LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
1. Auditions des rapporteurs :
Colonel Laurent Phélip , commandant du GIGN
Colonel Pierre Sauvegrain , adjoint au directeur des opérations et de l'emploi de la gendarmerie nationale, accompagné du chef d'escadron Fabien Masson .
2. Audition devant la commission des affaires étrangères le mercredi 25 octobre 2017 :
Général Richard Lizurey , directeur général de la gendarmerie nationale.
ANNEXE - AUDITION DU GÉNÉRAL RICHARD LIZUREY, LE MERCREDI 25 OCTOBRE 2017
M. Christian Cambon, président - Mon Général, c'est la seconde fois depuis votre désignation comme Directeur général de la gendarmerie nationale, le 1er septembre 2016, que nous avons le plaisir de vous recevoir.
Avant de commencer, je voulais vous faire part de notre sympathie dans la regrettable polémique qui vient d'éclater au sujet d'une enquête en cours. Nous voulons nous redire notre confiance et notre amitié.
Vous savez à quel point notre commission reste attachée à la Gendarmerie nationale, même depuis qu'elle relève pour son emploi du ministère de l'intérieur et non plus de celui chargé de la défense. En effet, ses personnels restent en majorité des militaires et c'est ce qui constitue, malgré des velléités de rapprochement qui tendent parfois à omettre cette spécificité indispensable, sa principale différence avec l'autre force de sécurité intérieure, la police nationale. En outre, la Gendarmerie remplit également des missions militaires, il est vrai minoritaires dans son activité globale, mais qui nous intéressent tout particulièrement.
Cette audition nous permettra de faire le point sur la menace terroriste et sur le rôle joué par la gendarmerie nationale dans l'analyse de cette menace présente sur la plus grande partie du territoire national. La gendarmerie a perfectionné au cours des dernières années l'organisation de sa fonction « renseignement » pour mieux capter les « signaux faibles » de la radicalisation. Outre le rôle de renseignement assumé par toutes les unités, il existe désormais 73 « antennes du renseignement territorial » (ART) qui regroupent 150 gendarmes. Cette organisation a-t-elle permis de mieux déceler les phénomènes de radicalisation ? Existe-t-il un véritable continuum entre gendarmerie et police, entre le renseignement capté sur le terrain et le travail des services spécialisés, permettant de faire circuler l'information de manière fluide jusqu'au service le mieux à même d'y donner les suites les plus adaptées ? Nous savons que cela n'a pas toujours été le cas par le passé.
En ce qui concerne l'activité de la gendarmerie, nous sommes naturellement préoccupés par l'application de la directive européenne « Temps de travail ». Pourriez-vous faire le point sur les quelque 6 000 ETP qu'a déjà couté cette mise en oeuvre, et sur la suite ?
La gendarmerie travaille également sur une modernisation permanente de la gendarmerie et de ses outils informatiques. Celle-ci permet d'abord d'accroître la productivité des personnels, mais aussi de les décharger en partie des taches les plus répétitives au profit de celles qui ont du sens. Quelles sont les principales évolutions en cours dans ce domaine ? Les crédits prévus au programme gendarmerie nationale pour 2018 permettront-ils de poursuivre cet effort ?
Enfin, nous avions été très attentifs l'année dernière à l'annonce de l'expérimentation des Brigades territoriales de contact (BTC) qui doivent permettre de revitaliser le lien entre les gendarmes et les citoyens et à associer davantage les élus à l'action de la gendarmerie dans les territoires. Où en est cette expérimentation et se poursuivra-t-elle en 2018 ?
Je vous laisse à présent la parole pour nous présenter les principaux axes du budget de la gendarmerie pour 2018, avant de la passer à nos rapporteurs, Philippe Paul et Yannick Vaugrenard, puis à l'ensemble des membres de la commission.
Général Richard Lizurey, directeur général de la gendarmerie. - Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les sénateurs, je vous remercie de m'inviter à échanger avec vous sur le budget de la gendarmerie nationale, ainsi que sur les priorités qui sont les siennes. Je souhaitais également vous remercier pour le soutien de l'ensemble de la commission à l'égard des enquêteurs mis en cause dans une affaire récente. Dans cette dernière, je pense d'abord à l'enfant : nous travaillons et nous nous mobilisons pour elle. C'est un travail d'importance, associant de nombreux enquêteurs, mais aussi une communauté locale et des citoyens qui ont participé aux recherches. Je souhaite remettre au centre du débat le plus important : cette enfant et la manifestation de la vérité.
Les priorités de la gendarmerie nationale sont influencées par la menace terroriste. Cette dernière a impacté nos modes de fonctionnement et d'action. Toutefois, elle n'efface pas le reste de l'activité, notamment celle concernant la délinquance quotidienne, comme la lutte contre les cambriolages, ou encore l'insécurité routière. Il nous faut intégrer dans un spectre plus large l'ensemble des menaces de manière à pouvoir y faire face. Afin d'assurer la sécurité des citoyens, notre action s'articule autour de trois points : la sécurité des personnes, celle des biens, et enfin la sécurité numérique et des données.
La sécurité des personnes est la mission la plus classique : elle renvoie à la fois à la menace de la délinquance, mais aussi à la menace terroriste. Or, nous sommes confrontés aujourd'hui à un terrorisme qualifié de « low-cost » : parfois il se sert d'armes sophistiqués, ou d'explosifs, mais aussi d'armes du quotidien. Ce terrorisme est présent sur la totalité de notre territoire et doit être pris en compte. Nous avons évolué à la fois au plan ministériel et dans l'organisation de la gendarmerie nationale.
Au plan ministériel, tout d'abord, une capacité d'intervention partagée a été mise en place et un schéma national d'intervention a été élaboré, dans lequel s'inscrivent les grandes forces d'intervention : le RAID pour la police nationale, la BRI pour la préfecture de police, le GIGN pour la gendarmerie nationale.
Les antennes régionales de ces différentes forces ont également évolué. On a remplacé le principe de la compétence territoriale par le principe de proximité. Il y a quelques années, le GIGN intervenait dans les zones de gendarmerie, le RAID dans celle de la police. Aujourd'hui, la synectique rapide des attentats et des crises nous obligent à remettre en cause cette dichotomie. Désormais, l'unité la plus proche, quel que soit sa zone de compétence, intervient sur l'évènement qui a lieu. Cela représente un changement majeur dans le fonctionnement des forces d'intervention.
Nous avons également durci la capacité d'intervention et de protection de nos unités territoriales. Aujourd'hui, n'importe quelle patrouille, comme nos camarades des armées, peut se retrouver confronter à une action terroriste. Nous devons mettre en place des dispositifs de protection individuelle, mais aussi collective, notamment grâce à des véhicules davantage renforcés. Dans les unités, la capacité de riposte a été augmentée. Je pense notamment à l'instauration de PSIG (peloton d'intervention et de surveillance de la gendarmerie) durcis dits « PSIG-Sabre » dans chaque compagnie territoriale - nous en avons 450 en tout. Nous avons transformé un tiers des PSIG en PSIG-Sabre, comportant un plus grand nombre de professionnels, des moyens offensifs et défensifs plus importants, et une plus grande mobilité. Ce plan, qui doit s'achever en 2018, doit permettre, via l'existence de 150 PSIG-Sabre de répondre sur tout le territoire à une menace terroriste, dans un délai de 20 minutes - délai fixé par le Ministre de l'Intérieur.
Nous avons également travaillé en matière de renseignement, qui est un point central dans la lutte contre le terrorisme. Les unités territoriales effectuent un travail de recherche d'informations. Elles se nourrissent des contacts avec les personnels actifs, mais aussi avec les réservistes mobilisés ou non. Cette information est ensuite remontée au niveau de la gendarmerie départementale, mais aussi du service départemental de renseignement territorial. Celui-ci est un service partagé regroupant militaires de gendarmerie et fonctionnaires de police. Les informations sont ensuite travaillées, analysées, et transformées en renseignement. Aujourd'hui, la gendarmerie représente 10 % des effectifs du renseignement territorial.
Les signaux faibles collectés sur le terrain par les gendarmes et la sécurité publique et traduits en renseignement sont transmis au niveau central - à la direction générale de la sécurité intérieure si la menace est précise, laquelle procède aux actions nécessaires afin de la neutraliser. Le domaine du renseignement a fait l'objet depuis quelques années d'une évolution majeure. En effet, il y a encore peu, étaient juxtaposées la chaîne de renseignement de la police nationale et celle de la gendarmerie. Aujourd'hui, nous avons une chaîne partagée, jusqu'au plus haut niveau des structures et institutions, permettant la production de renseignements communs.
La menace terroriste n'est pas la seule, s'agissant des menaces contre les personnes et les biens. Nous avons également la délinquance quotidienne, dite de masse. Les cambriolages sont ainsi en augmentation régulière due à un double effet : la délinquance de proximité, d'opportunité, qui est aujourd'hui minoritaire ; et une délinquance organisée, majoritaire, avec souvent une structure pyramidale et commandée de l'étranger. Elle investit une région ou un département et progresse ensuite de manière quasi-militaire. Nous avons démantelé un certain nombre d'organisations, avec des donneurs d'ordre se situant à l'étranger, des structures d'encadrement sur le terrain national et régional, puis des cadres de contact et enfin, des hommes et des femmes de main. Ce sont d'ailleurs souvent des mineurs, ce qui pose des problèmes juridiques, par exemple pour la mise sous écrou. Ces mineurs sont aujourd'hui formés pour commettre des actes de délinquance, avec des objectifs journaliers de résultat. Sur ces phénomènes délinquants, nous travaillons en lien avec l'office central de lutte contre la délinquance itinérante qui est un organe conjoint police/gendarmerie nationale. Nous faisons également appel au service central du renseignement criminel, qui agrège la totalité des données et des modes opératoires, ainsi que toutes les procédures établies pour détecter l'existence d'un tel phénomène dans une zone. Ces outils permettent une analyse de situation extrêmement importante que nous souhaitons développer. Ils nous permettent en effet d'avoir une connaissance sur les phénomènes d'aujourd'hui, mais surtout de prévoir ceux de demain. Ce qui est en jeu, c'est la prédictibilité des lieux de délinquance. Ainsi, en Aquitaine, nous sommes actuellement en train de travailler sur la capacité à prévoir l'occurrence de tels phénomènes. La totalité des données en matière de délinquance et de criminalité ont été intégrée à une application, tout comme celles relatives à la météo, ou encore les données socio-économiques, et économiques. Pour l'instant, nous nous concentrons sur les cambriolages, afin d'affiner la méthodologie. Bien évidemment, ce n'est pas une science exacte, mais cet instrument doit nous permettre de nous aider et d'orienter les patrouilles.
Ainsi, à partir d'un phénomène existant, celui de l'atteinte aux biens, nous modernisons la gendarmerie nationale. La modernisation est désormais inscrite dans nos réflexions et nos modes d'actions.
La sécurité des biens est aussi celle de la sécurité des échanges sur notre territoire. Il y a une importante circulation de valeurs, notamment à l'approche des fêtes, avec des chargements importants. Il était essentiel pour nous de réfléchir à sécuriser ces mobilités. C'est un axe stratégique important pour assurer la sécurité des citoyens qui circulent, dans les transports publics notamment dans et en dehors des métropoles, ainsi que celles des frets sensibles. Nous nous sommes rapprochés des opérateurs qui procédaient déjà à une géolocalisation de leurs cargaisons, par exemple les cargaisons de tabac. Il est important pour nous d'agréger ces données et de se faire communiquer le plus rapidement possible les alertes lorsqu'il y a un incident. A partir de celle-ci, nous pouvons alors alerter la patrouille la plus proche.
Nous développons en ce moment le dispositif NÉOGEND : d'ici la fin de l'année 2017, nous allons attribuer à chaque gendarme départemental une tablette ou un smartphone, qui comprend la totalité des outils métiers existants. Pour ainsi dire, le gendarme amènera son bureau avec lui sur le terrain. Il aura accès à sa messagerie opérationnelle, à sa documentation, à l'ensemble des fichiers existants auxquels il est habilité à accéder. Cet outil est déjà en place à titre expérimental dans le département du Nord et dans la région Bourgogne. Le gendarme peut, en prenant une pièce d'identité, interroger immédiatement la totalité des fichiers existants et avoir la réponse en quelques secondes. Auparavant, il fallait à chaque fois interroger un à un les fichiers. Cela permet un important gain de temps. Ainsi, un bus de 45 personnes pourra désormais être contrôlé en une vingtaine de minutes, contre deux heures aujourd'hui. D'autres facilités ou applications pourront être intégrées dans ce dispositif, comme le dispositif « tranquillité vacances ». Grâce à la cartographie et sa géolocalisation, le gendarme saura où se trouvent les maisons vides pendant les vacances et à quel endroit il n'a pas été depuis plus de 48 heures. Lorsque la zone est affichée en vert, cela signifie qu'un gendarme y est passé il y a moins de 24 heures ; en rouge, le délai de la dernière visite est de 48 heures ; et en noir, il doit impérativement y aller. NÉOGEND propose une aide au fonctionnement pour rendre un meilleur service public au citoyen.
Nous travaillons sur d'autres applications, notamment sur les procès-verbaux d'accident. Aujourd'hui, ce travail prend une demi-journée, pour faire les photos, les croquis d'accidents. Demain, avec cet outil, les photos seront géolocalisées, intégrées dans une annexe et permettront de faire automatiquement le croquis. Le procès-verbal est donc déjà avancé lorsque le gendarme rentre à la brigade. Une application semblable, GENDNOTE, est déjà utilisée : le gendarme, à l'occasion de ces patrouilles et en contact avec la population, est amené à prendre des déclarations. Jusqu'à présent, il le faisait sur un carnet de notes, qu'il devait ensuite recopier. Aujourd'hui, il peut prendre des notes directement sur son smartphone ou sa tablette, qui sont intégrées dans un logiciel de rédaction de procédure, ainsi que dans les bases. Son procès-verbal est donc prérempli, en intégrant ce qu'il a noté sur le terrain. En outre, cette application permettra d'alimenter les données statistiques. Les évolutions des technologies permettent ainsi de faire évoluer le métier du gendarme.
Cela doit notamment lui permettre d'aller au contact de la population. C'est pour moi un axe majeur. Il faut que la population et les élus voient davantage les gendarmes. Une certaine distance a pu se créer, pour diverses raisons : la volonté de développer les nouvelles technologies, ou encore la création des communautés de brigades, qui a entraîné la dissolution d'un certain nombre d'unités. Ainsi, dans les dix dernières années, près de 600 brigades territoriales ont été dissoutes. De ce fait, on a abandonné certaines parties du territoire, dans lesquelles la gendarmerie continue certes à être présente, mais pas de la même façon. Le moment est venu - et le Ministre de l'Intérieur a validé cette approche - de renforcer le contact avec la population, qui est, à mon sens, l'ADN de notre métier. Le gendarme doit prendre le temps pour aller vers les autres, contacter les élus, les informer de ce qui se passe, échanger avec eux, et surtout recueillir le renseignement. C'est pourquoi, nous avons mis en place depuis le début de l'année une trentaine de brigades de contact, dont la seule mission est d'aller au contact de la population. Elles ont été déchargés de toutes les autres missions, sauf urgence : la police de la route est faite par la brigade motorisée, l'intervention est faite par le PSIG, les accidents sont traités par quelqu'un d'autre,.... Nous avons fait un premier retour d'expérience, à la fois en interne, mais également et surtout sur la façon dont ces nouvelles brigades sont perçues par les élus et la population locale. En effet, la gendarmerie n'existe pas pour elle-même, mais pour la population qu'elle est chargée de protéger. Les retours des élus sont, dans leur quasi-totalité, très positifs. Bien évidemment, il y a des points sur lesquels nous devons travailler. Les gendarmes concernés ont, pour leur part, l'impression de retrouver leur métier. L'objectif pour moi est de poursuivre sur cette lancée, pas forcément en multipliant les brigades de contact, mais en laissant la main à mes commandants de groupement au niveau départemental, afin qu'ils trouvent la solution la plus adaptée au territoire. Ce qui est important est de garder cette idée de contact, mais c'est au niveau local, en liaison avec les commandants d'unités subordonnées que la meilleure solution doit être trouvée. Elle s'intégrera naturellement dans la sécurité du quotidien telle que le Président de la République l'a annoncée récemment. Il y a la même logique de proximité et de retour vers la population.
Enfin, en ce qui concerne la sécurité numérique, nous travaillons avec le service central de surveillance criminelle et le service de lutte contre la cybercriminalité sur le Dark net afin d'identifier et de traquer les infractions. Nous sommes également en relation avec l'office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication, qui est plus spécialement chargé de suivre tous ces phénomènes. Chaque jour, 1,9 million d'atteintes, d'escroqueries de toute nature ont lieu sur internet. C'est une nouvelle criminalité qui se développe à la faveur de ces territoires numériques. Aujourd'hui, il ne viendrait à l'idée de personne de laisser traîner son code de carte bleue sur son bureau. Or, sur internet, on le donne à beaucoup de monde, sans savoir réellement qui est de l'autre côté. Ces nouveaux territoires sont à la fois des opportunités magnifiques, mais aussi des vulnérabilités importantes sur lesquelles nous devons travailler. Les objets connectés représentent également un enjeu important. On peut s'intégrer, pirater un véhicule, qui n'est pour certains aspects qu'un simple ordinateur. Des interférences avec l'ensemble des objets connectés, pour des raisons malveillantes sont également possibles. Nous avons vu récemment, à travers des virus comme WANNA CRY, qu'ils peuvent mettre en jeu la sécurité de nos concitoyens ou bloquer des entreprises. Il nous faut ainsi lutter en permanence contre une criminalité imaginative. C'est la raison pour laquelle j'ai mis en place depuis le 1er mai 2017 une mission numérique, ainsi qu'un conseil scientifique chargé de suivre les évolutions technologiques. Un observatoire central chargé de suivre toutes les nouvelles technologies concernant la sécurité et la délinquance a également été créé.
Enfin, je finirai mon intervention par l'outre-mer. Il y a plusieurs sujets de préoccupations. À Mayotte, nous avons une situation sociale qui conduit à des tensions régulières. Je pense également à la Guyane et aux Antilles où la situation est difficile. En Calédonie, doit être organisé l'année prochaine le référendum d'autodétermination, et nous avons déjà un certain nombre de fermentation, d'agressions, de tirs contre les gendarmes. C'est d'ailleurs l'endroit en France où il y a le plus de tirs directs contre les gendarmes. Aujourd'hui, 25 escadrons sur 109 sont présents en permanence dans les outre-mer. Vous voyez l'importance que j'y attache.
M. Philippe Paul. - Combien de forces mobiles sont employées comme gardes statiques, au lieu de missions de maintien de l'ordre ? Quel est le dispositif actuel mis en place à Calais ? En outre, compte-tenu des évolutions dans les collectivités, comme la création de communes nouvelles ou le développement des métropoles, comment se passe l'articulation entre la gendarmerie nationale et la police ?
M. Yannick Vaugrenard. - Je tiens tout d'abord à exprimer mon soutien fort à la gendarmerie dans la période que nous traversons depuis les attentats. C'est un métier en constante évolution. Sachez que dans cette période, la gendarmerie fait partie intégrante, essentielle et déterminante de notre vie démocratique et de la protection de notre sécurité.
Ma première question concerne les réservistes, qui sont actuellement au nombre de 28 500. Dans un contexte sécuritaire de plus en plus important, la réserve opérationnelle de la gendarmerie s'affirme. Comment s'effectue cette montée en puissance, qui doit conduire la gendarmerie nationale à disposer de 40 000 réservistes en 2019, avec une emprise quotidienne de 4 000 réservistes l'année prochaine ?
Par ailleurs, le Premier ministre a annoncé une simplification des procédures l'année prochaine. Où en est la réflexion à ce sujet au sein de la gendarmerie nationale ? Avez-vous déjà élaboré une liste de simplifications ou des domaines de simplification qui vous apparaissent souhaitables ?
La loi d'actualisation de la programmation militaire du 28 juillet 2015 a créé le régime juridique des associations professionnelles nationales de militaires (APNM), afin de conformer la législation française à une directive européenne. Pouvez-vous faire le point sur les APNM constituées au sein de la gendarmerie nationale et la manière dont elles peuvent concevoir leurs activités ?
L'étau se resserre en Syrie, la défaite de Daech est proche. Un prochain retour de potentiellement 5 600 djihadistes sur notre territoire est possible. Y-a-t-il au sein de la gendarmerie nationale et au niveau interministériel une réflexion sur le déroulement des prochains mois et années ?
Enfin, pour faire suite à l'intervention de notre président de commission, je vous remercie pour votre hauteur de vue, laquelle considère que le plus important est de retrouver cette enfant. Aujourd'hui, le procureur de Grenoble lance une enquête. Ce n'est pas notre rôle, nous parlementaires, de prendre position. Je soutiens complétement la gendarmerie et je souhaite que, la lumière étant faite, la gendarmerie soit écartée de ce questionnement et de cette accusation. Pour que cela puisse se faire, avez-vous l'intention de diligenter une enquête interne ?
M. Christian Cambon, président. - Mes observations rejoignent les vôtres, mon cher collègue ; nous sommes tous attachés au respect du secret de l'instruction, et je pense que la médiatisation de ce genre d'interpellation n'est souhaitable, ni pour le parquet, ni pour la gendarmerie. Je vois le danger d'une mise en cause d'un corps qui ne mérite pas de l'être par les médias, les réseaux sociaux, des gens peu informés. Mon intervention s'arrêtait là. Tout comme vous, je suis attaché au secret de l'instruction, et au respect des familles qui apprennent ces choses par voie de presse, et doivent se poser des questions. Il ne s'agit en aucun cas pour le Parlement de se mêler de cette enquête, mais simplement de rappeler la nécessité de laisser la justice travailler dans la sérénité et d'éviter des interpellations par voie de presse. Les résultats ne sont en général jamais très bons.
Général Richard Lizurey, directeur général de la gendarmerie. - Les gardes statiques mobilisent environ 1 600 personnels militaires, gendarmes et gardes républicains. Ces derniers ne rentrent pas dans une logique de remise en cause, car leurs missions consistent à garder les palais institutionnels. Nous gardons aujourd'hui encore des emprises diplomatiques, ce qui répond à une protection habituelle de ces bâtiments. Pour Calais, il y a actuellement un escadron et demi qui garde le tunnel sous la Manche. Ce dernier avait été bloqué par un certain nombre de migrants il y a trois ans. 7 escadrons avaient été engagés pour rétablir l'ordre et empêcher l'arrêt des trains. Entretemps, la société Eurotunnel a procédé à d'importants de sécurisation du site. On peut peut-être aujourd'hui s'interroger sur l'évolution du dispositif, qui pourrait peut-être ressortir d'une société de sécurité privée.
Le Président de la République et le ministre de l'Intérieur ont souhaité que nous réfléchissions ensemble à la meilleure manière d'assurer la sécurité du quotidien, à la fois sur des zones bien définies, mais aussi sur l'ensemble du territoire. Pour ce qui relève des zones de gendarmerie nationale, les propositions que j'ai faites visent à intégrer cette sécurité du quotidien à une logique de proximité rapprochée et de présence auprès de notre population. On retrouve ici la fonction contact qui est, pour moi, la déclinaison du dispositif gendarmerie en matière de sécurité du quotidien. Une augmentation ou un report d'effectifs dédiés sont également prévus, et seront possible grâce à l'annonce d'un recrutement de 2 500 gendarmes supplémentaires sur une période de 5 ans. Ceux-ci ont vocation principalement, voire exclusivement, à être consacrés aux unités territoriales. Vous connaissez tous des brigades qui subissent aujourd'hui un déficit d'effectifs. Mon objectif est de renforcer ces dernières en hommes et moyens afin qu'elles puissent remplir leurs missions.
Parallèlement, je vais également proposer la mise en place de deux systèmes. Le premier doit permettre à chaque élu et chaque parlementaire d'avoir un point de contact au sein de sa gendarmerie de proximité. Ce n'est pas forcément le commandant de brigade. Mais je souhaite que chacune et chacun d'entre vous ait un contact privilégié avec un militaire de la gendarmerie. Il en est de même pour les maires, afin qu'ils puissent nous faire part d'un certain nombre d'observations, de questions, et de pouvoir être tenus informés de ce qui se passe dans le département ou la circonscription. Je considère qu'il est légitime que les maires soient informés.
En outre, je souhaite mettre en place l'année prochaine une réunion semestrielle d'une demi-journée, au niveau de l'arrondissement entre les compagnies départementales, les préfets, pour échanger avec les élus et faire le point sur l'action passée de la gendarmerie, mais aussi pour imaginer ensemble les évolutions et adaptations possibles.
La mise en place des communes nouvelles et des métropoles nous concerne. En effet, 20 % des effectifs des métropoles sont des effectifs de gendarmerie. On a ainsi 3 600 militaires de la gendarmerie nationale dans le périmètre des métropoles actuelles ou à venir, hors métropole parisienne. Ces effectifs sont de 14 000 si on y inclut les structures d'état-major et de gendarmerie mobile. Nous devons davantage travailler la coopération opérationnelle avec la police nationale, municipale et la sécurité privée. La métropole représente un état d'esprit, un partenariat élargi qui regroupe l'ensemble des forces en charge de la sécurité. Nous sommes très présents dans certaines métropoles : nos unités représentent 38 % des effectifs de sécurité dans la métropole rennaise. En revanche, nous sommes complétement absent de celle de Nancy. La question des communes nouvelles est plus délicate car elles peuvent regrouper des territoires qui étaient dans des zones de compétences différentes. Dès lors, par texte réglementaire, la commune nouvelle relève de la compétence de la police nationale. Ainsi, si 4 anciennes communes - dont l'une était en zone de police nationale - se regroupent, alors la totalité de la commune nouvelle passe en zone de police nationale. Annecy est une commune nouvelle depuis le 1er janvier 2017 et regroupe la ville centre et la totalité des communes périphériques. Cela représente 54 000 habitants qui étaient jusqu'à présent en zone de gendarmerie nationale et qui se retrouvent en zone de police nationale. Aucun texte n'a prévu la manière dont la gendarmerie nationale devait se retirer de cette zone.
L'une des difficultés de l'outre-mer est de renforcer la présence sur place avec des moyens adaptés. Nous avons 7 escadrons en Guyane, 6 en Calédonie. Depuis deux ans la présence de la gendarmerie a été renforcée à hauteur de 160 ETP et continuera sur cette voie, d'autant plus que la démographie y est dynamique. Toute une logistique est également mise en place en cas de catastrophe majeure. Au côté des autres forces armées, nous avons engagé 5 escadrons à Saint Martin. En outre, les réservistes ont également été mis à contribution. J'ai envoyé il y a une dizaine de jours une compagnie de réservistes volontaires à Saint-Martin, une autre doit partir demain ; Un appel à volontaires pour un séjour de trois mois dans des conditions dégradées a été lancé, et plus de 700 personnes y ont répondu. Les réservistes sont aujourd'hui une composante majeure de la gendarmerie nationale. D'ailleurs, je les compte dans les effectifs. Les premiers retours pour cette mission sont très positifs. Les réservistes font preuve d'un engagement exceptionnel. Cette mission permet également de valoriser le concept de réserve, qui est à inscrire dans la durée.
La cible affichée de disposer de 40 000 réservistes reste en vigueur. Toutefois, elle ne sera pas atteinte en 2019 pour des raisons budgétaires. Je souhaite consolider le dispositif à 30 000 personnes pour l'année prochaine, puis je verrai quelles seront les possibilités militaires pour 2019 et 2020. Le chiffre de 40 000 est un horizon chronologique légèrement différé. Cela dit, disposer de 30 000 réservistes permet d'avoir une empreinte au sol de 3 000 par jour, ce qui est déjà important et mérite d'être maintenu.
Sur la simplification des procédures, le Ministre de l'Intérieur et le Garde des Sceaux mènent un travail conjoint, en liaison avec l'ensemble des juridictions. Une consultation nationale entre les ministères a lieu, tout comme au niveau local, à travers les juridictions départementales et les différents services. Nous avons plusieurs pistes de réflexion. Par exemple, il s'agirait de donner une compétence nationale à l'OPJ, afin d'éviter un certain nombre de complexités, lorsqu'il sort de sa circonscription. Le recours à la visio-conférence pourrait être simplifié. On pourrait également réfléchir à l'extension de la forfaitisation pour un certain nombre de délits, routier, mais aussi en matière de consommation de stupéfiants, ou encore à la suppression de l'accord préalable du Procureur de la République pour un certain nombre d'opérations, notamment les réquisitions adressées aux organismes étatiques. Le contrôle pourrait se faire a postériori. Nous travaillons sur l'ensemble de ces sujets avec la chancellerie.
Il existe aujourd'hui deux APNM se réclamant de la gendarmerie, même si, par nature, ces associations sont interarmées : « Gendarmes et citoyens » et Gend21. Gend21 est historiquement la première à avoir été créée. On estime à 600-700 le nombre d'adhérents à celles-ci. Il me paraît important de les intégrer dans le dialogue social, qui est structuré autour de la concertation. Le conseil de la fonction militaire de la gendarmerie est d'ailleurs un organisme élu et chaque membre a déjà un mandat local. Ils peuvent ainsi prendre le pouls sur le terrain et échanger avec moi sur la meilleure manière d'avancer. Certes nous n'avons pas encore avec les APNM les relations ouvertes, constructives et franches que l'on peut espérer, mais il y a des progrès.
La directive temps de travail suscite un certain nombre de réactions et de réflexions. Nous nous inscrivons dans une logique statutaire pour sa mise en place. Elle a vocation à être analysée sous l'angle du statut militaire qui précise que ce dernier doit être disponible en tout temps et en toute heure. Il appartient ensuite à chaque responsable d'organiser le temps de repos. C'est ce qui a été fait il y a des années, avec la mise en place des permissions, des repos hebdomadaires, ou des 10 heures de récupération de service après un service nocturne. Depuis le 1er septembre 2016, chaque gendarme dispose de 11 heures de repos physiologique par tranche de 24 heures. Cela conduit à une perte de la capacité opérationnelle, représentant 5 % pour les unités territoriales pour les services de jour, 3 % pour les services de nuit, et 12 % pour la gendarmerie mobile. Nous essayons de contrebalancer cet impact par une évolution technologique qui doit nous permettre de gagner du temps par ailleurs. Ainsi, la perte des 6 000 ETP affichée est absorbée par l'institution, afin d'organiser la continuité du service de la gendarmerie nationale qui doit être assuré 24h/24, 365 jours par an. Toutefois, cela ne veut pas dire que nous ne souffrons pas de manque d'effectifs. Quant à la suite à donner aux travaux de la Commission européenne, je m'inscris dans ce que fera la ministre des Armées, car s'agissant d'une logique statuaire, c'est à elle de donner le la.
Un travail est actuellement en cours au sujet des Français revenant des théâtres de conflits d'Irak et de Syrie - ce que l'on appelle « les returnees » - sous l'égide du Procureur de la République de Paris, chargé de l'action antiterroriste, et en associant l'ensemble des ministères. Les mineurs nés dans ces territoires est une population extrêmement vulnérable et problématique. Outre les problèmes d'état civil, il s'agit de savoir comment les suivre et les accompagner. Des discussions sont en cours. Pour l'instant, la gendarmerie nationale n'a pas de mission précise en termes de suivi, à l'exception des cas des personnes signalées comme radicalisées.
M. Olivier Cigolotti. - Le Président de la République a rappelé la semaine dernière lors de son intervention en matière de sécurité que les Français ne supportent plus l'impuissance publique, et a souligné la nécessité de donner aux forces de gendarmerie et de police les moyens de leurs actions et de leur efficacité.
Les communautés de brigade ont certes permis d'assurer une présence minimale sur le territoire, notamment dans les zones rurales, mais n'ont pas réussi à maintenir le lien entre les élus les populations et les forces de gendarmerie. Les brigades territoriales de contact constituent-elles une nouvelle forme de gestion de la pénurie d'effectifs ? En outre, la vague de fermeture de brigades est-elle définitivement derrière nous ?
Mme Sylvie Goy-Chavent. - Je note votre souhait louable de modernisation de la gendarmerie via le plan NÉOGEND.
La menace terroriste est partout, et nos gendarmes peuvent être des cibles. Sont-ils physiquement assez protégés ? Les gilets pare-balles sont-ils suffisants face à des armes de gros calibre ? Que pouvez-vous nous dire sur leurs entraînements dans ce contexte, notamment l'entraînement au tir ? Quel est la fréquence ? Est-ce suffisant ?
M. Cédric Perrin. - Le contact avec la population, que vous aviez érigé l'an dernier comme une priorité, est encore trop difficile à voir sur le terrain pour les élus. Nous ne voyons pas suffisamment les gendarmes, en dehors de quelques passages dans des véhicules. En outre, les maires sont régulièrement informés des interventions réalisées par les SDIS dans leurs communes. Or un système similaire n'a jamais pu être mis en place avec la gendarmerie, alors que nous le réclamons depuis des années. Le travail entre les gendarmes et les maires nécessite une bonne information réciproque de ce qui se passe sur leurs territoires.
Par ailleurs, l'évolution des menaces a pour conséquence des interventions dans un nombre très important de secteurs. Disposez-vous des moyens suffisants pour intervenir dans tous ces domaines ?
M. Olivier Cadic. - En tant que sénateur de l'étranger, je me permets de vous mentionner deux expériences étrangères intéressantes. Au Maroc, la gestion des signaux faibles est d'une grande efficacité. Ainsi à Essaouira, c'est le boulanger qui a prévenu les forces de sécurité lorsqu'il a constaté qu'un client se mettait à commander d'un coup un grand nombre de pains. Les autorités ont découvert un commando prêt à passer à l'action. Avez-vous des contacts avec les autorités marocaines sur ce sujet ?
Par ailleurs, lorsque l'on arrive aux Émirats Arabes Unis, votre visage est scanné et une reconnaissance faciale permet de savoir qui vous êtes grâce à une interconnexion avec les fichiers d'information. Où en sont les réflexions sur le recours à l'intelligence artificielle ?
M. Hugues Saury. - La vague d'attentats a-t-elle amené la gendarmerie nationale à modifier sa doctrine dans le domaine du renseignement ? De quelle manière ?
M. Ladislas Poniatowski. - Comment faites-vous face à une délinquance particulière présente sur deux sites en France, à savoir à Notre-Dame-des-Landes et sur le site de Bure, à cheval entre la Meuse et la Haute-Marne ? En effet, ce sont des ZADistes, occupant illégalement le terrain, certains pendant une période de quelques heures, d'autres s'installent pour plusieurs semaines ou mois. Quelles consignes avez-vous reçues, et comme agissez-vous ?
M. André Vallini. - Le site de Roybon en Isère est également concerné. Des gens occupent illégalement un terrain appartenant à l'ONF depuis 4 ans.
M. Christian Cambon, président. - Enfin, que pensez-vous du transfert des contrôles radars à des sociétés privées ?
Général Richard Lizurey. - Les brigades territoriales de contact sont un signe donné en interne témoignant de la volonté de revenir à notre vrai métier. Toutefois, à un moment donné il faut faire un choix. En effet, nous ne sommes pas capables de tout faire, la polyvalence a ses limites. Certes des directives nationales existent et doivent être appliquées, en ce qui concerne les missions à réaliser. Mais je fais également confiance à l'intelligence locale du commandant d'unité, de compagnie ou de groupement par rapport aux problématiques et menaces locales. J'ai récemment publié une tribune, qui peut laisser perplexe, intitulée « le devoir de désobéir ». En effet, de temps en temps, il faut être capable de remettre en perspective les orientations données par la direction générale de la gendarmerie nationale avec la réalité de son territoire. Les orientations nationales définissent un point moyen, lequel dans les faits n'existe pas.
C'est dans cette idée que s'inscrivent les brigades de contact. Il n'y a pas de plan de poursuite des dissolutions. Toutefois, nous ne nous interdisons pas non plus de procéder à certaines d'entre elles, par exemple lorsque les problèmes immobiliers sont importants. S'il n'y a pas d'autres solutions, et en concertation avec les élus locaux, on procédera alors à des dissolutions. L'idée est de conserver le maillage du territoire tel qu'il est aujourd'hui - soit 3 100 brigades territoriales - pour ne pas créer de désert de sécurité, et pour assurer la présence de la gendarmerie nationale sur la totalité du territoire français.
Nous avons réalisé un investissement important en gilets pare-balles car ils constituent le premier élément de protection de l'individu. Aujourd'hui, chaque gendarme sur le terrain à un gilet pare-balles. En 2017, nous en avons acheté 40 000, autant seront achetés l'année prochaine, notamment pour permettre un remplacement de certains. Certes, nous avons bénéficié depuis deux ans de plusieurs plans de renforcement de matériels et de moyens. Toutefois, je souhaite que l'ensemble des mes réservistes soient également équipés d'un gilet pare-balles individuel.
L'entraînement au tir a également été renforcé. Il y a quelques années, il était de 30 cartouches par an. Nous sommes passés à 60 l'année dernière et je souhaite atteindre 90 cartouches d'instruction. Ce qui est important, ce n'est pas forcément le nombre de cartouches, mais la fréquence d'entraînement. Aussi seront mis en place des dispositifs de simulation de tirs, permettant de développer une habitude de manipulation des armes. Nous travaillons également avec la fédération française de tir et les clubs de tirs locaux afin de permettre aux gendarmes, de s'y entraîner, à titre individuel avec leur arme de service. Mon objectif est de donner à chacun les moyens, mais aussi le temps et l'opportunité de tirer. En effet, le tir fait partie des éléments essentiels de notre métier. Nous sommes sur la voie publique avec une arme, et il est important que les gendarmes sachent s'en servir et à bon escient.
Je remercie M. Perrin pour son retour sur les dysfonctionnements et l'insatisfaction de la population et des élus dans son territoire. Cela nous incite à travailler davantage. J'ai d'ailleurs instauré, dans le cadre de la mission de contact, une formation des personnels. En effet, dans l'esprit de beaucoup, lorsqu'ils sont en patrouille dans leur véhicule, ils sont au contact de la population. Pour moi, une patrouille doit progresser de points en points et à chaque fois descendre de voiture pour aller à la rencontre des gens. 90 heures de formation sur ce point ont été réintégrées dans la formation initiale des gendarmes et officiers.
Nous avons d'excellents contacts avec notre homologue marocain dans de nombreux domaines. Je me rapprocherai de lui pour savoir s'il existe des pratiques intéressantes en matière de recueil des signaux faibles. Dans tous les cas, c'est à nous de former nos personnels au domaine du renseignement pour qu'ils soient attentifs à ces derniers, et sachent quoi faire quand une telle information leur est transmise.
La mise en place des SPIG-Sabre, l'élaboration d'un schéma national d'intervention établissant la capacité du primo-arrivant à agir font partie des modifications apportées pour répondre au terrorisme. En outre, depuis l'année dernière, un dispositif de renseignement instantané du gendarme de base au directeur général a été mis en place. En cas d'attentat, ou de suspicion terroriste, tout gendarme, quel que soit son grade, doit me contacter directement. Je souhaite avoir l'information dans les dix minutes, concernant tout évènement de nature terroriste. Cela me permet d'avoir des informations directement de la patrouille sur le terrain, de pouvoir en rendre compte au Ministre, et de pouvoir organiser les renforts.
Les consignes reçues face aux ZAD sont simples. Il faut appliquer la loi de la République. Toutefois, cela doit être mis en accord avec le principe de droit administratif selon lequel l'intervention ne doit pas créer un problème plus important que le problème initial. A Notre-Dame-des-Landes, dès lors que l'on constate des actes de délinquance ou de criminalité, nous conduisons des enquêtes et procédons à une mise en cause. Par contre, à ce stade, nous n'entrons pas dans la ZAD, afin de ne pas créer une logique de confrontation. A Bure, la situation est différente, car les personnes contestataires sont chez elles. La capacité juridique est donc plus limitée. Mais nous conduisons également des enquêtes en cas de délinquance et délit, comme le récent incendie d'un hôtel-restaurant. Nous faisons ainsi notre travail qui est de réprimer les infractions et d'interpeller leurs auteurs.
Enfin, je souhaite préciser que lorsqu'une infraction routière est constatée, ceci est le résultat d'un processus. Ce n'est pas le gendarme dans la voiture équipée d'un radar qui constate l'infraction, mais l'OPJ situé au CACIR à Rennes, qui valide l'infraction - ou non. Le radar est ainsi un simple outil de photographie. Les informations numérisées sur le terrain sont envoyées par flux informatique au CASIR où des OPJ doivent valider le message d'infraction qui se transforme alors en avis de contravention. A titre personnel, le remplacement des gendarmes et policiers dans ces missions de surveillance routière me permettrait de dégager des forces pour remplir d'autres missions relevant de la sécurité au quotidien.
Après vérification, le nombre de gilets pare-balles est de 4 000 et non pas de 40 000 comme annoncé précédemment.