3. Les modalités de gestion du fonds
Le II du nouvel article L. 262-23 du code de l'action sociale et des familles, inséré par l'article 2 du présent projet de loi, prévoit que :
- le FNSA est administré par un conseil de gestion . La composition de ce conseil, les modalités de désignation de ses membres et ses modalités de fonctionnement ne sont en revanche pas précisées : elles seraient définies par décret ;
- la gestion de ce fonds est assurée par la Caisse des dépôts et consignations .
D'après les informations recueillies par votre rapporteur pour avis, le modèle retenu pour ce fonds est celui du Fonds national d'aide au logement (FNAL).
En tout état de cause, l'Etat et la Caisse des dépôts et consignations devraient conclure avec la CNAF et la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole une convention précisant les modalités de versement, par le FNSA, des recettes aux organismes payeurs, afin de garantir la neutralité des flux financiers pour leur trésorerie. On rappellera, à cet égard, que l'actuel article L. 262-31 du code de l'action sociale et des familles pose la même garantie de neutralité des flux financiers entre les conseils généraux et les organismes payeurs en matière de RMI.
4. L'équilibre général du fonds et l'impact sur la norme de dépenses
a) Un équilibre présenté sur trois ans
Alors que la mention selon laquelle l'Etat assure l'équilibre du FNSA en dépenses et en recettes pourrait laisser penser que cet équilibre est assuré chaque année, les projections présentées par le gouvernement font apparaître un équilibre du fonds sur la période 2009-2011 , comme le montre le tableau qui suit.
Il ressort de ces données que le FNSA recevra de l'Etat , compte tenu de la dotation de 555 millions d'euros inscrite sur le programme 304 de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », une subvention bien supérieure à ses besoins en 2009 .
Pourquoi 555 millions d'euros ? Alors que, selon les projections présentées par le gouvernement, le fonds n'aurait besoin que de 193 millions d'euros pour être à l'équilibre en 2009, 555,3 millions d'euros ont été inscrits sur la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». Selon les données transmises à votre rapporteur pour avis, la dotation de 555,3 millions d'euros prévue pour 2009 correspond au « recylage », au profit du RSA, des dépenses antérieurement consacrées aux dispositifs fusionnés dans cette prestation et des moindres dépenses fiscales associées à la non indexation de la prime pour l'emploi : - l'économie liée à la suppression de la prime de retour à l'emploi (PRE) est évaluée à 38 millions d'euros . Ceci correspond à 25% de la budgétisation prévisionnelle 2009 en direction des publics RMI et API, du fait des dispositions aménageant l'entrée en vigueur du RSA courant 2009, qui maintiennent un droit à la PRE pour les bénéficiaires en emploi jusqu'en mai 2009, leur donnant un droit au versement de la PRE jusqu'en septembre, donc une économie sur le dernier trimestre ; - l'économie nette découlant de la suppression de l'intéressement API et RMI est évaluée à 117 millions d'euros. Elle s'obtient par différence entre l'économie API sur le budget de l'Etat (439 millions d'euros, un peu inférieure à une économie à mi-année, en raison des dispositions transitoires figurant dans le présent projet de loi) et la compensation de la charge nouvelle de l'allocation pour les départements métropolitains , hors intéressement RMI et API, telle que calculée pour la même année (soit 322 millions d'euros) ; - le produit résultant de la non-indexation des seuils et limites de la prime pour l'emploi en 2009 est estimé à 400 millions d'euros. Le « recyclage » des crédits existants aboutirait donc au montant de 555 millions d'euros : 38 + (439 - 322) + 400 = 555. Ceci permettrait, selon les données du Haut commissariat aux solidarités actives contre la pauvreté, d'afficher un solde nul pour l'Etat en 2009 . |
b) Une opération extrabudgétaire qui fausse l'appréciation de la norme de dépenses mais n'a pas d'impact sur les comptes publics
Cette situation conduit votre rapporteur pour avis à formuler plusieurs observations.
(1) Le choix de faire porter ces dépenses par un fonds ad hoc est contestable mais des précédents existent
Le cabinet du Haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté a indiqué à votre rapporteur pour avis que la création de ce fonds « résulte du choix d'une gestion transparente de l'intégralité des nouvelles dépenses et recettes afférentes à cette réforme ».
Il précise également cette création apparaissait d'autant plus légitime que les surcoûts de la réforme « résultent au principal de l'élargissement du champ des bénéficiaires de la prestation aux travailleurs pauvres ou à revenu modestes, en dehors du champ de la compétence des départements et qui vont constituer, pour une part d'entre eux, des nouveaux publics pour la CNAF. Cette dernière estime en effet que, sur les quelque 3 à 3,5 millions de futurs bénéficiaires du RSA, environ 800.000 constitueraient des allocataires nouveaux, ne bénéficiant antérieurement ni du RMI ou de l'API ni de prestations familiales ou d'aides au logement ».
Il n'en demeure pas moins que le choix de faire assumer ces dépenses par un fonds contrevient aux principes d'unité et d'universalité budgétaires . Cette entorse à ces principes n'apparaît, au demeurant, pas nécessaire dès lors que la réforme proposée s'attache à bien distinguer les dépenses relevant des départements - le RSA « de base » - de celles relevant de l'Etat - le RSA « chapeau ».
On note toutefois que des précédents existent , comme le FNAL ou la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.
(2) Le schéma de financement retenu permet à l'Etat de contourner le respect de la norme de dépense mais est neutre du point de vue des finances publiques consolidées
Il convient, en outre, d'observer que ce schéma de financement permet à l'Etat de contourner le principe d'une norme de dépenses « zéro volume » , par ailleurs inscrit dans le projet de loi de programmation pluriannuelle des finances publiques et que le gouvernement s'est attachée à « élargir » pour éviter les points de fuite 42 ( * ) :
- en 2009 , les deux tiers des dépenses (subvention de 555 millions d'euros pour des dépenses prévisionnelles de 1,6 milliard d'euros) étant extraites du budget de l'Etat ;
- en 2010 et les années suivantes, grâce à l'octroi d'une subvention plus généreuse que nécessaire en 2009. En effet, l'octroi d'une subvention de l'Etat permettant au FNSA d'être à l'équilibre en 2009 aurait conduit, compte tenu des besoins anticipés les années suivantes, à un ajustement très significatif en 2010. Compte tenu de la norme de dépenses « zéro volume » précitée, il aurait donc été nécessaire de prévoir, en 2010, des économies supérieures à celles qui seront requises dans ce schéma de financement.
Si l'on peut saluer l'exercice de présentation des équilibres du FNSA sur trois ans, conformément à la démarche pluriannuelle retenue par le projet de loi de programmation pluriannuelle des finances publiques, on doit constater que les choix d'imputation budgétaire opérés ne sont pas neutres au regard des règles édictés par ailleurs .
En revanche, ceci n'a aucun impact lorsque l'on adopte une vision consolidée des comptes publics , les ODAC entrant dans le champ des administrations publiques.
(3) L'ensemble des mesures est censé être neutre pour le budget de l'Etat de 2009 à 2011
Signalons que, par ailleurs, l'ensemble du dispositif est censé être neutre pour le solde de l'Etat sur la période 2009-2011, le seul surcoût de la réforme, soit 1,5 milliard d'euros, étant financé par les contributions sociales de 1,1 % sur les revenus du patrimoine et les produits de placement.
Le tableau qui suit retrace l'impact de la réforme proposée par le présent projet de loi sur le solde de l'Etat.
On observera que les économies attendues de la désindexation de la PPE sont globalement évaluées à 400 millions d'euros, alors que certaines données recueillies par votre rapporteur pour avis conduisent plutôt à une économie comprise en 321 et 337 millions d'euros, auquel cas le solde de l'Etat serait négatif en 2008 (entre 63 et 79 millions d'euros). Le Haut commissariat aux solidarités actives contre la pauvreté a indiqué à votre rapporteur pour avis que « compte tenu des difficultés associées à l'estimation précise de la dépense fiscale associée à la PPE, il n'a pas paru préjudiciable de retenir dans le cadre de la budgétisation un chiffre arrondi ».
* 42 Sur l'élargissement de la norme de dépenses, se reporter à l'analyse développée par notre collègue Philippe Marini, rapporteur général, au sein de son rapport général n° 91 (2007-2008), tome 1.