II. LA BUDGÉTISATION DES BOURSES SCOLAIRES ET DE L'AIDE AUX ADHÉRENTS DE LA CFE DOIT ÊTRE CLARIFIÉE
Les rapporteurs pour avis se sont penchés sur deux postes de dépense du programme 151 relevant de l'aide à nos compatriotes de l'étranger les moins favorisés. De dimensions très différentes - plus de 100 millions pour l'un, moins d'un million pour l'autre - ils ont cependant en commun une budgétisation complexe, qui affecte grandement la visibilité des opérateurs concernés.
A. LES BOURSES SCOLAIRES : UN MÉCANISME COMPLEXE ET DES MONTANTS QUI SEMBLENT D'EMBLÉE INFÉRIEURS AUX BESOINS EN 2024
Alors que l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) reçoit, au titre de son fonctionnement, une subvention de l'État via le programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence », les bourses scolaires pour l'accès aux établissements du réseau, attribuées sur critères sociaux, relèvent du programme 151. À 118 millions d'euros inscrits dans le projet de loi de finances pour 2024, c'est de très loin le principal poste de dépense (hors T2) du programme puisqu'il représente 71,4 % du total des crédits.
En apparence, les crédits alloués aux bourses en 2024 ont fait l'objet d'une revalorisation significative : + 13,6 millions d'euros, soit 13 %, pour répondre à un contexte mondial de crise économique et d'inflation.
Cependant, un examen attentif du mécanisme d'attribution et de distribution des bourses vient nuancer cette première appréciation. En effet, il faut défalquer du montant attribué en loi de finances initiale la « réserve », qui représente un peu plus de 5 % du total, mise de côté pour faire face aux aléas ou procéder à des redistributions en cours d'exécution.
Mais il est apparu dès la présentation du PLF pour 2023 que ces montants seraient insuffisants ; c'est pourquoi l'administration a obtenu du ministère des comptes publics un « dégel » de la réserve et l'utilisation du reliquat de la « soulte »1(*) de l'AEFE, pour arriver à environ 113,3 millions de crédits ouverts en 2023 au titre des bourses scolaires.
BOURSES SCOLAIRES |
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
Dotation en LFI (en M€) |
110,3 |
105,3 |
105,31 |
104,7 |
95,52 |
105,75 |
Dotation effectivement allouée à l'AEFE (en M€) (après gel, réserve,...) |
102,3 |
101,6 |
140,8 |
80,4 |
83,7 |
100,4 |
Enveloppe effectivement distribuée par l'AEFE (en M€) |
100,2 |
99,2 |
89,2 |
102,6 |
114,3 |
114,6 |
N.B. : les chiffres présentés dans ce tableau incluent l'aide aux élèves à besoin éducatif particulier, portée à 1,31 million d'euros en 2022.
Ainsi, déduction faite de la réserve, les crédits présentés dans le projet de loi de finances pour 2024 s'élèvent à 112,6 millions d'euros, soit un total inférieur au montant effectivement distribué en 2023.
Or ce montant s'était déjà avéré insuffisant, même avec le dégel des crédits mis en réserve et l'apport de la soulte : c'est pourquoi, lors de l'examen des dossiers par la commission nationale des bourses, la CPS (voir encadré) a été portée de 2 à 7 points. Les montants des bourses attribuées ont ainsi été écrêtés par une forme de « rabot » budgétaire, d'une manière peu compréhensible pour les parents concernés.
La contribution progressive de solidarité (CPS)
Instituée en 2012, la CPS se présente comme un mécanisme ad hoc destiné à maintenir dans les limites de l'enveloppe budgétaire allouée les montants distribués à l'issue de la réunion de la commission nationale des bourses. Initialement fixée à 2 points, elle s'applique intégralement aux familles dont la quotité théorique est inférieure ou égale à 80 %, partiellement jusqu'à 99 %. Les familles dont la quotité est de 100 % sont exonérées.
Compte tenu des besoins et des crédits alloués, il est donc très probable que le taux de la CPS sera maintenu à 7 points lors de la prochaine réunion de la CNB, ce qui va directement à l'encontre de l'objectif énoncé par le Président de la République lors de son discours du 20 mars 2018 de doubler le nombre d'élèves accueilli dans le réseau AEFE à l'horizon 2030.
Alors que la soulte de l'AEFE arrive à extinction, il est important de trouver un mode de financement des bourses scolaires qui soit à la fois pérenne, lisible et compréhensible par les parents d'élèves.
Le Pass Éducation langue française :
une expérimentation dont les modalités restent à préciser
Répondant à un engagement du Président de la République, le Pass Education langue française a pour objectif de permettre aux enfants français résidant à l'étranger et scolarisés dans les systèmes nationaux de « garder un lien fort avec notre langue ». Doté d'un million d'euros, il financera des cours en ligne, avec un tuteur, pour les enfants âgés de 6 à 11 ans, soit un public potentiel de 125 000 enfants. S'il est conçu comme une outil complémentaire au FLAM (Français LAngue Maternelle), ni l'audition de la ministre de l'Europe et des Affaires étrangères par la commission, ni les auditions des rapporteurs pour avis n'ont permis d'obtenir de précisions sur ses modalités - prestataires, pays retenus pour l'expérimentation, etc.
* 1 On désigne sous ce nom les montants de bourse non distribués dont dispose l'opérateur en fin d'exercice ; ils servent notamment à alimenter l'enveloppe globale les années où les variations du taux de change sont défavorables. La soulte a été fortement abondée durant la pandémie, de nombreux élèves n'ayant finalement pas été scolarisés, puis mise à contribution au cours des exercices suivants, jusqu'à extinction en 2023.