévues. Le taux des lois non mises en application au cours de leur session d'adoption a légèrement baissé cette année, revenant de 20 à 17,4 %. Deux des quatre lois non applicables ont été promulguées en fin de session, dont celle sur l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée . Le taux de mise en application des lois est passé de 73,3 à 82,6 %, 19 lois sur 23 étant entièrement applicables. En revanche, trop peu de décrets d'application sont intervenus (14,70 %).
La mise en application des lois votées antérieurement à la session connaît une forte baisse : 53 mesures sont parues contre 140 l'an dernier ; seulement six lois anciennes dont notre commission avait été saisie au fond sont devenues entièrement applicables, contre treize en 2008-2009.
Les délais sont globalement bons : moins de six mois pour les mesures prises. Toutefois, se dessine en creux un délai particulièrement long pour les 63 mesures prévues et non encore prises.
Les lois promulguées sous la XIIe législature sont pratiquement toutes mises en application : douze contre dix-sept l'an dernier, sont en grande partie applicables, le taux moyen de mise en application atteignant 84 %. Trois lois promulguées sous la XIIIe législature sont devenues applicables ; cinq le sont partiellement, avec un taux moyen de 44,6 %. Je salue les efforts de la direction générale des collectivités locales pour les décrets relevant de sa compétence concernant la loi relative à la législation funéraire ; en revanche, la sous-direction des assurances de Bercy n'a pas permis la mise en place de la convention obsèques.
La commission se félicite de l'usage très modéré de la procédure accélérée dans ses domaines de compétence, mise en oeuvre seulement pour quatre lois sur 23, soit un taux (17,4 %) en baisse constante, il convient de le noter. Deux de ces lois ne sont pas encore mises en application et deux le sont faiblement : 11 % pour la loi pénitentiaire et 4% pour la rénovation du dialogue social dans la fonction publique.
Si la part des lois d'origine parlementaire revient à 34,8 %, nous pouvons nous féliciter d'avoir examiné en outre quinze propositions de loi en commission. Les huit lois d'origine parlementaire émanent pour moitié de l'Assemblée nationale et pour moitié du Sénat.
La loi du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation de la justice est entièrement mise en application depuis la parution du décret du 18 mai 2010 ; en revanche, la loi pénitentiaire , quoiqu'examinée en procédure accélérée, reste très partiellement applicable, des décrets restant à prendre pour les droits des détenus, l'assignation à résidence avec surveillance électronique, le conseil d'évaluation des établissements pénitentiaires, l'isolement administratif, le régime disciplinaire des détenus, les règlements intérieurs types, le code de déontologie, les conditions d'aptitude de la réserve civile pénitentiaire, l'aide en nature aux détenus les plus démunis, ainsi que les correspondances. Le 30 septembre dernier sont toutefois intervenus deux décrets, l'un relatif aux procédures simplifiées d'aménagement des peines, l'autre aux modalités d'exécution des fins de peine en l'absence de tout aménagement.
Bien que la loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes , que nous avions votée à l'unanimité, ne prévoie pas de décret d'application, un décret en Conseil d'État était nécessaire pour l'ordonnance de protection. Il est intervenu le 29 septembre 2010 ; trois rapports seront en outre rendus au Parlement d'ici la fin de l'année.
Depuis le 4 mars 2010, la loi sur la fiducie du 19 février 2008 est totalement mise en application. La loi organique du 5 mars 2007 relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats l'est depuis le 1er juin 2007 à l'exception de deux mesures subordonnées à un décret en Conseil d'État. En outre, la loi du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme devrait être très prochainement totalement applicable. S'agissant enfin de la loi du 2 mars 2010 renforçant la lutte contre les violences de groupe , il est trop tôt pour obtenir des statistiques sur l'utilisation du délit d'appartenance à une bande violente.
Nous avons examiné huit textes permettant l'application de la dernière révision constitutionnelle. Les 63 membres du nouveau Conseil économique , social et environnemental ont été désignés avec un léger retard, et le renouvellement des membres du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) devrait intervenir en janvier 2011.
Acte est donné de cette communication.