B. LE RECOURS ADMINISTRATIF PRÉALABLE OBLIGATOIRE COMME SOLUTION ?
Votre rapporteur a souhaité savoir si l'instauration d'un recours administratif préalable obligatoire (RAPO), préconisée par un récent rapport du Conseil d'Etat 26 ( * ) , pourrait apporter une solution au développement du contentieux du permis à points.
L'an passé, il avait indiqué être réservé sur l'introduction de cette procédure, soulignant que, sans méconnaître ses atouts (pour le citoyen, elle constitue un moyen simple, peu coûteux et rapide d'obtenir l'annulation partielle ou totale d'une décision avec des chances raisonnables de succès ; pour l'administration, elle permet la correction de ses erreurs éventuelles et une meilleure connaissance des réactions des administrés), elle risquait de ne pas éviter le contentieux devant les juridictions administratives et, pis encore, d'avoir pour double conséquence, d'une part d' engorger le ministère de l'intérieur , d'autre part, d'allonger les délais de procédure pour les requérants.
Interrogé dans le cadre de la préparation du présent rapport, le ministère de l'intérieur rejoint les analyses de votre rapporteur. Il considère que le recours administratif obligatoire ne résoudrait pas les difficultés évoquées en matière de contentieux du permis à points .
En effet, si l'administration ne parvient pas à démontrer le respect de son obligation d'information préalable ( cf supra ), c'est essentiellement en raison des délais de réponse des tribunaux de police, supérieurs dans 70 % des cas au délai de quatre mois envisagé dans le cadre du RAPO. Dans ces conditions, la réponse au RAPO se solderait dans la grande majorité des cas par une décision implicite de rejet et cette procédure n'aurait fait qu'allonger les délais pour les requérants sans enrayer la saisine ultérieure de la juridiction administrative.
En outre, la réforme proposée par le Conseil d'Etat prévoit parallèlement le maintien de la possibilité pour le conducteur sanctionné, de saisir le juge administratif d'une demande de référé-suspension 27 ( * ) à l'encontre d'une décision ministérielle d'invalidation de son permis de conduire pour solde de points nul.
Dans la mesure où le recours en référé-suspension devant un tribunal continuerait à faire valoir ses effets dans un délai plus court que le délai de quatre mois susmentionné (actuellement 96 % des référés relatifs au contentieux du permis à points sont jugés et exécutés dans un délai inférieur à trois mois), les intéressés auraient toujours intérêt à saisir directement le juge des référés plutôt qu'à introduire un recours administratif.
Dès lors, il ressort que l'introduction du RAPO en matière de permis de conduire représenterait pour le ministère de l'intérieur un investissement humain et matériel important pour un résultat très médiocre en termes de prévention du contentieux.
* 26 Le recours administratif préalable obligatoire est une procédure par laquelle une personne, souhaitant contester une décision administrative qui lui est défavorable, est tenue de former un recours devant l'autorité administrative préalablement à toute saisine du juge, généralement administratif : voir l'avis n° 104 (2008-2009) de MM. Yves Détraigne et Simon Sutour, fait au nom de la commission des lois, déposé le 20 novembre 2008, sur le projet de loi de finances pour 2009 : http://www.senat.fr/rap/a08-104-4/a08-104-4.html .
* 27 Le référé-suspension, qui a succédé au sursis à exécution en 2000, vise à faire suspendre l'exécution d'un acte administratif si deux conditions sont réunies : l'urgence et un doute sérieux d'annulation.