EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 16 novembre 2011, sous la présidence de Mme Marie-Christine Blandin, présidente, la commission examine le rapport pour avis de M. David Assouline sur les crédits du programme « Audiovisuel et presse» de la mission « Médias, livre et industries culturelles » du projet de loi de finances pour 2012.

Un débat s'engage après l'intervention du rapporteur pour avis.

Mme Marie-Christine Blandin , présidente . - Je vous rappelle que nous devrons être particulièrement vigilants à l'occasion de l'examen par notre assemblée de la proposition de loi de simplification du droit de notre collègue député Jean-Luc Warsmann, qui comporte des dispositions modifiant substantiellement le régime des agences de presse et donc potentiellement leurs modalités de financement.

Mme Catherine Morin-Desailly . - Je crois que nous sommes tous d'accord sur la nécessité d'accompagner aussi bien l'audiovisuel public que la presse dans leur modernisation afin de relever le défi de la révolution numérique. C'est pourquoi il est indispensable, à mon sens, de soutenir les efforts de sorte que les réformes engagées puissent arriver à leur terme. A titre d'exemple, je me réjouis que le COM entre l'État et France Télévisions fasse désormais toute sa place au développement du média global, même si l'on peut regretter le manque d'indicateurs bien calibrés et chiffrés.

Je vous rappelle que j'avais moi-même déposé un amendement visant à élargir l'assiette de la redevance audiovisuelle l'année dernière et que je m'étais retrouvée, en séance, pourtant bien isolée...

Comme l'a souligné notre rapporteur, la perspective d'un reversement à l'État de l'intégralité des surréalisations de la régie publicitaire de France Télévisions constitue une inquiétante source de démotivation pour notre audiovisuel public.

D'une façon générale, la position de mon groupe sur la réforme de l'audiovisuel public consiste à défendre une suppression totale de la publicité à condition qu'elle soit intégralement compensée par des ressources de nature publique. J'ai le sentiment que nous sommes, malgré parfois quelques errements, sur la bonne voie afin d'achever une réforme ambitieuse.

En ce qui concerne la proposition de notre rapporteur d'aligner le taux de TVA de la presse en ligne à celui applicable à la presse imprimée, je vous indique que je porterai en séance un amendement similaire afin de garantir un même traitement fiscal à tous les supports de diffusion.

Enfin, monsieur le rapporteur, je souhaiterais que vous nous apportiez plus de précisions sur les résultats de l'opération visant à offrir aux jeunes des abonnements à des quotidiens de leur choix.

M. André Gattolin . - Je m'inquiète, à l'heure actuelle, de la déperdition de la qualité du pluralisme de l'information et d'une véritable crise de vocation des journalistes. A mon sens, notre système d'aides publiques en faveur de la presse doit impérativement mettre l'accent non seulement sur la qualité des projets éditoriaux mais également sur le nombre de journalistes que le titre mobilise pour produire de l'information. Aujourd'hui, nous constatons que les plus grands quotidiens nationaux disposent d'effectifs de journalistes bien supérieurs à ceux de certaines agences de presse, y compris l'AFP, ou de magazines spécialisés qui bénéficient également d'aides significatives. Les critères d'attribution des aides publiques ne peuvent plus privilégier aussi systématiquement les objectifs de rentabilité.

M. David Assouline , rapporteur pour avis des crédits « Audiovisuel et presse » . - En ce qui concerne la réforme de l'audiovisuel public, le leitmotiv qui prétend que l'on peut régler les problèmes en agissant uniquement sur la publicité n'est pas soutenable. A l'heure actuelle, c'est la pérennité même de notre service public de la télévision qui est en jeu et nous devons la garantir par des ressources durables et indépendantes des aléas des politiques gouvernementales. Je regrette que, dans cette réforme, on ait privilégié les demi-choix par dogmatisme.

S'agissant de l'opération « Mon journal offert », qui consiste à proposer un abonnement gratuit, un jour par semaine pendant un an, à tout jeune âgé de 18 à 24 ans à l'un des quotidiens de leur choix, elle est reconduite en 2012 à hauteur de 5 millions d'euros, ce qui témoigne de son succès. Je préciserai dans mon rapport les éléments chiffrés précis sur les résultats enregistrés depuis le début de la mise en oeuvre de cette mesure.

Je soutiens pleinement l'approche défendue par notre collègue André Gattolin. Si nous sommes profondément attachés à la permanence d'un système d'aides publiques ambitieux, indispensable au maintien du pluralisme et de la liberté d'expression dans notre pays, les critères d'attribution doivent être repensés. J'ai l'espoir que le prochain budget fera toute sa place à l'incitation des mécanismes innovateurs.

J'ai quatre amendements à vous présenter.

Le premier amendement tend à créer un article additionnel après l'article 5. Il vise à étendre à la presse en ligne le bénéfice du taux de TVA réduit de 2,1 %, jusqu'ici réservé à la presse imprimée. A l'heure actuelle, le taux de TVA applicable aux services de presse en ligne est de 19,6 %. La baisse proposée du taux de TVA va dans le même sens que la mise en oeuvre d'un taux de TVA réduit pour le livre numérique instaurée par la loi de finances pour 2011 et applicable à compter du 1 er janvier 2012.

Le 13 octobre 2011, les parlementaires européens ont adopté, à une très large majorité, une résolution sur la TVA dans laquelle ils soutiennent l'application d'un taux réduit pour la presse en ligne. L'égalité de traitement fiscal est la condition de la migration réussie de la presse sur supports numériques au nom du principe de neutralité technologique.

La perte de recettes fiscales générée par cet amendement n'est que d'une valeur extrêmement limitée, dans la mesure où il s'agit d'un marché naissant. Au contraire, en favorisant l'essor d'un modèle économique pérenne payant pour la presse en ligne, cet amendement permettra d'asseoir des bases de recettes fiscales solides pour l'avenir à l'avenir, avec la multiplication attendue des services de presse en ligne.

L'amendement est adopté.

Le second amendement tend également à insérer un article additionnel après l'article 5.

Le CSA attribue des fréquences gratuitement à des éditeurs de radio et de télévision sous réserve du respect de certaines obligations en matière d'investissement dans la création ou de quotas de diffusion. Depuis le lancement de la télévision numérique terrestre, les reventes de sociétés détentrices de fréquences se sont multipliées, avec des gains parfois très importants pour ces entreprises. Nombreuses sont les voix qui se sont élevées contre ces ventes, et notamment le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel.

Il semble difficile d'interdire totalement la revente des dites sociétés, qui peuvent ne pas avoir trouvé leur équilibre économique. Cependant, afin d'éviter la tentation que des candidatures ne soient inspirées que par le souhait de revendre les chaînes au plus offrant, je vous propose de taxer les reventes à hauteur de 5 % du prix de la cession.

L'amendement est adopté.

Le troisième amendement tend aussi à insérer un article additionnel après l'article 5. Le Gouvernement peine à dégager les ressources suffisantes permettant de pérenniser notre audiovisuel public. La suppression de la publicité sur France Télévisions en soirée a en effet largement diminué ses marges de manoeuvre. Afin de desserrer la contrainte budgétaire et de pouvoir financer les sociétés nationales de programme à hauteur de leur besoin, je vous propose de réintégrer les résidences secondaires dans l'assiette de la contribution à l'audiovisuel public.

Il s'agit d'une mesure juste et équitable dont le produit devrait s'élever à 200 millions d'euros. Elle permettra à la fois de respecter les contrats d'objectifs et de moyens des différents acteurs et de baisser la dotation budgétaire de l'État qui pèse aujourd'hui sur notre endettement.

L'amendement est adopté.

Le quatrième amendement vise à supprimer l'article 52 ter rattaché à la mission médias livre et industries culturelles.

L'article 52 ter prévoit que les recettes de la régie publicitaire de France Télévisions supérieures à celles anticipées par le contrat d'objectifs et de moyens soient rendues à l'État. La régie de France Télévisions serait donc taxée à 100 % sur la tranche supérieure de ses gains !

Parce que ce dispositif induirait une très forte source de démotivation pour la régie de France Télévisions et parce que le Gouvernement dispose toujours de marges de négociation a posteriori , cet amendement propose de supprimer l'article.

L'amendement est adopté.

La commission émet un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles ».

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page