IV. LE PROBLÈME DE LA SÉCURITÉ NUCLÉAIRE À L'EST.

A. UNE PRIORITÉ ABSOLUE

La coopération avec les pays de l'Est constitue un axe majeur de la politique énergétique actuelle et future, dont la priorité absolue concerne la sûreté nucléaire. Celle-ci passe par la formation des hommes, l'entretien, la mise à niveau de certaines centrales, voire la construction de nouvelles centrales, mais aussi par la fermeture de celles qui présentent des risques importants. Il en va de l'avenir du nucléaire dans le monde, qui ne résisterait pas à un nouveau « Tchernobyl ».

La coordination des actions bilatérales entre l'Europe de l'Est et les autres pays est assurée par le G7. Dans le but de compléter ces actions et de financer à hauteur suffisante l'aide aux centrales nucléaires de type ancien (RBMK, VVER 440-230) des pays d'Europe centrale et orientale et de la Communauté d'États indépendants, un fonds structurel multilatéral a également été mis en place à l'instigation de la France et de l'Allemagne.

L'amélioration de la sûreté nucléaire a ainsi bénéficié de 331 millions d'Ecu de crédits communautaires pour les années 1991 à 1993. Et la France a fourni une aide de 600 millions de francs, dont 64 millions en aide bilatérale, sur la même période.

B. UN BILAN MITIGÉ

Le bilan de cette politique est mitigé.

Parmi les aspects positifs, on peut citer les réels progrès accomplis dans la sûreté des centrales nucléaires, le renforcement des autorités de sûreté et la mise en place de régimes législatifs et réglementaires en matière de responsabilité civile nucléaire dans les pays de la zone.

Mais aucun progrès n'a été accompli dans la fermeture effective des réacteurs les plus anciens, même si des engagements en ce sens ont été pris par la Bulgarie, la Lituanie et l'Ukraine.

Trois facteurs peuvent expliquer ce bilan :

- tout d'abord, face aux difficultés économiques rencontrées par ces pays, l'absence de véritables contre-pouvoirs n'a pas permis d'élever la sûreté nucléaire au rang de priorité ;

- ensuite, la Russie a fait preuve d'une ferme détermination politique dans la défense de son industrie nucléaire et a probablement joué de son influence auprès des autres pays de l'Est pour entraver la mise en oeuvre de cette politique ;

- enfin, les pays occidentaux n'ont pas toujours présenté la cohésion nécessaire et les aides annoncées sont rapidement apparues au pays de l'Est insuffisantes pour compenser les pertes financières entraînées par la fermeture de tranches nucléaires.

Ces éléments devront être pris en compte pour la poursuite de l'action internationale.

C. L'EXEMPLE DE KOZLODUY

La centrale de Kozloduy, en Bulgarie, comprend six réacteurs à eau sous pression de conception soviétique, dont quatre de conception ancienne.

Après que l'Agence internationale pour l'énergie atomique (AIEA) ait tiré la sonnette d'alarme sur l'état de cette centrale, différents financements se sont mis en place, pour un budget total de 37,8 millions d'Ecu (de 1992 à 1995) pour le programme européen et de 24 millions d'Ecu pour le Fonds d'assistance multilatérale pour la sûreté nucléaire, géré par la BERD.

EDF a participé au programme d'amélioration de la centrale et a organisé sa coopération sous la forme d'un jumelage entre Kozloduy et la centrale de Bugey.

Si de nombreuses améliorations ont pu être apportées à la centrale, les experts occidentaux n'ont pas pu réaliser les tests nécessaires sur le réacteur n° 1 et celui-ci ne peut fonctionner dans des conditions de sûreté satisfaisante.

Rappelons qu'en dépit des mises en garde de nombreux experts internationaux, dont les experts d'EDF et de l'Institut français de protection et de sécurité nucléaire (IPSN), les autorités bulgares ont décidé de faire redémarrer ce réacteur en octobre dernier.

Un accident grave lié à une rupture de la cuve du réacteur n'étant pas à exclure, les autorités européennes et internationales ont demandé, en vain, à la Bulgarie de procéder à son arrêt.

L'Union européenne, notamment à l'initiative de la France, a même proposé, le 24 octobre dernier, de mettre en place des solutions alternatives, afin de permettre à la Bulgarie de compenser la perte de 5 % de son électricité que fournit le réacteur controversé. Les autorités bulgares ont, pour l'instant, repoussé cette proposition et renoncé à arrêter le réacteur.

Votre commission ne peut que s'alarmer devant une telle situation. Elle demande au Gouvernement de continuer à tout mettre en oeuvre pour inciter les autorités bulgares à prendre une décision qui relève bien entendu de leur souveraineté, mais qui concerne l'ensemble des citoyens européens.

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