II. EXAMEN DE L'AVIS
Réunie le mercredi 29 novembre 2006 , sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Alain Milon , sur le projet de loi de finances pour 2007 (mission « Santé »).
M. Alain Milon, rapporteur pour avis de la mission « Santé » , a présenté les grandes lignes de son rapport (cf. exposé général du présent avis).
M. Jean-Pierre Godefroy a estimé l'avis présenté trop critique pour pouvoir donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission. Si les moyens sont renforcés pour le « plan cancer », les difficultés d'application demeurent sur le terrain en raison du manque de médecins dans certains départements ruraux, la Manche par exemple, où les femmes doivent attendre huit à neuf mois pour un dépistage du cancer du sein.
Il s'est en revanche félicité de la constance des moyens consacrés à la lutte contre le Sida et a estimé que, sans contester son intérêt, la vente des préservatifs à 20 centimes d'euro constitue une diversification singulière de l'activité des buralistes confrontés à la diminution des ventes de cigarettes.
Il s'est étonné que la taxe applicable aux publicités sur les produits caloriques ne soit pas encore entrée en vigueur. Ce délai de mise en oeuvre est trop long, comme l'a été d'ailleurs celui de l'apposition du pictogramme de prévention à destination des femmes enceintes sur les conditionnements d'alcool.
En ce qui concerne le problème du refus de soins par certains médecins aux bénéficiaires de la CMU et de l'AME, il a demandé l'application de sanctions sévères à leur encontre et a souhaité plus largement attirer l'attention de la commission sur les difficultés d'accès aux soins pour les personnes qui ne bénéficient plus du tiers payant.
Il a constaté, pour la lutte contre la toxicomanie, que si le projet de loi de prévention de la délinquance multiplie les mesures coercitives, le projet de budget limite inversement les moyens alloués à cette politique.
Il a enfin considéré que, s'il était indispensable de retirer le volet « psychiatrie » du même projet de loi « délinquance », il est inacceptable de traiter ces questions par voie d'ordonnance, d'autant que les dispositions prévues font l'objet d'un débat et sont en totale contradiction avec les propositions de la HAS en la matière.
M. Louis Souvet s'est inquiété des conséquences sur l'emploi de la limitation drastique de la subvention de l'Etat à la HAS. Il a également estimé très insuffisante la dotation de 5,6 millions d'euros pour le plan de santé mentale, compte tenu de l'ampleur des besoins.
Il a souhaité qu'un moyen soit rapidement trouvé pour permettre aux médecins étrangers d'exercer de façon durable dans les hôpitaux français et a considéré que les médecins coupables de discrimination dans l'accès aux soins doivent être fermement sanctionnés.
Mme Bernadette Dupont a demandé si une partie des crédits affectés au plan santé mentale est consacrée à la problématique particulière de la prévention du suicide des jeunes.
Mme Sylvie Desmarescaux a jugé ce budget inquiétant, notamment en ce qui concerne la diminution des moyens consacrés à la lutte contre les addictions, domaine dans lequel les progrès sont fragiles, ainsi que de la faiblesse des crédits affectés à l'action « qualité de la vie et handicap ». Elle a estimé, plus largement, que le financement des plans de santé publique repose de manière excessive sur l'assurance maladie.
Reconnaissant par ailleurs que le comportement des médecins qui refusent de recevoir les bénéficiaires de la CMU et de l'AME est anormal, elle a considéré que les patients doivent également être rappelés à l'ordre lorsqu'ils ne respectent pas leurs devoirs vis-à-vis des soignants.
Abordant le problème des discriminations géographiques et sociales en matière d'accès aux soins, M. André Lardeux a considéré que la solution ne peut être immédiate, dans la mesure où il faut au moins dix ans pour former un médecin et où la question de la liberté d'installation reste taboue. Les attentes professionnelles des jeunes médecins ont changé : les critères familiaux, sociaux et environnementaux jouent de plus en plus dans leur choix de carrière, d'autant que 70 % des jeunes diplômés sont des femmes qui ne souhaitent plus être assujetties aux mêmes contraintes horaires que leurs prédécesseurs. Concernant les discriminations à l'égard des bénéficiaires de la CMU et de l'AME, il a jugé que ce phénomène touche plus particulièrement l'Ile-de-France et s'explique aussi souvent par la désinvolture de certains patients vis-à-vis des professionnels de santé.
M. Francis Giraud a observé que, plus qu'une question de moyens budgétaires, les problèmes évoqués traduisent l'évolution des mentalités du corps médical, auquel ses devoirs doivent être rappelés dans le cadre de la formation initiale et continue, et l'ignorance d'une partie de la population, en direction de laquelle un effort d'éducation à la santé doit être mené.
M. Guy Fischer a qualifié ce budget de « trompe-l'oeil », estimant que l'effort en faveur du « plan cancer » ne constitue qu'un rattrapage des dotations insuffisantes des années précédentes. Il a rappelé, à cet égard, que le projet « étoile » des régions Rhône-Alpes et Auvergne a failli être abandonné faute de moyens. Il a également regretté les transferts de charges incessants vers l'assurance maladie.
Il s'est inquiété des inégalités récurrentes en matière d'accès aux soins, tant en milieu rural que dans les quartiers difficiles. L'accompagnement sanitaire des bénéficiaires de minima sociaux doit être renforcé et les médecins coupables de discrimination doivent être sanctionnés.
Il s'est élevé contre la décision du Gouvernement de légiférer par ordonnance pour réformer la psychiatrie, alors même que ce secteur est sinistré et qu'il doit faire l'objet d'un vaste débat public.
Il a enfin souhaité que soit renforcée la lutte contre les addictions, qui accroissent les inégalités sociales et professionnelles.
Mme Brigitte Bout s'est félicitée de la différenciation opérée prochainement entre la prévention de la délinquance et la prise en charge des malades mentaux.
Par ailleurs, elle a fait état des bons résultats obtenus dans sa commune en matière de lutte contre l'obésité, où des actions sont menées depuis 1992 dans le cadre d'un contrat ville-santé. L'application rapide de la taxe sur les publicités en faveur des produits caloriques est donc hautement souhaitable.
Mme Isabelle Debré s'est inquiétée de l'insuffisance des crédits affectés à certaines pathologies, notamment la lutte contre les addictions.
Elle a également dénoncé l'attitude de certains bénéficiaires de la CMU, qui ne se rendent pas aux rendez-vous fixés ou ne présentent pas leur carte Vitale au médecin, et a estimé que de telles attitudes peuvent justifier un refus de soins.
M. Jean-Pierre Michel a considéré que la présentation des crédits de cette mission ne peut se conclure que par un vote défavorable.
Reconnaissant l'existence de fraudes à la CMU, il a estimé que les caractéristiques sociales de la population concernée doivent être prises en compte et qu'il faut informer les personnes les plus défavorisées sur leurs droits et leurs devoirs en matière d'accès aux soins.
Sur les moyens affectés à la santé mentale, il les a jugés très inférieurs aux besoins, notamment en pédopsychiatrie et en obstétrique, et a regretté que l'on envisage une réforme majeure des textes par voie d'ordonnance.
En réponse aux intervenants, M. Alain Milon, rapporteur pour avis , a rappelé que les crédits de la mission « Santé » n'ont pas vocation à financer l'ensemble des plans de santé publique, mais seulement les mesures de prévention et d'éducation prévues dans ce cadre.
Il a indiqué que des crédits sont spécifiquement prévus pour la prévention du suicide des jeunes dans le plan « santé mentale ».
Il a estimé que les problèmes de démographie médicale vont s'aggraver dans les cinq prochaines années. Ce sujet difficile sera traité dans le rapport d'information confié sur ce thème à M. Jean-Marc Juilhard par la commission.
Il a considéré que la réussite des « plans cancer » et de lutte contre les addictions doit être reconnue, même si les efforts doivent être poursuivis, notamment dans le domaine de l'alcoolisme des jeunes.
Concernant enfin l'accès aux soins des plus défavorisés, il a observé qu'il s'agit essentiellement d'un problème francilien et qui concerne plus particulièrement les médecins spécialistes. Il a rappelé que le médecin conserve sa liberté de soigner, en l'absence de danger pour le patient, et que les malades ont également des devoirs vis-à-vis des professionnels de santé.
A l'issue de ce débat, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Santé » pour 2007.