II. UNE MISSION MARQUÉE PAR UNE HAUSSE CONJONCTURELLE
Au total, la mission « Relations avec les collectivités territoriales » est dotée pour 2021 de 4,09 milliards d'euros en autorisations d'engagement - soit une augmentation de 261 millions d'euros - et de 3,9 milliards d'euros en crédits de paiement - soit une augmentation de 446 millions d'euros .
Elle comporte deux programmes :
- le programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements », doté de 3,90 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 3,72 milliards d'euros en crédits de paiement, vise à financer diverses dotations de fonctionnement ou d'investissement à destination des collectivités territoriales. Ce programme a fait l'objet d'un abondement d'un milliard d'euros en autorisations d'engagement en troisième loi de finances rectificative, dans le cadre du plan de relance ;
- le programme 122 « Concours spécifiques et administration », doté de 194,1 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 195,8 millions d'euros en crédits de paiement, agrège des crédits poursuivant des objectifs variés, finançant pour l'essentiel certaines aides exceptionnelles aux collectivités locales et des dotations à destination de certaines collectivités d'outre-mer.
A. LE PROGRAMME 119 « CONCOURS FINANCIERS AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET LEURS GROUPEMENTS »
1. Une hausse attendue des dotations générales de décentralisation (actions nos 2, 4, 5 et 6)
Après le maintien de leur gel en 2020, les dotations générales de décentralisation (DGD), regroupées au sein des actions n os 2, 4, 5 et 6, connaissent une légère augmentation pour 2021 . Ces dotations ont pour objet de compenser financièrement les transferts, extensions ou créations 11 ( * ) de compétences de l'État vers les collectivités territoriales concernées 12 ( * ) .
Réparties en fonction de la collectivité destinataire (communes 13 ( * ) , départements 14 ( * ) , régions 15 ( * ) ainsi que divers concours particuliers versés indistinctement à plusieurs niveaux de collectivités 16 ( * ) ), elles représentent un total de 1,85 milliard d'euros, en hausse de 20 % par rapport à 2020 , comme le montre le tableau ci-dessous.
Évolution du total des dotations générales de décentralisation entre 2020 et 2021
Source : projet annuel de performance pour 2021.
Cette hausse est pour l'essentiel due à la majoration de l'ordre de 292,7 millions d'euros de la DGD dont bénéficient les conseils régionaux , au titre de la formation professionnelle. Ne pouvant plus bénéficier du versement des frais de gestion de la taxe d'habitation, les régions se sont vues attribuer par l'article 16 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 17 ( * ) , à compter du 1 er janvier 2021, une dotation d'un montant égal aux frais de gestion qui leur étaient versés en 2020.
Cette hausse prend donc acte d'une compensation prévue en loi de finances pour 2020 et s'apparente à une mesure de périmètre , cette compensation étant due aux conseils régionaux ; elle ne modifie donc pas l'équilibre des DGD, qui restent gelées depuis 2012 à leur niveau de 2009, à l'exception de nouveaux transferts amenant de nouvelles compensations.
2. À l'exception d'une augmentation conjoncturelle, des dotations de soutien à l'investissement stables (actions nos 1, 3 et 9)
Les actions n os 1, 3 et 9 regroupent les concours financiers de l'État destinés à soutenir l'investissement des collectivités territoriales . Elles incluent des dotations d'investissement (qui constituent l'essentiel du programme), des dotations d'investissement ou de fonctionnement 18 ( * ) , ainsi qu'à titre plus subsidiaire des dotations de fonctionnement (dotation communale d'insularité par exemple).
Les dotations de soutien à l'investissement restent globalement stables en valeur, à l'exception notable de la DSIL « exceptionnelle » , qui s'inscrit dans la stratégie de soutien de l'État aux collectivités territoriales face à la crise sanitaire. Cette stabilité en valeur se traduit, malgré les prévisions d'une inflation atone de 0,6 % 19 ( * ) , par un léger recul de 0,5 % des autorisations d'engagement en volume.
Montant en millions d'euros et évolution en valeur et en volume des dotations d'investissement des actions n os 1, 3 et 9 entre 2020 et 2021 20 ( * )
Source : projet annuel de performance pour 2021, commission des lois du Sénat.
Le soutien de l'État à l'investissement local est concentré sur les projets portés par les communes et leurs groupements (actions n os 1 et 9). Quatre dotations portent à titre principal cet effort financier :
- la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) dont le montant en autorisations d'engagement reste stable à hauteur de 1,046 milliard d'euros ;
- la dotation « politique de la ville » , dont le montant est aussi stable (150 millions d'euros en autorisations d'engagement, 129 millions d'euros en crédits de paiement) ;
- la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), dont les montants en autorisations d'engagement (570 millions d'euros) et en crédits de paiement (526 millions d'euros) restent également constants ;
- enfin, la DSIL exceptionnelle , au titre de laquelle un milliard d'euros de crédits ont été ouverts en autorisations d'engagement par la troisième loi de finances rectificatives pour 2020, et pour laquelle 100 millions d'euros de crédits de paiement sont demandés pour l'exercice 2021.
Cette part exceptionnelle de DSIL s'inscrit donc dans le paysage remarquablement stable en valeur des dotations de soutien à l'investissement . Au-delà des modalités de son attribution, qui font l'objet de développements ultérieurs, la clé de décaissement choisie pour cette part exceptionnelle de DSIL pose question. L'on peut ainsi s'interroger sur le fait que seuls 100 millions d'euros de crédits de paiement soient demandés pour 2021 : les modalités de décaissement choisies concentreraient la consommation des crédits sur les exercices 2022 et 2023. Si la situation actuelle dans le cycle électoral laisse supposer que les besoins de consommation soient effectivement retardés, il semble malgré tout surprenant que seuls 10 % des crédits aient été demandés pour 2021 .
Le soutien de l'État aux investissements des départements via la dotation de soutien à l'investissement des départements 21 ( * ) (DSID) est stable en valeur , à hauteur de 212 millions d'euros en autorisations d'engagement et 105 millions d'euros en crédits de paiement. Il devrait donc légèrement reculer en 2021 en volume, dans la stricte proportion de l'inflation, prévue à ce jour à 0,6 %.
* 11 Pour plus de détails sur les diverses modalités selon lesquelles s'opèrent ces compensations, se référer à l'avis n° 146, tome XII (2019-2020), portant sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2020, déposé le 21 novembre 2019, pp. 14 à 16.
* 12 Pour une analyse critique des difficultés posées par le cadre juridique actuel dans lequel s'opèrent ces compensations financières, se référer au rapport n° 48 (2020-2021) relatif aux propositions de lois constitutionnelle et organique pour le plein exercice des libertés locales , de Mathieu Darnaud et Françoise Gatel, fait au nom de la commission des lois, déposé le 14 octobre 2020, pp. 35 à 41.
* 13 La dotation générale de décentralisation (DGD) des communes compense cinq types de dépenses : l'élaboration par les communes et groupements de communes de documents d'urbanisme, en particulier les coûts liés aux études nécessaires pour l'établissement de tels documents (23,3 millions d'euros) ; le financement des services communaux d'hygiène et de sécurité, qui représente le premier poste de dépenses de cette action, avec 90,6 millions d'euros ; l'entretien de la voirie nationale de la ville de Paris (15,4 millions d'euros) ; l'entretien et le fonctionnement de certains monuments ayant fait l'objet d'un transfert à des collectivités territoriales (0,6 million d'euros) ; la délivrance, dans certaines communes, des autorisations de changement d'usage des locaux à usage d'habitation (0,5 million d'euros), compétence auparavant exercée par le représentant de l'État.
* 14 La DGD des départements (265,6 millions d'euros) abonde pour l'essentiel une enveloppe dite « de droit commun ». Elle a pour objet de compenser des charges de personnel transférées de l'État vers les départements ainsi que diverses compétences (gestion des collèges à sections binationales et internationales).
* 15 La DGD des régions a principalement pour objectif de compenser des charges de personnel ainsi que certaines compétences transférées. Elle finance également la dotation de continuité territoriale versée à la collectivité de Corse et compense les charges supportées par le Syndicat des transports d'Île-de-France (STIF) en matière de gestion des transports scolaires.
* 16 Ces crédits, en légère hausse par rapport à 2020, sont répartis en six concours : un concours en faveur des autorités compétentes pour l'organisation des transports urbains (dites « ACOTU ») d'un montant de 87,9 millions d'euros ; un concours au bénéfice des collectivités gestionnaires de ports maritimes (53,3 millions d'euros), réparti entre les ports départementaux et les ports d'intérêt national ; un concours compensant le transfert des aérodromes civils de l'État n'étant pas d'intérêt national ou international (4,1 millions d'euros) ; un concours relatif au domaine public fluvial d'un montant de 2,7 millions d'euros ; un concours destiné à financer les investissements communaux et départementaux en faveur des bibliothèques (88,4 millions d'euros) ; enfin, un dernier concours, abondé à hauteur de 17 millions d'euros, réunit diverses dotations de compensation de la réduction des taxes additionnelles de la CFE et de la TFPB ou diverses taxes additionnelles assises sur la CFE ou la TFPB.
* 17 Voir le G du V de l'article en question.
* 18 La dotation politique de la ville peut ainsi être consacrée à la fois à des dépenses d'investissement et de fonctionnement.
* 19 Banque de France, « Projections macroéconomiques », septembre 2020, consultable à l'adresse suivante : https://publications.banque-france.fr/projections-macroeconomiques-septembre-2020 .
* 20 La création de deux nouvelles dotations entre 2020 et 2021 (dotation « protection fonctionnelle élu local », qui permet de remplir des obligations créées par la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, ainsi que la DSIL exceptionnelle) rend impossible le calcul de certaines évolutions en pourcentage.
* 21 Pour plus de détails sur la construction, les modalités d'attribution et les critères d'éligibilité de cette dotation, se référer à l'avis n° 146, tome XII (2019-2020), portant sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2020, déposé le 21 novembre 2019, pp. 40 à 43.