INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le PLF 2017 présente pour la gendarmerie nationale un budget en forte continuité avec le précédent, les crédits hors titre 2 affichant une certaine stabilité. En revanche, la croissance des effectifs est moindre qu'en 2016, année d'intense recrutement avec une augmentation de 2 300 personnels.
Les crédits du programme « Gendarmerie nationale », au sein de la mission « Sécurités », s'élèvent ainsi à 8,6 milliards en crédits de paiement, soit une augmentation de 293 millions d'euros ou +3,5%. Cette hausse est essentiellement due à l'augmentation des dépenses de personnel consécutive aux recrutements massifs de 2016 et à des mesures catégorielles.
Le plafond d'emploi augmente de 402 ETPT pour un total légèrement supérieur à 100 000 personnels. En net, ce sont 255 nouveaux emplois qui seront créés en 2017, correspondant à 200 postes au titre de l'engagement présidentiel du début du quinquennat et 55 du plan de lutte anti-terroriste qui seront affectés aux antennes du renseignement territorial (ART). Pour parvenir à ces chiffres, la gendarmerie nationale devra recruter plus de 10 000 personnels pour compenser les départs.
Les crédits de fonctionnement et d'investissement, stables par rapport à 2016, permettront notamment de financer pour 13 millions d'euros le début du déploiement national du projet Néogend, programme visant à doter chaque gendarme sur le terrain d'un équipement numérique afin de mieux répondre aux sollicitations du public. Ils financeront également un emploi accru de la réserve opérationnelle, qui nécessitera un abondement de 18 millions d'euros en hors titre 2 pour atteindre un objectif de 3 000 réservistes mobilisés par jour.
En matière d'investissement, un montant de 70 millions d'euros en autorisation d'engagements permettra de financer la troisième année du plan de réhabilitation de l'immobilier domanial de la gendarmerie. Les crédits permettront enfin de renouveler 3 000 véhicules légers et motocyclettes.
La légère progression des crédits prévue pour 2017, indispensable en cette période d'intense mobilisation des forces de sécurité, ne permet pas, toutefois, d'occulter certains sujets de préoccupation.
Au premier rang de ceux-ci figure la question de l'application de la directive européenne 2003/88/CE relative au temps de travail. À la suite d'une décision du Conseil d'Etat faisant suite au recours d'une association, cette directive a en effet due être appliquée de manière anticipée par la gendarmerie nationale, avant même sa transposition qui devrait avoir lieu l'année prochaine. Se traduisant par un repos obligatoire de 11 heures toutes les 24 heures et une durée maximale hebdomadaire de 48 heures maximum avec des dérogations complexes, les nouvelles règles sur le temps de travail bouleversent les missions. Selon le Directeur général de la gendarmerie nationale, entendu par votre Commission, c'est l'équivalent de 5 000 équivalents temps plein (ETP) qui pourraient ainsi être perdus, ce qui relativiserait quelque peu la progression des effectifs des deux dernières années. Or, le présent projet de budget ne prévoit pas de compensation pour cette perte d'effectifs .
En second lieu, si la gendarmerie nationale ne connaît pas de mouvement de contestation semblable à celui qui touche la police nationale depuis octobre 2016, il est indéniable que les gendarmes ont connu une année 2016 difficile, avec un alourdissement des missions et une intense sollicitation dus, d'une part, à de nombreux grands événements exigeant une forte mobilisation en matière de maintien de l'ordre public et, d'autre part, à la poursuite de la lutte anti-terroriste.
À cet égard, le plan « sécurité », présenté par le ministre de l'intérieur le 26 octobre 2016, comporte certes quelques points positifs, en prévoyant notamment un nouvel effort sur la réduction des tâches indues, ou encore un renforcement de l'équipement des policiers et gendarmes. Le lancement d'une nouvelle réflexion sur la légitime défense en vue de formuler des propositions dès la fin de mois de novembre constitue également un aspect important. Pour le moment, toutefois, le présent projet de budget ne comporte aucune traduction de ce plan en termes d'attribution de nouveaux crédits.
Au total, compte tenu de ces fortes préoccupations, votre commission a donné un avis défavorable à l'adoption des crédits du programme « Gendarmerie nationale » de la Mission « Sécurités » inscrits au PLF 2017.
I. DES CRÉDITS EN PROGRESSION MAIS DES SUJETS DE PRÉOCCUPATION
Les crédits de la mission gendarmerie inscrits au sein du PLF 2017 sont en augmentation de 3,5% par rapport aux crédits votés en 2016. Une absence de progression eût été impensable compte tenu de la priorité qui doit être accordée à la sécurité intérieure dans le contexte national actuel.
Par ailleurs, cette hausse, surtout due à la croissance des dépenses de titre II, ne permet pas de surmonter des préoccupations relatives notamment au gel des crédits des loyers, à l'organisation du temps de travail ou encore à la dégradation des conditions de logement des militaires de la gendarmerie nationale.
A. LES PRINCIPALES ÉVOLUTIONS PAR RAPPORT AUX CRÉDITS VOTÉS EN 2016
En raison du contexte international et national, les fonctions de sécurité font à nouveau partie des priorités de la loi de finances initiale. Le PLF pour 2017 prévoit ainsi la création de 2 286 postes pour l'ensemble de la mission.
Au sein du projet de loi de finances pour 2017, la Mission « sécurités », qui comprend les programmes « police nationale », « gendarmerie nationale », « sécurité et éducation routières » et « sécurité civile », est dotée de crédits en hausse, les crédits de paiement de la Mission passant de 12 536 millions d'euros à 12 975 euros, soit une hausse de 3,5 % par rapport à la loi de finances pour 2016 , quand les dépenses de l'Etat hors dette et pension n'augmentent que d'environ 1,1%.
Au sein de cette Mission, la gendarmerie nationale est dotée, dans le projet de loi de finances pour 2017, d'un montant de 8 795 millions d'euros en autorisations d'engagement contre 8 453 millions d'euros de crédits ouverts par la LFI 2016, soit une augmentation de 342 millions d'euros, + 4 % par rapport à 2016 . Les crédits de paiement s'élèveront quant à eux à 8 589 millions d'euros, contre 8 296 millions d'euros en 2016, en hausse de 293 millions d'euros (+ 3,5 %) . |
Les crédits de titre 2 pour rémunérations et charges sociales, qui représentent comme en 2016 environ 85 % des crédits du programme, se montent en 2017 à 7 271 millions d'euros (AE=CP), soit une hausse de 295 millions d'euros par rapport à 2015 (+ 4,2 %), supérieure à la hausse globale des crédits du programme 152 . Hors CAS pensions toutefois, les crédits passent de 3769 à 3941, soit une hausse plus contenue de 172 millions d'euros (+4,6%).
Notons également que, hors contribution du programme au compte d'affectation spéciale « Pensions », l'évolution du coût moyen d'un emploi de gendarmerie a été de seulement + 10,2 % entre 2006 et 2014, alors que le cumul de l'inflation atteignait 11,4 % sur la même période. En effet, ce sont d'abord les sous-officiers et les personnels civils administratifs et techniques qui ont vu leur nombre croître tandis qu'étaient supprimés des postes de gendarmes ayant le grade d'officier. La part des sous-officiers atteint ainsi, en 2016, 75,8 % du plafond d'emploi du programme. Les dépenses de personnel ont toutefois été alourdies entre 2006 et 2014 par la hausse du taux de cotisation des militaires au titre des pensions, passé de 100 % à 126 % alors que le taux de cotisation des personnels civils est de 75 %.
Les dépenses hors titre 2 (fonctionnement, investissement et intervention) s'élèveront à 1 524 millions d'euros en autorisations d'engagement (+48 millions d'euros, soit + 3,3 %) et 1 318 millions d'euros en crédits de paiement, soit une baisse de 2 millions d'euros ou - 0,15 % par rapport à 2016.
Au sein de ce « hors titre II », les dépenses de fonctionnement s'établiront en 2017 à 1 171 millions d'euros en crédits de paiement, en hausse de 10,5 millions d'euros (0,9 %) par rapport à 2016 .
Les dépenses d'investissement s'élèveront à 139 millions d'euros en crédits de paiement en 2017, soit - 11 millions d'euros par rapport à 2016, - 7,3 % environ .
Comme les années précédentes, le budget de la gendarmerie est donc essentiellement un budget de personnel dont les dépenses de titre II sont dynamiques tandis que les dépenses de fonctionnement et d'investissement n'évoluent que faiblement .
Par ailleurs, les principales caractéristiques du budget de la gendarmerie nationale sont, cette année, les suivantes :
En ce qui concerne les crédits de titre 2 :
Les dépenses de titre 2 hors CAS Pensions s'élèvent à 46,5 M€ en 2017 pour la mise en oeuvre du plan de lutte anti-terrorisme (PLAT) et du pacte de sécurité (PDS). Ceci correspond :
- à la création de 55 ETP en 2017 pour le PLAT (2,2 M€) ;
- à l'extension en année pleine des 1 763 ETP créés en 2016 pour le PDS (22,7 M€) ;
- au financement de la réserve opérationnelle (9,1 M€ pour le PLAT et 12,5 M€ pour le PDS).
Les dépenses de titre 2 hors CAS Pensions pour la mise en oeuvre du plan de lutte contre l'immigration clandestine (PLIC) en 2017 s'élèvent quant à elles à 0,57 M€, correspondant à l'extension en année pleine de 120 des 370 ETP créés en 2016.
En ce qui concerne le « hors titre 2 » :
Le Pacte de sécurité (PDS) et le plan de lutte anti-terroriste (PLAT) sont financés à hauteur de 79 M€ en AE et en CP en 2017 et visent à renforcer et développer les capacités de la gendarmerie nationale pour lutter contre la menace terroriste :
- Au titre du PDS, 73,4 M€ serviront notamment à financer :
• le déploiement du projet NEOGEND ;
• la poursuite de la remise à niveau du parc
automobile ;
• l'acquisition de véhicules
supplémentaires pour le contrôle des flux ;
• l'acquisition de moyens de protection et
d'intervention pour les personnels ;
• l'adaptation des infrastructures, les
équipements et le fonctionnement de la nouvelle école de
Dijon.
- Au titre du PLAT, 5,6 M€ serviront à financer :
• le renforcement de la présence des forces de
l'ordre sur le terrain via la création d'effectifs
supplémentaires et le financement de la réserve
opérationnelle ;
• l'acquisition de moyens informatiques (ordinateurs
et serveurs).
LE PROJET NEOGEND Ce programme vise à doter chaque gendarme sur le terrain d'un équipement numérique, de type tablette ou smartphone, afin de mieux répondre aux sollicitations du public en tous points du territoire. Lancé en septembre 2014, il a d'abord été testé dans le département du Nord. Cette expérimentation a ensuite été étendue à la région Bourgogne. Le déploiement national des équipements à usage collectif est en cours et celui des tablettes à usage individuel aura lieu à partir de 2017. Le coût de ce projet est évalué à 75,7 millions d'euros sur la période 2015-2019, dont 13 millions d'euros inscrits au présent PLF. Un marché public est envisagé pour 2017, pour lequel le SAELSI a déjà identifié plusieurs options, y compris celle d'une location des matériels qui permettra de lisser la dépense sur la durée du marché et de revaloriser le stock des matériels en fin d'exercice. |