II. UNE POLITIQUE DE L'EAU ET DE LA BIODIVERSITÉ QUI RÉPOND IMPARFAITEMENT AUX DÉFIS DU CHANGEMENT CLIMATIQUE
A. LES AGENCES DE L'EAU CONTRAINTES PAR LE « PLAFOND MORDANT »
En dépit de son climat tempéré, notre pays a fait face cet été à une sécheresse et des canicules d'une intensité inédite . Sous l'effet du changement climatique, les collectivités ont dû faire face à des situations hydriques particulièrement sévères et des déficits pluviométriques d'une ampleur inégalée. De plus, une centaine de communes ont été dans l'incapacité de distribuer de l'eau potable à leurs habitants. Ces épisodes démontrent la centralité de la gestion quantitative de l'eau : la France n'est plus épargnée par les conflits d'usage de la ressource en eau. Il est essentiel de s'y préparer.
« Une ère nouvelle a commencé. L'obsession de l'eau ne va plus nous quitter. »
Erik Orsenna, La Terre a soif , 2022
Pour répondre à ces forts enjeux, les six agences de l'eau sont chargées de la gestion de la politique de l'eau, dans le cadre d'une action territorialisée par bassin hydrographique. La commission salue la mobilisation, la réactivité et les capacités d'intervention de ces acteurs stratégiques , confirmées par un audit interne de décembre 2021.
Au fil du temps, leurs missions se sont étoffées en direction de la biodiversité et du grand cycle de l'eau, avec notamment l'atteinte du bon état des masses d'eau fixé par la directive-cadre sur l'eau pour 2027. En ce qui concerne le petit cycle de l'eau, les besoins en investissements sont colossaux, estimés à 4,6 milliards d'euros par an selon l'Union des industries et entreprises de l'eau. Face à une ressource en eau qui se raréfie, la diminution des taux de fuite du réseau de distribution est une nécessité .
Malgré cela, le mécanisme du « plafond mordant » limite leurs recettes , avec un écrêtement de leurs ressources au-delà de 2,197 milliards d'euros. Ceci entraîne des effets pervers, avec des taxes qui sont modulées pour s'ajuster à cet effet de seuil, qui fausse le signal prix du coût de l'eau . La tarification actuelle de l'eau n'inclut pas la raréfaction croissante de la ressource et n'incite pas à la sobriété des usages.
Le mécanisme du « plafond mordant » est un frein à la capacité des agences d'engager des financements à la hauteur des enjeux en matière d'adaptation au changement climatique, de renforcement de la résilience des territoires et de restauration de la biodiversité terrestre et maritime. Sa suppression, ou à tout le moins son relèvement, est une nécessité pour accroître la résilience hydrique de la France .