II. LES CHANTIERS STRUCTURELS À MENER
Avec le plan « Logement d'abord » et la lutte contre le sans-abrisme, l'ambition affichée par les pouvoirs publics était de diminuer de manière significative le nombre de personnes sans domicile d'ici 2022, il s'agissait de recentrer l'hébergement sur sa mission d'accueil temporaire et d'urgence et de développer des parcours d'accès plus rapide au logement adapté ou autonome.
A. LE PLAN « LOGEMENT D'ABORD » ET LA LUTTE CONTRE LE SANS-ABRISME (2018-2022) : DES RÉALISATIONS RALENTIES PAR LA CRISE ET QUI PEINE À RÉDUIRE LA TENSION SUR LES STRUCTURES D'HÉBERGEMENT
1. Une stratégie de transformation de la politique publique de lutte contre le sans-abrisme
Le plan quinquennal 2018-2022 pour le « Logement d'abord » définit la stratégie prioritaire de transformation structurelle de la politique publique. Il entend développer les modes de logement adapté avec un accompagnement social renforcé afin d'orienter en priorité les personnes sans-abri ou mal logées vers ces dispositifs. Le « Logement d'abord » fait donc le choix de mettre fin au parcours d'insertion par étape : accueil en CHU ou à l'hôtel, en CHRS puis seulement en logement adapté. Les objectifs assignés au plan sont de créer 10 000 places en pensions de famille et 40 000 places supplémentaires en intermédiation locative (IML) sur cinq ans.
Ce projet vise également à donner une visibilité sur le nombre de places à un horizon de cinq ans et à anticiper les besoins de places en fonction des publics et des territoires. Dans l'instruction du 26 mai 2021, la ministre demandait ainsi aux préfets de région et de département de produire une trajectoire 2022-2024 de l'offre d'hébergement, de logement adapté et d'accompagnement sur leur territoire, avec l'objectif de mettre fin à une gestion de très court terme rythmée par les périodes hivernales. Cette gestion dans l'urgence emporte des effets néfastes pour la qualité du service public rendu aux personnes en situation précaire mais aussi pour les gestionnaires des structures d'hébergement. Ces derniers n'ont pas de visibilité sur le nombre de places ouvertes ou prolongées chaque année et donc, par exemple, sur le nombre d'équivalents temps plein (ETP) nécessaires.
Ce plan arrive à échéance à la fin de l'année 2022. Il fait l'objet d'un consensus parmi les acteurs et sa reconduction devrait être annoncée en janvier 2023.
2. Des objectifs atteints sans entraîner de baisse de la demande d'hébergement d'urgence
Ce plan arrive à échéance cette année et un premier bilan peut en être tiré, en tenant compte du fait que cette transformation de l'action publique s'est trouvée perturbée par l'épidémie de covid-19.
En 2021, 10 384 logements sociaux ont été attribués à des ménages se déclarant sans-abri ou en habitat de fortune (source Dihal). Ce résultat, supérieur à l'objectif 2021, illustre le rebond de cette politique à la suite de la crise sanitaire. Cela correspond à une augmentation de 30 % par rapport au résultat de 2020. Entre janvier et juin 2022, 5 210 logements sociaux ont été attribués à des ménages se déclarant sans-abri ou en habitat de fortune (source Dihal). Le premier semestre 2022 a permis d'exécuter la moitié (48 %) de l'objectif 2022, fixé à 10 750 attributions, en augmentation de 21 % par rapport à l'objectif fixé en 2021 (8 850).
Ces attributions de logements se font dans le parc social, ou dans des logements adaptés. Le terme de logement adapté recouvre les dispositifs comme les maisons-relais ou les pensions de famille permettant un accueil, sans limitation de durée, dans des structures de petite taille gérées par un hôte rémunéré, l' intermédiation locative (IML) pour laquelle une aide est versée à un organisme de logement social ou une association qui, en retour, sous-loue aux personnes un logement à un tarif social ou enfin les résidences sociales soutenues financièrement par l'aide à la gestion locative sociale ( AGLS ).
La crise sanitaire a eu des effets contrastés sur le développement du logement adapté. La création de places en pensions de famille a été retardée avant que la trajectoire ne se redresse en fin de période.
2021 |
% de l'objectif 2021 |
Fin août |
% de l'objectif 2022 |
Total 2018-2022 |
6 259
36 500
Source : Commission des affaires sociales d'après les réponses au questionnaire de la Dihal
In fine , en trois ans et demi, soit entre 2019 et juin 2022, 31 944 logements sociaux ont été attribués à des ménages se déclarant sans-abri ou en habitat de fortune. Ce sont ainsi environ 390 000 personnes qui ont pu accéder à un logement dans le cadre de ce plan.
Entre 2017 et 2022, 390 000 personnes ont pu accéder à un logement dans le cadre de ce plan.
Confrontées à la pression des flux entrants de personnes sans domicile, ces sorties vers le logement n'ont toutefois pas permis d'enregistrer une baisse de la demande d'hébergement d'urgence, ainsi que le montre les crédits consacrés à cette action. En outre, la politique du « Logement d'abord » ne peut que constater le maintien dans l'hébergement, à l'hôtel ou dans des campements, de personnes déboutées du droit d'asile qui ne disposent pas des droits leur permettant d'accéder à un logement.