b) Un retour inopportun à la solidarité ministérielle en matière de régulation budgétaire
Cette disproportion entre la contribution aux annulations de crédits et le poids effectif de chaque programme au sein de la mission s'explique par des logiques ministérielles incompatibles avec la nouvelle architecture budgétaire issue de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).
Celle-ci avait en effet pour principe le redécoupage des unités budgétaires soumises à l'autorisation du Parlement afin de constituer des ensembles cohérents du point de vue des politiques publiques et non plus du seul point de vue ministériel . C'est la raison pour laquelle l'article 47 de la LOLF précise le cadre d'application de l'article 40 de la Constitution en autorisant les parlementaires à redéployer les crédits au sein d'une même mission.
Cette nouvelle nomenclature devait avoir pour effet d'empêcher que des annulations de crédits soient prévues sur un programme, afin de compenser des ouvertures sur d'autres programmes gérés par le même ministère . Ce principe de solidarité ministérielle, qui est le plus souvent invoqué par le ministère en charge du budget au cours des négociations liées à la régulation en exécution, trouvait particulièrement à s'appliquer au ministère de l'agriculture et de la pêche. En effet, ce dernier devait régulièrement financer des plans exceptionnels permettant la prise en charge des conséquences de calamités naturelles diverses et invoquait cette nécessité afin de gager une partie des avances nécessaires sur des annulations de crédits destinés à l'enseignement agricole.
Au moment de la présentation de la nouvelle nomenclature budgétaire, le ministère de l'agriculture et de la pêche avait donc indiqué à plusieurs reprises à votre rapporteur que le rattachement de l'enseignement technique agricole à la mission « Enseignement technique agricole » permettrait de mettre celui-ci à l'abri de ces annulations de crédits devenues particulièrement fréquentes , qui perturbaient presque chaque année l'exécution du projet de loi finances voté par le Parlement.
Force est de constater que cet engagement n'est pas tenu , puisque les logiques ministérielles ont encore prévalu au cours de l'exécution de la loi de finances pour 2007. En effet, il a été répondu à votre rapporteur, qui souhaitait connaître les raisons de la contribution anormalement élevée de l'enseignement agricole aux annulations de crédits portant sur la mission « Enseignement scolaire », que cela s'expliquait par le fait que le ministre de l'agriculture et de la pêche était par ailleurs largement bénéficiaire des avances gagées sur ces annulations et qu'en conséquence, il était légitime que les programmes du ministère contribuent tout particulièrement aux annulations, lorsqu'ils ne faisaient l'objet pour leur part d'aucune ouverture de crédits.
En effet, la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » fait l'objet dans le décret précité d'un abondement de crédits à hauteur de 110,3 millions d'euros d'AE et de 39 millions d'euros de CP. Cela s'explique par la nécessité de financer la prise en charge par l'Etat d'une partie des conséquences liées au passage du cyclone « Dean » en Guadeloupe et en Martinique en août 2007 .
Votre rapporteur est pleinement conscient de la nécessité de mettre en jeu la solidarité nationale lorsque des catastrophes naturelles surviennent. Mais il convient alors de répartir équitablement l'effort entre toutes les politiques publiques menées par l'État, sans concentrer celui-ci sur les autres actions menées par le ministère bénéficiaire des avances gagées.
Cette dernière est en effet d'autant plus discutable qu'elle va à l'encontre des principes fondateurs de la réforme budgétaire et marque un retour à l'esprit de la nomenclature budgétaire telle qu'elle était présentée sous l'empire de l'ordonnance n° 2-59 portant loi organique relative aux lois de finances du 2 février 1959.
Votre rapporteur estime que le retour de ces logiques ministérielles en exécution n'est pas acceptable et souhaite qu'il y soit mis fin .