III. LA POLITIQUE DU LOGEMENT SOUFFRE D'UN MANQUE DE COHÉRENCE EN PARTIE EXPLICABLE PAR LA CONJONCTURE ÉCONOMIQUE
La politique du logement est portée par le programme « Développement et amélioration de l'offre de logement », qui concentre les aides à la pierre, et par le programme « Aide à l'accès au logement », qui rassemble les aides à la personne.
A. LES AIDES À LA PIERRE SUBISSENT DEUX INFLUENCES CONTRADICTOIRES
1. La débudgétisation du financement de l'agence nationale de l'amélioration de l'habitat
a) Un désengagement de l'Etat annoncé
Comme dans d'autres domaines, la politique du logement du Gouvernement est marquée par le souci d'utiliser au mieux les moyens existants.
Dans ce cadre, le Gouvernement a estimé qu'une partie des fonds du 1 % logement, dont le montant total s'élève à 3,7 milliards d'euros, pourrait être employée de manière plus efficace en étant directement attribuée d'une part à l'Anah, d'autre part à l'Anru.
L'agence nationale de l'habitat (Anah)
Créée en 1971, l'Anah est un établissement public à caractère administratif placé sous la tutelle des ministres chargés du logement et des finances.
- développer un parc privé à vocation sociale ; - contribuer à l'adaptation des logements aux besoins des personnes âgées ou handicapées ; - promouvoir la qualité de l'habitat dans un objectif de développement durable et d'économie d'énergie ; - lutter contre l'habitat indigne.
L'agence verse des subventions aux propriétaires bailleurs et sous conditions de ressources aux propriétaires occupants qui réalisent des travaux d'amélioration dans les logements achevés depuis plus de quinze ans, ou depuis plus de dix ans lorsqu'il s'agit de travaux dans un immeuble faisant l'objet d'un plan de sauvegarde. Les travaux doivent permettre d'améliorer l'habitat en matière de sécurité, de salubrité ou d'adaptation aux personnes handicapées et de favoriser la prise en compte du développement durable. En échange, les propriétaires s'engagent à occuper leur logement ou le donner en location, pendant neuf ans, à titre de résidence principale. |
Un accord entre le 1 % logement et l'Etat, annoncé lors de l'examen de projet de loi de mobilisation pour le logement, mais qui n'a toutefois pas encore été publié, prévoit donc que l'organisme collecteur versera à l'Anah 480 millions d'euros par an pendant trois ans. Cette somme s'ajoute aux 320 millions supplémentaires, déjà évoqués, à destination de l'Anru et aux 50 millions dédiés à la réhabilitation des quartiers anciens dégradés.
Au total, le prélèvement sur le 1 % logement se monte à 850 millions d'euros par an pendant trois ans. Cette somme sera prélevée sur les aides actuellement distribuées par le 1 % logement.
Le budget 2009 intègre cette donnée en supprimant la contribution de l'Etat aux dépenses d'intervention de l'Anah, qui représentait pourtant 370 millions d'euros en 2008 .
Evolution des ressources de l'Anah hors trésorerie |
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(en milliards d'euros) |
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2008 |
2009 |
|
Dotation de l'Etat |
376 |
6 |
Taxe sur les logements vacants |
18 |
18 |
Contribution 1 % logement |
480 |
|
Total |
394 |
504 |
Source : Anah |
Grâce à la contribution du 1 % logement, l'Anah disposera de 110 millions d'euros supplémentaires par rapport à l'année précédente.
Toutefois, un tiers de cette augmentation s'explique par le transfert de deux nouvelles compétences à l'agence qui aura en charge, dès 2009, la lutte contre l'habitat insalubre, à laquelle elle devra consacrer un budget au moins égal à 25 millions, et l'humanisation des centres d'hébergement d'urgence, qui devrait lui coûter 6 millions.
b) Une décision inopportune mais déjà contrebalancée
Dans un contexte de ralentissement de la conjoncture, la diminution globale des fonds publics destinés au logement est tout à fait inadaptée.
La récession appelle au contraire un effort supplémentaire de l'Etat en faveur de ce secteur pour deux raisons. D'une part, les emplois concernés ne sont pas, par nature, délocalisables. D'autre part, le risque d'éviction est nul puisque les fonds sont directement investis sur le territoire national et ne peuvent pas profiter aux importations.
Il semble que le Gouvernement se soit finalement approprié ce raisonnement puisqu'il a très récemment annoncé un plan de relance de 19 milliards d'euros en faveur des secteurs de l'automobile et du bâtiment. Les mesures concernées, dont le Parlement n'a pas encore connaissance, seront certainement intégrées au projet de loi de finances rectificative pour 2008. Elles viendront s'ajouter au programme exceptionnel d'acquisition en vente en l'état futur d'achèvement (VEFA) de 30 000 logements, qui a été rendu public au mois d'octobre dernier.
Dans ce contexte, il est malaisé de porter une appréciation globale sur le budget 2009 de la politique du logement. L'orientation initiale contredite par les dernières annonces laisse une impression confuse.
L'aide à l'investissement locatif social, en revanche, poursuit un mouvement cohérent depuis maintenant quatre ans.
2. Un effort constant en faveur des logements sociaux
a) Un niveau d'aide très élevé
Le logement social correspond à cinq millions de logements, soit 16 % du parc national .
Les financements du logement social portés par
le programme
Le programme subventionne quatre dispositifs : les prêts locatifs à usage social (Plus), les prêts locatifs à usage social construction-démolition (Plus-CD), les prêts locatifs aidés d'intégration (PLAI) et les prêts locatifs sociaux (PLS). Les Plus, Plus-CD et PLAI combinent un prêt à taux préférentiel de la Caisse des dépôts et consignations, une subvention de l'Etat et des avantages fiscaux . Les PLS ne bénéficient que d'avantages fiscaux . En complément de chaque prêt, l'Etat peut accorder des subventions pour surcharge foncière, pour le financement de places d'hébergement ou de logements d'urgence et pour l'amélioration de la qualité du service rendu aux usagers des logements sociaux. Les collectivités territoriales et l'UESL peuvent également apporter leur concours financier. Les opérateurs sont essentiellement les organismes d'HLM, les sociétés d'économie mixte de construction et les associations agréées. La délivrance des aides est une compétence de l'Etat, mais il peut la déléguer depuis 2004 aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ou aux conseils généraux.
Il faut ajouter aux quatre aides mentionnées
la
prime à l'amélioration des logements à usage locatif et
à occupation sociale (Palulos)
, qui a pour objet d'aider les
bailleurs propriétaires ou gestionnaires de logements locatifs sociaux
à réaliser les travaux d'amélioration dans les logements
ou immeubles existants. Le taux de base de la Palulos est au plus égal
à 10 % du coût prévisionnel des travaux dans la limite
d'un plafond de 13 000 euros par logement. La subvention peut être
complétée par un prêt de la Caisse des dépôts
et consignations.
|
Comme le montre le tableau suivant, le rythme de construction des logements sociaux s'est fortement accéléré ces dernières années.
Nombre de logements sociaux produits depuis 2000 |
|||||||
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
42 117 |
56 299 |
56 290 |
56 425 |
72 704 |
76 990 |
96 367 |
92 489 |
Source : D'après la direction régionale de l'urbanisme, de l'habitat et de la construction (DGUHC) |
Nombre de logements sociaux produits,
depuis 2000,
par catégories
Source : D'après la DGUHC
Alors que seuls 31 000 Plus avaient été réalisés en 2000, 46 000 logements sociaux de cette catégorie ont été produits l'année dernière et 55 000 devraient voir le jour cette année. Le budget 2009 est encore plus ambitieux puisqu'il table sur 58 000 nouveaux Plus.
La production des PLAI, qui sont réservés aux personnes les moins dotées financièrement, a connu une nette augmentation en 2007, puisqu'elle a pratiquement doublé par rapport à l'année précédente. Le mouvement devrait encore s'accélérer car 17 000 nouveaux PLAI sont attendus cette année, et 20 000 pourront être financés en 2009.
Cette évolution, dont votre commission ne peut que se réjouir, révèle sans contestation possible la volonté du Gouvernement de porter la production de logements sociaux à un niveau encore jamais atteint .
Ceci étant, il serait judicieux d'accompagner ce mouvement en faveur du logement social par un développement plus audacieux et volontariste de la garantie des risques locatifs (GRL) , qui vise à couvrir les propriétaires contre tous les risques d'impayés liés à la location d'un logement.
Votre commission vous proposera donc un amendement en ce sens .
b) Le coût d'arrêt donné aux Palulos
Alors que la loi de finances pour 2008 prévoyait le financement de 40 000 Palulos, pour un montant de 60 millions d'euros, le budget prévisionnel pour 2009 ne réserve aucun crédit à ce type d'aide.
Cette situation s'explique par le fait que le Gouvernement espérait que les Palulos soient financés l'année prochaine par le prélèvement, proposé par le projet de loi de mobilisation pour le logement, sur les ressources des organismes HLM qui n'investissent pas suffisamment. Ce dispositif devait permettre de dégager entre 60 et 100 millions d'euros qui auraient été redistribués, notamment sous forme de Palulos, aux organismes HLM ayant besoin d'engager des travaux de rénovation de leur parc.
Cependant, lors de l'examen du projet de loi par le Sénat, il a été décidé que le prélèvement ne serait organisé qu'à partir de 2011.
Le Gouvernement n'a pas, pour l'instant, tiré les conséquences budgétaires de cet arbitrage, espérant sans doute en obtenir la révision à l'occasion de l'examen du projet de loi par l'Assemblée nationale.
Si cela ne devait pas être le cas, le Gouvernement aurait le devoir de prendre les dispositions nécessaires au financement des Palulos, qui sont absolument indispensables à l'entretien du parc HLM.