III. UNE NOUVELLE HAUSSE DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES CONSACRÉS À LA RECONNAISSANCE, AU SOUTIEN ET À LA RÉPARATION EN FAVEUR DES HARKIS ET RAPATRIÉS
Les moyens alloués aux actions en faveur des rapatriés augmenteraient de 10,1 % avec une enveloppe de crédits de 123,5 millions d'euros en CP. Ils permettent de financer des aides au bénéfice des rapatriés et des harkis, sous la responsabilité de l'ONaCVG, dont l'allocation de reconnaissance, l'allocation viagère et des aides à la formation professionnelle, au désendettement, au bénéfice des conjoints survivants ou encore pour le remboursement de cotisations de retraite complémentaire.
D'une part, les moyens permettant le versement des allocations de reconnaissance et des allocations viagères seraient en augmentation respectivement de 1,8 million d'euros et 9,4 millions d'euros par rapport à 2024. Cette augmentation est, en partie, la conséquence de la levée en 2022 de la forclusion5(*), qui s'appliquait depuis janvier 2016 aux veuves souhaitant demander l'allocation viagère.
S'agissant du dispositif, institué par la loi du 23 février 2022, de réparation du préjudice subi par les harkis et autres membres des formations supplétives, pour l'indignité des conditions de leur accueil, le ministère des armées indique que, de 2022 au 31 juillet 2024, 15 133 demandes ont fait l'objet d'une décision d'indemnisation par la Commission nationale indépendante de reconnaissance et de réparation des préjudices subis par les harkis (CNIH) tandis que 2 766 dossiers (14,8 %) ont fait l'objet d'un rejet. Le montant cumulé de cette indemnisation est de 129,4 millions d'euros. L'enveloppe budgétisée à cette fin dans le PLF s'établit à 70,4 millions d'euros pour 2025 soit une hausse de seulement 6000 000 euros par rapport à 2024.
Pourtant, le Gouvernement a pris acte de la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'Homme, le 4 avril 2024 (voir ci-dessous), et a décidé d'une revalorisation de l'indemnisation s'élevant à 4 000 € par année passée dans les camps de Bias et de Saint-Maurice l'Ardoise (Gard), dans lesquels les rapatriés souffraient d'une privation de liberté. Le décret fixant les nouveaux montants d'indemnisation doit encore être publié.
Or, le cout budgétaire de cette revalorisation pourrait s'élever, selon l'ONaCVG, à, au moins, 42 millions d'euros qui ne sont pas répercutés dans les crédits inscrits au PLF. Les dossiers déjà liquidés devront notamment être réexaminés. Comme l'a indiqué l'Office à la rapporteure, l'indemnisation des harkis et autres rapatriés risque d'être limitée en 2025 et 2026, non pas à cause de la capacité de traitement des demandes, laquelle s'est professionnalisée et systématisée, mais bien par les plafonds trop faibles de crédits budgétaires. Cette situation risque d'entrainer des délais longs d'indemnisation et un afflux de contentieux alors que l'indemnisation n'est pas une dépense pilotable mais un droit.
Indemnisation au titre des conditions d'accueil indignes des harkis et des autres personnes rapatriées résultant de la loi du 23 février 2022
La loi du 23 février 2022 a prévu l'indemnisation des harkis et des autres personnes rapatriées d'Algérie accueillis dans des structures indignes (camps, hameaux de forestage et autres structures) entre 1962 et 1975. Le décret d'application a fixé l'indemnisation à 4 000 euros pour la première année complète de séjour, puis à 1 000 euros par année supplémentaire. Le montant moyen d'indemnisation par personne s'élève à 8 500 euros.
Un arrêt n° 17131/19 de la CEDH du 4 avril 2024 (affaire Tamazount) a considéré que les conditions de vie dans le camp d'accueil de Harkis de Bias (Lot-et-Garonne) étaient incompatibles avec le respect de la dignité humaine et des libertés individuelles. Elle a jugé que l'indemnisation de 4 000 euros, prévue par le Conseil d'État avant la promulgation de la loi, n'était pas suffisante et ne tenait pas compte des spécificités des conditions de vie dans le camp.
* 5 Article 8 de la loi n° 2022-229 du 23 février 2022 portant reconnaissance de la Nation envers les harkis et les autres personnes rapatriées d'Algérie anciennement de statut civil de droit local et réparation des préjudices subis par ceux-ci et leurs familles du fait de l'indignité de leurs conditions d'accueil et de vie dans certaines structures sur le territoire français.