EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 27 février 2019, la commission a examiné l'avis sur le projet de loi n° 274 (2018-2019), adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant création de l'Office français de la biodiversité, modifiant les missions des fédérations des chasseurs et renforçant la police de l'environnement.

Mme Sophie Primas , présidente . - Nous examinons le rapport pour avis de Mme Anne Chain-Larché sur le projet de loi portant création de l'Office français de la biodiversité, modifiant les missions des fédérations des chasseurs et renforçant la police de l'environnement.

Je remercie le rapporteur au fond de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, M. Jean-Claude Luche, de sa présence.

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Le Gouvernement a présenté le 4 juillet 2018 son plan en faveur de la biodiversité.

C'est dans ce cadre que s'inscrivent les dispositions du projet de loi portant création de l'Office français de la biodiversité, modifiant les missions des fédérations des chasseurs et renforçant la police de l'environnement.

Ce projet de loi a été renvoyé à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Cependant, notre commission, qui est compétente en matière de chasse, s'est saisie pour avis des articles 1 er , 2, 2 bis A, 2 bis , 3, 10 et en tant que de besoin des articles 4 à 8.

J'ai entendu de nombreux acteurs : les chasseurs, les directeurs de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) et de l'Agence française pour la biodiversité (AFB), les représentants des personnels de ces deux établissements, les représentants des agriculteurs, des forestiers et des pêcheurs, le ministère de l'environnement ou encore les associations de défense de l'environnement. La majorité de ces auditions ont été organisées avec M. Jean-Claude Luche, rapporteur au fond du texte.

Le premier axe du projet de loi vise à créer l'Office français de la biodiversité issu de la fusion de l'AFB et de l'ONCFS.

La loi de 2016 relative à la biodiversité avait déjà entrepris de rationaliser le nombre d'établissements intervenant en matière de biodiversité en créant l'AFB. Néanmoins les chasseurs s'étaient opposés à l'intégration de l'ONCFS au sein de cette agence. Résultat, deux établissements ont été maintenus.

L'AFB, créée en 2017, est issue du regroupement de plusieurs organismes, dont l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (Onema). L'agence compte 1 300 agents et dispose d'un budget de 224 millions d'euros. Elle contribue à la préservation et à la restauration de la biodiversité, participe au développement des connaissances en matière de biodiversité, à la gestion équilibrée et durable des eaux, et contribue également à l'exercice des missions de police de l'eau et de l'environnement.

L'ONCFS, créé en 1972, compte 1 500 agents et dispose d'un budget d'environ 117 millions d'euros, dont 74 millions sont issus des redevances cynégétiques. Il est chargé de réaliser des études relatives à la faune sauvage, dont il assure la surveillance, notamment les dangers sanitaires qu'elle peut représenter. Il veille au respect de la réglementation relative à la chasse et organise le permis de chasser. Ses missions ont évolué : je pense aux « brigades loup » ou à la lutte contre les espèces exotiques envahissantes par exemple.

Les chasseurs ont finalement accepté la fusion de ces deux établissements dans un nouvel établissement : l'Office français de la biodiversité (OFB).

Mes auditions m'ont conduite à une première série d'interrogations sur la place de la chasse dans le nouvel établissement. Pour la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire Mme Emmanuelle Wargon, la dénomination de l'établissement est importante : au-delà du symbole, elle renvoie à son identité et à son ambition. En ne faisant pas apparaître le mot « chasse » dans la dénomination de l'établissement, tout est dit.

Le Gouvernement a construit ce nouvel établissement à l'image de l'AFB. Son conseil d'administration, calqué sur celui de l'agence, compte donc cinq collèges. L'État y est majoritaire avec les personnalités qualifiées. Les chasseurs sont noyés au sein du deuxième collège, qui comprend des représentants des secteurs économiques et des pêcheurs. Les agriculteurs et les forestiers ne sont pas expressément mentionnés.

Les députés ont complété la liste de ses missions en reprenant toutes les missions de l'AFB, mais omettant l'organisation matérielle du permis de chasser.

La seconde série d'interrogations porte sur le financement et les effectifs du nouvel établissement.

L'établissement doit bénéficier des ressources actuelles des opérateurs fusionnés, soit 343 millions d'euros, dont 258 millions d'euros des agences de l'eau, l'État n'apportant aucune subvention. Or il manque 41 millions d'euros : 21 millions en raison de la baisse du prix du permis national de chasser à 200 euros ; 9 millions d'euros en raison du transfert de deux missions - gestion des plans de chasse et des associations communales de chasse agréées (ACCA) - aux fédérations de chasseurs ; 11 millions d'euros pour les actions en matière de biodiversité, l'État s'étant engagé à verser 10 euros quand les chasseurs mettent 5 euros.

Le nouvel établissement devrait comprendre 2 700 agents, dont 1 700 inspecteurs de l'environnement. La fusion des établissements conduira à un rééquilibrage dans les missions de police au bénéfice de la police de l'eau et en défaveur de la police de la chasse. La situation est telle que le nouveau directeur général devra au regard des moyens précédemment indiqués faire des choix et je crains que la chasse ne soit pas la priorité.

Le deuxième axe du projet de loi concerne le renforcement des missions des inspecteurs de l'environnement. Il s'agit de permettre à ces inspecteurs de se déplacer partout sur le territoire et de mener plus facilement des enquêtes judiciaires, sans avoir à demander l'assistance des services de police et de gendarmerie.

Les inspecteurs pourront demander toutes informations utiles et requérir un expert, avoir accès au fichier national d'immatriculation des véhicules et recevoir des commissions rogatoires du juge d'instruction, mettre en oeuvre des mesures alternatives aux poursuites sur instruction du procureur de la République, constater les infractions à la réglementation relative aux armes.

Les agents qui sont investis de missions de police judiciaire au titre du code de l'environnement et du code forestier pourront mener leurs actions conformément aux procédures définies par le code de l'environnement.

Le dernier axe du projet de loi concerne le renforcement des missions des chasseurs.

La gestion du fichier des permis de chasser sera confiée non plus aux chasseurs, mais à l'Office français de la biodiversité. Néanmoins, les fédérations de chasseurs se voient transférer trois missions : la délivrance de l'autorisation de chasser, actuellement délivrée par l'ONCFS, la gestion des ACCA et des plans de chasse, actuellement sous la responsabilité du préfet.

Le transfert des plans de chasse doit permettre de donner aux chasseurs tous les outils pour maîtriser le développement des espèces et limiter les dégâts de gibiers. Les représentants des agriculteurs et des forestiers sont assez mécontents de ce transfert.

Le timbre national grand gibier et le fonds de péréquation cynégétique sont supprimés et la participation des territoires à l'indemnisation des dégâts est rendue obligatoire.

Les chasseurs sont des acteurs incontournables en matière de protection de la biodiversité. Leur rôle n'est pas reconnu à leur juste valeur. Le Gouvernement a souhaité inscrire dans la loi l'obligation de consacrer à ces actions un financement au moins égal à 5 euros par an et par permis. Mais les fédérations n'ont pas attendu le projet de loi pour conduire des actions en faveur de la biodiversité.

Le Gouvernement a par ailleurs souhaité améliorer la mise en oeuvre du principe de prélèvement raisonnable des espèces, en introduisant le concept de gestion adaptative des espèces. C'est un dispositif intéressant qui doit permettre d'adapter le prélèvement des espèces en fonction de leur état de conservation. Six espèces sont pour l'instant concernées.

Le projet de loi précise la mise en oeuvre du dispositif. Les chasseurs devront transmettre à leur fédération les données de prélèvement sous peine de sanction : interdiction de chasser l'espèce pendant la campagne de chasse en cours et pendant la campagne suivante ; en cas de récidive pendant les cinq campagnes qui suivent le premier manquement, interdiction de chasser l'espèce concernée pendant trois campagnes.

Les fédérations départementales devront transmettre à l'Office français de la biodiversité et à la fédération nationale des chasseurs les données de prélèvements réalisés par les chasseurs. Les chasseurs ont, à mon avis, tout intérêt à jouer le jeu de ce dispositif.

Les ACCA sont également des acteurs de la biodiversité. Elles ont deux objectifs : valoriser les territoires en rassemblant les territoires de petite taille et morcelés pour y faire revenir le gibier et favoriser une chasse populaire. Les députés ont précisé les règles de retrait de terrains d'une ACCA à la suite d'un arrêt du Conseil d'État autorisant un tel retrait lorsque plusieurs propriétaires se regroupent et atteignent le seuil minimal fixé par la loi.

Je partage les objectifs et la philosophie du projet de loi, qui tend à améliorer l'organisation et la coopération des acteurs en matière de biodiversité. Sans remettre en cause les dispositifs proposés, je vous proposerai trois séries d'amendements : des amendements porteront sur l'Office français de la biodiversité afin de donner leur juste place aux chasseurs et aux acteurs économiques concernés par la biodiversité - je pense aux agriculteurs et aux forestiers - ; des amendements renforceront les pouvoirs des inspecteurs de l'environnement ; enfin, des amendements porteront sur les missions des chasseurs.

M. Daniel Dubois . - Ce regroupement est une erreur, si l'on en juge par les problèmes financiers et de représentativité qu'il crée. Espérons que le Sénat apportera les améliorations nécessaires.

La gestion adaptative des espèces peut être une vraie chance, mais peut aussi représenter un vrai risque si on ne lui donne pas un contenu précis.

Les décharges sauvages sont un vrai problème dans les milieux ruraux : il faudrait que les inspecteurs de l'environnement soient dotés de pouvoirs en la matière. Les maires sont souvent démunis, les procureurs de la République classant de surcroît la plupart du temps les plaintes. Avec la modulation de la taxe sur les ordures ménagères en fonction du poids, le risque est grand que ces décharges se multiplient. Ce texte pourrait être l'occasion d'apporter des réponses, car c'est là un vrai enjeu environnemental.

Je signale que la fédération des chasseurs de la Somme a pris l'initiative d'organiser une journée de nettoyage de l'environnement, initiative reprise par la région Hauts-de-France. Les chasseurs, bien que décriés, ont un vrai rôle en matière d'environnement.

M. Joël Labbé . - Je précise d'emblée que je ne suis pas un anti-chasse primaire ! Je lui reconnais son rôle de régulation. Mais je note le plaidoyer de Mme la rapporteure pour avis en faveur de la chasse, habituel dans cette assemblée.

Si ce regroupement avait été fait précédemment, nous aurions gagné du temps et de l'argent.

Les agents censés passer de la catégorie C à la catégorie B craignent les arbitrages de Bercy. Par ailleurs, les agents de l'ONCFS qui pourraient être dotés de pouvoirs d'officier de police judiciaire demandent à être suffisamment nombreux.

M. Franck Menonville . - Les chasseurs ont été associés à la décision de créer l'office français de la biodiversité, ce qui me semble une bonne chose. Néanmoins, leur place me paraît insuffisante dans la gouvernance du futur office. Si l'on reconnaît leur rôle dans la biodiversité, ils doivent avoir toute leur place. Par ailleurs, les fédérations départementales de chasseurs se voient transférer de nouvelles missions, mais sans les moyens correspondants : n'existe-t-il pas un risque financier pour elles ?

Mme Françoise Férat . - Les agences de l'eau perçoivent des redevances, grâce auxquelles elles aident à la gestion de la ressource, contribuent aux actions de dépollution, de mise en valeur des milieux aquatiques. Or le texte ne dit rien de l'articulation entre les missions des agences avec celles des comités de bassin.

M. Daniel Gremillet . - On a assisté à un véritable hold-up sur les agences de l'eau, au détriment de nos concitoyens qui ont payé pour l'assainissement collectif.

Les chasseurs jouent dans nos territoires un rôle majeur, notamment par leurs observations : ils sont les seuls à arpenter des secteurs notamment dépourvus de toute activité agricole ou forestière.

Il faut trouver une solution aux dégâts causés par les sangliers dans les prairies, dont la biodiversité végétale est ainsi mise à mal. De même, je veux indiquer que certains propriétaires forestiers ne reboisent plus, car ils en sont découragés compte tenu de la surpopulation de cervidés. Il faut retrouver ces équilibres, mais je ne suis pas certain que l'Office aura la capacité d'agir en ce sens.

Mme Sylviane Noël . - Il manque 41 millions d'euros pour boucler le budget de ce futur office. En 2018, l'État avait demandé aux agences de l'eau de financer l'AFB à hauteur de 260 millions d'euros et l'ONCFS à hauteur de 37 millions d'euros. Ce siphonage régulier des ressources des agences de l'eau depuis plusieurs années n'est pas sans conséquence sur le financement des réseaux locaux d'eau et d'assainissement. Ces ponctions ne sont plus supportables et il faut les limiter.

Mme Marie-Noëlle Lienemann . - La directive-cadre sur l'eau oblige à ce que l'argent pris sur l'eau aille à l'eau ! Et qu'il aille à l'eau pour faire vivre aussi la biodiversité. Ces ponctions des agences sont une erreur, car les objectifs fixés par la directive-cadre sont loin d'avoir été atteints. Au minimum, il faudrait s'assurer que ces ponctions sont compatibles avec la directive et servent réellement à améliorer la qualité de l'eau.

M. Martial Bourquin . - Je suis surpris que ce projet de loi ne soit pas complètement financé. Ce trou de 41 millions d'euros trouve essentiellement son origine dans la baisse de 50 % du prix du permis de chasse. Pourquoi l'État ne compense-t-il pas ?

La biodiversité s'effondre, dans les zones rurales comme dans les zones urbaines : des espèces d'oiseaux, d'insectes disparaissent. Il faut mener un vrai travail de fond. Si les agents qui font respecter les règles en matière d'environnement n'ont pas de pouvoir de police, rien ne sera réglé. Aujourd'hui, certaines collectivités mettent en place une collecte au poids des déchets et en conséquence certaines personnes s'en débarrassent dans la nature ou dans la poubelle du voisin.

Mme Anne-Catherine Loisier . - Lors de la création de l'AFB, il y a eu un loupé : la quasi-absence des forestiers. Il faut y revenir. La forêt est un élément majeur de la biodiversité et elle est vulnérable. Il doit y avoir une concertation entre les chasseurs et les forestiers.

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Dissipons un malentendu : ce regroupement de l'AFB et de l'ONCFS n'est pas une erreur. Mais il faut apporter des solutions en termes de financement.

La gestion adaptative des espèces est une excellente chose, mais à condition qu'elle soit bien gérée et qu'elle soit l'affaire de tous, et non pas seulement celle des chasseurs. Toutes les parties doivent jouer le jeu. D'ailleurs, M. Jean-Noël Cardoux, président du groupe d'études chasse et pêche, déposera des amendements relatifs à cette gestion permettant de chasser les espèces en bon état de conservation et pas uniquement lorsque l'espèce cause des dégâts.

Le passage d'agents de la catégorie C à la catégorie B bute sur un problème budgétaire. Le renforcement des missions de police des inspecteurs de l'environnement permettra ce passage d'une catégorie à l'autre. M. Jean-Claude Luche et moi-même avons d'ailleurs prévu de déposer des amendements tendant à renforcer ces pouvoirs de police, sans empiéter sur ceux des officiers de police judiciaire.

Les chasseurs doivent avoir toute leur place. Le transfert de certaines missions aux fédérations départementales de chasseurs représente un coût de 9 millions d'euros. Pour minimiser ce coût pour l'ONCFS, nous proposerons que ce transfert n'intervienne qu'à partir du 1 er janvier 2020, soit une économie de 4,5 millions d'euros.

Concernant les agences de l'eau, la secrétaire d'État Emmanuelle Wargon nous a confirmé qu'elles financeraient bien a priori les actions en faveur de la biodiversité, soit les 10 euros promis par l'État dont je vous ai parlé.

Mme Sophie Primas , présidente . - C'est un tour de passe-passe !

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Demander aux maires de procéder aux mises aux normes en matière d'assainissement collectif et non collectif sans financement correspondant, c'est insupportable. On nous renvoie au projet de loi de finances pour 2020. Il faudra que nous intervenions pour que cela soit corrigé.

Au sujet des dégâts causés par le gibier, l'emploi de la contribution à l'hectare est une forme de réponse des chasseurs à la suppression du timbre grand gibier et du fonds cynégétique.

Concernant les 41 millions d'euros non financés, des mesures seront prévues dans le projet de loi de finances. Ce n'est pas tout de créer un office de la biodiversité ; encore faut-il le doter de moyens. À ce jour, nous ne pouvons pas apporter de réponse.

Mme Sophie Primas , présidente . - Pas plus que la secrétaire d'État.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1 er

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - On fusionne deux agences : l'AFB et l'ONCFS. Le mot « chasse » disparaît de l'intitulé du nouvel établissement créé par l'article 1 er du projet de loi. Je crois comprendre que le directeur de l'ONCFS aurait souhaité que ce mot ne disparaisse pas mais aussi que le nom de la nouvelle agence soit prononçable. C'est pourquoi nous proposons par cet amendement AFFECO.25 d'ajouter le mot « chasse » dans l'intitulé de l'établissement, qui s'appellerait donc « Office français de la biodiversité et de la chasse ».

M. Joël Labbé . - Le mot « biodiversité » me paraît suffisamment globalisant. Pourquoi insister sur la chasse ?

Mme Sophie Primas , présidente . - Il y a trois ans, lors du vote de la loi relative à la biodiversité, il n'était pas question de fusionner l'ONCFS et l'AFB. On le fait aujourd'hui. Les choses évoluent avec le temps.

L'amendement AFFECO.25 est adopté.

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Les députés ont placé les missions de police du futur établissement en dernière position. Nous avons entendu les agents de l'AFB et de l'ONCFS, et, par l'amendement AFFECO.19 , nous proposons d'en revenir au projet de loi initial et de remettre ces missions en première position.

M. Daniel Gremillet . - Je suis très réservé. Sur le terrain, ce sera mal perçu, car certains se considèrent comme de petits shérifs.

Mme Anne-Catherine Loisier . - De même, les pouvoirs de police de l'ex-Onema sont parfois très mal vécus. En revanche, il faut exercer des contrôles. Quelle sera la place du code forestier ? Il ne faudrait pas que les prérogatives environnementales aillent à l'encontre des orientations de la politique forestière.

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Ces missions de police sont exercées par 1 700 agents. Pour asseoir la crédibilité du nouvel établissement, il est important de les placer en tête.

M. Joël Labbé . - Je ne suis pas d'accord. On vit une période de plus en plus sécuritaire, et, pour moi, l'essentiel, c'est la mission de reconquête de la biodiversité. Prenons garde aux dérives sécuritaires.

M. Marc Daunis . - Je suis en désaccord avec M. Joël Labbé. Comment adopter un tel texte de loi en matière de biodiversité et faire l'impasse sur les dérives lourdes qu'on constate en la matière ?

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Monsieur Labbé, valoriser cette mission de police permettra aussi aux agents de passer de la catégorie C à la catégorie B. Et je le rappelle, nous proposons là d'en revenir au texte initial.

L'amendement AFFECO.19 est adopté.

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Par l'amendement AFFECO.2 , nous proposons de confier à l'OFB l'organisation matérielle de l'examen du permis de chasser, comme le faisait jusqu'à présent l'ONCFS.

L'amendement AFFECO.2 est adopté.

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Les quatre amendements qui suivent portent sur la composition du conseil d'administration de l'OFB. Nous souhaitons maintenir les équilibres. Un conseil d'administration d'une quarantaine de membres serait ingérable. C'est pourquoi nous proposons qu'il compte 35 membres.

Le texte indique que le premier collège, composé de représentants de l'État et de personnalités qualifiées, représentera au moins la moitié des membres du conseil d'administration de l'Office. Par l'amendement AFFECO.1 , nous proposons de ne pas donner de majorité au premier collège et d'instaurer en contrepartie un droit de veto au bénéfice de l'État, comme c'est le cas à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine.

Par l'amendement AFFECO.27 , nous proposons, afin de mieux équilibrer les collèges, que les gestionnaires d'espaces naturels - les parcs nationaux - soient représentés au sein de ce premier collège avec l'État, et non pas au sein du deuxième collège au côté des représentants des secteurs économiques, des chasseurs, des pêcheurs et des associations de protection de l'environnement.

Par l'amendement AFFECO.3 , nous proposons que des représentants d'organisations professionnelles agricoles et forestières soient représentés au sein du deuxième collège.

Enfin, par l'amendement AFFECO.5 , nous proposons de préciser qu'au moins un représentant de la Fédération nationale des chasseurs et un représentant de la Fédération nationale de la pêche en France et de la protection du milieu aquatique siégeront au sein du deuxième collège, l'article 1 er mentionnant simplement la présence de représentants des instances cynégétiques et des instances de la pêche de loisir.

M. Jean-Noël Cardoux déposera un amendement tendant à ce que 10 % des sièges soient attribués à la Fédération nationale des chasseurs. Je vous propose d'adopter l'amendement que je vous soumets et de me donner mandat pour trouver une solution qui concilie techniquement mon amendement et celui de notre collègue .

Mme Sophie Primas , présidente . - Le Gouvernement n'a pas explicitement donné son accord à la proposition contenue à l'amendement AFFECO.1 . En outre, vous aurez compris que l'effectif du conseil d'administration n'est pas figé. Il est intéressant de proposer une solution pour que l'effectif ne soit pas pléthorique. Ainsi l'État ne serait pas majoritaire mais disposerait d'un droit de veto. Cela fonctionne dans d'autres agences.

Mme Anne-Marie Bertrand . - S'il y a un espace naturel réservoir de biodiversité, c'est bien la Camargue. A-t-elle été évoquée lors des auditions ? Sera-t-elle représentée ?

M. Daniel Gremillet . - Je suis favorable à ces amendements. Remettre les espaces naturels dans le premier collège me semble absolument nécessaire. Je fais confiance à notre rapporteure pour trouver un équilibre avec la représentation des chasseurs. Il conviendrait en outre de prendre en compte le nombre de représentants des agriculteurs et des forestiers, car ce ne sont pas les urbains qui font la biodiversité, mais bien ceux qui sont dans l'espace économique territorial.

Mme Anne-Catherine Loisier . - Si l'on veut mener des actions en faveur de la biodiversité, il faudrait aussi considérer les propriétaires de ces espaces. Comment sont-ils pris en compte ?

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Procédons par sous-amendement. Pour l'heure, nous ne pouvons pas être trop précis...

Si nous arrivons à faire entrer les représentants du monde agricole et les forestiers dans le conseil d'administration - sachant que l'ONF sera présente dans le premier collège -, ce sera déjà beaucoup. Un texte trop lourd risquerait de se faire retoquer à l'Assemblée nationale : avançons prudemment. Et pourquoi évoquer la Camargue, plutôt que la Baie de Somme, la Vanoise ou le pays briard ?

L'amendement AFFECO.1 est adopté, ainsi que les amendements AFFECO.27, AFFECO.3 et AFFECO.5.

Article 2

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Afin de rendre le traitement des procédures judiciaires plus rapide, plus efficace, et apporter une réponse pénale aux infractions commises, l'amendement AFFECO.13 autorise sur instruction du procureur de la République les inspecteurs de l'environnement à porter à la connaissance de l'auteur des faits la proposition de composition pénale faite par le procureur de la République et à notifier des convocations en justice. M. Luche proposera quant à lui à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, saisie au fond, un amendement donnant à ces inspecteurs un pouvoir de contrainte pour les auditions.

M. Daniel Gremillet . - On créerait ainsi des super-sheriffs... Cohérent avec moi-même, je ne voterai pas cet amendement.

L'amendement AFFECO.13 est adopté.

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Les textes actuels ne permettent pas à l'ONCFS, ni à l'AFB, d'obtenir l'affectation de biens saisis qui peuvent leur être utiles pour l'exercice de leurs missions, tels que les armes ou les véhicules. L'amendement AFFECO.6 y remédie en permettant au futur OFB de se voir affecter à titre gratuit des biens mobiliers dont la propriété a été transférée à l'État par une décision de justice devenue définitive. C'est une gestion de bon sens, en bon père de famille.

L'amendement AFFECO.6 est adopté.

Article 3

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Les fédérations de chasseurs sont des organismes de droit privé régies par un statut législatif particulier ; elles sont investies de missions de service public. Les données qu'elles produisent relativement aux prélèvements ou aux comptages permettent à l'État d'élaborer des réglementations plus pertinentes, celles relatives aux dégâts de gibier permettent de mieux identifier les zones les plus concernées par ces dégâts et de prendre des mesures de gestion adaptées, et celles relatives à la sécurité à la chasse doivent être portées à la connaissance de l'État. L'amendement AFFECO.9 pose le principe selon lequel les données produites par ces fédérations seront systématiquement transmises à l'OFB, afin d'asseoir la crédibilité du dispositif.

M. Pierre Cuypers . - Ces données seront-elles transmises dans les deux sens ?

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Ces données sont destinées au ministre, qui peut ainsi prendre les bonnes décisions - l'OFB est un établissement public.

L'amendement AFFECO.9 est adopté.

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - L'État s'est engagé lors des débats à l'Assemblée nationale à apporter son concours financier au financement d'actions en matière de biodiversité en versant dix euros pour cinq euros versés par les chasseurs sur chaque permis de chasse validé. C'était une promesse du ministre Sébastien Lecornu reprise par sa successeur Emmanuelle Wargon. L'amendement AFFECO.12 propose d'inscrire dans la loi cet engagement de l'État.

Mme Sophie Primas , présidente . - On ne sait pas d'où viendra cette somme... Nous en discuterons certainement en séance.

M. Pierre Cuypers . - Est-ce révisable chaque année ?

M. Henri Cabanel . - Est-ce proportionnel ?

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - C'est un engagement de l'État de verser 10 euros pour 5 euros versés par les chasseurs. Cela coûterait, pour 1,1 million de chasseurs environ, 11 millions d'euros, ce qui contribue au trou financier de 41 millions d'euros...

Mme Sophie Primas , présidente . - Ces 11 millions seraient pris sur les agences de l'eau, d'après les informations dont nous disposons.

L'amendement AFFECO.12 est adopté.

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - La création de l'OFB ne doit pas conduire l'État à abandonner ses missions de contrôle. Une fois les plans de chasse transférés aux fédérations départementales de chasseurs, le préfet devra continuer à fixer les nombres minimal et maximal d'animaux à prélever dans l'ensemble du département. Je propose même qu'il soit plus précis et fixe les prélèvements minimaux et maximaux d'animaux par sous-ensemble territorialement cohérent pour la gestion des espèces, en tenant notamment compte des dégâts de gibier dans le département. C'est l'objet de l'amendement AFFECO.20 .

M. Daniel Gremillet . - Que deviennent les comités régionaux sylvo-cynégétiques, mis en place récemment ?

Mme Anne-Catherine Loisier . - Il faudrait en effet prévoir un lien avec les comités régionaux sylvo-cynégétiques, qui fonctionnent par massif, et qui sont très utiles ! Ils ont notamment pour mission d'identifier les dégâts de gibier et de faire des préconisations.

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Nous allons creuser cette question, mais en toute hypothèse le plan de chasse sera élaboré après consultation des personnes concernées.

Mme Anne-Catherine Loisier . - Ces comités régionaux sont une création récente !

M. Daniel Gremillet . - Attention : le comité paritaire sylvo-cynégétique installé au niveau régional n'a aucune autorité sur les comités départementaux qui fixent les prélèvements ; il formule simplement des recommandations à leur attention. Songeons à leur articulation.

Mme Anne-Catherine Loisier . - C'est important car ces comités paritaires régionaux raisonnent par massif, et non par département.

M. Daniel Gremillet . - Le préfet doit tenir compte de leur travail.

Mme Sophie Primas , présidente . - Si ces comités émettaient des recommandations, ils continueront à le faire.

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Cela ne change rien.

L'amendement AFFECO.20 est adopté.

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Selon le projet de loi, le préfet ne modifierait les plans de chasse qu'en cas de « défaillance grave dans la prise en compte par le plan de chasse des orientations du schéma départemental de gestion cynégétique ». Je vous propose avec l'amendement AFFECO.30 que le préfet puisse intervenir lorsque le plan de chasse ne prend pas en compte les orientations du schéma départemental de gestion cynégétique et pas uniquement en cas de défaillance grave. Il est également important que le préfet puisse modifier les plans de chasse en cas d'augmentation importante des dégâts de gibier dans le département. Restaurons la responsabilité des préfets.

Mme Sophie Primas , présidente . - C'est important car, si les chasseurs s'en tiennent aux valeurs minimales, il pourrait y avoir des dégâts importants en forêt ou dans les plaines, que le préfet n'aurait plus la possibilité de corriger.

M. Daniel Gremillet . - Très bien !

L'amendement AFFECO.30 est adopté.

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Le chasseur qui n'a pas transmis les données de prélèvement sur une espèce soumise à gestion adaptative est sanctionné, en cas de récidive au cours d'une des cinq campagnes cynégétiques suivant le précédent manquement, par l'interdiction de prélever des spécimens de l'espèce concernée pendant la campagne cynégétique en cours et les trois suivantes. Or la sanction paraît disproportionnée. L'amendement AFFECO.21 la restreint en prévoyant une interdiction de prélever des spécimens de l'espèce pendant la campagne en cours et les deux suivantes en cas de récidive au cours d'une des trois campagnes suivant le premier manquement.

M. Jackie Pierre . - Pas de cadeau !

M. Daniel Gremillet . - Parle-t-on de manquements aux règles visant les espèces protégées aux niveaux national et régional ?

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Il s'agit des règles visant les espèces soumises à gestion adaptative, six espèces pour l'instant, mais leur nombre pourrait évoluer.

M. Joël Labbé . - Pour récidiver, en la matière, il faut en avoir vraiment envie... Pourquoi réduire la sanction ?

Mme Sophie Primas , présidente . - Trois ans, c'est long, tout de même.

M. Daniel Dubois . - Où en est le débat sur le prélèvement zéro ?

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Je le précise : sont ici visés les manquements à l'obligation de transmission des données. Le prélèvement zéro, même s'il suscite une levée de boucliers, paraît de bon sens.

L'amendement AFFECO.21 est adopté.

Article 10

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Le projet de loi transfère aux fédérations départementales des chasseurs les compétences en matière de gestion des ACCA et de plan de chasse. Ce transfert donne lieu au versement d'une compensation financière versée par l'ONCFS jusqu'au 31 décembre 2019, puis par l'OFB à compter du 1 er janvier 2020. Or cette compensation, estimée à 9 millions d'euros par an, n'a pas été prévue dans le budget de l'ONCFS. Pour ne pas accroître le déficit de l'ONCFS, l'amendement AFFECO.15 transfère ces nouvelles compétences en même temps que la création de l'OFB.

M. Daniel Dubois . - Les représentants des chasseurs, lors des auditions, ont estimé que la gestion des ACCA était un tel bazar que l'État devait s'engager à remettre de l'ordre dans les dossiers avant leur transfert. Avons-nous des garanties que ce sera fait ?

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Cela donne six mois de plus pour organiser les choses... Et 4,5 millions d'euros d'économie en plus, ce n'est pas négligeable.

M. Jackie Pierre . - Comme on n'a pas d'argent, on en prend ailleurs, et c'est toujours sur les agences de l'eau ! Je ne voterai pas cela. Quand on crée des dispositifs, tout État français qu'on soit, on doit assumer son financement.

M. Franck Menonville . - Cet amendement ne porte que sur le délai.

Mme Sophie Primas , présidente . - Le problème financier lui-même reste en effet entier.

M. Daniel Dubois . - L'État n'a pas mis à jour les dossiers relatifs aux ACCA !

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Et les fédérations demandent que les dossiers soient à jour. Cela va être très compliqué.

L'amendement AFFECO.15 est adopté.

Mme Anne Chain-Larché , rapporteure pour avis . - Nous avons adopté un amendement autorisant les inspecteurs de l'environnement de l'OFB à délivrer sur instruction du procureur des convocations en justice : l'amendement AFFECO.14 prévoit la même chose, à titre transitoire, pour les inspecteurs de l'environnement de l'AFB et de l'ONCFS.

Nous avons également adopté un amendement permettant d'affecter au nouvel établissement les biens transférés à l'État par décision de justice : l'amendement AFFECO.7 prévoit la même chose, à titre transitoire, pour l'AFB et l'ONCFS.

L'amendement AFFECO.14 est adopté, ainsi que l'amendement AFFECO.7.

Mme Sophie Primas . - Je vous remercie.

La commission émet un avis favorable à l'adoption du projet de loi, sous réserve de l'adoption de ses amendements.

M. Alain Chatillon . - Je voudrais attirer l'attention de mes collègues sur les difficultés rencontrées par les agences de l'eau. L'Agence de l'eau Adour-Garonne, en 2015, avait un excédent annuel de 55 millions d'euros ; il est aujourd'hui de zéro. L'Agence de l'eau de Rhône-Méditerranée-Corse avait à la même époque un excédent de 25 millions d'euros ; il est également tombé à zéro. Il n'y a plus d'argent : comment les agences de l'eau vont-elles travailler ? La région Occitanie a un déficit annuel de 1,3 milliard de mètres cubes ! Comment pourra-t-on construire des récipients d'eau suffisants si les ressources des agences de l'eau sont ponctionnées chaque année ? Il va falloir remettre ce débat à l'ordre du jour prochainement.

Mme Sophie Primas , présidente . - Ce débat, essentiel, sera rouvert lors de l'examen de ce texte, de même qu'à l'approche du prochain projet de loi de finances. Le principe selon lequel l'eau paie l'eau est pour le moins remis en question.

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