B. LES MOYENS ALLOUÉS À LA LUTTE CONTRE LES DÉRIVES SECTAIRES
Une partie des crédits du programme 232 visent à lutter contre les dérives sectaires, en étroite coordination avec la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES). On soulignera que la coordination entre le ministère de l'intérieur et le réseau préfectoral, d'une part, et la MIVILUDES, dont le pilotage est assuré par les services du Premier ministre, constitue le socle de la lutte contre les dérives sectaires. Toutefois, votre rapporteur, comme il l'avait déjà souligné dans son dernier avis budgétaire, souhaite de nouveau attirer l'attention de votre commission sur deux aspects : les moyens insuffisants alloués à la CAIMADES, d'une part, et les inquiétudes suscitées par la « théorie de la fin du monde pour 2012 », d'autre part.
Votre rapporteur rappelle qu'une commission d'enquête sur l'influence des mouvements à caractère sectaire dans le domaine de la santé a récemment été mise en place au Sénat, dont la présidence a été confiée à notre collègue Jacques Mézard. Ses conclusions devraient être présentées en avril 2013. C'est pourquoi votre rapporteur se bornera à rappeler les principaux outils à la disposition de l'État pour lutter contre les dérives sectaires, afin de ne pas interférer avec les orientations qui seront préconisées par la commission d'enquête.
1. Une baisse des moyens préjudiciable à l'action de la CAIMADES
Parmi les outils dont s'est doté l'État pour lutter contre les dérives sectaires, on retiendra ce qu'on peut assimiler à une « police des dérives sectaires » : la Cellule d'Assistance et d'Intervention en Matière de Dérives Sectaires (CAIMADES). Créée le 1 er septembre 2009 au sein de la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ), la CAIMADES est placée sous l'autorité de l'Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP). Son principal objectif est d'apporter une expertise dans le traitement judiciaire des affaires sectaires, d'élaborer des outils destinés aux enquêteurs et de mettre en place un réseau de spécialistes.
a) Un travail d'investigation positif
D'après les informations fournies à votre rapporteur, la CAIMADES a été saisie, en 2011, de onze nouveaux dossiers, dont trois à caractère international et deux en co-saisine, qui s'ajoutent à une douzaine d'affaires débutées en 2010. Les enquêtes menées en préliminaire ou sur commission rogatoire, visent des infractions criminelles ou délictuelles : viol, atteintes sexuelles de toutes natures, violences, escroqueries, exercice illégal de la médecine, provocations au suicide, non-assistance à personne en danger ou encore des abus de faiblesse liés à une manipulation psychologique.
Malgré des difficultés liées à la mise en évidence de ces infractions ou de leur éventuelle prescription, la CAIMADES a produit un travail de qualité et obtenu de bons résultats en 2011, ce dont se félicite votre rapporteur. Toutefois, selon les informations recueillies, ces bons résultats en termes d'investigation restent toujours en attente d'une concrétisation judiciaire sans ambiguïtés, qui légitimerait complètement les méthodes de travail employées par la CAIMADES, notamment dans l'établissement de l'infraction de l'article 223-15-2 du code pénal qui réprime l'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de faiblesse. Du fait de la longueur des procédures, aucune affaire importante dans laquelle elle est intervenue n'a encore été jugée à ce jour.
b) Une mission d'assistance renforcée
En complément de ses missions d'investigation, la CAIMADES assume également des missions d'assistance à tous les services d'enquête chargés de la lutte contre les dérives sectaires, liées à l'application de l'article 223-15-2 du code pénal.
La CAIMADES répond, en moyenne, à une dizaine de sollicitations par mois émanant des services de police et de gendarmerie, qui peuvent consister en de simples demandes de conseils ou de renseignements ou prendre la forme d'une véritable expertise d'un phénomène sectaire.
Enfin, dans la perspective de la « fin du monde » annoncée par certains mouvements sectaires pour le 21 décembre 2012, la CAIMADES se montre particulièrement vigilante, notamment au sujet des incitations aux suicides collectifs dont elle pourrait être informée, et se tient prête à intervenir le cas échéant.
c) Le nécessaire renfort de la CAIMADES
Cellule unique en Europe, ayant la charge de dossiers dont certains, très complexes, comprennent des ramifications internationales, votre rapporteur rappelle que la CAIMADES s'est forgée une expérience dans l'application de la loi, notamment sur le délit d'emprise mentale qui requière une expertise particulière.
La poursuite de ces missions nécessite d'un effectif suffisant. Or, force est de constater que le niveau des effectifs de la CAIMADES ne correspond pas à celui nécessaire pour un service à compétence nationale. Alors qu'elle disposait de sept policiers et gendarmes lors de sa constitution, elle ne disposait plus, en 2011, que de quatre agents, tous issus de la Police nationale. D'après les informations recueillies par votre rapporteur, deux officiers de police judiciaire sont venus compléter cet effectif depuis le mois de septembre 2012. Ainsi, la CAIMADES est aujourd'hui composée de six policiers, soit un effectif quasi-équivalent à celui dont elle disposait à sa création. Si votre rapporteur se féliciter de ce renforcement, il estime toutefois que l'effectif actuel est encore insuffisant pour assurer la lutte contre les dérives sectaires, même s'il salue les excellents résultats obtenus, liés à la motivation et au professionnalisme des agents de cette cellule.