EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. POURSUIVRE LES EFFORTS POUR PRÉVENIR L'ENTRÉE EN DÉPENDANCE

A. DES INDICATEURS DE TENDANCE RASSURANTS, MAIS DES NIVEAUX DE CONSOMMATION QUI RESTENT PRÉOCCUPANTS ET DES PHÉNOMÈNES DE MODE À SURVEILLER

1. Tabac et alcool sont en recul, mais toujours destructeurs

La baisse du nombre de fumeurs se poursuit . D'après l'édition 2019 du baromètre annuel de Santé publique France, le nombre de fumeurs a baissé de 1,6 million, soit 12 %, en deux ans. Cela traduit non seulement l'arrêt du tabac par les fumeurs, mais aussi la réduction du nombre de nouveaux fumeurs. La part de fumeurs quotidiens est ainsi passée de 30 % en 2000 à 27 % en 2017.

Ces bons résultats sont le fait de politiques publiques déterminées : hausse du prix, paquet neutre, remboursement des produits nicotiniques, opération « Mois sans tabac », etc. La communication des pouvoirs publics, depuis des années, a aussi contribué à ternir l'image du tabac : 54 % des personnes interrogées estiment que l'on est moins bien accepté quand on est fumeur.

La part des adultes consommant de l'alcool à une fréquence hebdomadaire est en baisse, celle des consommateurs quotidiens se stabilise à 10 % . Reste que près de 10,6 millions de personnes dépassent les seuils de consommation à moindre risque fixés par les pouvoirs publics (pas plus de dix verres par semaine et deux par jour ; respecter des jours sans consommation). L'image de l'alcool y est encore pour beaucoup : pour 56 % de nos concitoyens, offrir ou boire de l'alcool fait partie des règles de savoir-vivre, et près d'un sur deux estime qu'il est acceptable de boire son premier verre d'alcool avant 18 ans.

Tabac et alcool continuent à faire des ravages : chaque année, leur sont respectivement imputables 75 000 et 41 000 décès. Leur coût respectif est estimé à 120 milliards d'euros à la société française chaque année, si l'on prend en compte les coûts des vies perdues, du trafic et de la perte de qualité de vie.

Niveaux d'usage de tabac, alcool et cannabis chez les adultes (en %)

Source : Santé publique France, 2019

2. Autres drogues : installation du cannabis, diversification des usages
a) Cannabis

La France est le pays dans lequel la prévalence de la consommation de cannabis, quoiqu'en baisse, est la plus élevée chez les jeunes et les adultes en Europe . L'expérimentation concerne 45 % des adultes de 18 à 64 ans, et l'usage régulier, qui diminue chez les jeunes de 17 ans (7,2 %, contre 9,2 % en 2014), a été multiplié par deux chez les adultes depuis 2000 pour atteindre 11 %.

Un quart des usagers présentent un risque élevé d'usage problématique ou de dépendance, progression en hausse de quatre points depuis 2014 : plus d'un million de personnes sont concernées.

b) Cocaïne et crack

L'usage au cours de l'année de la cocaïne a été multiplié par 8 entre 2000 et 2017 , mais ne concerne que 1,6 % de la population. Alors qu'il s'était stabilisé entre 60 et 65 euros, son prix médian a récemment augmenté, atteignant 70 à 80 euros le gramme, et son taux de pureté est passé de 35 % en 2009 à 59 %.

Les consommateurs de crack, forme basée de la cocaïne, sont de plus en plus nombreux : 27 000 en ont pris au cours du dernier mois. Les saisies sont les plus élevées depuis 2000. Le marché progresse en Ile-de-France et dans le nord de la France, en raison de l'implantation de filières - albanaise par exemple.

c) Héroïne et opioïdes

La part des expérimentateurs d'héroïne est stable , à 1,3 % des 18-64 ans. Parmi les jeunes de 17 ans, ce chiffre est en baisse. Les saisies sont en revanche en forte augmentation, l'offre progressant dans le Nord-Est et en Auvergne Rhône-Alpes du fait de l'implantation de réseaux criminels.

Les opioïdes restent les produits les plus impliqués dans les décès directement liés aux drogues. En 2015, 10 millions de personnes ont bénéficié du remboursement d'un antalgique opioïde, mais leur consommation est aussi orientée à la baisse. La surveillance des pouvoirs publics a empêché la survenance d'une crise analogue à celle qui sévit aux Etats-Unis.

d) Produits de synthèse

Après la forte augmentation enregistrée entre 2010 et 2014, la part des expérimentateurs de MDMA/ecstasy se stabilise à environ 5 %.

Les nouveaux produits de synthèse, en essor depuis 2008 regroupent près de 300 molécules. Leur prévalence reste difficile à évaluer. Comme les hallucinogènes, leur usage se rencontre plus fréquemment dans les espaces festifs.

Les solvants et préparations chimiques euphorisantes comme le GHB/GBL, le poppers ou le protoxyde d'azote connaissent une visibilité accrue mais restent cantonnés aux contextes sexuel et/ou festif. Le poppers est aujourd'hui l'un des produits psychoactifs les plus expérimentés par les jeunes de 17 ans après l'alcool, le tabac et le cannabis . Le protoxyde d'azote, peu cher et accessible légalement, connaît un certain succès chez les plus jeunes.

e) Des usagers et des usages qui se diversifient

La représentation de l'usager de drogue héroïnomane injecteur a vécu.

Pour les consommateurs socialement insérés , l'usage de drogue va de pair avec l'espace festif : plutôt alternatif pour les consommateurs de cannabis, d'alcool ou d'hallucinogènes, plutôt commercial pour les consommateurs de cocaïne ou d'euphorisants chimiques.

Les usagers précarisés présentent divers profils : l'OFDT distingue les « désocialisés traditionnels », souvent atteints de troubles psychiatriques, des jeunes en errance ou des migrants d'Europe centrale et orientale ; s'ils sont souvent polyusagers, tous n'appellent pas la même prise en charge.

Les patients en traitement de substitution présentent un profil différent encore. Les plus âgés ont pu connaître la dépendance à l'héroïne avant la diffusion des traitements de substitution aux opioïdes à partir de 1995, certains ont été d'emblée des polyusagers d'opioïdes, d'autres sont codépendants, à l'alcool ou aux nouveaux produits de synthèse.

Enfin, les modes d'usage s'hybrident : l'héroïne est à présent majoritairement sniffée, la cocaïne fumée. L'injection reste toutefois une pratique stable.

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