B. L'ORGANISATION DU TOURISME EN MONTAGNE
1. L'extension des « servitudes d'été » pour diversifier l'activité touristique des stations
En période hivernale, le préfet peut établir une servitude sur une propriété privée pour permettre à un site de ski nordique de fonctionner, pour aménager des pistes de ski alpin, etc .
En été, la servitude n'est possible que pour assurer, dans le périmètre plus restreint des sites de ski nordique, le passage, l'aménagement et l'équipement de pistes de loisirs non motorisés 17 ( * ) .
L' article 17 ter propose d' étendre cette servitude d'été. Elle pourrait ainsi concerner un site nordique - comme aujourd'hui - mais également le domaine skiable . Pour prévenir tout conflit d'usages 18 ( * ) , la chambre d'agriculture serait saisie pour avis.
2. La possibilité pour certaines communes de conserver la compétence tourisme, par dérogation à la loi NOTRe
Prévu par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, le transfert de la compétence « promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme » , aux communautés de communes et d'agglomération, doit intervenir le 1 er janvier 2017.
Au regard des difficultés rencontrées sur le terrain, l' article 18 propose que les communes déjà stations classées de tourisme ou en voie de l'être puissent déroger à cette disposition et conserver la compétence tourisme, sous réserve d'une délibération de leur conseil municipal prise avant le 1 er janvier 2017.
Le dispositif, assoupli à l'Assemblée nationale afin d'intégrer davantage de communes touristiques, présentait toutefois des difficultés d'application, auxquelles votre rapporteur pour avis propose de remédier ( amendement COM-282 ).
C. L'ADAPTATION DES RÈGLES D'URBANISME ET LA RÉHABILITATION DE L'IMMOBILIER DE LOISIR EN MONTAGNE
1. La réforme des unités touristiques nouvelles
L' article 19 propose de réformer la procédure des unités touristiques nouvelles (UTN) en renforçant leur assise dans les schémas de cohérence territoriale (SCoT) et dans les plans locaux d'urbanisme (PLU).
Il distingue ainsi deux catégories d'UTN : les UTN locales , inscrites dans les PLU, et les UTN structurantes , de plus grande ampleur, qui seraient intégrées aux SCoT. Seules les UTN qui ne seraient pas couvertes par un document d'urbanisme nécessiteraient l'octroi d'une autorisation préfectorale 19 ( * ) .
Lors de ses auditions, votre rapporteur pour avis a pu constater toute la complexité du dispositif voté par l'Assemblée nationale :
- les démarches administratives nécessaires à la création d'une UTN seraient multipliées par rapport au droit en vigueur (étude de discontinuité, avis de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestier, etc. ) ;
- le régime des UTN serait considérablement rigidifié. Dans la plupart des cas, il serait nécessaire de faire évoluer le SCoT ou le PLU pour créer une unité touristique nouvelle ou la modifier. Cette procédure n'apparaît guère adaptée aux enjeux économiques des UTN : la modification d'un document d'urbanisme peut prendre plusieurs années alors que l'offre touristique doit s'adapter rapidement aux nouvelles demandes des clients de stations de sports d'hiver.
Forte de ce constat, votre commission a adopté dix amendements visant à simplifier la procédure UTN tout en préservant les espaces naturels des zones de montagne (amendements COM-283 à COM-293) .
2. La réhabilitation de l'immobilier de loisir en montagne
Les articles 21 A à 22 visent à lutter contre le vieillissement de l'immobilier de loisir en montagne et à encourager sa réhabilitation, notamment dans le cadre des schémas de cohérence territoriale (SCoT).
Ils assouplissent ainsi le cadre juridique des « opérations de réhabilitation de l'immobilier de loisir » (ORIL) qui permettent aux communes de cofinancer la réhabilitation d'appartements détenus par des particuliers 20 ( * ) . Chaque commune pourrait désormais fixer les contreparties imposées aux bénéficiaires des ORIL (exigences en termes de travaux, de modalité d'occupation du local, de mise en location, etc .) 21 ( * ) .
3. La simplification du régime d'urbanisme des parcs naturels régionaux
À l'initiative de son rapporteur pour avis, votre commission propose d' enrichir le projet de loi en simplifiant le régime d'urbanisme des cinquante et un parcs naturels régionaux français (amendement COM-300 ).
En l'état du droit, ces parcs sont dotés d'une charte, soumise à enquête publique, qui constitue leur projet de territoire et précise leurs objectifs 22 ( * ) . Les communes situées à l'intérieur des parcs sont ainsi soumises à plusieurs documents d'urbanisme : la charte, les schémas de cohérence territoriale (SCoT) et le plan local d'urbanisme (PLU).
S'il existe une hiérarchie des normes entre ces différents documents 23 ( * ) , ce régime s'avère particulièrement complexe en pratique. À titre d'exemple, le parc naturel régional (PNR) des Bauges - qui regroupe quatorze communes de Savoie et de Haute-Savoie - est soumis, outre sa charte et les PLU, à quatre SCoT 24 ( * ) . L'articulation entre ces différents documents est une source quotidienne de difficultés, surtout que leurs procédures de renouvellement ne sont pas coordonnées 25 ( * ) .
La loi ALUR 26 ( * ) a d'ores et déjà permis d'avancer sur ce point : dans les parcs naturels régionaux (PNR) qui ne sont pas couverts par un schéma de cohérence territoriale, leur charte peut valoir SCoT dès lors que certaines exigences procédurales sont respectées 27 ( * ) (article L. 144-1 du code de l'urbanisme). En pratique, cette disposition n'est toutefois pas applicable, l'ensemble des PNR français étant couverts par des SCoT.
Dès lors, votre commission propose d' aller plus loin que la loi ALUR et de prévoir que la charte peut valoir SCoT même lorsque le parc est déjà couvert par un tel document . Pour reprendre l'exemple du parc des Bauges, sa charte pourrait valoir SCoT et les schémas de Savoie agglomération, d'Annecy, d'Albertville et de l'Albanais ne lui seraient plus opposables, ce qui simplifierait grandement le régime juridique du parc.
4. Les dispositions diverses
L' article 20 vise à rendre obligatoires les servitudes permettant de libérer les communes de l'obligation d'assurer la desserte des chalets d'alpage et bâtiments d'estive . Tout en approuvant l'objectif de cette disposition, votre commission propose un dispositif moins complexe permettant de libérer les communes de l'obligation de desserte en toute circonstance, qu'une servitude ait été ou non prévue ( amendement COM-293 ).
L' article 22 bis propose d'assouplir le régime juridique des refuges et notamment de prendre en compte les spécificités des zones de montagne dans la définition des normes de sécurité et d'hygiène.
Par souci de sécurité, votre commission souhaite préciser les règles applicables aux mineurs ( amendement COM-299 ). Ces derniers devraient être accompagnés pour accéder aux refuges non gardés.
Enfin, votre commission propose de supprimer des dispositions satisfaites par le droit en vigueur - et donc superfétatoires - concernant les règles d'urbanisme en fonds de vallée (article 20 B, amendement COM-295) , la définition des SCoT ruraux (article 20 bis A, amendement COM-296) et les modalités de création des établissements publics fonciers locaux ( article 20 ter , amendement COM-297) .
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Au bénéfice de ces observations et sous réserve de l'adoption de ses amendements, votre commission a donné un avis favorable à l'adoption des articles du projet de loi dont elle s'est saisie.
* 17 Article L. 342-20 du code du tourisme.
* 18 Par exemple entre la volonté de la commune de créer une piste de VTT et la nécessité, pour un agriculteur, de cultiver son terrain.
* 19 Alors, qu'en l'état du droit, cette autorisation concerne les communes dépourvues d'un document d'urbanisme mais également celles couvertes par un PLU.
* 20 Cf. le commentaire de l'article 21 pour l'exemple des Menuires, station où 350 appartements ont été rénovés grâce aux ORIL depuis 2003.
* 21 Alors, qu'en l'état du droit, les propriétaires bénéficiant d'une ORIL sont contraints de louer leur bien pendant neuf ans, exigence qui dissuade nombre de personnes éligibles au dispositif ORIL.
* 22 Article L. 333-1 du code de l'environnement.
* 23 La charte est supérieure au SCoT, lui-même supérieur au PLU (articles L. 131-1 et L. 131-4 du code de l'urbanisme).
* 24 Soit les SCoT de Savoie agglomération, d'Annecy, d'Albertville et de l'Albanais.
* 25 À titre d'exemple, la charte du parc sera renouvelée en 2022 alors que certains SCoT seront renouvelés entre 2017 et 2020.
* 26 Loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové.
* 27 Dans cette hypothèse, la charte doit notamment comporter un chapitre individualisé reprenant les différents éléments d'un SCoT (rapport de présentation, projet d'aménagement et de développement durables, document d'orientation et d'objectifs).