CHAPITRE II - L'AVANCEMENT DES OPÉRATIONS D'ÉQUIPEMENT

Le projet annuel de performances de la mission « défense » comporte plusieurs objectifs et indicateurs de performances associés au programme « équipement des forces », destinés à permettre un suivi synthétique de l'avancement des opérations d'armement.

Une première série d'indicateurs porte sur la réalisation physique des opérations d'armement . Ils mesurent, par systèmes de forces, la progression de leur réalisation, au vu d'un certain nombre de jalons (commande, livraison, jalon technique) attendus dans le déroulement du programme, et chiffrent le retard moyen pris par les programmes. Ces indicateurs évaluent également la performance technique des équipements, mesurée au cours des essais de qualification. Dans l'ensemble des domaines, ils fixent pour l'année à venir un objectif cible.

Ainsi, pour la réalisation des opérations d'armement principales , un objectif de taux de progression de 85 % est fixé pour 2008, à l'exception du système de forces « dissuasion » pour lequel l'objectif est de 97,5 %. En 2006, seule année renseignée, le taux de progression des opérations par rapport aux jalons attendus avait été de 100 % pour la dissuasion, alors qu'il variait entre 68,6 % et 74,6 % pour les autres systèmes de forces.

S'agissant du déroulement calendaire des opérations, l'objectif est de tenir un glissement annuel de 2,25 mois, excepté pour la dissuasion où le glissement maximal est fixé à un mois et demi. Les résultats de l'année 2006 font apparaître un glissement limité à 1 mois pour la dissuasion et le système de forces « commandement et maîtrise de l'information », et à 2 mois pour les systèmes « projection-mobilité » et « protection-sauvegarde ». Le glissement annuel est en revanche de 6,3 mois pour le système de forces « engagement et combat » .

Enfin, pour la mesure des performances techniques , l'objectif pour 2008 est un taux de réalisation de 90 % par rapport aux performances attendues. Cet indicateur n'est pas renseigné pour les années antérieures.

En dépit de leur caractère encore lacunaire, faute de séries sur plusieurs années, et des limites inhérentes à toute tentative d'évaluation qualitative chiffrée en la matière, ces indicateurs témoignent en eux-mêmes de la complexité de la réalisation des programmes d'armement, soumis à un grand nombre d'aléas technologiques, industriels, financiers ou de coopération. Les glissements calendaires par rapport aux échéanciers annoncés semblent ainsi en être considérés comme la conséquence inévitable.

Il serait toutefois nécessaire, pour renforcer l'intérêt de ces indicateurs, de les assortir d'éléments d'explication, même sommaires, permettant de justifier les écarts constaté par rapport aux objectifs ou d'un système de forces à l'autre, en mentionnant notamment les principaux programmes concernés.

Une deuxième série d'indicateurs à un objet plus directement financier.

Y figure le montant des intérêts moratoires , qui s'est établi à 15 millions d'euros en 2005 et 2006, et pourrait atteindre 18 millions d'euros en 2007, soit 0,23 % des paiements du programme. L'objectif est de limiter les intérêts moratoires à 16 millions d'euros en 2008.

Un autre indicateur mesure l' évolution annuelle moyenne des devis à terminaison des opérations d'armement . Les résultats mentionnés pour 2006 font apparaître une baisse des devis sur trois systèmes de forces : commandement et maîtrise de l'information (- 0,90 %) ; projection, mobilité, soutien (- 0,10 %) ; protection et sauvegarde (- 1,84 %). En revanche, les devis sont en hausse pour la dissuasion (+ 0,25 %) et le système de force « engagement et combat » (+ 0,63 %).

D'après les éléments complémentaires adressés par le ministère de la défense à vos rapporteurs, le cumul de ces résultats fait apparaître une hausse limitée à 0,16 % sur la somme des devis des 55 opérations du programme parvenue au stade de la réalisation, et de 0,20 % pour les 25 principaux programmes d'armement, sur lesquels la hausse avait été de 0,59 % en 2004 et de 0,18 % en 2005.

La hausse des devis résulte principalement de trois facteurs : l'allongement des délais de réalisation du fait de la contrainte budgétaire, l'évolution du coût des facteurs et notamment des matières premières, et de mauvaises anticipations techniques ou économiques par la maîtrise d'ouvrage.

Les principales baisses de devis observées en 2006 concernent le programme de missiles de la famille sol-air futur - FSAF (- 4,1 % soit une diminution de 167 millions d'euros), le programme de satellite d'observation Helios II (- 3,7 % soit une diminution de 56 millions d'euros), le système d'information régimentaire (- 3,4 % soit une diminution de 20 millions d'euros) et le système de commandement et de conduite des opérations aériennes (- 1,8 % soit une diminution de 19 millions d'euros).

*

* * *

Vos rapporteurs présenteront système de force par système de force l'avancement des programmes d'armement, en rappelant que la commission a confié à M. Xavier Pintat l'examen des opérations concernant les fonctions « dissuasion » et « commandement et systèmes d'information », et à M. André Boyer celui des fonctions « projection, mobilité, soutien », « engagement et combat » et « protection et sauvegarde ».

I. DISSUASION

Dans un monde qui reste marqué par le fait nucléaire, avec le maintien d'arsenaux considérables au sein des puissances nucléaires reconnues et l'apparition ou le risque d'apparition, du fait de la prolifération, de nouveaux Etats nucléaires, la dissuasion nucléaire constitue toujours la garantie ultime de nos intérêts vitaux et un élément essentiel de notre stratégie de défense .

Au-delà du risque de la résurgence d'une menace majeure, qui ne peut être écarté sur le long terme, les conséquences que pourrait subir notre liberté d'action du fait d'Etats dotés d'armes de destruction massive et de missiles balistiques doit être prises en compte, et notre capacité de dissuasion demeure, de ce point de vue, un atout essentiel.

Notre doctrine a été adaptée à la nature des menaces nouvelles, ainsi que l'ont montré les discours prononcés par le précédent Président de la République le 8 juin 2001 et le 19 janvier 2006.

Notre posture est fondée sur la stricte suffisance et elle s'appuie sur des moyens plus flexibles et donc plus crédibles face à ces menaces nouvelles.

Ainsi que l'a souligné le président Serge Vinçon, au nom de la commission, dans le rapport d'information sur les équipements militaires publié en juillet dernier, il n'y a pas lieu d'envisager, pour la période couverte par la prochaine loi de programmation militaire, une remise en cause des programmes concernant la dissuasion nucléaire.

En tout état de cause, le renouvellement de nos moyens est désormais très largement avancé . La plupart des programmes ont dépassé le stade du développement et sont en phase de réalisation, qu'il s'agisse des SNLE NG, des missiles ASMP/A et M 51 ou des grands équipements du programme simulation. L'arrivée prochaine de l'ASMP/A réduit d'ailleurs la portée pratique des interrogations récurrentes sur le maintien de la composante aéroportée. Une éventuelle suppression génèrerait peu d'économies immédiates, mais priverait la France d'un volet appréciable de sa capacité de dissuasion, obtenu grâce à la capacité de frappe adaptée et visible qui caractérise cette composante.

A. L'ÉVOLUTION DES DOTATIONS CONSACRÉES À LA DISSUASION

Dans le projet de budget pour 2008 apparaît pour la première fois une action spécifique consacrée à la dissuasion nucléaire et regroupant des moyens jusqu'alors éclatés entre les différentes actions du programme « équipement des forces ».

Cette présentation apporte incontestablement une meilleure visibilité sur le financement de nos capacités nucléaires. Toutefois, l'action « dissuasion » ne recouvre que 80 % des autorisations d'engagement et 85 % des crédits de paiement consacrés aux forces nucléaires dans le projet de budget pour 2008. Quelques crédits sont répartis sur d'autres actions du programme « équipement des forces ». Le maintien en condition opérationnelle de la force océanique stratégique et l'activité des forces aériennes stratégiques figurent au programme « préparation et emploi des forces ». Les études opérationnelles et technico-opérationnelles ainsi que les études-amont dans le domaine nucléaire relèvent du programme « environnement et prospective de la politique de défense ». Enfin, le programme « soutien de la politique de défense » comporte des dotations d'infrastructure consacrées à la dissuasion.

Le tableau ci-dessous retrace les principales lignes budgétaires concernées.

PRINCIPALES DOTATIONS CONSACRÉES À LA DISSUASION EN 2008

(en millions d'euros)

PROGRAMMES

AE

CP

Environnement - prospective

Etudes opérationnelles et technico-opérationnelles nucléaires

Etudes amont nucléaire

2,8

93,2

2,8

60,4

Préparation - emploi des forces

Posture de dissuasion nucléaire

3,4

3,4

Equipement des forces

SNLE NG

M 51

Adaptation SNE NG au M 51

Mirage 2000n K3

ASMP/A

Simulation

Autres opérations

Soutien et mise en oeuvre des forces

Crédibilité technique de la posture - toutes opérations

109,2

199,5

120,2

31,9

90,9

460,1

483,6
229,5

89,5

346,8

645,0

121,8

41,0

231,9

448,6

549,9
382,6

116,8

(source : projet de loi de finances - annexe Défense)

Ce tableau ne fait pas apparaître les dépenses de maintien en condition opérationnelle de la force océanique stratégique, qui sont incluses dans l'action « soutien des forces sous-marines » et qui seront de l'ordre de 200 millions d'euros en 2008, ni celles des forces aériennes stratégiques qui, d'après les informations figurant dans le projet annuel de performances, représenteront 97,6 millions d'euros l'an prochain.

Si l'on globalise l'ensemble les dotations consacrées à la dissuasion nucléaire, le projet de budget pour 2008 fait apparaître une évolution très contrastée par rapport à 2007, avec une diminution de 32,1 % des autorisations d'engagement , qui se montent à 2,3 milliards d'euros et se situent à l'un des plus bas niveaux de ces dix dernières années, et une progression de 2,9 % des crédits de paiement , fixés à 3,4 milliards d'euros , soit à l'inverse le niveau le plus élevé de ces dix dernières années.

Ces montants représentent 6,4 % des autorisations d'engagement et 9,2 % des crédits de paiement de la mission « défense » .

Rapportés à l'agrégat « loi de programmation militaire », la dissuasion représentera 15,2 % des autorisations d'engagement et 21 % des crédits de paiement consacrés à l'équipement militaire .

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA DISSUASION NUCLÉAIRE

Année

millions d'euros courants

millions d'euros constants

2007

part des crédits d'équipement militaire

AE

CP

AE

CP

AE

CP

1998

2 517

2 535

2 874

2 894

20,5 %

20,7 %

1999

2 033

2 534

2 309

2 878

15,7 %

19,5 %

2000

2 809

2 417

3 159

2 718

21,1 %

18,7 %

2001

2 049

2 373

2 264

2 622

15,9 %

18,7 %

2002

2 518

2 652

2 721

2 866

19,4 %

21,4 %

2003

3 402

2 963

3 621

3 154

22,2 %

21,7 %

2004

3 456

3 111

3 617

3 257

20,6 %

20,9 %

2005

3 186

3 148

3 292

3 253

20,8 %

20,7 %

2006

3 613

3 323

3 678

3 383

22,4 %

20,9 %

2007

3 367

3 270

3 367

3 270

21,7 %

20,2 %

2008

2 286

3 368

2 252

3 318

15,2 %

21,0 %

La réduction très sensible des autorisations d'engagement est liée à de moindres besoins par rapport à 2007, année caractérisée par des opérations importantes, notamment la contractualisation d'une tranche de maintien en condition opérationnelle pour le M 51 et la commande du 2 ème lot de missiles ASMP/A.

S'agissant des crédits de paiement , 456 millions d'euros sont prévus pour le missile M 51 (compte non tenu des travaux d'infrastructure de l'Ile Longue), 448 millions d'euros pour le programme simulation, 346,8 millions d'euros pour le programme SNLE NG et 160,2 millions d'euros pour le missile ASMP/A.

Les crédits de paiement destinés à être transférés au Commissariat à l'énergie atomique (CEA) s'élèvent, pour 2008, à 1 373 millions d'euros, soit 6,6 % de plus que les crédits inscrits dans la loi de finances pour 2007. La quasi-totalité de ces crédits relèvent de l'agrégat « dissuasion nucléaire », certains d'entre eux n'y étant cependant pas rattachés (notamment des crédits transférés au titre du programme de sous-marins nucléaires d'attaque Barracuda). Au titre de l'agrégat « dissuasion », les principaux crédits transférés au CEA sont destinés au programme simulation et aux matières nucléaires.

Le rapport sur l'exécution de la loi de programmation militaire transmis au Parlement il y a quelques mois fait état d'un dépassement financier sur les programmes nucléaires par rapport aux prévisions initiales établies en début de programmation. D'après les précisions fournies par le ministère de la défense, ces dépassements représentent, sur l'ensemble de la période, 7 % de l'enveloppe initialement prévue. L'impact fiscal du changement de statut de DCN sur les coûts de construction et d'entretien représenterait à lui seul environ 500 millions d'euros. Les autres sources de dépassement concernent le programme M 51 et la nouvelle tête nucléaire océanique (350 millions d'euros), les travaux de remise à niveau et d'adaptation au M 51 des infrastructures de l'île Longue (250 millions d'euros), ainsi que l'augmentation des coûts de soutien des forces aériennes stratégiques (100 millions d'euros).

B. L'AVANCEMENT DES PROGRAMMES NUCLÉAIRES

La loi de programmation militaire 2003-2008 rappelle qu'en matière de dissuasion, l'objectif est de « disposer, en toutes circonstances, d'une capacité autonome et suffisante pour faire peser sur tout agresseur potentiel une menace de frappe nucléaire crédible ». Il souligne la nécessité de maintenir le niveau d'invulnérabilité de nos deux composantes et d' améliorer la souplesse de choix des objectifs .

Ce « contrat opérationnel » passe par la poursuite de la modernisation de la force océanique stratégique, dotée de sous-marins nucléaires de nouvelle génération emportant un missile plus performant, le M 51, et d'une composante aérienne à la fois plus visible et plus souple d'emploi, elle aussi dotée d'un nouveau missile, l'ASMP/A.

Il passe également par des moyens de simulation qui garantissent la fiabilité, et donc la crédibilité des armes nucléaires en l'absence d'essais de vraie grandeur.

1. La composante océanique

Pour la Force océanique stratégique (FOST) , l'année 2008 sera marquée par le retrait du service du dernier sous-marin de type « Redoutable », l'Inflexible , qui devra être démantelé. Ainsi, au début de l'année prochaine, le format de la FOST sera temporairement ramené à trois sous-marins nucléaires lanceurs d'engins. Il s'agit d'une situation comparable aux périodes durant lesquelles un sous-marin se trouve en grand entretien. Elle ne remet pas en cause la tenue de la posture, qui prévoit la permanence à la mer d'un sous-marin, et de deux si nécessaire.

Le retrait de l'Inflexible suppose toutefois un strict respect du calendrier de livraison du 4 ème sous-marin nucléaire lanceur d'engins de nouvelle génération (SNLE NG), le Terrible , commandé en 2000 et attendu pour juillet 2010 . Ce bâtiment sera mis à l'eau l'an prochain et sera directement équipé du nouveau missile balistique M 51.

Le montant cumulé des engagements sur le programme SNLE NG devrait dépasser 9,4 milliards d'euros fin 2007 , dont près de 8,9 milliards d'euros devraient avoir été payés. Les dotations prévues en 2008 s'élèvent à 109,2 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 346,8 millions d'euros de crédits de paiement. Les flux de paiements prévus sur les engagements passés avant fin 2008 sont de 286 millions d'euros en 2009 et 91 millions d'euros en 2010, année de livraison du 4 ème SNLE NG.

Le missile balistique M 51 destiné à équiper la FOST à compter de 2010 prendra la suite des missiles de la génération M 4 entrée en service en 1985, dont est issu le M 45 actuel et dont certains composants ou certaines technologies deviennent désormais obsolètes. Le M 51 est un missile à têtes multiples d'une portée de l'ordre de 6 000 km. Plus volumineux que le M 45, il est conçu pour emporter, sans perte de portée pour un même nombre de têtes, les futures têtes nucléaires océaniques (TNO) élaborées à partir du concept de « charges robustes », validé lors de la dernière campagne d'essais dans le Pacifique. Avec le M 51, les zones de patrouilles seront plus étendues, les profils de vols plus variés et les secteurs géographiques atteignables plus nombreux. La capacité de pénétration du missile sera accrue pour tenir compte de l'évolution des défenses antimissiles. Sa précision supérieure permettra de mieux sélectionner les objectifs.

Le développement du missile M 51 a débuté en 2000 et la fabrication du premier des deux lots commandés, sur trois prévus, a commencé en fin d'année 2004. Le M 51 a déjà effectué deux tirs d'essai réussis depuis le Centre d'essais des Landes. Un troisième essai doit être réalisé en 2008 à partir d'un caisson immergé dans une piscine de 100 mètres de profondeur construite spécialement à cet effet. Les essais à la mer proprement dits devront être réalisés sur le Terrible, dans la période précédant son admission au service actif.

Dans un premier temps, le M 51 emportera les têtes nucléaires TN 75 actuellement en service. A cette première version appelée M 51.1 succèdera, à compter de 2015, une seconde version appelée M 51.2 équipée de la TNO. Le marché de conception de cette version a été notifié à la fin de l'année 2006.

Le montant cumulé des engagements sur le programme M 51 devrait dépasser 7,2 milliards d'euros fin 2007 , dont près de 5,2 milliards d'euros devraient avoir été payés. Les dotations prévues en 2008 pour le développement et la fabrication du M 51 s'élèvent à 26,5 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 456,1 millions d'euros de crédits de paiement. Les flux de paiements prévus sur les engagements passés avant fin 2008 sont de 633 millions d'euros en 2009 et 465 millions d'euros en 2010.

Le projet de budget met également en place des dotations pour le programme d'adaptation au missile M 51 des trois premiers SNLE NG. Il s'agit de développer, à l'aide de différents moyens d'essai, la composante embarquée du système d'armes de dissuasion M 51 (CESAD M 51) qui sera installée à bord des trois bâtiments. La commande de la première adaptation est intervenue fin 2006. Les dotations prévues en 2008 s'élèvent à 120,2 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 121,8 millions d'euros de crédits de paiement.

Enfin, dans le cadre du soutien des forces sous-marines, les crédits prévus pour le maintien en condition opérationnelle des SNLE NG s'élèveront à 203 millions d'euros.

Pour la composante océanique, les principales évolutions à réaliser au cours de la prochaine loi de programmation militaire concernent l'adaptation de deux des trois premiers SNLE-NG au M 51 et la réalisation de la tête nucléaire océanique « robuste », qui n'entrera cependant en service qu'à l'horizon 2015.

2. La composante aéroportée

Le début du renouvellement de la composante aéroportée est programmé à très proche échéance, avec une arrivée du missile ASMP/A échelonnée entre 2009 et 2011 , et la mise en service opérationnelle des premiers Rafale pour les missions nucléaires en 2010 .

Le missile aéroporté ASMP/A (air sol moyenne portée améliorée) équipera à compter de 2009 les forces aériennes stratégiques et à compter de 2010 l'aéronavale . Il disposera d'une portée et d'une capacité de pénétration des défenses nettement supérieures à celles de l'ASMP. L'ASMP/A sera équipé de la nouvelle tête nucléaire aéroportée (TNA) dont la fabrication a commencé au printemps 2007. Un 2 ème lot de missiles ASMP/A , sur 3 prévus, doit être commandé d'ici la fin de l'année.

Les dotations prévues en 2008 pour le développement et la fabrication de l'ASMP/A s'élèvent à 90,9 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 231,9 millions d'euros de crédits de paiement.

Les forces aériennes stratégiques , actuellement composées de trois escadrons de Mirage 2000N, sont pour leur part appelées à évoluer avec l' arrivée du Rafale au standard F3 d'une part, et du missile ASMP/A d'autre part.

Deux escadrons de Mirage 2000N feront l'objet des adaptations nécessaires (standard K3) pour emporter l'ASMP/A en 2009 pour le premier escadron et en 2011 pour le second, alors qu'un premier escadron de Rafale doté de l'ASMP/A sera opérationnel en 2010. Le remplacement définitif du Mirage 2000N par le Rafale est envisagé à l'horizon 2018. C'est en 2010 que devrait être constituée une première capacité opérationnelle de Rafale équipés de l'ASMP/A sur le porte-avions Charles de Gaulle.

Le remplacement progressif des Mirage 2000N par le Rafale accentuera la polyvalence des avions affectés à la composante aéroportée qui, d'ores et déjà, ne sont pas cantonnés aux seules missions en liaison avec la dissuasion.

3. Le programme de simulation

La simulation doit fournir les moyens de garantir la fiabilité et la sûreté des armes nucléaires en l'absence d'essais en vraie grandeur. Elle permettra d' évaluer les conséquences du vieillissement des charges sur les armes actuelles et de valider les futures têtes nucléaires dotées de charges « robustes » , en vérifiant que leurs caractéristiques sont compatibles avec les modèles définis à la suite de la dernière campagne d'essais. Enfin, à plus long terme, la simulation fournira aux concepteurs n'ayant pas été confrontée aux essais des calculateurs et des moyens expérimentaux leur permettant de confronter leurs calculs à l'expérience.

Le programme simulation implique un développement considérable de la capacité de calcul de la direction des applications militaires du CEA et s'appuie sur deux grands équipements expérimentaux : la machine radiographique Airix, destinée à l'étude du fonctionnement non nucléaire des armes, et le laser mégajoule, destiné à l'étude du domaine thermonucléaire. Le calendrier de mise en service de ce dernier a été revu et légèrement décalé.

L' augmentation des moyens de calcul , développée dans le cadre du projet Tera , se déroule selon le calendrier prévu, en cohérence avec les besoins de la réalisation de la tête nucléaire aéroportée et de la tête nucléaire océanique. Le CEA dispose depuis 2002 d'une machine « 1 teraflop/seconde soutenu » (1000 milliards d'opérations par seconde) qui a multiplié par 100 sa capacité de calcul par rapport à 1996. Une deuxième machine de capacité dix fois supérieure ( Tera 10 ), réalisée par la société française Bull, est entrée en service à l'été 2006 . La dernière phase (Tera 100), prévue pour 2010, vise à acquérir une capacité 10 fois supérieure à la capacité actuelle (100 teraflops/seconde soutenu), soit 10 000 fois la capacité détenue en 1996.

La machine radiographique AIRIX , située à Moronvilliers dans la Marne, est opérationnelle, dans sa version initiale, depuis fin 2000. Elle est vouée à l'analyse de la dynamique des matériaux et permet d'étudier le fonctionnement non nucléaire des armes, à l'aide d'expériences au cours desquelles les matériaux nucléaires sont remplacés par des matériaux inertes. Il est envisagé de faire évoluer l'instrument actuel, qui comporte un seul axe de visée, afin d'obtenir au cours d'une même expérience davantage de clichés et sous des angles différents. Des études de faisabilité sont en cours pour définir la solution optimale en termes de nombre d'axes de visée, de nombre de flashs et de coût pour cette future installation dont le développement pourrait être lancé au cours de la prochaine loi de programmation militaire, pour une livraison qui n'est cependant pas envisagée avant 2016.

Enfin, le laser Mégajoule qui sera installé au Barp, en Gironde, est destiné à l'étude du domaine thermonucléaire. Il permettra de déclencher une combustion thermonucléaire sur une très petite quantité de matière et de mesurer ainsi les processus physiques élémentaires. Le développement du projet doit s'effectuer en plusieurs étapes. La ligne d'intégration laser (LIL) , prototype à 8 faisceaux du futur laser qui en comportera 240, a été mise en service en 2004. L'installation de la première ligne du laser mégajoule doit commencer en fin d'année 2007.

Au vu des résultats obtenus sur la LIL depuis sa mise en service, des progrès scientifiques réalisés depuis le lancement du programme et des perspectives financières, un nouveau calendrier a été arrêté cette année. La mise en fonctionnement des 240 faisceaux est désormais prévue pour fin 2012 et les premières expériences d'ignition et de combustion thermonucléaire pour 2014, au lieu de fin 2012.

L'ensemble du programme de simulation représente un coût global de 6,4 milliards d'euros 2007. D'après les informations fournies à votre rapporteur, le coût de fonctionnement des moyens de la simulation représentera moins de la moitié de celui des essais en grandeur réelle réalisés au Centre d'expérimentation du pacifique.

Enfin, comme votre commission l'a déjà souligné, les grands équipements liés à la simulation, c'est-à-dire le laser mégajoule et les moyens informatiques du CEA, seront ouverts à la communauté scientifique civile. Un Institut laser et plasmas a notamment été créé en Aquitaine en 2002 pour favoriser l'accès de la communauté civile à l'ensemble des moyens lasers du CEA.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page