B. UN NOEUD DE CONTRADICTIONS
1. Des contradictions manifestes du côté de la publicité
Il est
nécessaire d'entrer un peu plus avant dans le détail des
structures de financement de l'audiovisuel public pour prendre l'exacte mesure
des propositions budgétaires de 1999.
Nous avons vu que la hausse des ressources propres des organismes était
limitée à 1,3 %, contre 3,2 % pour les ressources
publiques, ce qui esquisse un rééquilibrage de leur structure de
financement au profit des ressources publiques.
Cette présentation renvoie à la critique traditionnelle de
l'augmentation depuis plusieurs années de la part des ressources de
publicité et de parrainage dans le budget de l'audiovisuel public. De
fait, entre 1994 et 1999 (prévisions), le budget global de l'audiovisuel
public aura augmenté de 21,2 %. Cette évolution recouvre les
mouvements suivants, calculés en francs courants :
- redevance : + 29,9 %
- concours de l'Etat : - 66,3 %
- publicité et parrainage : + 51 %
- autres ressources : - 8,7 %
En francs constants, les évolutions relatives sont les suivantes, pour
une augmentation globale de 13,1 % :
- redevance : + 21,2 %
- concours de l'Etat : - 68,6 %
- publicité et parrainage : + 40,9 %
- autres ressources : - 14,8 %
On sait les arguments habituellement opposés au financement publicitaire
de l'audiovisuel public.
La question sera au centre de l'examen du projet de loi sur l'audiovisuel
présenté à l'Assemblée nationale. L'amorce d'un
rééquilibrage de la structure des recettes de l'audiovisuel
public proposée dans le projet de budget de 1999 s'inscrit explicitement
dans la perspective du recentrage profond que devrait déclencher la
réduction à cinq minutes la durée horaire des messages
publicitaires diffusés par France Télévision. Le ministre
de la culture et de la communication a en effet présenté le
projet de budget comme une préfiguration de cette évolution
profonde.
Il convient donc de juger le projet de budget à partir des intentions
qui ont guidé son élaboration : la diminution, à
terme draconienne, de la part relative des recettes budgétaires des
organismes publics.
Il faut d'abord constater que la traduction budgétaire de la
" nouvelle politique " de financement de l'audiovisuel public est
bien modeste.
En effet, les ressources publicitaires des organismes publics augmenteront
globalement de 2,4 %, ce qui représente un supplément de
107,1 millions de francs par rapport à 1998.
Si l'on examine les objectifs de recettes des organismes, on se rend compte par
ailleurs que la part des ressources publicitaires dans le budget de
France 3 est stabilisée à 30,9 %, mais que leur
progression en volume atteindra 3,6 %, ce qui représente un montant
supplémentaire de 62,9 millions de francs. Par rapport aux
prévisions de recette effectives sur l'exercice 1998, ceci
représente une hausse comprise entre 8,4 % et 10,9 %, selon
les estimations communiquées par France Télévision,
reprises dans le tableau ci-après.
Le décalage entre la présentation des documents
budgétaires et la réalité comptable est dû au fait
que France 3 ne parviendra probablement pas à réaliser
l'objectif de 1 744 millions de francs de recettes publicitaires
prévu dans la loi de finances pour 1998, mais atteindra un montant
vraisemblablement compris entre 1 667 et 1 629 millions de
francs. Les parts d'audience de France 3 fléchissent en
effet : elles sont passées de 18,3 % en janvier 1998 à
16,7 % en octobre, après avoir atteint le plancher de 15,9 %
en septembre. Ce fléchissement est particulièrement perceptible
sur la tranche horaire où France 3 réalise ses gains les
plus forts, la première partie de soirée, de 18 heures
à 20 heures 30, et où les recettes publicitaires se
concentrent.
Cette évolution qui semble largement due au succès de
l'émission de divertissement proposée au même moment par
TF1, se produit dans un contexte marqué par la progression ralentie de
la télévision par rapport à la presse et à la
radio, sur le marché publicitaire : entre juillet 1997 et juillet
1998, la télévision affiche une progression de 4,2 % contre
16,6 % pour la presse et 3,9 % pour la radio, la croissance globale
des investissements publicitaires " trimédia "
s'élevant à 9,8 %, selon la dernière enquête
SECODIP. Ceci renforce d'autant plus les incertitudes qui pèsent sur
l'exercice 1999, que l'annonce de la diminution législative de la
durée horaire des messages publicitaires sur France
Télévision provoque, semble-t-il, des reports de budgets
publicitaires sur TF1 et M6. Les annonceurs souhaitent anticiper une innovation
qui risque de provoquer la saturation des écrans publicitaires des
chaînes privées et l'élévation de leurs tarifs.
France 2 fait face aux mêmes difficultés que France 3,
avec des perspectives qui sont moins préoccupantes : l'augmentation
affichée des objectifs de ressources publicitaires, 0,3 %, soit
12,2 millions de francs, pourrait représenter 3,4 % à
4,6 % par rapport aux encaissements effectifs de 1998.
On notera que la part d'audience de France 2 a fléchi de
22,7 % en janvier 1998 à 21,5 % en octobre, après avoir
atteint le plancher de 21,1 % en septembre. Dans le même temps, la
part d'audience de TF1 passait de 34,1 % à 36,1.
|
% |
TF1 |
France 2 |
France 3 |
Canal + |
La Cinq |
Arte |
M6 |
Autres TV |
TTV |
|
Audiencemoyenne |
4,9 |
3,3 |
2,6 |
0,6 |
0,3 |
0,2 |
1,9 |
0,6 |
14,4 |
Janvier 1998 |
part de marché |
34,1 |
22,7 |
18,3 |
4,3 |
1,9 |
1,6 |
12,9 |
4,1 |
100,0 |
|
A.m. |
4,8 |
3,4 |
2,6 |
0,6 |
0,3 |
0,2 |
1,7 |
0,6 |
14,2 |
février 1998 |
P.m. |
34,0 |
23,7 |
18,0 |
4,4 |
1,6 |
1,6 |
12,2 |
4,2 |
100,0 |
|
A.m. |
4,8 |
3,1 |
2,3 |
0,6 |
0,2 |
0,2 |
1,7 |
0,6 |
13,5 |
mars 1998 |
P.m. |
35,2 |
22,9 |
17,2 |
4,6 |
1,7 |
1,4 |
12,8 |
4,2 |
100,0 |
|
A.m. |
4,7 |
3,0 |
2,2 |
0,6 |
0,2 |
0,2 |
1,7 |
0,5 |
13,3 |
avril 1998 |
P.m. |
35,6 |
22,5 |
13,8 |
4,5 |
1,6 |
1,5 |
13,2 |
4,0 |
100,0 |
|
A.m. |
4,1 |
2,6 |
2,0 |
0,5 |
0,2 |
0,2 |
1,6 |
0,5 |
11,6 |
mai 1998 |
P.m. |
35,2 |
22,5 |
16,9 |
4,5 |
1,6 |
1,6 |
13,7 |
4,3 |
100,0 |
|
A.m. |
4,4 |
2,9 |
2,1 |
0,7 |
0,2 |
0,2 |
1,5 |
0,5 |
12,6 |
juin 1998 |
P.m. |
34,6. |
22,9 |
16,8 |
5,8 |
1,6 |
1,7 |
12,2 |
4,2 |
100,0 |
|
A.m. |
4,1 |
2,9 |
2,0 |
0,5 |
0,2 |
0,2 |
1,5 |
0,5 |
11,9 |
juillet 1998 |
P.m. |
34,7 |
24,2 |
17,1 |
4,5 |
1,8 |
1,6 |
12,3 |
1,0 |
100,0 |
|
A.m. |
3,6 |
2,2 |
1,7 |
0,4 |
0,2 |
0,2 |
1,3 |
0,4 |
10,0 |
août 1998 |
P.m. |
36,4 |
21,9 |
17,2 |
3,7 |
2,3 |
1,5 |
13,0 |
4,3 |
100,0 |
|
A.m. |
4,5 |
2,6 |
1,9 |
0,6 |
0,2 |
0,2 |
1,5 |
1,6 |
12,2 |
septembre 1998 |
P.m. |
37,2 |
21,1 |
15,9 |
4,6 |
1,9 |
1,6 |
12,5 |
4,6 |
100,0 |
|
A.m. |
4,8 |
2,9 |
2,2 |
0,6 |
0,2 |
0,2 |
1,7 |
0,6 |
13,3 |
octobre 1998 |
P.m. |
36,1 |
21,5 |
16,7 |
4,9 |
1,8 |
1,6 |
12,8 |
4,5 |
100,0 |
Source : France Télévision
Le tableau ci-dessous présente les perspectives réelles de
recettes publicitaires de France 2 et France 3 :
Publicité (net chaîne) |
Estimations 1998 |
Loi de Finances 1999 |
Evolution |
France 2 |
Hypothèse haute 2 444
|
2 526 |
+ 3,4 %
|
France 3 |
Hypothèse haute 1 667
|
1 807 |
+ 8,4 %
|
France Télévision |
Hypothèse haute 2
111
|
4 333 |
+ 5,4
|
Source : France Télévision
On constate ainsi que le projet de budget repose sur d'inextricables
contradictions :
- entre le radicalisme des objectifs affichés en ce qui concerne
l'évolution des structures de financement de l'audiovisuel public, et la
modestie du premier pas consenti dans le cadre de ce " budget de
préfiguration " ;
- entre les estimations de recettes publicitaires présentées pour
1999 et les réalités de marché : celui-ci risque de
précéder le Gouvernement dans la voie de la régression des
ressources propres des chaînes.
Cette perspective est inquiétante à deux égards.
Sur le plan conjoncturel, votre rapporteur évoquera plus loin les
tensions qui pèseront dès 1999 sur les ressources publiques des
chaînes, et la difficulté qui en résultera de compenser
l'insuffisance éventuelle des recettes publicitaires.
Sur le plan des principes, votre rapporteur est très
réservé à l'égard d'une analyse sommaire du
rôle de la publicité dans la programmation des chaînes
publiques : faire de la publicité le critère
emblématique des insuffisances de la télévision publique
conduit à des contorsions dont le budget de 1999 offre un aperçu
vraisemblablement prémonitoire.
Les réalités de la publicité sont complexes.
Un financement publicitaire excessif tire sans doute la programmation vers le
bas, mais n'implique pas inévitablement l'alignement sur les
chaînes privées. La ménagère de moins de 50 ans
n'est pas la cible-mère du secteur public qui paraît
répondre dans une assez large mesure à sa vocation de
" fédérer " un public beaucoup plus vaste
2(
*
)
. Il a besoin pour cela de ressources
importantes, que la publicité lui garantit mieux sans doute que les
crédits budgétaires ou la redevance. Comment attirer en effet un
vaste public sans coûteuses " paillettes " ? Comment
poursuivre l'ambition de susciter la production d'oeuvres de qualité,
pourvues d'une valeur patrimoniale, si la ressource publicitaire diminue au
profit d'un financement public dont on sait d'expérience le
caractère fondamentalement aléatoire ? Le débat du
financement est une équation à beaucoup d'inconnues, qu'il
convient d'aborder avec réalisme.
2. Des difficultés latentes du côté des recettes publiques
Ici
encore le commentateur du projet de budget fait face à un noeud de
contradictions inextricables. Il convient d'adopter une nouvelle fois la
logique révélée par le ministre de la culture et de la
communication : ce budget
" comporte des signes annonciateurs de
la réforme à venir "
qui,
" sans attendre
l'entrée en vigueur de la réforme de l'audiovisuel public,
retient une structure de financement du secteur public plus vertueuse que par
le passé ".
On sait que l'enfer est pavé de bonnes intentions. Votre rapporteur doit
à l'audiovisuel public de rechercher les perspectives infernales vers
lesquelles les intentions les plus vertueuses pourraient conduire à
terme.
• La redevance
Le projet de budget est construit sur l'hypothèse d'une augmentation de
4,9 % du produit de la redevance, qui en porterait le montant à
12,25 milliards de francs.
La décomposition de la recette supplémentaire de
569,2 millions de francs mérite un examen approfondi.
Après la hausse de 5 % de 1998, qui avait fait passer le taux de
700 à 735 francs, il a été décidé, on
l'a vu, de n'augmenter en 1999 la redevance que dans des proportions
égales à la hausse prévisionnelle des prix :
1,2 %. Le montant dû pour un récepteur couleur
s'élèvera ainsi à 744 francs (475 francs pour un
récepteur noir et blanc). Ceci représentera une recette
supplémentaire de 126 millions de francs.
La progression des recettes proviendra donc pour l'essentiel (443 millions
de francs) d'autres facteurs : d'une part, l'amélioration du
recouvrement de la taxe consécutif à la possibilité de
recouper le fichier des redevables et celui de la taxe d'habitation, ouverte
par la loi du 12 avril 1996, et d'autre part la réduction des
exonérations à la suite du durcissement des conditions y donnant
droit (cf. encadré ci-après).
Conditions d'ouverture du droit à l'exonération de
redevance à partir du 1er janvier 1998
(décret n° 96-1230 du 30 décembre 1996)
•
être âgé de 65 ans au 1er janvier de l'année
d'exigibilité de la redevance ;
• être titulaire de l'allocation supplémentaire du Fonds de
solidarité vieillesse, définie aux articles L 815-2 à L
815-8 du code de la sécurité sociale
• vivre seul ou avec son conjoint et, éventuellement, avec des
personnes à charge ou avec d'autres personnes qui en 1997 ont
bénéficié d'un revenu fiscal n'excédant pas la
somme de 43 550 francs pour la première part du quotient
familial, majorée de 11 650 francs pour chaque demi-part
supplémentaire ;
• Les conditions sont différentes pour les informes ou invalides
au taux minimum de 80 % :
• bénéficier en 1997 d'un revenu fiscal soumis aux
conditions décrites ci-dessus ;
• ne pas être passible de l'impôt de solidarité sur la
fortune ;
• vivre seul ou avec son conjoint et, éventuellement, avec des
personnes à charge ou avec d'autres personnes qui, en 1997, ont
bénéficié d'un revenu fiscal soumis aux conditions
décrites ci-dessus (à l'exception de la tierce personne
chargée d'une assistance permanente), ou avec des parents en ligne
directe si ceux-ci ont bénéficié en 1997 d'un revenu
fiscal soumis aux conditions décrites ci-dessus.
On peut escompter que ces ajustements susciteront effectivement en 1999 le
surplus de 443 millions de francs attendu. Compte tenu du champ
d'application différent de la taxe d'habitation et de la redevance (les
entreprises sont assujetties à l'une et non à l'autre) et du
probable manque de sensibilité du dernier carré des
réfractaires aux demandes d'explications transmises par
l'administration, l'ouverture de quelque 430 000 nouveaux comptes payants
pourrait cependant s'avérer excessivement optimiste.
Par ailleurs, cette source de recettes ne peut-être
considérée comme une réponse durable aux besoins futurs de
financement du secteur public.
En alignant ostensiblement l'augmentation de la redevance sur celle des prix,
le Gouvernement manifeste d'ailleurs à l'égard des
capacités contributives des redevables une prudence qui augure mal du
financement de l'audiovisuel public quand il s'agira de compenser le brutal
manque à gagner, quelque 2 milliards de francs, que France
Télévision subira en l'an 2000, et de financer les quelque
600 heures de programmes qui devront combler le vide des écrans
publicitaires (aucune estimation du besoin de financement correspondant n'a pu
être fournie à votre rapporteur).
De récentes déclarations de responsables gouvernementaux
confirment le manque d'enthousiasme du gouvernement à l'égard
d'une solution passant par l'augmentation sensible du taux de la
redevance : " Le Gouvernement
" s'engage "
à
ce que
" ce ne soit pas la redevance qui finance le manque à
gagner "
des chaînes publiques, après la réduction
de la publicité prévue par le projet de loi sur l'audiovisuel
public, a ainsi affirmé M. Daniel Vaillant, ministre des Relations avec
le Parlement. La perte de recettes publicitaires
" sera
compensée par le budget "
de l'Etat
" et vous verrez
que dans la loi de finances pour 2000, les crédits du budget de la
culture seront augmentés à due concurrence ".
3(
*
)
Votre rapporteur partage cette prudence à l'égard de la redevance
pour plusieurs raisons.
D'une part, la redevance est un prélèvement de plus en plus
archaïque. Dans le rapport d'information du groupe de travail sur la
communication audiovisuelle
4(
*
)
, votre rapporteur exprimait les
doutes que l'on peut avoir sur la pérennité d'un
prélèvement qui finance une part de plus en plus étroite
de l'offre audiovisuelle, une part plus étroite encore de l'offre
effectivement consommée, et qui s'analysera de plus en plus comme la
rémunération arbitraire d'une consommation virtuelle
forcée. A plus long terme, la possibilité de recevoir des
émissions de télévision sur les écrans
d'ordinateur, non taxés, aura les mêmes conséquences
déstabilisatrices sur cette ressource.
Il convient d'autre part, de tenir compte de l'évolution globale de la
communication audiovisuelle. De ce point de vue, un accroissement excessif du
prélèvement effectué par l'Etat au profit de la
télévision publique ne peut être analysé que comme
une préemption autoritaire sur le budget communication des
téléspectateurs, et serait en profonde contradiction avec les
nouveaux espaces de liberté dont les bouleversements en cours permettent
l'apparition.
Nous sommes loin d'avoir atteint l'excès, estiment les partisans d'une
augmentation sensible de la redevance, en mettant en avant l'expérience
de certains pays étrangers, en particulier l'Allemagne où le taux
dépasse 1 000 francs. Mais ces niveaux ont été
atteints dans un contexte tout à fait différent, marqué
par la rareté de l'offre audiovisuelle et la primauté du secteur
public. Si l'effet d'accoutumance permet à l'Allemagne de maintenir de
tels taux alors que l'audience de la télévision publique
régresse sensiblement dans ce pays, on ne peut attendre la même
attitude de la part du téléspectateur français,
habitué à un prélèvement plus modeste et dont le
désir de choisir librement l'affectation de son budget communication
s'exprime dans le succès inattendu des bouquets satellitaires payants.
Il convient d'être attentif au message délivré par les
quelque 900 000 abonnés à Canal satellite et 500 000
abonnés à TPS.
Le projet de budget de 1999 traduit une conscience embryonnaire de cette
réalité, contradictoire avec le choix affirmé de la
régression des recettes publicitaires.
Il manifeste aussi le début d'un enfermement de l'audiovisuel public
dans une logique de pénurie financière : l'abondement des
budgets des organismes par les crédits budgétaires, seul moyen de
compensation de la baisse ou de la stagnation des autres recettes, n'est pas
à l'ordre du jour.
• Les crédits budgétaires
Les crédits budgétaires aux organismes de l'audiovisuel public
s'élèveront en 1999 à 572 millions de francs, ce qui
représente une diminution de 22,8 % par rapport à 1998. Sur
ce montant, 120 millions de francs, en provenance du chapitre 46-01 des
crédits des services du Premier ministre, représentant les
remboursements d'exonérations de redevance, et 452 millions de
francs, en provenance du budget du ministère des affaires
étrangères, iront à RFI. Seule la radio internationale
continuera ainsi de bénéficier de ressources d'origine
budgétaire.
Ce repli du financement budgétaire des organismes publics marque
pratiquement le terme d'une évolution qui, en quelques années, a
rendu totalement fictive la notion de remboursement d'exonérations,
à partir de laquelle il a pu être tentant de bâtir une
doctrine cohérente de financement du secteur public.
En effet, les crédits représentatifs des remboursements de
redevance diminuent de 58,49 % par rapport à 1998. Ceci
réduit le taux de remboursement à quelque 4 %, contre
10,75 % en 1998, exercice au cours duquel le montant des
exonérations a été estimé à
2,58 milliards de francs, le remboursement s'élevant à
291,1 millions.
Cette évolution a l'avantage de mettre les organismes publics à
l'abri des régulations régulièrement
dénoncées dans le passé par les rapporteurs du
Sénat et de l'Assemblée nationale, régulations souvent
opérées sous le prétexte du dépassement par les
chaînes de leurs objectifs publicitaires.
Rappelons à cet égard que la régulation budgétaire
s'est élevée en 1997 à 46,6 millions de francs :
29 millions de francs pour Radio France et 17,6 millions de francs
pour l'INA.
Elle a été complétée par une annulation de
13 millions de francs portant sur la subvention de RFI imputée sur
le budget des affaires étrangères. Au total, ce sont donc
60 millions de francs de crédits budgétaires qui ont
été annulés en 1997, sur un total de
1 160 millions de francs en loi de finances initiale, soit 5,2 %.
On a déjà indiqué que la régulation de 1998 n'a
porté que sur près de 11 millions de francs.
Le régulateur de 1999 se trouvera devant le vide, ce dont on se
féliciterait sans réserve si l'ordre des priorités n'avait
changé à la suite des annonces du Gouvernement :
- ce n'est plus l'annulation de crédits en cours d'année 1999 qui
pose problème, mais la nécessité éventuelle
d'abonder en cours d'année avec des crédits budgétaires
les budgets des chaînes publiques, si les prévisions du
Gouvernement en termes de recettes publicitaires et de redevance se
revèlent trop optimistes ;
- dans une vision à plus long terme, la tendance apparemment
irréversible à la suppression des crédits
budgétaires des organismes publics (à l'exception des
crédits provenant du budget du ministère des affaires
étrangères) est préoccupante, compte tenu du
caractère peu dynamique du prélèvement
généré par la redevance, compte tenu aussi du reflux
annoncé des recettes publicitaires.