N° 147

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2024

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet
de
loi de finances, considéré comme rejeté
par l'Assemblée nationale, pour
2025,

TOME I

ANCIENS COMBATTANTS, MÉMOIRE
ET LIENS AVEC LA NATION

Par Mme Jocelyne GUIDEZ,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Mouiller, président ; Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale ; Mme Pascale Gruny, M. Jean Sol, Mme Annie Le Houerou, MM. Bernard Jomier, Olivier Henno, Xavier Iacovelli, Mmes Cathy Apourceau-Poly, Véronique Guillotin, M. Daniel Chasseing, Mme Raymonde Poncet Monge, vice-présidents ; Mmes Viviane Malet, Annick Petrus, Corinne Imbert, Corinne Féret, Jocelyne Guidez, secrétaires ; Mmes Marie-Do Aeschlimann, Christine Bonfanti-Dossat, Corinne Bourcier, Céline Brulin, M. Laurent Burgoa, Mmes Marion Canalès, Maryse Carrère,
Catherine Conconne, Patricia Demas, Chantal Deseyne, Brigitte Devésa, M. Jean-Luc Fichet, Mme Frédérique Gerbaud,
M. Khalifé Khalifé, Mmes Florence Lassarade, Marie-Claude Lermytte, Monique Lubin, Brigitte Micouleau, M. Alain Milon, Mmes Laurence Muller-Bronn, Solanges Nadille, Anne-Marie Nédélec, Guylène Pantel, M. François Patriat,
Mmes Émilienne Poumirol, Frédérique Puissat, Marie-Pierre Richer, Anne-Sophie Romagny, Laurence Rossignol, Silvana Silvani, Nadia Sollogoub, Anne Souyris, MM. Dominique Théophile, Jean-Marie Vanlerenberghe.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17ème législ.) : 324, 459, 462, 468, 471, 472, 486, 524, 527, 540 et T.A. 8

Sénat : 143 et 144 à 150 (2024-2025)

L'ESSENTIEL

Avec une dotation en 2025 de 1,9 milliard d'euros, les crédits de la mission diminueraient de 1,11 % par rapport au montant prévu en loi de finances initiale (LFI) pour 2024. Cette baisse s'explique, en grande partie, par la diminution du nombre de bénéficiaires des pensions militaires d'invalidité (PMI) et des autres prestations octroyées aux combattants.

La commission a émis un avis favorable sur cette mission.

*

**

Le PLF 2025 propose un montant de 1,906 milliard d'euros de crédits pour la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ». Cette enveloppe budgétaire serait donc en baisse de 21 millions d'euros (- 1,11 %) par rapport aux crédits ouverts par la loi de finances initiale (LFI) pour 2024. Au sein de la mission, le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation », portant la quasi-totalité des crédits de la mission (1 821 millions d'euros), se rétracterait de 1,02 % par rapport à 2024. Le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale » (85 millions d'euros) diminuerait de 3,16 %.

La rapporteure regrette qu'une fois de plus, l'intitulé de cette mission, en conservant les termes « anciens combattants », soit en décalage avec la réalité du monde combattant, expression plus juste.

Évolution des crédits ouverts en lois de finances initiales (2019-2024) et demandés par le PLF 2025

(en millions d'euros, en crédits de paiement)

Source : Commission des affaires sociales

I. LES CRÉDITS ALLOUÉS AUX ALLOCATIONS EN FAVEUR DU MONDE COMBATTANT CONTINUENT DE SUIVRE LE DÉCLIN DÉMOGRAPHIQUE DE LEURS BÉNÉFICIAIRES

A. UNE BAISSE LOGIQUE DES DÉPENSES DE PENSIONS ET D'ALLOCATIONS VERSÉES AU MONDE COMBATTANT

Les crédits demandés pour le versement des pensions militaires d'invalidité s'élèvent à 662 millions d'euros, soit une diminution de 30 millions d'euros par rapport à la LFI pour 2024. Cette diminution s'explique par la diminution tendancielle du nombre des bénéficiaires de ces pensions. L'hypothèse retenue par le Gouvernement est celle d'une diminution du nombre de pensionnés de 144 981 en 2024 à 137 141 en 2025 (- 5,4 %).

Évolution des dépenses de PMI (2020-2025)

(en millions d'euros)

Source : Commission des affaires sociales, données RAP/PAP

L'allocation de reconnaissance du combattant, dénomination de la retraite du combattant depuis juin 2023, est attribuée aux titulaires de la carte du combattant ayant atteint l'âge de 65 ans, en témoignage de la reconnaissance de la Nation. Le PLF 2025 propose une enveloppe de 505 millions d'euros, en baisse de 31 millions d'euros par rapport à la LFI pour 2024.

L'année 2024 exceptée, l'augmentation exceptionnelle étant liée à un décalage des paiements, les montants versés décroissent en continu en raison de la baisse du nombre des titulaires de la carte du combattant. Ainsi, entre 2024 et 2025, le nombre de bénéficiaires diminuerait de 8 % pour atteindre 564 592.

Évolution des dépenses de l'allocation de reconnaissance (retraite)
du combattant (2020-2025)

(en millions d'euros)

Source : Commission des affaires sociales, données RAP/PAP

En effet, les nouveaux bénéficiaires de la carte du combattant ne peuvent numériquement remplacer les générations déclinantes de combattants des guerres d'Indochine et de Corée et des combats en Afrique du Nord. Ainsi, au 1er juillet 2024, l'ensemble des cartes accordées au titre d'une opération extérieure - hors le cas des missions menées en Algérie entre 3 juillet 1962 et le 1er juillet 1964 - s'élèvent à 238 972. En comparaison, 211 060 cartes ont été attribuées au titre des guerres d'Indochine et de Corée et 1 689 842 au titre de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc.

La qualité de combattant ne peut être reconnue que si des critères stricts de service ou de participation à des actions de feu ou de combat, définis au sein du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, sont remplis et si le théâtre de la mission est reconnu comme opération extérieure (Opex) par un arrêté du 12 janvier 19941(*). Il ressort des travaux de la rapporteure que les associations et fédérations du monde combattant demandent, souvent de longue date, la reconnaissance de certaines missions comme opérations extérieures. Les associations et fédérations prennent ainsi en exemple les missions menées en Algérie entre le 3 juillet 1962 et le 1er juillet 1964, qui, depuis l'inscription en 2019 de cette période au sein des Opex, ouvrent droit à la carte du combattant - comme le rappelle l'historique ci-dessous.

S'il n'appartient pas à la rapporteure de se prononcer sur le bien-fondé de la reconnaissance comme Opex d'un théâtre d'opération précis, elle ne peut qu'appeler le Gouvernement à ne pas écarter a priori une demande sans motiver le refus et à engager les travaux nécessaires d'examen, même s'ils sont parfois longs.

La reconnaissance de combattant au titre des missions menées en Algérie entre le 3 juillet 1962 et le 1er juillet 1964

En vertu des articles L. 311-1 et R. 311-9 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerres, les militaires des unités françaises et les membres des forces supplétives françaises qui ont participé aux opérations effectuées en Afrique du Nord (guerre d'Algérie et combats en Tunisie et au Maroc) jusqu'au 2 juillet 1962 ont vocation à la qualité de combattant.

Toutefois, en application des accords d'Évian, le retrait d'Algérie des militaires français a été progressif et n'a été complet que le 1er juillet 1964. Les militaires engagés dans ces missions lors de cette période n'ont, pendant très longtemps, pas eu le droit à la carte du combattant, le Gouvernement estimant que cela « reviendrait à considérer que l'état de guerre sur ce territoire aurait continué jusqu'à cette date, ce qui est contraire à la vérité historique » (réponse à une question parlementaire du secrétariat d'État, auprès du ministère de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire publiée le 1er septembre 2016).

L'article 109 de la loi de finances pour 2014 a étendu le bénéfice de la carte du combattant (« carte à cheval ») aux militaires pouvant justifier d'un séjour de quatre mois en Algérie entamé avant le 2 juillet 1962 et s'étant prolongé au-delà de cette date sans interruption.

Par ailleurs, l'article 87 de la loi de finances pour 2015 a modifié les critères d'attribution de la carte du combattant au titre des Opex en l'accordant aux militaires justifiant d'une durée de service d'au moins quatre mois (ou 120 jours).

Un arrêté du 12 décembre 2018 a finalement inscrit, à compter du 1er janvier 2019, les missions menées en Algérie entre le 1962 et 1964 comme une opération extérieure donnant droit à la carte du combattant.

Un décret n° 2023-1215 du 20 décembre 2023 a finalement réduit la durée de service en Opex pour la reconnaissance de la qualité de combattant en la fixant à 112 jours.

Selon les informations du ministère des armées, du 1er janvier 2019 au 1er juillet 2024, 39 826 cartes du combattant ont finalement été attribuées au titre des missions conduites en Algérie entre juillet 1962 et juillet 1964.

B. LE MONTANT DES PENSIONS ET ALLOCATIONS TOUJOURS ÉRODÉ PAR L'INFLATION

Depuis 2005, la valeur du point de pension militaire d'invalidité (PMI), qui sert à calculer le montant des pensions militaires d'invalidité et de l'allocation de reconnaissance du combattant, évolue en fonction de l'indice d'ensemble des traitements bruts de la fonction publique de l'État.

Cette modalité de calcul a conduit à une stagnation du montant des PMI du fait du gel du point d'indice des fonctionnaires, malgré l'inflation constatée. Le Gouvernement s'était engagé à revaloriser les pensions militaires d'invalidité à la suite des conclusions de la commission tripartite (Gouvernement - parlementaires - associations d'anciens combattants) constituée sur ce sujet et dont le rapport publié en mars 2021 a fait état d'un écart de 5,9 % entre la valeur du point d'indice de PMI au 1er janvier 2020 et la valeur qu'aurait atteinte ce point s'il avait progressé au même rythme que l'inflation depuis 2005. Cet engagement s'est traduit par la revalorisation du point de PMI, fixé à 14,70 euros en 2021, à hauteur de 15,05 euros au 1er janvier 20222(*), soit une progression de 7 %.

Un décret du 4 février 20223(*) a fixé de nouvelles modalités de calcul du point de PMI en fonction de l'évolution des rémunérations indiciaires de la fonction publique mesurée par l'indice de traitement brut - grille indiciaire (ITB-GI). Le droit prévoit désormais que l'évolution de la rémunération des fonctionnaires est répercutée sur la valeur du point de PMI une seule fois par an, au début de chaque année civile, sur la base d'une période de référence allant du troisième trimestre de l'année n-2 au deuxième trimestre inclus de l'année n-1.

L'entrée en vigueur de cette mesure a toutefois été reportée au 1er janvier 2026 et des modalités à titre transitoire de calcul ont ainsi été prévues pour les années 2023, 2024 et 2025. Le Gouvernement a en effet choisi de prendre en compte dès le rehaussement du 1er janvier 2023 du point de PMI la revalorisation du point d'indice de la fonction publique intervenue en juillet 2022.

Selon les règles transitoires, la revalorisation au 1er janvier 2025 doit se faire en fonction de l'évolution de l'ITB-GI sur la période comprenant le dernier trimestre de 2023 et des deux premiers trimestres de 2024. Sur cette période, l'évolution de l'ITB-GI, qui prend notamment en compte l'attribution en janvier 2024 de 5 points d'indice à tous les fonctionnaires, s'élève à 1,07 %.

Or, la rapporteure constate que le PLF 2025 est construit avec une hypothèse d'une valeur du point de PMI de 16,05 € au 1er janvier 2025 soit une revalorisation de seulement 0,94 % par rapport à 2024. D'après les informations transmises par le Gouvernement à la demande de la rapporteure, le point de PMI devrait finalement s'établir en janvier 2025 à 16,09 € ou 16,10 € soit une revalorisation proche de 1,2 %. La rapporteure a également eu l'assurance que la budgétisation du PLF permettra de financer le surcoût qui devrait être proche de 4 millions d'euros. La hausse globale du point de PMI resterait cependant en-deçà de l'inflation qui, selon les prévisions disponibles, devrait s'établir à 1,8 % en 2025.

Évolution de la valeur du point de PMI (2022-2025)

1er janvier 2022

1er janvier 2023

1er janvier 2024

1er janvier 2025 (prévue par le PLF)

1er janvier 2025 (annoncée par le Gouvernement à la rapporteure)

15,05 €

15,05 €

15,90 €

16,05 €

16,05 €

Pour la préservation du pouvoir d'achat des pensionnés, la commission réitère son appel au Gouvernement à respecter son engagement de réunir la commission tripartite pour évaluer la nécessité de prendre à l'avenir de nouvelles mesures de correction de la valeur du point.

La rapporteure regrette que ne soit pas encore remis le rapport que le Gouvernement doit établir en 2024, sur le fondement de l'article D. 125-5 du code précité, aux fins de comparer l'évolution constatée de la valeur du point de pension et de celle de l'indice des prix à la consommation hors tabac.

II. LES MOYENS ACCORDÉS AUX OPÉRATEURS NE SONT PAS FRAGILISÉS

A. DES SUBVENTIONS À L'INI ET À L'ONACVG QUI SE MAINTIENNENT MALGRÉ LE CONTEXTE BUDGÉTAIRE DIFFICILE

La subvention pour charges de service public versée à l'Institution nationale des Invalides (INI) resterait stable en 2025 par rapport à 2024 en s'établissant à 14,44 millions d'euros. En revanche, le PLF 2025 prévoit un engagement exceptionnel de 7,2 millions d'euros au titre de la subvention pour charges d'investissement (SCI) pour un financement complémentaire de l'opération du schéma directeur d'infrastructure (SDI) de l'établissement.

La subvention pour charges de service public versée à l'Office national des combattants et des victimes de guerre (ONaCVG) croîtrait de 62,5 millions d'euros en LFI pour 2024 à 65,7 millions d'euros en PLF 2025.

La subvention pour charges de service publique accordée à l'ONaCVG

Selon le programme annuel de performance (PAP) 2025, la hausse de 3,2 millions d'euros de la subvention se répartirait ainsi :

1,12 million d'euros supplémentaires seraient alloués au dispositif des maisons ATHOS pour financer les nouvelles maisons déployées (voir encadré ci-après).

1 million d'euros seraient accordés pour les travaux dans les hauts lieux de la mémoire nationale et l'entretien des sépultures de guerre. Cette enveloppe devrait, selon l'ONaCVG, permettre de résorber un déficit structurel de cette ligne budgétaire dû, notamment, à la gratuité de l'entrée accordée aux jeunes dans les hauts-lieux ;

450 000 euros pour le relogement de services départementaux de l'ONaCVG.

En outre, l'Office bénéficierait d'une subvention exceptionnelle d'investissement de 650 000 euros pour renforcer la sécurité de ses systèmes informatiques.

Les moyens accordés à l'ONaCVG pour assurer ses missions sont donc globalement satisfaisants.

L'Office pointe toutefois que, sur l'année 2024, ses effectifs baissent, non pas en raison d'un plafond des emplois contraignant ou de besoins réduits, mais parce que ses marges budgétaires trop faibles l'ont contraint à geler les recrutements sur une grande partie de l'année.

Enfin, la subvention versée par le ministère des armées à l'ONaCVG pour remplir ses missions d'action sociale serait maintenue à 29 millions d'euros pour l'année 2025. L'effort budgétaire réalisé en 2024 au titre du soutien des pupilles de la Nation et des victimes de guerre majeures serait ainsi pérennisé l'année prochaine.

B. LE DISPOSITIF ATHOS POURSUIT SA CONSOLIDATION ET REMPLIT PLEINEMENT LES OBJECTIFS QUI LUI SONT ASSIGNÉS

Depuis 2023, le financement du dispositif Athos de réhabilitation psychosociale des blessés psychiques est assuré par la subvention pour charge de service public octroyée à l'ONaCVG par le programme 169. Dans le cadre de la LFI pour 2024, 2,06 millions d'euros supplémentaires ont été accordés afin, notamment, de financer l'ouverture de deux nouvelles maisons Athos. La nouvelle hausse de 1,12 million d'euros dans le présent PLF porterait le budget total du dispositif ATHOS à 6,1 millions d'euros en 2025.

La rapporteure se réjouit de la consolidation des moyens du dispositif Athos et appelle à leur pérennisation sur le long terme.

Depuis 2023, le co-pilotage opérationnel d'Athos est partagé entre l'Igesa et l'ONaCVG sous l'autorité d'un comité directeur dont la co-présidence est assurée par le chef d'état-major de l'armée de Terre et par le secrétaire général pour l'administration du ministère des armées. Le financement du dispositif fait également intervenir des mécènes privés, ainsi que l'a indiqué à la rapporteure la Fédération nationale André Maginot. Cette dernière devrait apporter un financement au dispositif Athos à hauteur de 12 millions d'euros en 2025.

Preuve de sa réussite, le dispositif Athos accueillait, début 2024, plus de 400 membres au sein des quatre maisons alors en activité, l'occupation maximale ayant même été déjà atteinte à la maison Athos de Bordeaux. Selon les informations transmises à la rapporteure, la rapide montée en puissance du dispositif conduit ces maisons à maintenant faire face à de nouveaux défis en matière de recrutement, de qualification et de fidélisation des équipes.

La naissance du dispositif Athos

La prise en charge des blessures post-traumatiques et le suivi de la santé psychique dans les armées ont été renforcés en réponse à l'augmentation du nombre de ces blessés psychiques. Un rapport de 2019 du Haut Comité d'évaluation de la condition militaire (HCECM)4(*) pointait que 2 376 troubles psychiques en lien avec un événement traumatisant ont été recensés entre 2010 et 2017 (contre 527 militaires blessés par armes ou engins explosifs en opérations extérieurs). Un militaire est donc 4,5 fois plus exposé à des troubles psychiques qu'à une blessure physique par arme ou par engin explosif.

Dans ce contexte, Athos est un dispositif de réhabilitation psychosociale des militaires et anciens militaires blessés psychiques en service, créé en février 2019 à l'initiative de l'armée de Terre et en partenariat avec l'Institution de gestion sociale des armées (Igesa). Ces structures proposent une offre non médicalisée, complémentaire du parcours de soins mis en oeuvre par le service de santé des armées (SSA).

Deux premières maisons ont été ouvertes en 2021 à Cambes (près de Bordeaux) et à Toulon. Deux nouvelles maisons ont été créées à Aix-les-Bains (2022), remplacée par celle de Coise-Saint-Jean-Pied-Gauthier en Savoie (2024) et à Auray dans le Morbihan (2023). Une maison à Villefranche de Lauragais (Haute-Garonne) a été inaugurée en 2024 tandis que l'ouverture d'une maison dans le Grand Est, annoncée pour 2024, a finalement été repoussée à 2025.

III. UNE NOUVELLE HAUSSE DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES CONSACRÉS À LA RECONNAISSANCE, AU SOUTIEN ET À LA RÉPARATION EN FAVEUR DES HARKIS ET RAPATRIÉS

Les moyens alloués aux actions en faveur des rapatriés augmenteraient de 10,1 % avec une enveloppe de crédits de 123,5 millions d'euros en CP. Ils permettent de financer des aides au bénéfice des rapatriés et des harkis, sous la responsabilité de l'ONaCVG, dont l'allocation de reconnaissance, l'allocation viagère et des aides à la formation professionnelle, au désendettement, au bénéfice des conjoints survivants ou encore pour le remboursement de cotisations de retraite complémentaire.

D'une part, les moyens permettant le versement des allocations de reconnaissance et des allocations viagères seraient en augmentation respectivement de 1,8 million d'euros et 9,4 millions d'euros par rapport à 2024. Cette augmentation est, en partie, la conséquence de la levée en 2022 de la forclusion5(*), qui s'appliquait depuis janvier 2016 aux veuves souhaitant demander l'allocation viagère.

S'agissant du dispositif, institué par la loi du 23 février 2022, de réparation du préjudice subi par les harkis et autres membres des formations supplétives, pour l'indignité des conditions de leur accueil, le ministère des armées indique que, de 2022 au 31 juillet 2024, 15 133 demandes ont fait l'objet d'une décision d'indemnisation par la Commission nationale indépendante de reconnaissance et de réparation des préjudices subis par les harkis (CNIH) tandis que 2 766 dossiers (14,8 %) ont fait l'objet d'un rejet. Le montant cumulé de cette indemnisation est de 129,4 millions d'euros. L'enveloppe budgétisée à cette fin dans le PLF s'établit à 70,4 millions d'euros pour 2025 soit une hausse de seulement 6000 000 euros par rapport à 2024.

Pourtant, le Gouvernement a pris acte de la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'Homme, le 4 avril 2024 (voir ci-dessous), et a décidé d'une revalorisation de l'indemnisation s'élevant à 4 000 € par année passée dans les camps de Bias et de Saint-Maurice l'Ardoise (Gard), dans lesquels les rapatriés souffraient d'une privation de liberté. Le décret fixant les nouveaux montants d'indemnisation doit encore être publié.

Or, le cout budgétaire de cette revalorisation pourrait s'élever, selon l'ONaCVG, à, au moins, 42 millions d'euros qui ne sont pas répercutés dans les crédits inscrits au PLF. Les dossiers déjà liquidés devront notamment être réexaminés. Comme l'a indiqué l'Office à la rapporteure, l'indemnisation des harkis et autres rapatriés risque d'être limitée en 2025 et 2026, non pas à cause de la capacité de traitement des demandes, laquelle s'est professionnalisée et systématisée, mais bien par les plafonds trop faibles de crédits budgétaires. Cette situation risque d'entrainer des délais longs d'indemnisation et un afflux de contentieux alors que l'indemnisation n'est pas une dépense pilotable mais un droit.

Indemnisation au titre des conditions d'accueil indignes des harkis et des autres personnes rapatriées résultant de la loi du 23 février 2022

La loi du 23 février 2022 a prévu l'indemnisation des harkis et des autres personnes rapatriées d'Algérie accueillis dans des structures indignes (camps, hameaux de forestage et autres structures) entre 1962 et 1975. Le décret d'application a fixé l'indemnisation à 4 000 euros pour la première année complète de séjour, puis à 1 000 euros par année supplémentaire. Le montant moyen d'indemnisation par personne s'élève à 8 500 euros.

Un arrêt n° 17131/19 de la CEDH du 4 avril 2024 (affaire Tamazount) a considéré que les conditions de vie dans le camp d'accueil de Harkis de Bias (Lot-et-Garonne) étaient incompatibles avec le respect de la dignité humaine et des libertés individuelles. Elle a jugé que l'indemnisation de 4 000 euros, prévue par le Conseil d'État avant la promulgation de la loi, n'était pas suffisante et ne tenait pas compte des spécificités des conditions de vie dans le camp.

IV. LA POLITIQUE DE MÉMOIRE ET LES LIENS ENTRE LA NATION ET SON ARMÉE

La ligne budgétaire destinée à la politique de mémoire diminuerait de 22 % par rapport à 2024 pour s'établir à 31,4 millions d'euros. Cette baisse s'explique par la spécificité que constitue l'année 2024 au regard des célébrations mémorielles liées au 80ème anniversaire des Débarquements de Normandie et de Provence.

Les crédits consacrés aux liens armées-jeunesse augmenteraient significativement de 57,4 % en 2025 pour atteindre 41 millions d'euros en crédits de paiement. Cette hausse importante s'explique par une refonte complète de la journée défense et citoyenneté (JDC) dans l'optique de susciter davantage d'intérêt pour les carrières de la défense. C'est ainsi un montant supplémentaire de 15 millions d'euros qui sera dédié à la JDC. La rapporteure estime que cette réforme de la JDC doit être l'occasion d'interroger le bien-fondé de maintenir le dispositif du service national universel (SNU) en comparaison à la création de plusieurs jours « défense et citoyenneté » obligatoires et plus ambitieux.

V. L'INDEMNISATION DES VICTIMES DE PERSÉCUTIONS ET D'ACTES DE BARBARIE PENDANT LA SECONDE GUERRE MONDIALE

Les crédits du programme 158 permettent de financer l'indemnisation, sous forme de capital ou de rente, des orphelins de la déportation et des victimes de spoliations antisémites, ainsi que des victimes d'actes de barbarie durant la seconde guerre mondiale.

Les crédits demandés pour 2025 au titre de ce programme s'élèvent à 85,35 millions d'euros, soit une diminution de 3,16 % par rapport à la LFI pour 2024. Cette évolution des crédits du programme s'explique par l'effet conjugué de la diminution naturelle du nombre de crédirentiers et des nouvelles demandes d'indemnisation.

S'agissant des indemnisations des victimes de spoliations durant la seconde guerre mondiale, après demande à la commission d'indemnisation des victimes de spoliations (CIVS), les crédits augmenteraient très légèrement de 3,91 % pour atteindre 11,2 millions d'euros.

En revanche, les crédits pour l'indemnisation des orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites chuteraient de 5,91 % pour 2025. Les nouvelles demandes deviennent en effet très rares : seules sept ont été formulées en 2021, une en 2022 et trois en 2023.

Réunie le mercredi 27 novembre 2024 sous la présidence de Philippe Mouiller, la commission des affaires sociales a examiné le rapport pour avis de Jocelyne Guidez sur les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » du projet de loi de finances pour 2025.

Elle a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 27 novembre 2024, sous la présidence de M. Philippe Mouiller, président, la commission examine le rapport pour avis de Mme Jocelyne Guidez sur la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » du projet de loi de finances pour 2025.

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ». - En 2025, la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » bénéficiera de 1,906 milliard d'euros en crédits de paiement (CP), après une enveloppe de 1,927 milliard d'euros ouverte en loi de finances initiale (LFI) de 2024.

Avant d'en présenter les enjeux financiers, je regrette d'emblée que, une fois encore, les termes « anciens combattants » retenus dans l'intitulé de la mission ne soient pas en conformité avec la nouvelle réalité du monde combattant...

Par rapport à l'an passé, les crédits demandés se contractent légèrement de 1,02 % et suivent donc la baisse continue du nombre de bénéficiaires des pensions militaires d'invalidité (PMI) et des autres prestations versées aux combattants.

Les crédits prévus pour le versement des PMI s'élèvent à 662 millions d'euros, soit une diminution de 30 millions d'euros par rapport à la LFI de 2024. Cette baisse s'explique, comme chaque année, par le déclin démographique naturel des bénéficiaires des pensions. L'hypothèse retenue par le Gouvernement est celle d'une diminution de 5,4 % du nombre de pensionnés, qui devrait atteindre 137 000 en 2025.

L'allocation de reconnaissance du combattant, dénomination de la retraite du combattant depuis juin 2023, est attribuée aux titulaires de la carte du combattant ayant atteint l'âge de 65 ans, en témoignage de la reconnaissance de la Nation. L'enveloppe proposée est de 505 millions d'euros, en baisse de 31 millions d'euros par rapport à la LFI de 2024. De même, la diminution anticipée de 8 % du nombre de bénéficiaires explique une moindre budgétisation.

Cette tendance démographique est appelée à se poursuivre puisque les nouveaux titulaires de la carte du combattant ne peuvent numériquement remplacer les générations déclinantes des combats d'Indochine ou d'Afrique du Nord. Ainsi, au 1er juillet 2024, le nombre de l'ensemble des cartes accordées au titre d'une opération extérieure (Opex) s'élevait à 239 000, alors que plus de 1,6 million de cartes ont été attribuées au titre de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc.

À ce sujet, les fédérations et associations du monde combattant sollicitent de longue date l'ouverture de la reconnaissance d'Opex à certains théâtres d'intervention extérieure, afin que les militaires engagés dans ces missions puissent se voir reconnaître la qualité de combattants. Comme moi, vous devez être saisis de demandes en ce sens.

Il faut tenir un discours de franchise sur cette question qui relève, au cas par cas, du seul pouvoir réglementaire. Les enjeux - de vérité historique, de reconnaissance, de traitement équitable, mais également d'incidence budgétaire - de cette qualification exigent que les réponses à ces demandes ne soient pas stéréotypées, mais le fruit de véritables travaux. Les gouvernements successifs ont tendance à engager des démarches sans jamais poursuivre sur le long terme ces réflexions, ce qui est regrettable.

Les pensions et allocations sont calculées sur la base du point de PMI qui, depuis 2005, est lui-même indexé sur l'évolution de la rémunération des fonctionnaires.

En 2022, une revalorisation de 7 % du point de PMI avait été décidée à titre exceptionnel. Elle résultait des travaux d'une commission tripartite dont le rapport de mars 2021 avait constaté un écart de 5,9 % entre la valeur du point de PMI au 1er janvier 2020 et la valeur atteinte si ce point avait progressé avec l'inflation depuis 2005.

Les modalités de calcul du point de PMI ont ensuite été revues par décret en 2022. Toutefois, des règles transitoires ont été prévues afin de prendre en compte dans l'évolution de 2023 la revalorisation du point d'indice des fonctionnaires intervenue en juillet 2022. La revalorisation au 1er janvier 2025 doit se faire en fonction de l'évolution de l'indice de traitement brut - grille indiciaire (ITB-GI) sur la période du dernier trimestre de 2023 et des deux premiers trimestres de 2024.

Sur cette période, l'évolution de l'ITB-GI, qui prend notamment en compte l'attribution en janvier 2024 de 5 points d'indice à tous les fonctionnaires, s'élève à 1,07 %. Or le PLF pour 2025 est construit avec une hypothèse d'une valeur du point de PMI de 16,05 euros au 1er janvier 2025, soit une revalorisation de seulement 0,94 % par rapport à 2024. Après des échanges avec le Gouvernement, j'ai obtenu l'assurance que le point de PMI devrait finalement s'établir à 16,09 euros ou 16,10 euros en janvier 2025, soit une revalorisation proche de 1,2 %. Le Gouvernement m'a également garanti que la budgétisation permettra de financer ce surcoût qui avoisinera 4 millions d'euros.

Cependant, la hausse globale du point de PMI reste inférieure au niveau de l'inflation qui, selon les prévisions disponibles, devrait s'établir à 1,8 % en 2025. Pour la préservation du pouvoir d'achat des pensionnés, le Gouvernement doit respecter son engagement de réunir la commission tripartite pour évaluer la nécessité de prendre de nouvelles mesures de correction du point. De même, il est regrettable que le rapport prévu pour 2024 et devant comparer l'évolution constatée de la valeur du point et de celle de l'indice des prix à la consommation (IPC) ne soit pas encore remis alors que la période d'examen budgétaire est déjà bien entamée...

J'en viens aux moyens alloués aux opérateurs qui accompagnent les combattants et les blessés de guerre.

La subvention pour charge de service public versée à l'Institution nationale des invalides (INI) s'établit à 14,4 millions d'euros et reste stable.

La subvention versée à l'Office national des combattants et des victimes de guerre (ONaCVG) progresse de 62,5 millions d'euros en LFI de 2024 à 65,7 millions d'euros en PLF pour 2025. Les moyens accordés à l'ONaCVG pour assurer ses missions sont globalement satisfaisants. L'Office souligne néanmoins que ses effectifs sont plutôt décroissants, non en raison d'un plafond d'emplois contraignant ou de besoins réduits, mais parce que ses marges budgétaires trop faibles l'ont contraint à geler les recrutements durant une grande partie de l'année 2024.

Les 3,2 millions d'euros de crédits supplémentaires demandés pour l'ONaCVG seraient alloués à l'entretien des hauts lieux de la mémoire nationale et des sépultures de guerre, dont les moyens financiers sont insuffisants depuis quelques années, ainsi qu'au relogement de services départementaux de l'opérateur. Un montant de 1,12 million d'euros supplémentaires serait également destiné au dispositif des maisons Athos en vue de financer le déploiement de nouvelles maisons.

Ce dispositif de réhabilitation psychosociale des blessés psychiques est financé par la subvention à l'Office depuis 2023. L'enveloppe budgétaire globale en faveur des maisons Athos atteindra 6,1 millions d'euros en 2025. Je me réjouis que leurs moyens financiers soient ainsi consolidés. Le dispositif, qui entrera bientôt dans sa sixième année d'existence, a pleinement prouvé son utilité. Cinq maisons sont déjà en fonctionnement, pour 400 membres accueillis début 2024. Une sixième structure doit ouvrir ses portes en 2025 dans la région Grand Est.

Les moyens alloués aux actions en faveur des harkis et des autres rapatriés augmentent de 10,1 %, avec une budgétisation de 123,5 millions d'euros.

Les enveloppes consacrées à l'allocation de reconnaissance et à l'allocation viagère progressent, respectivement de 1,8 million d'euros et de 9,4 millions d'euros, par rapport à 2024. Cette augmentation est en partie la conséquence de la levée par la loi du 23 février 2022 de la forclusion qui s'appliquait depuis janvier 2016 aux veuves de harkis souhaitant demander l'allocation viagère - nous l'avions déjà évoquée l'année dernière.

L'autre ligne budgétaire concerne le dispositif institué par la loi précitée de réparation du préjudice subi par les harkis et les autres membres des formations supplétives pour l'indignité des conditions de leur accueil. Le ministère des armées indique que, de 2022 au 31 juillet 2024, 15 133 demandes ont fait l'objet d'une décision d'indemnisation par la Commission nationale indépendante de reconnaissance et de réparation des préjudices subis par les harkis (CNIH). Le montant cumulé de cette indemnisation est de 129,4 millions d'euros.

Pour 2025, l'enveloppe budgétisée à cette fin s'établit à hauteur de 70,4 millions d'euros, soit une hausse de seulement 600 000 euros par rapport à 2024. Or la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) le 4 avril 2024 dans l'affaire Tamazount. Le Gouvernement a pris acte de cette décision et a choisi de revaloriser la réparation en portant à 4 000 euros l'indemnisation par année passée dans les camps de Bias et de Saint-Maurice-l'Ardoise, contre un dispositif actuel prévoyant 4 000 euros la première année complète de séjour et 1 000 euros par année supplémentaire.

Cette revalorisation représentera un coût budgétaire de plus de 40 millions d'euros, qui n'est donc pas intégré dans le PLF. La décision du Gouvernement de donner la priorité à la réparation des harkis survivants plutôt qu'à leurs ayants droit se comprend. Toutefois, je regrette l'absence de budgétisation complète d'un droit à indemnisation qui n'est pas pilotable. Cette décision risque de rallonger la durée de traitement des demandes et de créer un contentieux juridique pour des raisons de simple affichage comptable.

Les crédits en faveur de la politique de mémoire diminuent de 22 % par rapport à 2024, pour s'établir à 31,4 millions d'euros. Cette baisse s'explique par la spécificité de l'année 2024, avec les célébrations mémorielles du 80e anniversaire des débarquements de Normandie et de Provence.

En revanche, les crédits consacrés aux liens armées-jeunesse augmenteront significativement de 57,4 % en 2025, pour atteindre 41 millions d'euros. La hausse s'explique par une refonte complète de la Journée défense et citoyenneté (JDC) annoncée par le Gouvernement. Un montant supplémentaire de 15 millions d'euros est ainsi prévu dans l'optique de « remilitariser » cette journée. Ma conviction est que cette réforme, qui n'est pas encore aboutie, devrait être l'occasion de se réinterroger sur le bien-fondé du maintien en parallèle du service national universel (SNU). Ce dispositif n'a pas comblé toutes les attentes et ne sera probablement jamais rendu obligatoire. Si, certes, il n'est pas financé sur les crédits de la mission, il y a néanmoins là un enjeu global d'efficience de la dépense publique.

En ce qui concerne l'indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale, 85,35 millions d'euros sont prévus en 2025, soit une diminution de 3,16 % par rapport à la LFI de 2024.

Les crédits pour l'indemnisation des orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites diminueront de 5,91 % en 2025, les nouvelles demandes devenant rares.

Concernant les indemnisations des victimes de spoliations durant la Seconde Guerre mondiale, après demande à la Commission pour l'indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation (CIVS), les crédits augmentent très légèrement de 3,91 %, pour atteindre 11,2 millions d'euros. De nouvelles demandes continuent d'être déposées auprès de la Commission : en 2023, 85 nouveaux dossiers ont été enregistrés, dont 54 pour des spoliations matérielles, 19 pour des spoliations bancaires et 12 plus spécifiquement pour des spoliations de biens culturels.

En conclusion, je vous invite à émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission, sous le bénéfice des observations formulées s'agissant de la PMI.

Mme Émilienne Poumirol. - Je regrette également l'absence d'alignement du point de PMI sur l'inflation, alors que cette pension s'adresse à d'anciens combattants dont les moyens demeurent modestes et pour qui chaque augmentation compte.

Le renforcement du soutien, via l'ONaCVG, aux maisons Athos et à leur développement apparaît important en raison du rôle que ce dispositif joue dans le traitement du syndrome post-traumatique des anciens combattants.

Par ailleurs, quel sera le règlement financier de l'affaire Tamazount, après la condamnation de la France par la CEDH ? Pourquoi le PLF pour 2025 ne prévoit-il pas ce règlement et quels autres financements pourront-ils y pourvoir ?

Enfin, je m'interroge à mon tour sur l'intérêt de maintenir le SNU à côté de la JDC.

Mme Marie-Pierre Richer. - Je siège au sein de la CNIH. Je puis préciser qu'elle a commencé son travail d'indemnisation des personnes qui ont été résidentes des camps de Bias et de Saint-Maurice-l'Ardoise. Cette commission doit remettre tous les ans son rapport au Premier ministre, ce qu'elle n'a pu faire cette année en raison du contexte politique. Dans son premier rapport, elle sollicitait le Gouvernement sur le montant des indemnisations et la ministre Patricia Mirallès avait entériné le principe de leur revalorisation. Des personnes ont ainsi pu engager un second recours devant la CNIH afin d'obtenir un complément d'indemnisation. Les fonds utilisés sont ceux qui ont déjà été alloués à l'indemnisation des harkis et il nous faudra rester vigilants quant au niveau des moyens restant disponibles pour l'instruction de nouveaux dossiers.

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis. - L'absence de budgétisation pour 2025 conduit à étaler l'indemnisation sur plusieurs années alors même que l'ONaCVG dispose de la capacité de traiter les demandes.

Sur le point de PMI, après la perspective d'une revalorisation de seulement 0,94 % par rapport à 2024, je suis satisfaite de l'augmentation à laquelle le ministre a consenti lors de notre rencontre de lundi dernier ; elle correspond, à peu de choses près, à ce que souhaitaient les associations du monde combattant que j'ai entendues en audition.

Ma visite de la maison Athos de Bordeaux m'a instruite sur la nature de l'accompagnement que ce type de structures apporte. Il s'agit non pas d'un suivi médical, mais d'un accompagnement qui met l'accent sur la dimension collective de la réhabilitation psychosociale. Elle m'a convaincue de leur intérêt pour nos armées et nos blessés.

Le SNU témoignait à l'origine d'une belle volonté. Il faut cependant s'avouer que le dispositif ne fonctionne pas convenablement, alors qu'il représente un coût non négligeable. On n'a pas su attirer vers le SNU le public qu'il pouvait intéresser.

Quant à la JDC, elle ne présente non plus guère d'utilité si on l'envisage uniquement sous l'angle du repérage, en substitution de ce qui existait dans le cadre du service militaire, des jeunes qui, malheureusement, ne savent ni lire, ni écrire, ni compter. Reconnaissons cependant que nos armées manquent de jeunes qui s'engagent en leur sein, d'où l'idée de « remilitariser » la JDC. De ce point de vue, une unique journée paraît insuffisante et, à titre personnel, je serais favorable à en étendre le dispositif à cinq jours. Une telle durée permettrait de mieux exposer la diversité des métiers susceptibles d'attirer nos jeunes vers nos armées, ce qui était un avantage du service militaire. Évidemment, une telle modification engendrerait un coût.

Mme Émilienne Poumirol. - Le service militaire a précisément été supprimé en raison du coût qu'il représentait.

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis. - Les locaux militaires qui subsistent ne suffiraient du reste peut-être plus, et la question de la disponibilité de l'encadrement militaire se pose. Sans doute le SNU n'a-t-il pas, pour sa part, été supprimé afin de se laisser le temps d'une nécessaire réflexion.

Mme Nadia Sollogoub. - Aussi curieux que cela paraisse, nous disposons dans la Nièvre d'une préparation militaire Marine (PMM). Il faut reconnaître qu'elle fonctionne très bien. Ces PMM risquent-elles d'être affectées par d'éventuelles réformes des dispositifs existants ?

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis. - Je n'ai pas connaissance d'une quelconque remise en cause.

M. Xavier Iacovelli. - Elles continuent d'exister et nombre de jeunes s'y inscrivent en effet.

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis. - L'interrogation concerne le SNU. De son côté, le service militaire volontaire (SMV) fonctionne très bien ; il mériterait d'ailleurs peut-être que nous y consacrions davantage de moyens. Il y a cinq ans, il permettait à 78 % des jeunes d'obtenir un contrat ; la proportion atteint désormais 86 %.

Mme Silvana Silvani. - Merci d'avoir évoqué le SNU, même s'il n'est pas financé par les crédits de la présente mission. Rien n'empêche de supprimer ce dispositif qui ne donne pas satisfaction. L'octroi d'un montant supplémentaire à la JDC en vue de sa « remilitarisation » m'inquiète et suscite ma réticence ; je le mets en rapport avec l'augmentation, qui intervient par ailleurs dans le PLF, des crédits de la mission « Défense ».

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis. - Je ne dis pas qu'il ne faut pas supprimer le SNU, au contraire. Je souligne que l'on ne saurait le faire du jour au lendemain, sans y substituer un autre dispositif.

La JDC, notamment si elle devait s'étendre à plusieurs jours, peut permettre de concilier deux objectifs : d'une part, sensibiliser les jeunes aux enjeux de la défense nationale - n'oublions pas que la guerre pourrait revenir à nos portes - et, d'autre part, les ouvrir à des métiers auxquels ils ne penseraient pas spontanément. Il n'est certes pas question que tous intègrent nos armées !

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
ET CONTRIBUTIONS ÉCRITES

· Fédération Nationale des Anciens Combattants en Algérie, Maroc et Tunisie (Fnaca)

Jean-Louis Nageotte, responsable juridique nationale et social

· Fédération nationale André Maginot (Fnam)

Christian Piquet, président délégué

· Union nationale des combattants (UNC)

Général Pascal Dupont, conseiller juridique

· Fédération nationale des anciens des missions extérieures et opérations extérieures (Fname-Opex)

Jean-Jacques Soulas, administrateur national

· Association nationale des combattants des opérations extérieures (Anopex)

Jean-Pierre Pakula, président délégué

· Office National des anciens combattants et victimes de guerre (ONaCVG)

Général Éric Maury, directeur adjoint

Frantz-Éric Leloup, chef du département des finances et de l'évaluation


* 1 Arrêté du 12 janvier 1994 fixant la liste des opérations ouvrant droit au bénéfice de la carte du combattant au titre de l'article L. 253 ter du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre.

* 2 Art. 174 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.

* 3 Décret n° 2022-128 du 4 février 2022 modifiant les modalités de fixation de la valeur du point de pension militaire d'invalidité.

* 4 HCEFM, « La mort, la blessure, la maladie », rapport thématique de 2019.

* 5 Article 8 de la loi n° 2022-229 du 23 février 2022 portant reconnaissance de la Nation envers les harkis et les autres personnes rapatriées d'Algérie anciennement de statut civil de droit local et réparation des préjudices subis par ceux-ci et leurs familles du fait de l'indignité de leurs conditions d'accueil et de vie dans certaines structures sur le territoire français.

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