IV. LES DROITS DES PERSONNES DÉTENUES : APPORTER UNE RÉPONSE EFFECTIVE AUX ATTENTES SUSCITÉES PAR LA LOI PÉNITENTIAIRE

A. UN NOUVEAU CADRE LÉGISLATIF AMBITIEUX

La loi pénitentiaire, grâce aux initiatives conjuguées du Sénat et de l'Assemblée nationale, a permis de mieux assurer dans notre droit la pleine reconnaissance de la dignité de la personne détenue. Parmi les différentes dispositions adoptées, à ce titre, par le Parlement, il convient de citer plus particulièrement :

- l'encadrement des conditions dans lesquelles les détenus peuvent faire l'objet de fouilles . A cet égard, M. Claude d'Harcourt, directeur de l'administration pénitentiaire, a indiqué à votre rapporteur que deux matériels de substitution aux fouilles intégrales étaient expérimentés dans les maisons centrales de Saint-Maur et Lannemezan ;

- le renforcement des garanties reconnues aux détenus menacés de sanctions disciplinaires (notamment avec la présence d'une personne extérieure à l'administration pénitentiaire au sein de la commission de discipline) ;

- l'obligation pour l'administration pénitentiaire de garantir la sécurité des personnes détenues et l'institution d'un régime de responsabilité sans faute de l'Etat pour les décès en détention survenus du fait d'une agression commise par un détenu.

D'une manière générale, la loi pénitentiaire a permis de relever au niveau législatif plusieurs dispositions qui relevaient du règlement voire de la circulaire alors même qu'elles affectaient directement l'exercice des droits et libertés. Par ailleurs, à l'initiative du Sénat, la loi prévoit, afin de favoriser l'harmonisation de l'application de la règle de droit entre les établissements pénitentiaires, que des « règlements intérieurs-types, prévus par décret en Conseil d'Etat, déterminent les dispositions prises pour le fonctionnement de chacune des catégories d'établissements pénitentiaires » (article 728 du code de procédure pénale).

L'application de ces principes pourra s'appuyer en particulier sur l'action du Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

B. LES EFFETS DES INTERVENTIONS DU CONTRÔLEUR GÉNÉRAL DES LIEUX DE PRIVATION DE LIBERTÉ

L'activité du Contrôleur général revêt deux formes principales :

- les réponses aux saisines dont il est l'objet -en vertu de l'article 6 de la loi du 30 octobre 2007, toute personne physique ainsi que toute personne morale s'étant donné pour objet le respect des droits fondamentaux, peuvent porter à la connaissance du Contrôleur général des faits ou des situations susceptibles de relever de sa compétence ; le Contrôleur général peut être saisi par le Premier ministre, les membres du Gouvernement, les parlementaires ainsi que par différentes autorités administratives indépendantes ; il peut enfin se saisir de sa propre initiative. Au 1 er août 2009, 124 saisines sur des situations individuelles avaient été transmises au garde des sceaux. Le Contrôleur général, M. Jean-Marie Delarue, a indiqué à votre rapporteur que 573 dossiers étaient actuellement examinés par cette autorité.

- les visites . Au 1 er août 2009, le Contrôleur général avait effectué 40 contrôles en établissement pénitentiaire. Selon le rapport d'activité rendu public par le Contrôleur général le 8 avril 2009, ces contrôles se sont effectués dans de bonnes conditions avec le concours de l'ensemble des services concernés. Ils ont donné lieu à quinze rapports de visite.

Selon les informations communiquées par le ministre de la justice à votre rapporteur, l'administration pénitentiaire s'est attachée à « répondre précisément et promptement aux observations du Contrôleur général et à suivre avec attention leur mise en oeuvre et les engagements pris par le Garde des Sceaux ». Le 12 mai 2009, l'administration pénitentiaire a ainsi transmis un premier bilan de mise en oeuvre de ces observations : 80 % d'entre elles devraient être effectives fin 2009, 16 % font l'objet d'une étude de faisabilité de la part des établissements pénitentiaires concernés et 4 % ont été jugées non réalisables (il s'agit pour trois d'entre elles de l'équipement des cellules en plaques chauffantes, non réalisables au regard des installations électriques des établissements concernés et pour le quatrième de l'agrandissement des locaux des services médicaux d'une maison d'arrêt, incompatible avec les contraintes architecturales de cet établissement).

En outre, l'administration pénitentiaire a également chargé les inspecteurs territoriaux de l'inspection des services pénitentiaires de vérifier in situ leur réalisation effective, à l'occasion de chaque inspection portant sur les établissements pénitentiaires concernés.

Lors de son audition par votre rapporteur, M. Jean-Marie Delarue a nuancé ce bilan. Il a noté que les directeurs des établissements visités n'étaient destinataires ni du rapport définitif du Contrôleur général (seul le rapport provisoire leur est adressé), ni des décisions prises par l'administration pénitentiaire pour concrétiser les recommandations contenues dans ces documents. Il a observé que les constats dressés à l'occasion de nouvelles visites dans les mêmes établissements après un certain délai n'attestaient pas toujours de progrès effectifs. Il a relevé enfin que le taux de 80 % avancé par l'administration pénitentiaire concernait les recommandations sur lesquelles elle s'était engagée et non la totalité des préconisations du Contrôleur général.

Sur le fondement de l'article 10 de la loi du 30 octobre 2007 qui permet au Contrôleur général d'émettre des avis, de formuler des recommandations aux autorités publiques et de proposer au Gouvernement « toute modification des dispositions législatives et réglementaires applicables », M. Jean-Marie Delarue a présenté un avis, le 21 octobre 2009, sur l'exercice de leur droit à la correspondance des personnes détenues.

Synthèse de l'avis du 21 octobre 2009

Cet avis comporte plusieurs préconisations qui « n'imposent aucune modification du code en vigueur » (sous réserve d'une disposition nouvelle) et « pourraient s'appliquer le plus tôt possible » :

- les personnes ayant de sérieuses difficultés pour écrire doivent trouver au sein de leur établissement une aide pour l'écriture respectant la confidentialité de cette dernière ;

Votre rapporteur estime cette recommandation particulièrement importante dans un milieu pénitentiaire où prévaut la culture de l'écrit puisque toute demande ou sollicitation doit revêtir une forme écrite alors même qu'une partie de la population pénale ne maîtrise pas cet outil de communication.

- dans différents lieux, accessibles aux détenus lors de leurs mouvements ou à proximité immédiate de leurs cellules pour ceux qui s'y tiennent en permanence, des boîtes aux lettres métalliques fermées de manière sûre doivent être disposées ; elles sont au nombre de trois, chacune spécialisée pour un type de courrier -courrier interne, courrier destiné aux personnels soignants, courrier vers l'extérieur. « Ces boîtes aux lettres doivent être relevées régulièrement : celle renfermant le courrier destiné à l'UCSA ou au SMPR, par le seul personnel de cette unité, au moins deux fois par jour ; celle du courrier interne et externe par les vaguemestres, seuls habilités à les ouvrir, au moins une fois par jour et sous leur responsabilité exclusive -deux personnes au moins par établissement devant être habilitées par le chef d'établissement au titre de vaguemestre-. La lecture des lettres doit être le fait des seuls vaguemestre. Ces derniers seraient tenus au secret professionnel, seule disposition qui implique une modification de la réglementation actuelle, sauf à en être délié, conformément aux principes en vigueur, lorsqu'est en cause la réinsertion du détenu ou la sécurité des biens et des personnes.

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