Avis n° 165 (2015-2016) de Mme Dominique ESTROSI SASSONE , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 19 novembre 2015

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N° 165

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2015

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires économiques (1) sur le projet de loi de finances pour 2016 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME VII

ÉGALITÉ DES TERRITOIRES ET LOGEMENT

Par Mme Dominique ESTROSI SASSONE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Claude Lenoir , président ; Mmes Delphine Bataille, MM. Alain Bertrand, Martial Bourquin, Gérard César, Alain Chatillon, Daniel Dubois, Joël Labbé, Mme Élisabeth Lamure, MM. Michel Le Scouarnec, Yannick Vaugrenard , vice-présidents ; M. Marc Daunis, Mme Valérie Létard, M. Bruno Sido , secrétaires ; MM. Gérard Bailly, Jean-Pierre Bosino, Henri Cabanel, François Calvet, Roland Courteau, Alain Duran, Mmes Frédérique Espagnac, Dominique Estrosi Sassone, M. Daniel Gremillet, Mme Annie Guillemot, MM. Michel Houel, Serge Larcher, Jean-Jacques Lasserre, Daniel Laurent, Philippe Leroy, Mmes Marie-Noëlle Lienemann, Anne-Catherine Loisier, MM. Michel Magras, Franck Montaugé, Robert Navarro, Jackie Pierre, Ladislas Poniatowski, Mme Sophie Primas, MM. Yves Rome, Henri Tandonnet .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 3096, 3110 à 3117 et T.A. 602

Sénat : 163 et 164 à 170 (2015-2016)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Malgré les plans de relance et les multiples mesures adoptées dans la loi de finances pour 2015 pour créer un choc d'offre, la reprise dans le secteur de la construction se fait attendre.

En 2014, le nombre de permis de construire a diminué de 12 % par rapport à 2013 et le nombre de logements mis en chantier de 10,3%.

Fin août 2015, 361 900 logements ont été autorisés, en baisse de 6 % et 345 100 logements ont été commencés, en baisse de 4,1 %. Cependant, de juin à août 2015, le nombre de logements autorisés augmentent de 8,7 % par rapport aux trois mois précédents.

Le secteur de l'artisanat demeure très touché et connaît son quatorzième trimestre consécutif de baisse d'activité.

Les effectifs du secteur du bâtiment pâtissent de ce manque d'activité. Après avoir augmenté pendant onze années sans interruption, l'emploi dans le secteur du bâtiment connaît depuis 2009 une baisse continue de ses effectifs. Ainsi, entre octobre 2013 et avril 2015, on constate la perte de 20 000 emplois intérimaires et 55 800 emplois salariés sur cette période.

Votre rapporteur estime qu'en complément des dispositions en faveur du logement intermédiaire et de l'accession à la propriété, des mesures sont nécessaires pour lever les freins que rencontre le secteur de la construction et pour développer la construction de logements abordables.

S'agissant plus spécifiquement des crédits de la mission « égalité des territoires et logements », votre rapporteur constate que leur forte augmentation de 33,7 % en autorisations d'engagement et de 35,37 % en crédits de paiement est le résultat d'une mesure comptable : la budgétisation des allocations logement à caractère familial.

Votre rapporteur examinera les évolutions des crédits du programme 177 consacré à l'hébergement d'urgence, du programme 109 consacré aux aides personnelles au logement et du programme 135 consacré aux aides à la pierre et à la construction ainsi qu'à la lutte contre l'habitat indigne.

Malgré l'engagement de deux réformes attendues- la réforme des aides au logement et la réforme des aides à la pierre-, votre rapporteur a appelé au rejet de ces crédits estimant que le budget présenté manque de sincérité s'agissant en particulier des programmes 177 et 109. En effet, s'agissant du programme 177 relatif à l'hébergement d'urgence, votre rapporteur note que les crédits sont, comme l'an dernier, insuffisants pour répondre aux besoins de plus en plus pressants en matière d'hébergement d'urgence. Quant aux crédits du programme 109, votre rapporteur estime que la réforme des APL est une réforme a minima dont il n'est pas certain qu'elle permette de réaliser les économies annoncées par le Gouvernement.

Lors d'une réunion tenue le mardi 24 novembre 2015, la Commission des affaires économiques, sur la proposition de son rapporteur, a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Égalité des territoires et logement » du projet de loi de finances pour 2016.

Elle a également donné, sur proposition de son rapporteur, un avis défavorable à l'adoption de l'article 55 quater rattaché à la mission, un avis favorable à l'adoption des articles 54, 55, 55 bis , 55 ter , et 56 bis rattachés à la mission ainsi qu'à l'article 56 sous réserve des amendements qu'elle a adoptés.

I. UNE TRÈS FORTE AUGMENTATION DES CRÉDITS DE LA MISSION « ÉGALITÉ DES TERRITOIRES ET LOGEMENT » EN RAISON D'UNE MODIFICATION DE PÉRIMÈTRE

Les crédits de la mission « Égalité des territoires et logement » sont en très forte augmentation en 2016 , de 32,2 % en autorisations d'engagement (18,15 milliards d'euros) et de 33,4 % en crédits de paiement (17,89 milliards d'euros).

ÉVOLUTION EN 2016 DES CRÉDITS DE LA MISSION
« ÉGALITÉ DES TERRITOIRES ET LOGEMENT »
(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Programme

LFI pour 2015

PLF 2016

Évolution

LFI pour 2015

PLF 2016

Évolution

177

Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

1 365,9

1 440,3

+5,4%

1 365,9

1 440,3

+5,4%

109

Aide à l'accès au logement

10 984,3

15 401,9

+40,2%

10 984,3

15 401,9

+40,2%

135

Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat

598,2

546,09

-8,7%

279,6

286,09

+2,3%

337

Conduite et pilotage des politiques du logement et de l'égalité des territoires

777,1

765,2

-1,5%

777,1

765,2

-1,5%

TOTAL

13 725,7

18 153,7

+32,2%

13 407,1

17 893,7

+33,4%

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016.

Lors de l'examen des crédits de la mission « égalité des territoires et logement », le 4 novembre dernier, les députés ont adopté deux amendements du Gouvernement modifiant ces crédits :

- 69,85 millions d'euros supplémentaires sont affectés en AE et en CP au programme « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » ;

- 26,17 millions d'euros supplémentaires sont affectés en AE et en CP au programme « Aide à l'accès au logement » ;

- 100 millions d'euros supplémentaires sont affectés en AE et 150 millions d'euros en CP au programme « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat ».

Lors de la seconde délibération du présent projet de loi de finances, les députés ont également adopté un amendement du Gouvernement augmentant les crédits du programme « Aide à l'accès au logement » de 10 millions d'euros afin de tenir compte des modifications apportées par les députés à la réforme des aides personnelles au logement.

En conséquence, le budget de la mission « égalité des territoires et logement » s'établit ainsi :

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Programme

LFI pour 2015

PLF 2016

Évolution

LFI pour 2015

PLF 2016

Évolution

177

Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

1 365,9

1 510,2

+10,6%

1 365,9

1 510,2

+10,6%

109

Aide à l'accès au logement

10 984,3

15 438,1

+40,5%

10 984,3

15 438,1

+40,5%

135

Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat

598,2

646,0

+8%

279,6

436,09

+56%

337

Conduite et pilotage des politiques du logement et de l'égalité des territoires

777,1

765,2

-1,5%

777,1

765,2

-1,5%

TOTAL

13 725,7

18 359,7

+33,7%

13 407,1

18 149,7

+35,37%

Dans la suite du présent rapport, sauf mention spécifique, il sera cependant fait référence aux données figurant dans le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016.

A. DES CRÉDITS INSUFFISANTS POUR RÉPONDRE À LA DEMANDE D'HÉBERGEMENT D'URGENCE (PROGRAMME 177)

Le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » regroupe les crédits de la politique d'hébergement et d'accès au logement des personnes sans abri ou mal logées.

Il est à noter le changement d'intitulé du programme désormais libellé « hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », afin, selon le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016, de traduire « le recentrage des missions du programme sur le périmètre de l'hébergement, de l'accompagnement et de l'accès au logement, opéré depuis plusieurs années ».

Pour 2016, les crédits consacrés dans le projet de loi initial au programme 177 sont de nouveau en augmentation de 5,4 % en AE et en CP.

Cette évolution masque cependant des évolutions différenciées des crédits selon les actions. Ainsi, si les crédits de l'action n° 2 « hébergement et logement adapté », qui représentent 95 % des crédits du programme, augmentent de 6 %, ceux de l'action « conduite et animation des politiques de l'hébergement et de l'inclusion sociale » diminuent de 36,8 % en raison du transfert du Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (FONJEP) vers le programme 163 « jeunesse et vie associative ».

Évolution des crédits du programme 177
(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Actions

LFI 2015

PLF 2016

Évolution

LFI 2015

PLF 2016

Évolution

Prévention de l'exclusion

59,9

60,5

1%

59,9

60,5

1 %

Hébergement et logement adapté

1 289,9

1 369,7

6,1%

1 289,9

1 369,7

6,1%

Conduite et animation des politiques de l'hébergement et de l'inclusion sociale

16

10,1

-36,8%

16

10,1

-36,8%

Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

1 365,9

1 440,3

5,4%

1 365,9

1 440,3

5,4%

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016.

Lors de l'examen des crédits de la mission « égalité des territoires et logement », le 4 novembre dernier, les députés ont adopté un amendement du Gouvernement augmentant les crédits de 69,8 millions d'euros en AE et en CP portant ainsi les crédits du programme à 1 510,2 millions d'euros en AE et CP soit une augmentation de 10,6 % des crédits .

Les crédits de l'action 2 « hébergement et logement adapté » qui représentent l'essentiel des crédits de ce programme se répartissent de la manière suivante :

- 90 millions d'euros pour la veille sociale, en augmentation de 2,5 % ; ces crédits seront dédiés aux services d'accueil et d'orientation (SIAO) chargés de la coordination de l'action des structures contribuant à l'accueil, l'hébergement et l'accès au logement des personnes sans domicile fixe, le numéro vert 115 et les SAMU sociaux ;

- 440 millions d'euros pour l'hébergement d'urgence, en augmentation de 15 % ;

- 636,3 millions d'euros pour les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) ;

- 203,4 millions d'euros pour les dispositifs de logements adaptés, en augmentation de 4,2 %.

1. Une pression constante de la demande sur le parc d'hébergement d'urgence

Pour répondre à la demande toujours aussi forte sur le parc d'hébergement d'urgence, le Gouvernement a décidé d'augmenter les capacités d'accueil et de réduire les nuitées hôtelières par le biais de trois plans :

- la feuille de route pour 2015-2017 du plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale, adoptée le 3 mars dernier ;

- le plan triennal relatif à la substitution de dispositifs alternatifs aux nuitées hôtelières et à l'amélioration de la prise en charge à l'hôtel pour la période 2015-2017 conformément à la circulaire interministérielle du 20 février 2015 ;

- le plan « Répondre au défi des migrations : respecter les droits - faire respecter le droit » mis en oeuvre conformément à la circulaire du 22 juillet 2015 commune au ministère du logement et au ministère de l'intérieur.

a) Le plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale

Le 21 janvier 2013, le Gouvernement avait adopté un plan contre la pauvreté qui affirmait en matière d'hébergement et de logement un double objectif :

- que le plus grand nombre de personnes en difficultés accèdent plus rapidement au logement en faisant éventuellement l'objet d'un accompagnement adapté ;

- que les réponses apportées aux personnes en situation d'exclusion soient mieux structurées.

Ce plan s'est traduit en pratique par la création de :

- 7 000 places d'hébergement, 4 000 places en centres d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA) et 7 360 places en logement adapté ;

- 106 414 places en logements sociaux dont plus de 25 % de logements très sociaux.

Cette feuille de route a été actualisée le 3 mars dernier pour la période 2015-2017. Le Gouvernement a réaffirmé sa volonté de sortir de la gestion de l'urgence et de mettre en place des solutions pérennes en matière de logements. Il a notamment souhaité améliorer l'organisation des services offerts par les dispositifs d'hébergement en renforçant le rôle des services intégrés d'accueil et d'orientation (SIAO) et en généralisant les diagnostics dits à 360°.

b) La gestion de l'accueil des demandeurs d'asile et la mise en place du plan « Répondre au défi des migrations : respecter les droits - faire respecter le droit »


• Les demandeurs d'asile bénéficient en principe de places d'hébergement dédiées. Ainsi, on dénombre 25 300 places dans les centres d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA), 19 600 places d'hébergement d'urgence pour demandeurs d'asile (HUDA) et un dispositif d'hébergement d'urgence à gestion nationale (AT-SA) de 2 800 places.

Ces places sont gérées dans le cadre du programme 303 « immigration et asile ».

Toutefois, en raison de l'insuffisance du nombre de places dédiées aux demandeurs d'asile, ces derniers sont en pratique hébergés dans les structures d'accueil et d'hébergement d'urgence généralistes .

La direction générale de la cohésion sociale a indiqué à votre rapporteur ne pas être en mesure de donner le nombre de demandeurs d'asile pris en charge par le dispositif généraliste. Cependant, selon un rapport de l'Igas, il peut être estimé à 20%.

Votre rapporteur constate que la réforme de l'asile , contrairement à ce que le Gouvernement indiquait l'année dernière, n'a pour l'instant produit aucun effet , le Gouvernement reconnaissant lui-même dans son plan « répondre à la crise des migrants : respecter les droits, faire respecter le droit » que les capacités d'hébergement des demandeurs d'asile demeuraient engorgées.


• La hausse des flux migratoires a conduit le Gouvernement a présenté le 17 juin dernier un plan visant à « répondre à la crise des migrants : respecter les droits, faire respecter le droit » qui comprend des actions réparties selon trois axes : améliorer l'accueil des demandeurs d'asile, mieux les mettre à l'abri et les accompagner et enfin lutter contre l'immigration irrégulière. Ce plan s'inscrit dans la continuité de la réforme du droit d'asile.

Le Gouvernement s'est engagé à créer 4 000 places supplémentaires d'hébergement pour les demandeurs d'asile d'ici la fin de l'année 2016, dont 2 000 places d'ici la fin de l'année 2015. Ces places viendront s'ajouter aux 4 200 places devant être créées avant la fin de l'année 2015.

En outre, 5 000 places « destinées à favoriser l'accès au logement autonome des personnes réfugiées » et situées dans le parc social des zones détendues, dans les résidences sociales et dans l'intermédiation locative ainsi que 500 places en centre provisoire d'hébergement devraient en outre être créées avant 2017. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, les réfugiés n'auront pas le choix du lieu de l'hébergement et seront dirigés vers les zones détendues.

c) Le plan de réduction des nuitées hôtelières

Face à une pression continue des demandes sur les structures d'hébergement d'urgence, le recours aux nuitées d'hôtel s'est imposé comme une solution de facilité plus particulièrement dans quatre régions : l'Ile-de-France qui concentre 86% des nuitées, la Lorraine, Rhône-Alpes et la Basse-Normandie.

Le Gouvernement a souhaité développer des solutions pérennes alternatives aux nuitées d'hôtel. Il a ainsi décidé de réduire de 10 000 le nombre de nuitées lesquelles seraient remplacées par 13 000 places créées sur trois ans qui se répartissent en :

- 9 000 places en intermédiation locative ;

- 1 500 places en logement adapté ;

- 2 500 places d'hébergement dans les centres ou des appartements dédiés aux familles.

Cependant, votre rapporteur constate que le nombre de nuitées continue d'augmenter atteignant 37 318 au 30 juin 2015, soit une augmentation de 15,5 %.

d) L'augmentation des capacités d'accueil et le développement de l'intermédiation locative

Votre rapporteur observe une augmentation constante depuis 2011 des places d'hébergement passant de 75 347 à 103 527 (soit + 37,4 %), augmentation à laquelle les plans précités contribuent.

Le nombre de places dans les hôtels a plus que doublé sur cette même période. Le nombre de places en CHRS est lui aussi en augmentation de 3,4 % sur la période et atteint 40 690.

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2013, 2014, 2015 et 2016 NB : pour 2013, le PAP ne mentionne pas le détail des places en centre d'hébergement d'urgence.

En outre, 209 749 places sont disponibles soit dans des résidences sociales, soit dans les dispositifs d'intermédiation locative.

Le Gouvernement a souhaité renforcer l 'intermédiation locative qui permet de développer l'accueil des ménages en difficultés pour accéder à un logement autonome. Le dispositif comporte des garanties financières et des avantages fiscaux en faveur des bailleurs afin de faciliter la mobilisation du parc privé. En pratique, le dispositif peut prendre deux formes :

- une forme avec mandat de gestion par laquelle le propriétaire s'adresse à une agence immobilière sociale qui assurera la gestion et un suivi individualisé ; un bail d'une durée de trois ans est conclu avec le locataire ;

- une forme avec sous-location, avec ou sans bail glissant : le tiers social est locataire et sous-loue à la personne.

Ce dispositif a connu une montée en puissance extrêmement rapide depuis 2012 pour atteindre 21 643 places en 2014 . Cette progression devrait se poursuivre, la création de 9 000 places supplémentaires étant prévue d'ici 2017.

Évolution depuis 2012 du nombre de places en intermédiation locative

Modalités d'intermédiation locative

2012

2013

2014

Sous-location

5 539

14 392

17 472

Mandat de gestion

2 396

3 344

2 840

Sous-location avec bail glissant

-

642

1331

total

7 935

18 378

21 643

Source : DGCS : enquête AHI.

Votre rapporteur estime que l'intermédiation locative est un dispositif intéressant mais qui demande du temps pour démarcher et convaincre les propriétaires. Elle observe que l'Anah s'est mobilisée afin que 2 000 logements passent sous le statut de l'intermédiation locative, en adoptant le principe d'une prime incitative pour l'intermédiation locative de 1 000 euros.

Parallèlement, les personnes qui ne sont pas assez autonomes pour occuper un logement peuvent être accueillies dans les maisons-relais ou les pensions de famille . Le projet de loi de finances prévoit d'affecter à ce dispositif 86 millions d'euros pour 2016, en augmentation de 8,5 %. 1 000 places supplémentaires devraient ainsi être créées en complément des 14 038 places ouvertes au 31 décembre 2014.

2. Des crédits dédiés à l'hébergement d'urgence insuffisants
a) Le constat d'une sous-budgétisation persistante des crédits dédiés à l'hébergement d'urgence

Malgré l'augmentation des capacités d'accueil, votre rapporteur constate une pression continue sur les dispositifs d'hébergement d'urgence et une sous-budgétisation persistante des crédits qui leur sont dédiés.

Votre rapporteur observe que la prévision budgétaire initiale de 1 440 millions est inférieure aux crédits du programme exécutés en 2014 et qui atteignaient 1 470 millions d'euros en AE et 1 469 millions d'euros en CP, alors même que les besoins se sont accrus.

En outre, votre rapporteur constate que le Gouvernement a de nouveau été contraint de prendre un décret d'avance pour augmenter les crédits dédiés à l'hébergement d'urgence pour 2015. 130 millions ont ainsi été débloqués afin :

- de financer les mesures exceptionnelles du plan d'accueil des réfugiés : création de 5 000 places de logement accompagné et 1 500 places d'hébergement d'urgence, moyens mobilisés pour Calais ;

- d'assurer le versement des financements dédiés au logement adapté et au CHRS.

Le projet de loi de finances rectificative pour 2015 prévoit en outre d'ouvrir des crédits supplémentaires à hauteur de 53,59 millions d'euros . Ce sont ainsi 1 550 millions d'euros qui auront finalement été ouverts pour ce programme.

Or, même si lors de l'examen des crédits de la mission « égalité des territoires et logement », les députés ont adopté un amendement du Gouvernement augmentant ces crédits de 69,8 millions d'euros pour atteindre 1 510 millions d'euros, ces crédits demeurent inférieurs à ceux qui seront finalement ouverts pour 2015. Au vu de ces éléments, votre rapporteur estime que le budget présenté n'est pas sincère.

Par ailleurs, votre rapporteur souhaite réaffirmer que tant qu'une solution -expulsion ou régularisation- ne sera pas prise pour les demandeurs d'asile déboutés, les besoins continueront de s'accroître.

b) Les difficultés budgétaires de l'accompagnement vers et dans le logement

Le dispositif d'accompagnement vers et dans le logement ne bénéficie plus de financement budgétaire direct mais est financé par le Fonds national d'accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL). Or, le FNAVDL qui finance des actions d'accompagnement  de personnes reconnues prioritaires et auxquelles un logement doit être attribué dans le cadre du DALO et des personnes ou familles confrontées à des difficultés particulières, pour accéder à un logement décent et indépendant ou s'y maintenir bénéficie uniquement des ressources résultant du produit des liquidations d'astreinte prononcées et liquidées à l'encontre de l'État dans le cadre du DALO .

Votre rapporteur constate que certaines juridictions ne liquidant plus de façon régulière ces astreintes, un décalage s'est produit entre les ressources budgétaires prévues et les sommes effectivement liquidées. Cette situation a eu d'importantes répercussions sur les actions financées par le FNAVDL cette année.

Ainsi, le comité de gestion a décidé, en juin 2015, de ne pas approuver d'état prévisionnel des ressources et des dépenses pour l'année 2015 en raison du niveau moindre de recettes et de l'impossibilité de faire des prévisions sérieuses. Toutefois, le paiement des astreintes dues au titre du DALO constituant des dépenses obligatoires pour les services déconcentrés, les membres du comité de gestion se sont finalement prononcés le 11 septembre 2015 sur la répartition des ressources.

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, a chargé l'Igas et le CGEDD d'examiner la situation et de faire des recommandations.

Les députés ont toutefois décidé de ne pas attendre ces recommandations et ont adopté l' article 55 ter (commentaire cf. infra) rattaché à la présente mission qui prévoit de liquider plus régulièrement les astreintes prononcées à l'encontre de l'État en cas de non-respect du droit au logement opposable. Votre rapporteur est favorable à cette disposition qui permettra au FNAVDL de bénéficier plus régulièrement du produit de ces astreintes lui donnant ainsi une meilleure visibilité pour engager ses actions.

3. Des efforts de gestion à poursuivre


• Pour votre rapporteur, les dispositifs de coordination et d'amélioration des besoins d'hébergement doivent encore être améliorés. Votre rapporteur ne peut en effet que regretter que les dispositifs de SIAO et de diagnostic à 360 degrés ne soient pas partout pleinement opérationnels.

Elle constate également que le Gouvernement a mobilisé dans le cadre de l'accueil des réfugiés des places d'hébergement sans passer par le SIAO. Le collectif des associations unies, dont fait partie la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (FNARS), s'est inquiété de cette entorse au principe et craint que la mobilisation pour accueillir les réfugiés ne « renforce encore le développement de dispositifs parallèles qui vont accroître la segmentation et les inégalités de traitement entre les différents publics si aucune coordination n'est mise en place sur les territoires ».

Votre rapporteur souhaite rappeler la nécessité de ne pas créer de concurrence entre les publics et invite le Gouvernement et les préfets à renforcer la coordination entre les différents intervenants dans l'attribution des places.

Elle estime également que la connaissance précise des besoins en termes d'hébergement doit être renforcée afin de permettre d'apporter localement les réponses les plus adaptées et regrette que l'élaboration des diagnostics dits à 360 degrés qui était attendue pour juin 2015, ait pris du retard.


• Pour les représentants de la FNARS entendus par votre rapporteur, la politique suivie en matière d'hébergement d'urgence se caractériserait par un recentrage vers des missions de mises à l'abri plutôt que de réinsertion. Ils souhaitent qu'un effort plus important soit porté à l'accompagnement et proposent en conséquence que le budget soit élaboré par missions (hébergement, accompagnement...) plutôt que par dispositifs.

Le plan de lutte contre la pauvreté de 2013 s'interrogeait déjà sur une évolution des dispositifs en prévoyant que « la possibilité de proposer un statut unique pour les structures d'hébergement et pour l'accompagnement, afin de mettre un terme à l'empilement des dispositifs et à la segmentation , sera également à étudier à moyen terme . » Votre rapporteur estime que la pression sur l'hébergement d'urgence perdurant, une réflexion d'ensemble sur ce programme devient inéluctable.

B. LA RÉFORME DES AIDES AU LOGEMENT : UNE RÉFORME NÉCESSAIRE AUX CONSÉQUENCES FINANCIÈRES ET SOCIALES MAL DÉFINIES (PROGRAMME 109)

Le programme 109 « Aides à l'accès au logement » comporte les crédits destinés au financement des aides à la personne, à l'information relative au logement, à l'accompagnement des publics en difficulté et à la garantie des risques locatifs.

Les crédits de ce programme sont de nouveau en très forte augmentation de 40,2 % . Toutefois, votre rapporteur ne peut que constater que cette augmentation est le résultat de choix purement comptable lié à la budgétisation des aides au logement à caractère familial actuellement financées par le budget de la sécurité sociale.

Évolution en 2016 des crédits du programme
(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Actions

LFI 2015

PLF 2016

Évolution

LFI 2015

PLF 2016

Évolution

Aides personnelles

10 966,9

15 385,7

+ 40,2%

10 966,9

15 385,7

+40,2%

Information relative au logement et accompagnement des publics en difficulté

8

8

0

8

8

0

Sécurisation des risques locatifs (libellé modifié)

9,3

8,2

-11,8%

9,3

8,2

-11,8%

Aide à l'accès au logement

10 984,3

15 401,9

+40,2%

10 984,3

15 401,9

+40,2%

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016.

Lors de l'examen des crédits de la mission « égalité des territoires et logement », le 4 novembre dernier, les députés ont adopté un amendement du Gouvernement augmentant les crédits de ce programme de 26,17 millions d'euros en AE et en CP, afin de tenir compte de l'impact de l'accueil des réfugiés en matière d'APL. Puis, lors de la seconde délibération du projet de loi, les députés ont également adopté un amendement du Gouvernement augmentant de nouveau les crédits du programme de 10 millions d'euros afin de tirer les conséquences des ajustements opérés par les députés quant à la réforme des APL.

En conséquence, le budget de ce programme atteint désormais 15 438,1 millions d'euros en AE et en CP soit une augmentation de 40,5% par rapport à l'an dernier.

Avant de se pencher plus longuement sur l'action 1 « aides personnelles au logement » qui concentrent 99 % des crédits du programme, votre rapporteur a constaté s'agissant des autres actions du programme que les crédits destinés à l'action 3 « sécurisation des risques locatifs » étaient en diminution de 11,8 %.

Ces crédits correspondent aux sommes nécessaires pour équilibrer le fonds de garantie universelle des risques locatifs (GURL) au titre du dispositif de garantie des risques locatifs (GRL). Ce dispositif sera remplacé au 31 décembre 2015 par le dispositif VISALE entièrement géré et financé par Action Logement. Ce dispositif devrait prendre la forme d'un cautionnement par lequel Action Logement s'engage à payer au bailleur les loyers et les charges récupérables non payés par le locataire dans la limite de 1 300 euros et pour 36 mois de loyers au maximum. Pourront bénéficier de cette garantie les salariés du secteur privé entrant dans un emploi et dans un logement privé, les salariés du secteur privé de moins de 30 ans et les ménages accompagnés dans le cadre d'une intermédiation locative. Les crédits indiqués sont ceux nécessaires au règlement des sinistres constatés en 2015.

1. Les aides personnelles au logement : une dépense de guichet en constante augmentation

En 2014, 17,7 milliards d'euros d'aides au logement ont été versés à 6,5 millions de bénéficiaires.

Entre 2013 et 2014, le nombre de bénéficiaires a augmenté de 0,6 % (contre 1,1%), le montant global des prestations a quant à lui augmenté de 1,8 % (contre 3,9 %).

Évolution du nombre de bénéficiaires des aides au logement
(en milliers)

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Évolution 2013/2014

ALF

1 255

1 244

1 263

1 351

1 356

1 335

1 332

1 323

1 317

1 319

+ 0,15%

APL

2 567

2 482

2 496

2 620

2 619

2 621

2 681

2 724

2 773

2 803

+ 1 %

ALS

2 252

2 198

2 216

2 345

2 364

2 353

2 388

2 374

2 405

2 416

+ 0,45 %

Total

6 074

5 924

5 975

6 316

6 339

6 309

6 401

6 421

6 496

6 538

+ 0,6 %

Source : Estimation à partir des statistiques annuelles au 31 décembre de la CNAF et de la CCMSA. Nombres arrondis au millier de bénéficiaires. La répartition par parc est estimée pour la CCMSA.

Évolution du montant total des prestations versées
(en milliards d'euros)

2005

2006

2007

2008

2008

2010

2011

2012

2013

2014

Évolution

ALF

3,47

3,60

3,67

3,90

4,07

4,15

4,21

4,24

4,369

4,424

+ 1,25%

APL

6,17

6,23

6,20

6,57

6,72

6,86

7,14

7,41

7,767

7,988

+ 2,84%

ALS

4,15

4,30

4,36

4,71

4,82

4,90

5,00

5,07

5,254

5,296

+0,76%

Total

13,80

14,14

14,24

15,19

15,61

15,92

16,35

16,73

17,39

17,708

+1,8%

Source : Éléments statistiques et comptables (y compris 13 ème balance) émanant des caisses des régimes général et agricole. Comptabilité en décaissements. Chiffres arrondis au million le plus proche.

92,7 % des bénéficiaires des aides au logement sont locataires.

Dans son rapport réalisé à la demande de la commission des finances du Sénat 1 ( * ) , la Cour des comptes rappelle que la majorité des bénéficiaires des aides personnelles au logement qui présentent un caractère fortement redistributif, ont des ressources qui se situent sous le seuil de pauvreté. Plus de la moitié d'entre eux résident dans le parc social.

Le nombre d'étudiants bénéficiaires d'une aide au logement a de nouveau augmenté entre 2013 et 2014 (+2,4 %). Ils représentent 11,4 % des bénéficiaires. Parmi ces derniers, 34 % seraient boursiers.

Bénéficiaires étudiants
(en milliers) au 31/12

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Dont boursiers

APL

106

105

102

100

101

99

100

103

99

103

103

49

(48%)

ALF

10

10

10

10

10

9

8

8

8

7

7

1

(20%)

ALS

592

591

580

572

571

578

589

615

595

619

637

201 (32%)

Total

708

706

692

682

682

686

697

726

702

730

747

252 (34%)

Source : Statistiques annuelles de la CNAF et estimations.

2. Plusieurs propositions de réformes

Dans un contexte d'économie des dépenses publiques, M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics avait annoncé le 11 mai dernier que des « économies conséquentes ser[aient]réalisées dans le domaine du logement, dans le cadre du budget 2016 », une des pistes de réflexion pour réaliser ces économies étant de réformer les aides au logement. Votre rapporteur a dénombré depuis le début de cette année pas moins de quatre rapports portant sur une réforme des aides personnelles au logement.

a) Le document de travail du CGEDD, de l'IGF et de l'Igas présentant les « conclusions finales » de la mission d'évaluation de la politique du logement

Un document de travail du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), de l'inspection générale des finances (IGF) et de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) présentant les « conclusions finales » de la mission d'évaluation de la politique du logement en date du 23 juin 2014, publié sur le site internet des Échos le vendredi 30 janvier 2015, constatait que l'État consacrait d'importantes ressources -46 milliards, soit 2 % du PIB- aux dépenses de logement sans veiller à leur cohérence.

S'agissant des aides au logement, il était proposé :

- de mettre fin à la possibilité de cumul entre le rattachement au foyer fiscal parental du jeune et l'octroi des APL ;

- d'abaisser le taux d'abattement à 20% en cas de chômage indemnisé et de supprimer les cas d'abattement et de neutralisation n'ayant plus de justification ;

- de renforcer les critères d'éligibilité en introduisant des maxima de loyer, de surface et de patrimoine ;

- d'améliorer la détection des fraudes ;

- de relever le seuil minimal d'effort ;

- de désindexer les paramètres du barème locatif pour une année.

b) Les conclusions du groupe de travail sur les aides personnelles au logement de l'Assemblée nationale présidé par M. François Pupponi

Le groupe de travail sur les APL a été mis en place à l'Assemblée nationale à la suite des débats qui eurent lieu au Parlement lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2015.

Le groupe de travail a présenté ses conclusions le 26 mai dernier. Il formule six recommandations :

- écarter tout rabotage général considérant qu'une telle disposition toucherait les ménages les plus modestes ;

- maintenir le principe de l'APL-accession et en conséquence annuler la réforme votée lors du PLF pour 2015 ;

- prendre en compte le patrimoine des ménages dans le calcul de l'APL. Cette proposition permettrait de générer 150 millions d'euros d'économie annuelle ;

- prendre en compte le revenu des parents, l'éloignement géographique et les cas de rupture familiale dans le versement des APL à des étudiants. Cette proposition permettrait de générer 180 millions d'euros d'économie annuelle ;

- afin de diminuer les coûts de gestion, stabiliser l'APL par période de trois à six mois quels que soient les changements intervenus dans la situation des ménages ;

- réfléchir à plus long terme à une baisse du niveau des loyers par une augmentation des aides à la pierre.

c) Le rapport « Politique du logement : faire sauter les verrous » de l'Institut Montaigne

En juillet 2015, l'Institut Montaigne a publié un rapport intitulé : Politique du logement : faire sauter les verrous. S'agissant des APL, les auteurs envisageaient trois réformes, la dernière ayant leur préférence :

- réformer le dispositif des aides au logement pour l'unifier tout en tenant en compte de la diversité des situations des locataires du parc privé et du parc social ;

- réfléchir à une meilleure articulation entre les APL et le revenu de solidarité active (RSA) sans pour autant aller jusqu'à intégrer les APL dans le RSA ;

- supprimer les APL pour les étudiants non-boursiers.

d) Les préconisations de la Cour des comptes

La commission des finances du Sénat a saisi la Cour des comptes d'une demande d'enquête portant sur « les aides personnelles au logement ».

Après un état des lieux sur les aides personnelles au logement, la Cour des comptes a écarté plusieurs pistes de réforme jugées non pertinentes :


• le pilotage des aides par le taux d'effort, qu'elle juge lourde à mettre en oeuvre, peu soutenable financièrement et susceptible de renforcer « la captation des aides au logement par les bailleurs » ;


• la fusion des trois barèmes, qu'elle juge peu convaincante ;


• l'accélération du rythme de prise en compte des ressources pour laquelle la Cour des comptes souligne deux effets négatifs : un surcoût de gestion et une dégradation de la situation des bénéficiaires.

À court terme , la Cour des comptes propose d'améliorer le dispositif sans toutefois le remettre fondamentalement en cause par :


• une amélioration de la prévisibilité des aides qui permettrait de réaliser des économies sur le coût des rappels et des indus en raison de la diminution du nombre d'actualisations ;


• un accroissement de l'équité des aides afin de réduire les inégalités entre les bénéficiaires résidents du parc social et ceux du parc privé. S'agissant des étudiants, la Cour des comptes propose d'instituer un droit d'option entre le bénéfice des aides et le rattachement au foyer fiscal des parents ;


• un renforcement du pilotage budgétaire des aides au logement en améliorant la prévisibilité budgétaire ;


• une mise en place d'une base de données sur les logements.

À moyen terme , la Cour des comptes propose de fusionner les aides personnelles avec les minima sociaux sur le modèle de ce qui a été fait en Grande-Bretagne.

En conclusion, la Cour des comptes formule six recommandations :

1. Simplifier les modalités de prise en compte des changements de situation des bénéficiaires afin d'améliorer la prévisibilité des aides

2. Analyser la réalité et l'étendue de l'effet inflationniste des APL

3. Renforcer le pilotage budgétaire des aides au logement en unifiant les hypothèses retenues par les administrations et en améliorant la connaissance des déterminants réels de la dépense

4. Mettre en place une base de données sur les logements

5. Réformer les APL pour les étudiants en introduisant un droit d'option entre APL et rattachement de l'étudiant au foyer fiscal de ses parents

6. Engager une réflexion sur la fusion des APL avec certains minima sociaux et la prime d'activité

3. Une réforme limitée des aides personnelles au logement aux conséquences financières et sociales mal définies

L'action 1 « Aides personnelles au logement » comporte les crédits dédiés à la contribution de l'État au financement des aides personnelles au logement. Cette contribution prend la forme d'une subvention d'équilibre au Fonds national d'aide au logement (FNAL).

Ces crédits sont de nouveau en forte augmentation en raison de la budgétisation des allocations de logement à caractère familial qui relevaient jusqu'à présent du budget de la sécurité sociale. Ainsi, pour 2016, les crédits s'élèvent à 15 385,7 millions d'euros soit une augmentation de 40,2 %.

Votre rapporteur ne peut que regretter que le Gouvernement n'ait pas budgétisé les allocations de logement à caractère familial l'an dernier en même temps que la budgétisation des aides personnalisées au logement (APL) et des allocations logement à caractère social (ALS), contribuant ainsi à masquer l'impact réel des réformes qu'il a engagées sur l'attribution des aides au logement.

Pour 2016, les ressources du Fonds national d'aide au logement ( FNAL) sont estimées à 18 188 millions d'euros. La contribution de l'État est la principale ressource du fonds (84,5 %). Elle tient compte de la perte d'une partie des recettes de cotisations employeurs résultant du pacte de responsabilité et de solidarité et de la budgétisation des allocations logement à caractère familial. Outre la cotisation des employeurs, s'y ajoutent deux recettes supplémentaires prévues par l' article 54 rattaché à la présente mission (Cf. commentaire infra) :

- un prélèvement sur la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) à hauteur de 100 millions d'euros ;

- dans la limite de 45 millions d'euros, le produit de la taxe sur les plus-values de cession d'immeuble autres que des terrains à bâtir qui alimentait jusqu'à présent le fonds de péréquation géré par la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS).

Votre rapporteur regrette que les mesures d'économies engagées par le Gouvernement ne permettent d'éviter l'affectation du produit de la taxe sur les plus-values de cession d'immeuble autres que des terrains à bâtir, au FNAL plutôt qu'au FNAP pour qui cette taxe représentait une ressource non négligeable.

Les articles 55 et 55 quater rattachés à la présente mission (Cf. commentaire infra) comportent plusieurs mesures directement inspirées du rapport de M. Pupponi et censées contenir la hausse continue des dépenses liées aux aides personnelles au logement.

Ainsi, l'article 55 modifie les règles d'éligibilité aux APL en prenant en compte le patrimoine du demandeur et en instaurant des plafonds au-delà desquels l'aide serait versée dégressivement. Il prévoit en outre l'abrogation de la réforme des APL-accession engagée l'an dernier, ce dont votre rapporteur se félicite. L'article 55 quater vise à ne pas permettre aux étudiants rattachés au foyer fiscal de leurs parents redevables de l'ISF de percevoir des APL. Ces mesures sont plus amplement présentées infra dans le commentaire des articles 55 et 55 quater .

Ces mesures viennent en complément :

- de la réforme du forfait R0 du barème locatif qui conduit depuis le 1 er janvier 2015 à calculer ce montant à partir du forfait R0 de l'année N-1 revalorisé en fonction de l'inflation de l'année N-2. Cette mesure a permis une économie de 65 millions d'euros pour l'État ;

- d'une mesure règlementaire prévoyant à compter de 2016 que les allocations seraient arrondies à l'euro inférieur par souci de simplification.

Votre rapporteur estime que malgré les multiples propositions de réforme proposées lors du premier semestre 2015, la réforme soumise au Parlement est limitée et que ses conséquences sociales et financières ne semblent à ce stade pas complètement maîtrisées par le Gouvernement .

Elle appelle le Gouvernement à mettre en oeuvre les recommandations de la Cour des comptes et à examiner l'opportunité d'une réforme globale des APL.

Par ailleurs, s'agissant du montant des crédits retenus, votre rapporteur note que la Cour des comptes dans son rapport précité a constaté que les différents ministères avaient recours à des modalités de prévisions divergentes et n'avaient pas « mobilisé de travaux scientifiques sur les déterminantes réels de l'évolution des dépenses, malgré les masses budgétaires en jeu » conduisant ainsi à une sous-estimation systématique de la programmation budgétaire. Votre rapporteur invite les ministères à remédier à cette situation en lançant les études demandées.

En outre, votre rapporteur constate que 70,3 millions d'euros supplémentaires ont été ouverts en AE et CP sur le programme 109 par le Gouvernement dans le projet de loi de finances rectificative pour 2015. Elle estime que malgré la réforme proposée une nouvelle rallonge de crédit n'est pas à exclure en fin d'année 2016.

Au vu de ces éléments, votre rapporteur s'interroge sur la réalité des économies réalisées et sur la sincérité du budget qui lui est présenté.

C. CONSTRUCTION LOCATIVE ET AMÉLIORATION DU PARC : UNE RÉFORME DES AIDES À LA PIERRE EN TROMPE L'oeIL ET UNE OBLIGATION DE CONSTRUCTION DE LOGEMENTS SOCIAUX À REDÉFINIR (PROGRAMME 135)

Le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » regroupe les crédits consacrés au logement et à la construction et ceux relatifs à l'urbanisme et à l'aménagement.

Les crédits du programme baissent de 8,7 % en AE mais augmentent de 2,2 % en CP. Les crédits au sein des différentes actions évoluent différemment comme le montre le tableau suivant.

Évolution en 2016 des crédits du programme 135
(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Actions

LFI 2015

PLF 2016

Évolution

LFI 2015

PLF 2016

Évolution

Construction locative et amélioration du parc

380,8

405

+6,3%

147,2

105

-28,6 %

Soutien à l'accession à la propriété

3,8

3,6

-5,2%

3,8

3,6

-5,2 %

Lutte contre l'habitat indigne

4,82

4,70

-2,4%

4,82

4,70

-2,4%

Réglementation, politique technique et qualité de la construction

48,8

53,6

+9,8%

48,8

53,6

+9,8%

Soutien

14,8

14

-5,4%

14,8

14

-5,4%

Urbanisme et aménagement

144,9

64,9

-55,2%

59,9

104,9

+75%

Grand Paris

Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat

598,2

546

-8,7%

279,6

286

+2,2 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016.

Votre rapporteur a souhaité s'intéresser plus particulièrement dans cette partie aux aides à la pierre et à la construction de logements sociaux. Elle examinera la question de la lutte contre l'habitat indigne dans la section suivante (Cf. infra IV).

1. Une réforme des aides à la pierre, prémices du désengagement de l'État ?

L'action 1 « Construction locative et amélioration du parc » comporte les crédits destinés au financement des actions de développement et d'amélioration du parc locatif social en métropole hors opérations de rénovation urbaine et des investissements nécessaires à l'accueil des gens du voyage.

Pour 2016, le PLF déposé à l'Assemblée nationale prévoyait une baisse des crédits consacrés aux aides financières au développement et à l'amélioration du parc locatif social dites « aides à la pierre ». Les crédits de paiement diminuaient de nouveau de 60 millions d'euros par rapport à 2015, pour s'établir à 100 millions d'euros. Les autorisations d'engagement étaient stables pour atteindre 400 millions d'euros. Lors de l'examen des crédits de la mission « égalité des territoires et logement », le 4 novembre dernier, les députés ont adopté un amendement du Gouvernement modifiant ces crédits afin que 100 millions d'euros supplémentaires soient affectés en AE et 150 millions d'euros en CP . Il s'agissait pour le Gouvernement de traduire l'engagement du président de la République devant le congrès Hlm d'une contribution renforcée de l'État.

Ces crédits seront complétés par voie de fonds de concours, le Fonds national des aides à la pierre devant abonder ce programme à hauteur de 270 millions d'euros .

Le Gouvernement a souhaité réformer le financement des aides à la pierre, objet de critiques depuis plusieurs années. L'article 56 rattaché à cette mission (Cf commentaire infra) prévoit ainsi la création du Fonds national des aides à la pierre . Ce fonds remplacera le fonds de péréquation actuellement géré par la CGLLS et le fonds national de développement d'une offre de logements locatifs très sociaux.

Cette réforme devrait permettre de répondre aux observations de la Cour des comptes qui demande depuis deux ans la suppression du fonds de péréquation ou à défaut sa mise en conformité avec les règles budgétaires. En effet, pour la haute juridiction financière, le fonds de péréquation ne respecte pas les règles de l'article 17 de la loi organique relative aux lois de finances dans la mesure où « les ressources du fonds de péréquation sont issues de prélèvements présentant un caractère obligatoire, et où la commission assurant la gestion de ce fonds ne dispose pas d'une réelle autonomie par rapport à l'État ».

Votre rapporteur constate que le dispositif proposé par le Gouvernement est éloigné des annonces faites par le Président de la République , M. François Hollande, lors du congrès Hlm de Montpellier le 24 septembre dernier et qui indiquait : « Ce fonds rassemble les bailleurs, vous, les collectivités locales et l'État. C'est un fonds qui sécurise, puisque l'argent qui y sera déposé, demeurera affecté au seul logement social, quoi qu'il arrive. C'est un fonds qui mutualise, puisqu'il répartira les aides à la pierre, sur le territoire et notamment les zones les plus tendues. Et pour que ce fonds [FNAP] puisse avoir une portée, pour que ce fonds puisse se traduire en logements nouveaux, l'État doit montrer l'exemple et y contribuer directement. »

Votre rapporteur observe en effet qu'à la différence de la contribution des organismes Hlm, le Parlement ne dispose d'aucune visibilité sur les crédits de l'État qui seront effectivement affectés au FNAP ni sur leur pérennité. Si « l'argent qui sera déposé [au FNAP], demeurera affecté au seul logement social, quoi qu'il arrive », encore faut-il qu'il y soit effectivement affecté !

En outre, votre rapporteur constate que le Gouvernement opère à l' article 14 du présent projet de loi de finances de nouveau un prélèvement de 100 millions d'euros sur le fonds de roulement de la CGLLS au profit du budget général . Votre rapporteur dénonce ce prélèvement opéré sur des fonds issus des cotisations des organismes Hlm.

Ainsi, ce sont en réalité les organismes Hlm qui contribueront le plus aux aides à la pierre, et non le budget de l'État, en versant 270 millions d'euros de cotisations et, pour 2016, de façon indirecte 100 millions des 250 millions de l'État.

Considérant que l'ampleur de l'augmentation de la contribution des bailleurs n'est pas justifiée au regard des besoins, votre rapporteur a proposé de diminuer la contribution des bailleurs à 200 millions d'euros, de maintenir le taux de cotisation à 1,5% et de conserver l'intégration du supplément de loyer (SLS) dans l'assiette de la cotisation à hauteur de 75 %. Votre rapporteur a également proposé que la cotisation versée par les sociétés d'économie mixte puisse également reposer sur le produit du supplément de loyer.

S'agissant de la gouvernance du FNAP , votre rapporteur est favorable à ce que siègent au FNAP des représentants de l'État et des bailleurs sociaux à parité, ainsi que des représentants des collectivités territoriales. Elle a proposé que des représentants des métropoles puissent également siéger au sein du FNAP .

Ces éléments sont plus amplement développés infra dans le commentaire de l'article 56.

Par ailleurs, votre rapporteur tient à rappeler d'une part, que les organismes Hlm ont déjà réalisé d'importants efforts de réforme par la mise en place d'un mécanisme de mutualisation de leurs fonds et, d'autre part, que ce mécanisme prévu par le Pacte d'objectifs et de moyens pour la mise en oeuvre du plan d'investissement pour le logement signé le 8 juillet 2013 entre l'État et les organismes HLM, puis consacré par la loi pour un accès au logement et un urbanisme renouvelé (Alur), ne se substitue pas au dispositif d'aides à la pierre mais a pour finalité d'accompagner l'effort d'investissement des organismes et faire circuler les fonds disponibles.

Votre rapporteur se félicite des dispositions de l' article 56 bis rattaché à la mission (Cf. commentaire infra) qui prévoit de déduire de l'autofinancement qui sert de base à la cotisation additionnelle des organismes Hlm à la CGLLS les soldes nets perçus dans le cadre de la mutualisation financière entre les organismes Hlm.

Enfin, votre rapporteur s'interroge sur les économies qui pourraient résulter d'une autre annonce du président François Hollande lors du congrès Hlm de septembre dernier : la baisse du commissionnement du taux du livret A de 0,1 % dont votre rapporteur constate qu'elle n'est toujours pas effective.

Or, la date d'entrée en vigueur de cette mesure est décisive. En effet, si le nouveau taux de commissionnement entre en vigueur avant la fin de l'année, la Caisse des dépôts et consignations pourrait récupérer 200 millions d'euros sur les sommes provisionnées au titre de la garantie qu'elle apporte pour ses prêts, augmentant ainsi les résultats des fonds d'épargne de cette année. Votre rapporteur souhaite que ces sommes soient réaffectées au logement social et non au budget général de l'État.

2. Le développement du parc locatif social : des objectifs irréalistes et une obligation de construction de logements sociaux à redéfinir
a) Des objectifs de construction de logements sociaux irréalistes

Pour 2016, le Gouvernement réaffirme son objectif de production de 150 000 logements sociaux. Outre 8 000 logements dans les DOM et 2 000 logements au titre de la reconstruction de l'offre ANRU, cet objectif de production comprend 140 000 logements sociaux en métropole, contre 135 000 l'an dernier , qui se répartissent en :

- 69 000 prêts locatifs à usage social (PLUS) en augmentation de 4,5 % ;

- 35 000 prêts locatifs aidés d'intégration (PLAI) en augmentation de 2,9 % ;

- 36 000 prêts locatifs sociaux en augmentation de 2,8 %.

Votre rapporteur a souhaité faire trois observations sur ces chiffres.

Tout d'abord, elle regrette le maintien d'objectifs en progression alors même que les objectifs fixés pour ces dernières années n'ont pas été atteints.

Évolution des objectifs de construction de logements sociaux

Source : rapports annuels de performance annexé aux projets de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes pour 2011, 2012, 2013 et 2014 et projets annuels de performance annexé aux projets de loi de finances pour 2015 et 2016.

De même, votre rapporteur regrette le choix du Gouvernement de ne porter son effort que sur les PLAI, alors même que les PLUS sont nécessaires.

Enfin, votre rapporteur constate que les crédits affectés à la surcharge foncière diminuent passant de 173 à 167 millions d'euros, soit une baisse de 3,4 %, alors même que ces crédits permettent de compenser le coût du foncier dans les zones tendues.

b) Une obligation de 25 % de logements sociaux à réformer

L'article 55 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains dite loi SRU a imposé une obligation de logements sociaux aux communes les plus peuplées.

Ainsi, les communes dont la population est au moins égale à 1 500 habitants en Ile-de-France et 3 500 habitants dans les autres régions qui sont comprises dans une agglomération ou un EPCI à fiscalité propre de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants doivent comporter 25 % de logements sociaux . Cependant, ce taux demeure fixé à 20 % lorsque la situation de la commune ne justifie pas un effort de production supplémentaire au regard de la demande et des capacités des personnes aux revenus modestes de se loger.

Ces dispositions ne s'appliquent pas lorsque plus de la moitié du territoire urbanisé de la commune est soumis :

- à une inconstructibilité résultant d'une zone A, B ou C ;

- à un plan d'exposition au bruit ;

- à une servitude de protection ;

- à une inconstructibilité de bâtiment à usage d'habitation en application du règlement d'un plan de prévention des risques technologiques (PPRT), d'un plan de prévention des risques naturels (PPRN), ou d'un plan de prévention des risques miniers.

De même, ces dispositions ne s'appliquent pas aux communes en décroissance démographique.

En 2015, 1 258 communes n'atteignaient pas leur quota de logements sociaux. 143 communes ont été exemptées de cette obligation, 23 en raison du risque, 120 en raison de leur décroissance démographique. 214 communes ont fait l'objet d'un constat de carence.

Les communes qui ne respectent pas leur obligation font l'objet d'un prélèvement financier. Ainsi, 51,2 millions d'euros ont été prélevés en 2015, 37,4 millions d'euros ont été reversés à des bénéficiaires locaux (ex. EPCI délégataires des aides à la pierre, établissement public foncier) et 13,8 millions d'euros au Fonds national de développement d'une offre de logements locatifs très sociaux.

La décision du comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC) du 6 mars 2015 de renforcer la mixité sociale dans les territoires s'est notamment traduite par un renforcement du suivi et de l'application des obligations de logements sociaux .

En outre, M. Thierry Repentin a été désigné délégué interministériel à la mixité sociale dans l'habitat , et chargé d'assurer :

« - en appui des préfets, la coordination et le suivi des actions publiques nécessaires à la mise en oeuvre des objectifs de réalisation des logements sociaux ;

« - la coordination et l'harmonisation des programmes d'actions établis par les préfets vis-à-vis des communes faisant l'objet d'un constat de carence, dont il peut proposer l'ajustement. »

Chaque préfet devra établir un plan d'actions en fonction des caractéristiques de chaque commune concernée et proposer aux communes carencées de mettre en place un contrat de mixité sociale chargé de préciser les moyens que la commune s'engage à mettre en oeuvre pour atteindre ses obligations légales d'ici 2025. Deux tiers des communes concernées se seraient engagées dans cette démarche.

S'agissant des communes carencées qui ne veulent pas signer de contrat de mixité sociale ou qui ne mettent pas en oeuvre les actions prévues dans un tel contrat, d'autres moyens pourront être mobilisés :

- exercice par le préfet du droit de préemption urbain sur les aliénations de biens destinés au logement ou délégation de ce droit  aux bailleurs sociaux ou aux EPCI délégataires des aides à la pierre ;

- mise en compatibilité des documents d'urbanisme ;

- signature d'une convention avec l'établissement public foncier ;

- reprise de l'instruction et de la signature des permis de construire dans des secteurs préalablement identifiés ;

- inscription au budget de la commune d'une partie du financement des logements sociaux réalisés comme dépenses obligatoires.

À l'issue du comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC) du 26 octobre dernier, le Gouvernement a publié une liste de 36 communes carencées ayant refusé de signer un plan de mixité sociale, et pour lesquelles l'État va se substituer aux maires pour préempter des terrains et logements, délivrer des permis de construire et mobiliser des logements vacants dans le parc privé. Votre rapporteur considère que cette méthode visant à publier la liste non exhaustive des communes carencées dans lesquelles l'État va intervenir ou consistant pour le ministre chargé de la politique de la ville à se déplacer dans des villes carencées à grand renfort de médias n'est pas digne de la République. Elle appelle l'État à revenir à une attitude plus constructive plaçant le dialogue au coeur de ses rapports avec ces communes plutôt que de passer en force.

En outre, votre rapporteur estime que l'examen du projet de loi égalité et citoyenneté en cours de préparation sera l'occasion d'un réexamen complet de ce dispositif . En effet, la loi actuelle ne prend pas en compte les logements privés vacants à loyer équivalent, ni les cas de pénuries de foncier de certaines communes. En outre, la mise en place d'un taux de logements sociaux applicables de la même façon sur l'ensemble du territoire n'est pas réaliste et peut conduire à des constructions inopportunes. Enfin, votre rapporteur appelle l'État à ne pas sous-estimer l'impact des réformes des dotations sur la capacité des communes à s'engager dans la construction de logements sociaux.

3. Les aides aux maires bâtisseurs

Lors de l'examen de la loi de finances pour 2015, le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement augmentant les crédits de la mission de 100 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 15 millions d'euros en crédits de paiement. Cet amendement traduisait l'engagement du Premier ministre en faveur des « maires bâtisseurs » annoncé lors du congrès des maires.

Le décret n° 2015-734 du 24 juin 2015 portant création d'un dispositif d'aide aux communes participant à l'effort de construction de logements est venu préciser les conditions d'octroi de cette aide.

Ainsi peuvent bénéficier de cette aide les communes répondant aux conditions cumulatives suivantes :

- être située dans les zones tendues (A, A bis et B) ;

- ne pas avoir fait pas l'objet d'un arrêté de carence au titre des obligations de constructions de logements sociaux ;

- se situer en dessous d'un plafond de potentiel financier fixé par le décret n° 2015-734 du 24 juin 2015 précité à 1 030 euros. Ce plafond est majoré pour les communes situées dans le périmètre d'une opération d'intérêt national (OIN) pour plus de 20% de leur territoire ou pour celles qui ont signé un contrat de développement territorial.

Cette aide s'élève à environ 2 000 € par logement « construit au-delà d'un taux de croissance normal ». Elle sera versée aux communes à partir du second semestre 2015 en fonction des permis de construire accordés au premier semestre et, début 2016, sur la base des logements autorisés lors du second semestre 2015.

Environ 1 200 communes sont éligibles à ce dispositif . Selon le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016, l'Ile-de-France et l'outre-mer devraient bénéficier de la moitié des crédits.

Pour 2016, l'action 7 du programme 135 prévoit que 20 millions d'euros en AE et 60 millions en CP seront affectés à ce dispositif.

D. LA POURSUITE DE LA LUTTE CONTRE L'HABITAT INDIGNE ET ÉNERGIVORE (PROGRAMME 135)

1. L'Anah : des ressources toujours incertaines alors que l'Agence est de plus en plus sollicitée

L'Agence nationale de l'habitat est un établissement public chargé, en application de l'article L. 321-1 du code de la construction et de l'habitation de :

- lutter contre la précarité énergétique ;

- lutter contre l'habitat indigne et dégradé ;

- participer aux actions de prévention et de traitement des copropriétés fragiles ou en difficulté ;

- participer à l'adaptation des logements à la perte d'autonomie et à l'amélioration des structures d'hébergement.

Alors que l'agence est de plus en plus sollicitée, via le programme « Habiter mieux » ou via la mise en oeuvre du plan triennal de mobilisation pour les copropriétés fragiles et en difficulté, votre rapporteur observe que les ressources de l'agence demeurent incertaines.

a) Les ressources de l'Anah toujours aussi incertaines

En 2015, outre les ressources issues du produit des quotas carbone, l'Anah a bénéficié des ressources suivantes :

- une contribution des énergéticiens de 55 millions ;

- une contribution d'Action Logement de 50 millions d'euros ;

- une contribution du Fonds de financement de la transition énergétique de 20 millions d'euros ;

- une contribution de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) de 20 millions d'euros.

En outre, lors de l'examen de la loi de finances pour 2015, le produit de la taxe sur les logements vacants affecté à l'Anah a été augmenté pour atteindre 61 millions d'euros.

Pour 2016, Mme Blanche Guillemot, directrice générale de l'Anah, a indiqué à votre rapporteur que si l'évolution des quotas carbone était favorable à l'agence et pourrait atteindre 7,35 euros/t CO 2 en moyenne au lieu de 5,91 euros/t CO 2 en 2014, il demeurait néanmoins des incertitudes quant aux autres ressources de l'agence.

Ainsi, en 2016, l'Anah ne bénéficiera pas de la contribution du Fonds de financement de la transition énergétique et bénéficiera dans une moindre mesure des recettes résultant de la taxe sur les logements vacants. En effet, l'article 14 du projet de loi de finances pour 2016 diminue la part de la taxe sur les logements vacants affectée à l'Anah la faisant passer de 61 millions à 21 millions, ce que votre rapporteur déplore. C'est pourquoi, elle a déposé un amendement supprimant cette disposition.

En outre, la mise en place de la nouvelle obligation spéciale en matière de certificats d'économie d'énergie devrait bouleverser l'équilibre qui avait été trouvé avec certains énergéticiens et pourrait conduire à un report de la contribution des fournisseurs d'énergie de 59 millions d'euros attendue par l'agence.

Enfin, votre rapporteur regrette que la contribution de la CNSA au budget de l'Anah ne soit, semble-t-il, pas actée pour 2016, alors même que l'adaptation des logements au vieillissement est un enjeu majeur pour notre société et que le plan pour l'adaptation de 80 000 logements privés sur la période 2014-2017 devait être assuré, selon l'étude d'impact du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement, « par l'ANAH (47 millions d'euros en 2014) dont le budget sera abondé d'un versement de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) d'un montant de 40 millions d'euros ».

Ses ressources devraient en conséquence être les suivantes :

2014

Budget
Initial 2015

Projection de réalisations
2015

Projection

Exercice 2016

Projection

Exercice 2017

Produit de la taxe sur les logements vacants

21 000 000 €

55 510 000 €

55 510 000 €

19 100 000 €

19 100 000 €

Contribution des fournisseurs d'énergie

47 852 250 €

50 000 000 €

50 000 000 €

59 400 000 €

55 000 000 €

Produits issus
de la mise aux enchères des quotas carbone

215 345 125 €

273 100 000 €

300 600 000€

332 600 000 €

401 900 000

Contribution de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie

20 000 000 €

20 000 000 €

Contribution Action Logement

50 000 000 €

50 000 000 €

50 000 000 €

50 000 000 €

Contribution Fonds de financement de la transition énergétique

20 000 000 €

20 000 000 €

Autres produits

6 489 606 €

5 724 000 €

5 724 000 €

6 000 000 €

6 000 000 €

Total des ressources propres

290 686 981 €

479 589 000 €

501 834 000 €

467 100 000 €

532 000 000 €

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

L' article 55 bis (commentaire cf. infra) rattaché à la mission introduit par l'Assemblée nationale prévoit d'affecter la totalité du produit de l'astreinte administrative en matière de lutte contre l'habitat indigne à l'Anah. Votre rapporteur regrette de nouveau que le décret d'application de ce nouveau dispositif d'astreinte n'ait toujours pas été pris, rendant pour le moment cette ressource virtuelle.

Au vu de ces éléments, votre rapporteur appelle donc de ses voeux une réforme des ressources de l'Anah afin de donner à cette dernière des ressources stables et pérennes lui permettant de poursuivre dans les meilleures conditions l'exercice de ses missions.

b) Le succès continu du programme « Habiter mieux »

Le programme « Habiter mieux » connaît un franc succès. Alors que l'engouement pour ce programme avait conduit l'Anah à mettre en place des mesures de régulation, Mme Blanche Guillemot, directrice générale de l'Anah, a indiqué à votre rapporteur que le stock de dossiers, qui atteignait 25 226 dossiers au 1 er janvier 2015, était en voie de résorption.

En 2014, 44 055 propriétaires occupants et 3 579 propriétaires bailleurs ont ainsi bénéficié de ce programme. Votre rapporteur souhaite rappeler l'importance que peut revêtir cette aide pour les « petits » propriétaires bailleurs.

Votre rapporteur constate que le Fonds d'aide à la rénovation thermique (FART) mis en place en 2010, qui finance en complément des aides apportées par l'Anah, le programme « Habiter mieux », sera épuisé à la fin de l'année 2015, après avoir bénéficié de 28 millions de recettes supplémentaires, l'objectif du programme étant porté à 50 000 logements en 2015. Entre 2011 et 2015, ce sont ainsi 483 millions d'euros qui auront été engagés pour traiter 150 000 logements dont 100 000 sur les deux dernières années.

Pour 2016, l'Anah estime le besoin à 100 millions d'euros, sous réserve d'une réforme des aides. Selon les informations recueillies par votre rapporteur auprès du cabinet de Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, 50 millions d'euros seraient issus du programme d'investissement d'avenir (PIA) et 50 millions seraient versés par le Fonds de financement de la transition énergétique . Votre rapporteur se félicite que le Gouvernement ait pu trouver des financements pour le programme « Habiter mieux ».

Cependant, à l'heure où se profile la Conférence sur le Climat (COP 21) et après avoir posé des objectifs ambitieux de rénovation énergétique des logements lors de la loi relative à la transition énergétique pour une croissance verte, votre rapporteur regrette que le Gouvernement ne soit pas en mesure de consacrer des fonds pérennes à ce programme dont chacun reconnaît les effets positifs puisque le gain énergétique moyen est estimé à 38 % après travaux.

c) Un plan triennal de mobilisation pour les copropriétés fragiles et en difficulté

En 2014, l'Anah a consacré 51,7 millions d'euros d'aide au redressement des copropriétés en difficulté. Ces aides ont bénéficié à 13 258 logements. Dans son rapport d'activité pour 2014, l'Anah souligne que cette activité s'est étendue à des opérations de redressement nécessitant des travaux de requalification importants et à la préfiguration des opérations de requalification de copropriétés dégradées d'intérêt national mises en oeuvre en 2015, notamment à Clichy.


• Le 13 octobre dernier, le Gouvernement et l'Anah ont mis en place un plan triennal de mobilisation pour les copropriétés fragiles et en difficulté . Ce plan comprend douze actions réparties en trois axes.

Le 1 er axe concerne l'amélioration de la connaissance des situations de fragilité. Il est proposé de généraliser :

- le dispositif de veille et d'observation des copropriétés (VOC) qui aide les collectivités locales à mettre en place un observatoire leur permettant d'acquérir une meilleure connaissance des copropriétés situées sur leur territoire ;

- et le dispositif de programme opérationnel de prévention et d'accompagnement des copropriétés (POPAC) qui permet de définir et financer des missions d'ingénierie préventive (repérage, diagnostic, soutien...).

Depuis 2012, huit dispositifs de veille et d'observation des copropriétés (VOC) et vingt-quatre programmes opérationnels de prévention et d'accompagnement des copropriétés (POPAC) ont été mis en place. Le plan triennal se fixe pour objectif d'atteindre trente VOC et quarante POPAC en 2016.

L'Anah finance chaque VOC à hauteur de 60% dans la limite de 60 000 euros et chaque POPAC à hauteur de 50% dans la limite de 50 000 euros, sous réserve que la collectivité s'engage dans ce programme pour trois ans.

Le 2 ème axe concerne les interventions pour traiter les copropriétés en difficulté. Le plan prévoit de développer de nouveaux outils (ex. valorisation des certificats d'économie d'énergie), d'expérimenter avec les bailleurs sociaux des outils d'intervention dans des copropriétés comportant à la fois des logements sociaux et des logements privés et de mettre en oeuvre les dispositifs instaurés par la loi ALUR (ex. carence partielle, ORCOD de droit commun).

Enfin, le dernier axe concerne l'accompagnement des collectivités locales. Le plan prévoit notamment d'aider les petites et moyennes villes ainsi que les territoires ruraux à organiser l'ingénierie nécessaire, à mettre en place un plan de formation des acteurs locaux et à permettre le partage des bonnes pratiques.


• Par ailleurs, une centaine des nouveaux quartiers prioritaires de la politique de la ville comportent une proportion importante de grandes copropriétés construites après 1948 et qui présentent des indices élevés de fragilité. Le nouveau programme de renouvellement urbain (NPNRU) permettra dans ces quartiers de restructurer les copropriétés en grande difficulté, de redresser des copropriétés fragiles ou encore de lutter contre l'habitat indigne.

Le 4 mai dernier, l'Agence nationale de rénovation urbaine (Anru) et l'Agence nationale de l'habitat (Anah) ont signé une convention permettant une meilleure articulation des interventions des deux agences. Ainsi, lorsque la copropriété doit être « recyclée » ou démolie, l'Anru sera chef de file, l'Anah étant chef de file dans les autres cas.

2. De nouveaux moyens pour soutenir la rénovation énergétique

La loi Grenelle I a fixé comme objectif la rénovation avant 2020 de 800 000 logements sociaux dont la consommation en énergie est supérieure à 230 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré et par an, afin que leur consommation devienne inférieure à 150 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré.

La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a fixé des objectifs ambitieux de rénovation énergétique pour le parc privé :

- l'article 3 prévoit la rénovation énergétique de 500 000 logements par an à compter de 2017, dont au moins la moitié est occupée par des ménages aux revenus modestes ;

- l'article 5 prévoit la rénovation énergétique avant 2025 de tous les bâtiments privés résidentiels dont la consommation en énergie primaire est supérieure à 330 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré et par an.

La prolongation de l'éco-PTZ pour le parc privé et la mise en place du prêt amiante pour le parc social devraient faciliter cette rénovation énergétique.

a) La prolongation de l'éco-PTZ

Les particuliers qui souhaitent engager des travaux de rénovation énergétique peuvent bénéficier de différentes aides :

- le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) ;

- la TVA au taux réduit de 5,5 % pour les travaux d'amélioration de la qualité énergétique éligibles au CITE ;

- des aides de l'Anah ;

- l'éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ).

Accessible sans conditions de ressources, l'éco-prêt à taux zéro finance :

- des travaux permettant d'atteindre une performance énergétique globale minimale ;

- des bouquets de travaux composés de deux actions au moins, sauf pour les éco-prêt propriété pour lesquels une seule action suffit ;

- des travaux de « réhabilitation de système d'assainissement non collectif » par des dispositifs ne consommant pas d'énergie.

Depuis le 1 er septembre 2014, les deux premières séries de travaux précitées doivent être réalisées par des professionnels titulaires d'un signe de qualité (RGE).

L'éco-prêt est soumis aux plafonds suivants :

Action seule dans le cadre d'un éco-PTZ copropriété

"Bouquet de travaux"

"Performance énergétique globale"

Système d'assainissement non collectif

2 actions

au moins
3 actions

Plafond de l'avance

10 000 €

20 000 €

30 000 €

30 000 €

10 000 €

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

L'article 42 du projet de loi de finances pour 2016 prolonge jusqu'au 31 décembre 2018 l'éco-PTZ , et, prévoit que ce prêt pourra financer le coût des travaux de performance énergétique réalisés par des propriétaires occupants ou des bailleurs, bénéficiant des aides de l'Anah .

Il est également prévu que la condition d'ancienneté du logement de l'éco-PTZ (achevés avant le 1 er janvier 1990) ne s'appliquera pas lorsque sont financés des travaux ayant ouvert droit aux aides du programme « Habiter mieux ».

Selon les informations recueillies par votre rapporteur, depuis le 1 er janvier 2015, la responsabilité de la vérification de l'éligibilité des travaux qui relevait des banques a été transférée vers les entreprises qui réalisent ces travaux, ce qui devrait permettre de lever le principal frein à la distribution du produit. Ce prêt pourrait également être utile pour les copropriétés.

b) Le PLS-amiante

Les organismes Hlm bénéficient de plusieurs dispositifs pour faciliter la mise en oeuvre de la rénovation énergétique de leur parc : les prêts bonifiés, des subventions et des aides fiscales (TVA à taux réduit et dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour travaux d'économie d'énergie).

Selon l'Union sociale pour l'habitat (USH), la présence d'amiante était un des principaux freins à la rénovation des logements.

Une convention entre l'USH, l'État et la Caisse des dépôts et consignations ayant pour objet la mise en place du PLS-amiante a été signée le 24 mars dernier. Le PLS-Amiante est un prêt à taux bonifié, dont les conditions financières sont alignées sur celles de l'éco-PLS qui permettra aux bailleurs sociaux de financer les surcoûts de la réhabilitation résultant de la présence d'amiante.

Une enveloppe globale d'1,5 milliards d'euros a été prévue pour la période 2015-2017. Chaque prêt individuel est plafonné à hauteur de 10 000 euros par logement. Il peut être accordé en complément d'un prêt éco-PLS ou d'un prêt à l'amélioration (PAM).

Ce prêt permettra ainsi de financer les différentes phases de l'opération : repérage, traitement, élimination des déchets. Ces travaux devront débuter dans un délai de 6 mois à compter de la date d'obtention du prêt et s'achever dans un délai de deux ans.

Votre rapporteur se félicite de la mise en place de ces dispositifs qui permettront d'accélérer les rénovations du parc social.

II. LA NÉCESSITÉ DE METTRE EN oeUVRE D'AUTRES MESURES DE SOUTIEN AU SECTEUR DE LA CONSTRUCTION EN COMPLÉMENT DES MESURES EN FAVEUR DU LOGEMENT INTERMÉDIAIRE ET DE L'ACCESSION À LA PROPRIÉTÉ

Si votre rapporteur salue les mesures prises en faveur du logement intermédiaire et de l'accession à la propriété, elle estime que d'autres mesures sont nécessaires pour encourager le secteur de la construction.

A. DES MESURES DE BON SENS EN FAVEUR DU LOGEMENT INTERMÉDIAIRE ET DE L'ACCESSION À LA PROPRIÉTÉ

1. Des mesures fiscales et juridiques pour soutenir le développement du logement intermédiaire

Le logement intermédiaire est un logement dont le prix se situe entre les plafonds des loyers des logements sociaux et les niveaux de loyer du parc privé.

Plusieurs dispositifs juridiques et fiscaux ont été mis en place pour soutenir la production de logements intermédiaires.

Sur le plan fiscal , deux mesures soutiennent le logement intermédiaire :


• le dispositif d'investissement locatif dit dispositif « Pinel ».

Ce dispositif permet d'accorder une réduction d'impôt aux particuliers qui acquièrent ou construisent des logements neufs loués sous conditions de loyers et de ressources pour une durée de 6 ou 9 ans. La loi de finances pour 2015 a permis de louer le logement à un ascendant ou un descendant tout en conservant l'avantage fiscal. Selon la Fédération des promoteurs immobiliers, cette disposition aurait permis la vente d'environ 10 000 logements supplémentaires.

Votre rapporteur est favorable à l'adoption de l'article 2 quinquies du présent projet de loi de finances qui lève un frein au développement du dispositif « Pinel » en supprimant l'obligation d'avoir au moins 20 % des logements acquis sans le bénéfice du dispositif « Pinel » dans les immeubles neufs comportant au moins cinq logements.


• L'application d'un taux réduit de TVA à 10 % et une exonération de taxe foncière

Pour bénéficier de ces dispositions, le bailleur, personne morale, doit louer les logements sous des conditions de loyers et de ressources applicables au dispositif « Pinel » et sous réserve que l'ensemble immobilier comprenne 25 % de logements sociaux. Cette dernière condition a été supprimée par les députés à l'article 3 ter du présent projet de loi lorsque le bien est situé dans un quartier prioritaire de la politique de la ville d'une commune comportant au moins 50 % de logements sociaux. Votre rapporteur estime que ce taux est trop important et prive d'effet cette mesure pourtant attendue de l'ensemble des professionnels et collectivités concernées en excluant de trop nombreux territoires. Elle a en conséquence proposé de l'abaisser à 35 %.

Sur le plan juridique , la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques dite loi Macron comprend plusieurs dispositions permettant d'encourager le développement du logement intermédiaire :


• définition unique du logement intermédiaire ;


• possibilité d'accorder dans certaines zones un bonus de constructibilité pouvant aller jusqu'à 30 % pour la réalisation de programmes de logements intermédiaires ;


• possibilité pour les organismes de logements sociaux de créer des filiales dédiées à la réalisation de logements intermédiaires.

Par ailleurs, le groupe SNI, filiale de la Caisse des dépôts et consignations, s'est mobilisé pour relancer la construction de logements intermédiaires avec un objectif de 35 000 logements intermédiaires construits d'ici 2019. À cette fin, trois outils ont été mis en place :

- le fonds de logement intermédiaire , qui regroupe outre la SNI, 17 investisseurs. Ce fonds qui dispose d'1,045 milliards d'euros de fonds propres devrait concourir à la production de 10 000 logements intermédiaires ;

- la société pour le logement intermédiaire . Ce fonds constitué pour répondre à un appel d'offre de l'État disposera entre 750 millions et 1,250 milliards d'euros de l'État, permettant d'assurer la construction de 13 000 logements intermédiaires ;

- et enfin un programme réalisé directement par la SNI, la Caisse des dépôts et consignations apportant à cette dernière environ 900 millions de fonds propres qui devraient ainsi contribuer à la construction de 12 000 logements intermédiaires.

Votre rapporteur sera très attentive à la réalisation de ces programmes mais aussi aux résultats d'une expérimentation dont M. André Yché, président du directoire de la SNI, a fait part aux membres de la commission des affaires économiques lors de son audition le 14 octobre dernier et qui porte sur un système d'accession réversible pour des primo-accédants remplissant les conditions pour être locataires d'un logement intermédiaire .

2. Une mesure pour faciliter l'accession à la propriété : l'assouplissement du prêt à taux zéro

Pour soutenir l'accession à la propriété, le Président de la République a décidé de faciliter l'application du prêt à taux zéro, ce dont les acteurs du secteur de la construction se réjouissent.

À cette fin, l'article 41 du présent projet de loi de finances pour 2016 modifie les modalités d'application du PTZ :

- le plafond de revenus pris en compte sera augmenté et aligné sur les plafonds du dispositif « Pinel » ;

- le montant du prêt à taux zéro qui pouvait représenter de 18 % à 26 % du montant de l'emprunt immobilier selon les zones, pourra désormais représenter jusqu'à 40 % sur tout le territoire ;

- le différé de remboursement, actuellement entre zéro et quatorze ans selon les tranches de revenus, sera allongé et ira de cinq ans à quinze ans ;

- la durée d'occupation minimale du logement par l'emprunteur est réduite à 6 ans (et non pour la durée du prêt comme c'est le cas actuellement).

Par ailleurs, le PTZ a été étendu par la loi de finances pour 2015, à compter du 1 er janvier 2015, à l'achat de logements anciens situés dans certaines communes de la zone C sous réserve de réaliser des travaux de rénovation d'un montant au moins égal à 25 % du montant total de l'opération.

Ainsi, sont éligibles 5 920 communes répondant aux critères suivants :

- ne pas appartenir à une agglomération d'au moins 10 000 habitants ;

-  avoir un taux de vacance du parc de logements supérieur ou égal à 8 % ;

- avoir un nombre minimal d'équipements et de services intermédiaires et de proximité supérieur ou égal à 8.

Le présent projet de loi de finances pour 2016 prévoit d'étendre ce PTZ réhabilitation à l'ensemble des communes situées en zone C.

Si votre rapporteur estime que l'assouplissement des conditions d'octroi du prêt à taux zéro va dans le bon sens, elle souhaite néanmoins rappeler que cette mesure ne peut être suffisante dans les zones tendues. Elle souhaite que d'autres pistes soient examinées pour diminuer le coût de l'accession.

B. DES MESURES POUR LEVER LES FREINS À LA CONSTRUCTION ET ENCOURAGER LA CONSTRUCTION DE LOGEMENTS ABORDABLES

Votre rapporteur souhaite rappeler que de nombreux ménages modestes demeurent locataires faute de logements abordables.

En effet, comme l'a indiqué M. André Yché aux membres de votre commission, les prix d'accession sont devenus insoutenables en raison du départ des investisseurs institutionnels. Il ajoutait que « la capacité de négociation, qui permet de stabiliser les prix, voire de les tirer vers le bas dans certains cas, a complètement disparu ».

En outre, une étude du FIDAL publiée en 2014 comparant la fiscalité immobilière applicable dans plusieurs pays européens montrait que la fiscalité applicable en France pesait lourdement sur le prix d'acquisition (27 % du prix d'acquisition en France contre 10 % en Allemagne).

Votre rapporteur estime indispensable qu'une réflexion soit menée sur la fiscalité de l'immobilier et sur les moyens de faire revenir les investisseurs institutionnels. La relance de l'accession abordable permettrait ainsi non seulement de construire de nouveaux logements mais aussi de fluidifier les parcours résidentiels et ainsi libérer des logements du parc social.

Pour lever les freins à la construction et favoriser le développement du logement abordable, votre rapporteur propose d'agir sans attendre dans plusieurs directions : la poursuite de la simplification des normes et des procédures et la facilitation de l'accès au foncier public comme privé.

1. Simplifier les normes et les règles de contentieux de l'urbanisme

Les professionnels du secteur de la construction ont unanimement rappelé à votre rapporteur l'importance de réduire l'inflation règlementaire et normative. La relance du secteur de la construction impose de simplifier les normes applicables en matière de construction afin d'en diminuer le coût mais aussi d'encadrer les procédures afin d'accélérer la production de logements.


• L'évolution des prix de la construction peut être estimée à l'aide de deux indices :

- l'indice du coût de la construction, qui est un indice de prix calculé trimestriellement par le ministère du logement ;

- les index mensuel BT, qui permet de suivre les coûts des différents segments du secteur de la construction. Cet index est défini par l'INSEE avec les organisations professionnelles du secteur.

Entre 2004 et 2015, ces deux indices de référence ont augmenté de plus de 33 %.

En juin 2014, le Gouvernement avait annoncé cinquante mesures de simplification qui avaient pour objectif de mieux articuler les normes de référence sans diminuer la qualité exigée. Ainsi, en matière d'accessibilité, a-t-on autorisé l'acquéreur a réalisé des travaux modificatifs dès lors qu'était garantie la possibilité pour une personne handicapée de visiter le logement. De même, a-t-on supprimé l'obligation d'installer un conduit de fumée dans les maisons individuelles neuves équipées d'un système de chauffage électrique.

La CAPEB a indiqué à votre rapporteur que ces cinquante mesures de simplification n'avaient été effectives qu'en 2015. Votre rapporteur souhaite réaffirmer la nécessité que les annonces de simplification soient suivies d'une entrée en vigueur rapide et que ce mouvement de simplification soit poursuivi.

La production de nouvelles normes est également encadrée . L'article 10 de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a consacré l'existence au niveau législatif du Conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique installé le 15 juin 2015. Ce conseil a pour mission de « conseiller les pouvoirs publics dans la définition, la mise en oeuvre et l'évaluation des politiques publiques relatives à la construction et sur l'adaptation des règles relatives à la construction aux objectifs de développement durable ». Il aura également pour mission de suivre l'évolution des prix des matériels et matériaux de construction et d'isolation.

Le Conseil a rappelé sa volonté d'accompagner « le mouvement de simplification des réglementations impulsées par le ministère du logement afin de construire davantage, mieux et moins cher et dans le respect de la qualité d'usage pour tous des logements ». Il a décidé de s'intéresser plus particulièrement à trois sujets : les coûts dans la construction, la charge des formations obligatoires et le poids de la normalisation dans la construction. Votre rapporteur sera particulièrement attentive aux conclusions du Conseil supérieur sur ces sujets.


• Les règles d'urbanisme, qu'il s'agisse de la délivrance des permis de construire ou des délais d'examen des recours, ont également un impact non négligeable sur la réalisation des constructions.

L'introduction d'un recours contentieux contre un permis de construire conduit en pratique à geler la réalisation de l'opération jusqu'à ce qu'il soit purgé. Or, les fédérations en charge de la construction constatent une multiplication des recours abusifs contre les autorisations de construire .

Des mesures avaient été prises par l'ordonnance n° 2013-638 du 18 juillet 2013 relative au contentieux de l'urbanisme qui comportait plusieurs mesures de nature à accélérer le règlement des litiges dans le domaine de l'urbanisme et à prévenir les contestations dilatoires ou abusives, en encadrant la notion d'intérêt à agir, en permettant au juge administratif de sursoir à statuer sur une demande d'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, lorsqu'il constate que la régularisation est possible par un permis modificatif.

Dans le même sens, l'article 111 de loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques dite loi Macron, a réservé l'action en démolition aux constructions situées dans des zones, espaces ou secteurs présentant des enjeux particuliers. Votre rapporteur a soutenu l'adoption de cette disposition de bon sens.

Cependant, ces mesures semblent encore insuffisantes. Les représentants de la Fédération des promoteurs immobiliers estiment que 30 000 logements seraient bloqués en raison de délais de jugement particulièrement longs .

Votre rapporteur souhaite que des réformes de la procédure contentieuse en matière d'urbanisme soient engagées rapidement afin que :

- des délais de jugement soient instaurés dans le cadre du contentieux des autorisations d'urbanisme, comme le code de justice administrative en prévoit pour le contentieux du droit au logement opposable. Un délai de 4 mois en première instance et 6 mois en appel pourraient être retenus ;

- le juge des référés puisse surseoir à statuer pour permettre au bénéficiaire de régulariser l'autorisation contestée ;

- soit créé un référé-recevabilité qui pourrait être introduit devant le juge des référés à la demande du défendeur.

2. Faciliter l'accès au foncier public comme privé

Comme l'ont indiqué les professionnels de l'immobilier à votre rapporteur, l'accès au foncier demeure un enjeu fondamental. La rareté et la cherté du foncier ont inmanquablement des conséquences sur le prix des logements.

S'agissant du foncier public , la loi n° 2013-61 du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social a permis à l'État de céder des terrains de son domaine privé avec une décote à la condition qu'ils soient destinés à la réalisation de programmes comportant une part de logements sociaux.

Ces dispositions s'appliquent également aux établissements publics de l'État et aux sociétés dont l'État est actionnaire à 100 %. Sont ainsi concernés : SNCF, Réseau ferré de France, Voies navigables de France, la RATP et, depuis le 1 er janvier 2015, les établissements publics de santé . Cependant le décret permettant à la Société de valorisation foncière et immobilière (SOVAFIM) de pouvoir céder ses terrains avec décote n'a, semble-t-il toujours pas été pris, ce que déplore votre rapporteur.

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite loi Macron, prévoit la possibilité d'une décote pour la part consacrée aux constructions d'équipements publics destinés aux occupants des logements, indépendamment de l'inscription du terrain par le préfet sur la liste régionale. En effet, la réalisation d'équipements publics peut également s'avérer nécessaire pour les terrains non soumis à décote de droit. Cette mesure traduit ainsi une recommandation de la Commission nationale de l'aménagement, de l'urbanisme et du foncier présidée par notre ancien collègue Thierry Repentin, et dont votre rapporteur salue l'action.

La loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense a prévu que le taux de la décote consentie pour la cession de terrains occupés par le ministère de la défense ne peut excéder 30 % de leur valeur vénale . Cette disposition s'applique jusqu'au 31 décembre 2019. L'Assemblée nationale, sur proposition de Mme Valérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, a supprimé cette disposition à l'article 21 ter du projet de loi de finances pour 2016.

Comme l'a indiqué M. Thierry Repentin à votre rapporteur, le foncier utilisé par le ministère de la défense se caractérise par une grande emprise permettant la construction de nombreux logements . Pour ces terrains, aucune cession ne peut en pratique se faire sans décote supérieure à 30 % en raison de la nécessité de réaliser des travaux conséquents de transformation conduisant à traiter des questions de désamiantage ou de dépollution des sols. Le plafonnement du taux de décote à 30 % pour les terrains militaires risque de geler des négociations engagées à propos de ces terrains.

Par ailleurs, l'article 21 bis du projet de loi de finances pour 2016 étend le dispositif de la décote aux opérations de réhabilitation , ce dont se félicite votre rapporteur. En effet, ces opérations permettront la réhabilitation de casernes des douanes ou de la gendarmerie.

Fin juillet, 365 terrains ont été identifiés, 281 appartenant à l'État et 84 aux établissements publics de transport. 25 sites ont ainsi été cédés par l'État pour un montant global de 48 millions d'euros, avec une décote de 76 millions d'euros . Ils permettront la réalisation de 4 000 logements dont 3 000 logements sociaux.

Si les mesures d'accès au foncier public vont dans le bon sens, votre rapporteur considère qu'il est également nécessaire d'agir sur le foncier privé .

La loi de finances pour 2015 comprenait plusieurs mesures favorisant la libération du foncier :

- exonération temporaire de droit de mutation à titre gratuit en cas de donation de terrain à bâtir lorsque le donataire s'engage à y construire un logement neuf dans les quatre ans ;

- abattement exceptionnel de 30 % sur les plus-values résultant de cessions de terrains à bâtir pour les promesses de vente signées entre le 1 er septembre 2014 et le 31 décembre 2015 ;

- abattement exceptionnel de 30 % sur les plus-values résultant de cessions de biens immobiliers bâtis situés dans des communes appartenant à une zone d'urbanisation continue de plus de 50 000 habitants si le cessionnaire s'engage dans un délai de quatre ans à démolir les constructions existantes puis à reconstruire de nouveaux logements dont la surface de plancher est au moins égale à 90 % de la surface de plancher maximale autorisée en application des règles du plan local d'urbanisme ou du plan d'occupation des sols.

Votre rapporteur constate que ces dispositions ne sont valables que pour l'année 2015. Elle ne peut que redire la nécessité d'avoir une politique foncière qui s'inscrit dans la durée . Elle note par ailleurs que la clause exigeant que 90 % de la surface de plancher maximale soit construite se révèle difficilement réalisable. En effet, la Fédération des promoteurs immobiliers a indiqué à votre rapporteur qu'en pratique non seulement ce taux était difficile à mesurer mais aussi que les maires octroyaient rarement un permis de construire pour un taux d'occupation aussi important.

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

Article 54 - Ressources du Fonds national d'aide au logement

Commentaire : cet article affecte deux nouvelles ressources au FNAL : un prélèvement exceptionnel sur la participation des employeurs à l'effort de construction et une part des recettes de la surtaxe sur les plus-values immobilières.

I. Le dispositif

Pour assurer ses missions, le Fonds national d'aide au logement (FNAL) bénéficie des ressources prévues à l'article L. 351-7 du code de la construction et de l'habitation, actuellement constituées :

- des dotations de l'État qui assure l'équilibre du fonds ;

- du produit des cotisations employeurs prévu à l'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale.

Le présent article prévoit de compléter les ressources du FNAL avec :

- une contribution exceptionnelle de la PEEC à hauteur de 100 millions d'euros en 2016 ;

- le produit de la taxe sur les plus-values de cession d'immeuble autres que des terrains à bâtir à hauteur de 45 millions d'euros.

II. La position de votre commission

L'an dernier, le Sénat, sur proposition de M. Philippe Dallier, rapporteur spécial et de votre rapporteur, avait supprimé l'augmentation de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) qui atteignait 300 millions d'euros au lieu des 150 millions d'euros initialement envisagés.

Votre rapporteur constate cette année que le Gouvernement a décidé d'affecter aux ressources du Fonds national d'aide au logement (FNAL)  pour 2016 un prélèvement de 100 millions d'euros sur la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) qui demeuraient inaffectés dans la convention quinquennale signée avec Action Logement l'an dernier !

En outre, votre rapporteur regrette que les mesures d'économies engagées par le Gouvernement en matière d'APL soient insuffisantes pour éviter de transférer le produit de la taxe sur les plus-values de cession d'immeuble autres que des terrains à bâtir du fonds de péréquation géré par la CGLLS au FNAL.

Votre commission a donné un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 55 - Réforme du dispositif des aides personnelles au logement

Commentaire : cet article a pour objet de réformer le dispositif des aides personnelles au logement.

I. Le dispositif

Le Gouvernement a souhaité réformer les critères d'éligibilité des aides personnelles au logement.

Il a tout d'abord décidé que serait prise en compte en plus des ressources du demandeur la valeur en capital de son patrimoine , à compter du 1 er octobre 2016. Les députés ont adopté un amendement de M. Goldberg, rapporteur de la commission des affaires économiques et le sous-amendement du Gouvernement, afin de préciser que le patrimoine ne sera pris en compte que lorsque sa valeur dépasse 30 000 euros . Il est à noter que le seuil retenu est supérieur au plafond du livret A.

En outre, à compter du 1 er juillet 2016, les allocations seront diminuées au-delà d'un certain plafond . Selon le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016, cette disposition permettrait « de ne pas subventionner des logements dont la taille serait trop grande par rapport aux besoins réels du ménage ou dont le loyer rapporté à la taille du ménage serait excessif ; cette mesure participera ainsi à la lutte contre les loyers élevés et à l'optimisation du parc de logement ; les ménages s'acquittant de loyers manifestement trop élevés par rapport à la taille du ménage considéré verront ainsi leur aide diminuer progressivement lorsque le loyer sera supérieur à un premier seuil, puis l'aide sera supprimée au-delà d'un second seuil ». Les députés ont adopté un amendement de M. Caresche, rapporteur spécial de la commission des finances et un sous-amendement du Gouvernement afin d'encadrer ce dispositif en précisant que le montant de l'allocation diminuera au-delà d'un plafond de loyer élevé qui ne peut être inférieur au plafond de loyer de base multiplié par 2,5 .

Enfin, les députés ont supprimé les dispositions prévoyant d' abroger , dès le 1 er janvier 2016, la minoration forfaitaire dans le calcul des ressources accordée aux demandeurs de moins de 25 ans et qui bénéficie d'un contrat de travail autre qu'un CDI .

Par ailleurs, la réforme de l'APL-accession votée lors de la loi de finances pour 2015 est abrogée.

II. La position de votre commission


• Selon les informations recueillies par votre rapporteur, 4 % des allocataires détiendraient un patrimoine supérieur à 75 000 euros et 10 % un patrimoine supérieur à 30 000 euros. Votre rapporteur observe que la réforme concernera 10 % des allocataires et regrette de n'avoir aucune information sur les modalités pratiques de prise en compte du patrimoine des allocataires ni sur le coût de traitement et de contrôle que cela entraînera pour les caisses d'allocations familiales.

S'agissant du seuil de dégressivité, votre rapporteur constate que le choix d'un seuil fixé à 250 % du loyer de base permettra de mieux prendre en compte la situation des ménages situés en zones tendues. Cependant, elle souhaite que le Gouvernement module ce seuil afin de distinguer la situation des ménages habitant en zones tendues de ceux habitant en zones détendues. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, la modification de seuil proposée par les députés ne devrait pas avoir d'impact sur le montant des économies attendues.

En outre, votre rapporteur ne peut que se féliciter de la décision du Gouvernement d' abroger la réforme de l'APL-accession votée l'an dernier dans la loi de finances. Cependant, elle regrette que le Gouvernement n'ait pas entendu l'avis unanime des professionnels du secteur de la construction, avis relayé par votre rapporteur, qui considéraient que la suppression du dispositif de l'APL-accession était un signal négatif envoyé aux Français qui aurait nécessairement des répercussions sur le nombre de constructions.


• Selon le Gouvernement, les mesures initialement prévues devaient générer les économies suivantes :

- 133 millions d'euros s'agissant de la prise en compte du patrimoine ;

- 125 millions s'agissant du plafond de loyer ;

- 109 millions s'agissant de la minoration forfaitaire.

Globalement 185 millions d'économies étaient attendues en 2016 et 274 millions en 2017.

Cependant, votre rapporteur constate que ces économies dépendent très largement des critères retenus, critères dont la détermination est renvoyée le plus souvent à un décret. Elle regrette que le Gouvernement ne soit pas en mesure à ce stade de lui indiquer avec précision les seuils exacts qui seront retenus qu'il s'agisse du patrimoine ou de la dégressivité de l'aide, et qu'il place ainsi les parlementaires en situation de ne pas pouvoir se prononcer sur les crédits de ce programme en parfaite connaissance de cause.

Votre commission pour avis est favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 55 bis - Astreinte administrative en matière de lutte contre l'habitat indigne

Commentaire : cet article prévoit d'affecter la totalité du produit de l'astreinte administrative en matière de lutte contre l'habitat indigne à l'Anah.

I. Le dispositif

La loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour un accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, a ouvert la possibilité aux maires d'appliquer des astreintes d'un montant maximal de 1 000 euros par jour de retard à l'encontre :

- du propriétaire ou de l'exploitant qui n'exécuterait pas les travaux visant à faire cesser la situation d'insécurité dans un établissement recevant du public à usage total ou partiel d'hébergement (article L. 123-3 du code de la construction et de l'habitation) ;

- du propriétaire qui n'exécuterait pas les travaux visant à remettre en état de fonctionnement ou à remplacer des équipements communs d'un immeuble collectif à usage principal d'habitation présentant un fonctionnement défectueux ou un défaut d'entretien de nature à créer des risques sérieux pour la sécurité des occupants ou à compromettre leurs conditions d'habitation (article L. 129-2 du code de la construction et de l'habitation) ;

- du propriétaire d'un immeuble menaçant ruine qui n'exécuterait pas les réparations nécessaires afin de mettre fin durablement au péril, qui ne procéderait pas aux travaux de démolition, ou qui ne prendrait pas les mesures indispensables pour préserver les bâtiments contigus (article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation) ;

- du propriétaire qui n'exécuterait pas les mesures visant à remédier à l'insalubrité de l'immeuble (article L. 1331-29 du code de la santé publique).

Le montant de l'astreinte peut être progressif dans le temps et modulé dans des conditions fixées par voie règlementaire.

L'astreinte est liquidée et recouvrée par l'État. Après prélèvement de 4 % pour frais de recouvrement, 43% des sommes perçues doivent être versées au budget de l'Agence nationale de l'habitat. L'étude d'impact de la loi dite Alur avait prévu que 43% des sommes seraient également affectées au Fonds d'aide au relogement d'urgence (FARU).

II. La position de votre commission

Votre rapporteur ne voit pas d'objection à l'affection de l'ensemble des ressources résultant du produit de l'astreinte administrative en matière de lutte contre l'habitat indigne à l'Anah.

Cependant, elle trouve pour le moins regrettable que le décret d'application de ce nouveau dispositif ne soit toujours pas paru.

Votre commission pour avis est favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 55 ter - Liquidation de l'astreinte administrative prononcée dans le cadre du DALO

Commentaire : cet article prévoit de faciliter la liquidation de l'astreinte administrative prononcée dans le cadre du DALO

I. Le dispositif

L'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation prévoit que le demandeur reconnu prioritaire et qui n'a pas reçu d'offre de logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités peut depuis le 1 er décembre 2008 engager un recours contre l'État.

Selon le comité de suivi du DALO, 96 965 recours ont été déposés, soit une progression de 6,3%. Au 31 décembre 2014, on dénombrait 59 502 ménages prioritaires et urgents à reloger contre 54 394 en 2013, dont 74 % résidaient en Ile-de-France.

Le président du tribunal administratif peut ordonner le logement ou le relogement du demandeur par l'État en assortissant sa décision d'une astreinte dont le montant est « déterminé en fonction du loyer moyen du type de logement considéré comme adapté aux besoins du demandeur par la commission de médiation ». Le produit de l'astreinte est versé au Fonds national d'accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL).

Selon les informations transmises par le Gouvernement à votre rapporteur, en 2014, 19 730 720 euros d'astreintes ont été liquidées. Pour 2015, de janvier à août, 20 884 124 euros d'astreintes ont été liquidées. Le Gouvernement prévoit que ce montant devrait continuer d'augmenter en 2016 en raison de l'augmentation du volume d'activité.

Depuis 2014, certaines juridictions administratives, dont le tribunal administratif de Paris, ont modifié leur pratique et ne prononcent plus automatiquement la liquidation des astreintes. Cette jurisprudence conduit à un décalage entre les crédits budgétaires prévus par la loi de finances pour le FNADVL et les crédits effectivement utilisés.

Les députés ont adopté deux amendements identiques présentés d'une part, par M. Giraud et plusieurs de ses collègues et, d'autre part, Mme Orliac prévoyant une liquidation immédiate des astreintes prononcées et un versement de ces astreintes au FNAVDL tous les six mois.

II. La position de votre commission

Votre rapporteur tient à saluer les associations intervenues au titre de l'accompagnement dans et vers le logement qui ont poursuivi leurs activités malgré des conditions financières dégradées.

Elle ne peut que souscrire à la mise en place de cette nouvelle procédure qui permettra au FNAVDL de bénéficier de ressources plus régulières.

Votre commission pour avis est favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 55 quater - Éligibilité des étudiants aux APL

Commentaire : cet article précise les conditions de ressources des étudiants aux aides au logement

I. Le dispositif

Les députés ont adopté un amendement de M. Goldberg, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques et de M. Pupponi et un sous-amendement de M. Rogemont afin de préciser que les « particuliers », rattachés au foyer fiscal de leurs parents, ne sont pas éligibles aux aides au logement lorsque les parents sont redevables de l'impôt annuel de solidarité sur la fortune (ISF).

II. La position de votre commission

Votre rapporteur constate que cette mesure est très éloignée des mesures ambitieuses qu'avaient adoptées nos collègues députés, lesquels avaient proposé de prendre en compte le revenu des parents, l'éloignement géographique et les cas de rupture familiale dans le versement des APL à des étudiants.

Votre rapporteur estime qu'il s'agit en réalité d'une mesure plus symbolique qu'efficace sur le plan budgétaire. Elle considère que les règles d'attribution des APL aux étudiants, pour lesquelles M. Pupponi constatait qu'elles étaient les moins redistributives et avaient le plus d'effet inflationniste, doivent être réformées et elle souhaite que le Gouvernement se penche sérieusement sur cette question afin de proposer une réforme juste et équitable. M. Philippe Dallier, rapporteur spécial, présentera un amendement en ce sens, amendement que votre rapporteur soutiendra.

Votre commission pour avis est défavorable à l'adoption de cet article.

Article 56 - Création du Fonds national des aides à la pierre (FNAP)

Commentaire : cet article crée le Fonds national des aides à la pierre (FNAP).

I. Le droit en vigueur

Créé en 2009, le fonds de péréquation participe en application de l'article L. 452-1-1 de code de la construction et de l'habitation, « au développement et à l'amélioration du parc de logements locatifs sociaux appartenant aux organismes d'habitations à loyer modéré et aux sociétés d'économie mixte, ainsi qu'à la rénovation urbaine ». Ce fonds est géré par la Caisse de garantie du logement locatif social.

Ce fonds bénéficie de plusieurs ressources :

- des ressources de la taxe sur les plus-values de cession d'immeubles autres que des terrains à bâtir prévue à l'article 1609 nonies G du code général des impôts. Cette ressource est estimée à 45 millions en 2014 ;

- d'une cotisation et d'une cotisation additionnelle versée par les organismes d'habitations à loyer modéré, les sociétés d'économie mixte et les organismes bénéficiant de l'agrément relatif à la maîtrise d'ouvrage prévu à l'article L. 365-2 en fonction de leur activité prévues aux articles L. 452-4 et L. 452-4-1 du code de la construction et de l'habitation. La loi de finances pour 2015 a fixé le montant de ces cotisations à 120 millions d'euros par an contre 70 millions euros auparavant, soit une augmentation de 71,4% ;

- pour 2015, du prélèvement de 15 millions d'euros sur le fonds de roulement de la CGLLS.

Ce sont ainsi 180 millions d'euros qui ont été budgétés au titre des ressources du fonds de péréquation.

Le fonds national de développement d'une offre de logements locatifs très sociaux , prévu par l'article L. 302-9-3 du code de la construction et de l'habitation, a pour objet le financement de la réalisation de logements locatifs très sociaux. Il bénéficie de la majoration des prélèvements sur les budgets des communes qui n'ont pas atteint le taux de logement social. En 2015, 13,8 millions d'euros ont été reversés à ce fonds.

II. Le dispositif

Le Gouvernement souhaite réformer le financement des aides à la pierre en mettant en place le Fonds national des aides à la pierre (FNAP).


• Ce fonds aura pour mission :

- à titre principal, de contribuer au financement des opérations de développement, d'amélioration et de démolition du parc de logements locatifs sociaux ;

- à titre accessoire, de financer des actions de maîtrise d'oeuvre urbaine et sociale, des actions d'ingénierie pour développer la gestion du système national d'enregistrement, d'actions d'accompagnement visant à moderniser le secteur du logement social, d'autres opérations menées par des personnes morales bénéficiant de prêts et subventions pour la construction, l'acquisition et l'amélioration des logements locatifs aidés.


• Ce fonds bénéficiera de plusieurs ressources :

- une fraction des cotisations mentionnées aux articles L. 452-4 et L. 452-4-1 (c'est-à-dire les cotisations et les cotisations additionnelles versées par les organismes de logements sociaux). Pour 2016, cette fraction est fixée à 270 millions d'euros ;

- la majoration du prélèvement prévu au deuxième alinéa de l'article L. 302-9-1 (c'est-à-dire le prélèvement sur les communes carencées en logements sociaux), qui est exclusivement destinée au financement de la réalisation de logements locatifs sociaux à destination des ménages mentionnés au II de l'article L. 301-1. Les députés ont adopté un amendement de M. Goldberg, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques précisant que ces fonds financeraient également des dispositifs d'intermédiation locative dans les communes carencées ;

- des subventions de l'État, des collectivités territoriales et de toutes autres personnes publiques et privées. Les députés ont adopté un amendement du Gouvernement précisant que ces dernières ressources ne sont pas accessoires.

En outre, les députés ont adopté un amendement de M. Rogemont supprimant l'augmentation des cotisations versées par les organismes Hlm de 1,5 % à 3 %.

Lors de la seconde délibération du projet de loi de finances, les députés ont adopté un amendement du Gouvernement relatif aux ressources du FNAP. Il est désormais prévu que l'assiette de la cotisation versée par les organismes Hlm inclura le produit du supplément de loyer de solidarité. Le taux plafond de 3 % des cotisations est rétabli et il est précisé que, s'agissant du supplément de loyer de solidarité, ce taux sera de 75 % au maximum.


•Alors qu'initialement la gouvernance du FNAP était renvoyée à un décret en Conseil d'État, les députés ont souhaité préciser les grandes lignes de la composition du conseil d'administration. Aussi, ce dernier sera-t-il composé :

- de représentants de l'État et de bailleurs sociaux, à parité ;

- de représentants des collectivités territoriales ;

- de représentants de l'Assemblée nationale et du Sénat.

Cette composition semble s'éloigner de celle initialement envisagée par le Gouvernement qui souhaitait que le conseil soit composé de 5 représentants de l'État, 5 représentants des bailleurs sociaux et de 5 personnalités qualifiées et représentants des collectivités territoriales.


•En outre, le Fonds national de développement d'une offre de logements locatifs très sociaux exclusivement destiné au financement de la réalisation de logements locatifs sociaux sera supprimé.


•Ces nouvelles dispositions entreront en vigueur de manière échelonnée :

- au 1 er janvier 2016 : suppression de l'affectation au fonds de péréquation géré par la CGLLS des ressources spécifiques (taxe sur les plus-values de cession d'immeubles autres que des terrains à bâtir + cotisations des Hlm) ;

-  un mois après le décret créant le FNAP et au plus tard le 1 er juillet 2016 : mise en place du FNAP ;

- un mois après le décret précité et au plus tard le 1 er août 2016 : affectation de ses ressources au FNAP, suppression du Fonds national de développement d'une offre de logements locatifs très sociaux et du Fonds de péréquation géré par la CGLLS.

III. La position de votre commission

S'agissant des missions du FNAP , votre rapporteur constate que les missions du FNAP sont plus étendues que celles de l'actuel fond de péréquation. Le directeur de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) a indiqué à votre rapporteur que l'énoncé des missions du FNAP était volontairement extensif afin de reprendre les missions actuellement financées par l'action 1 du programme 135.

S'agissant de la gouvernance , votre rapporteur proposera que les métropoles soient représentées au sein du FNAP .

S'agissant des ressources , votre rapporteur observe que les dispositions prévues sont en contradiction avec les propos tenus par Mme Sylvia Pinel, ministre du logement lors du congrès Hlm de septembre dernier selon lesquels le FNAP « apportera les meilleures garanties de sécurité, de pérennité et de visibilité au financement, afin de préserver les ressources suffisantes pour vos missions . » En effet, votre rapporteur estime que ce dispositif ne permet en aucun cas d'exclure des gels de crédits de l'État avant affectation au FNAP. En outre, le Parlement n'a aucune visibilité sur les fonds versés par l'État dans les prochaines années. Votre rapporteur craint ainsi que la création de ce fonds ne soit que les prémices d'un désengagement de l'État des aides à la pierre, et que ces aides soient désormais financées par les bailleurs et donc, indirectement par les locataires ayant des revenus modestes.

Votre rapporteur constate que les ressources affectées au FNAP, hors crédits budgétaires, augmentent de 180 millions à 270 millions sans réelle justification. En effet, votre rapporteur observe que les objectifs fixés de construction de logements sont relativement stables et que leurs réalisations sont systématiquement inférieures aux prévisions.

Au vu de ces éléments, votre rapporteur considère que rien ne justifie d'augmenter de 125 % les cotisations des bailleurs sociaux. Elle propose en conséquence de diminuer le montant global du taux de cotisation pour maintenir le taux actuel de 1,5 % , de conserver l'intégration du supplément de loyer (SLS) dans l'assiette de la cotisation à hauteur de 75 % et de diminuer le montant global apporté par les bailleurs sociaux à 200 millions d'euros, ce qui représentera tout de même une augmentation de 66 % par rapport à l'an dernier et permettra ainsi de compenser la non-affectation de la taxe sur les plus-values de cession d'immeubles autres que des terrains à bâtir à hauteur de 45 millions d'euros.

En outre, votre rapporteur a proposé que la cotisation versée par les sociétés d'économie mixte et des organismes bénéficiant de l'agrément relatif à la maîtrise d'ouvrage puisse également s'appuyer sur le produit du supplément de loyer.

Votre commission pour avis est favorable à l'adoption de cet article sans réserve de l'adoption des amendements de votre rapporteur.

Article 56 bis - Assiette de la cotisation additionnelle des organismes Hlm

Commentaire : cet article modifie les modalités de détermination de l'assiette de la cotisation additionnelle des organismes Hlm.

I. Le dispositif

L'article L. 452-4-1 code de la construction et de l'habitation précise les modalités de calcul de la cotisation additionnelle versée chaque année par les organismes Hlm à la Caisse de garantie du logement locatif social. Cette cotisation est composée :

- d'une part du « produit d'une somme forfaitaire par le nombre de logements à usage locatif et d'unités de logements-foyers ouvrant droit à redevance sur lesquels l'organisme est titulaire d'un droit réel au 31 décembre de l'avant-dernière année précédant l'année de contribution » ;

- d'une part variable qui a pour assiette l'autofinancement net de l'organisme. « L'autofinancement net est calculé en déduisant les remboursements d'emprunts liés à l'activité locative, à l'exception des remboursements anticipés, de la différence entre les produits et les charges locatifs de l'exercice. Pour le calcul de cette différence, ne sont pas pris en compte les dotations pour amortissements et provisions et leurs reprises, les donations, dons et legs, ainsi que certains produits ou charges exceptionnels ou de transfert définis par décret en Conseil d'Etat . »

Les députés ont adopté un amendement de M. Rogemont et plusieurs de ses collègues tendant à déduire de l'autofinancement les soldes nets reçus par un organisme Hlm au titre de la mutualisation financière entre organismes Hlm.

II. La position de votre commission

Cet amendement présenté par notre collègue Mme Marie-Noëlle Lienemann lors de l'examen de la loi Alur avait été retiré au bénéfice des explications du Gouvernement qui s'était alors engagé à déduire les sommes reçues au titre de la mutualisation financière dans le décret relatif au calcul de la cotisation versée à la CGLLS. Or, votre rapporteur constate que le Gouvernement n'a pas tenu ses engagements.

Votre rapporteur est donc favorable aux dispositions de cet article. En effet, les fonds reçus au titre de la mutualisation financière entre organismes Hlm doivent rester aux organismes Hlm et non alimenter le budget de l'Etat.

Votre commission pour avis est favorable à l'adoption de cet article sans modification.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Mercredi 28 octobre 2015 :

- Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) : M. Laurent Girometti , directeur et Mme Clémentine Pesret , sous-directrice du financement et de l'économie du logement et de l'aménagement ;

- Commission nationale de l'aménagement, de l'urbanisme et du foncier (CNAUF) : MM. Thierry Repentin , président de la commission et délégué interministériel à la mixité sociale dans l'habitat et Simon Molesin , adjoint du délégué interministériel ;

- Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) : Mme Catherine Aubey-Berthelot , directrice générale et M. Jean-Michel Fieter , secrétaire général.

Jeudi 29 octobre 2015 :

- Union sociale pour l'habitat (USH) : Mmes Marianne Louis , secrétaire générale et Francine Albert , conseillère pour les relations avec le Parlement.

Mardi 3 novembre 2015 :

- Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (FNARS) : M. François Brégou , responsable du service stratégie et analyse des politiques publiques et Mme Ninon Overhoff , chargée de mission hébergement et logement ;

- Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) : Mme Alexandra François-Cuxac , présidente et M. Jean-Michel Mangeot , délégué général.

Mercredi 4 novembre 2015 :

- Agence nationale de l'habitat (ANAH) : Mme Blanche Guillemot , directrice générale et M. Jacques Berger , directeur adjoint en charge de la direction financière ;

- Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) : MM. Jean-Philippe Vinquant , directeur général, Olivier Petit , chef de bureau urgence sociale et hébergement, Mme Aurore Collet , cheffe de bureau des budgets et performance.

Jeudi 12 novembre 2015 :

- Cabinet de Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité : MM. Thierry Laget , directeur adjoint de cabinet, Noam Léandri , conseiller budgétaire, Tristan Barrès , conseiller logement, Maximilien Mézard , conseiller spécial et conseiller parlementaire, et Mme Axelle Pourras , chargée de mission hébergement.

Des contributions écrites de la Confédération de l'Artisanat et des Petites entreprises du bâtiment et de la Fédération Française du Bâtiment nous ont été adressées.


* 1 Le rapport de la Cour des comptes est publié en annexe du rapport d'information n° 687 (2014-2015) de M. Philippe DALLIER sur les aides personnelles au logement.

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