B. DES ACTIONS CIBLÉES SUR DES PRIORITÉS SANITAIRES IDENTIFIÉES
Le renouveau d'une politique de santé publique centrée sur la prévention, avec la loi du 9 août 2004 précitée, s'appuie sur la mise en oeuvre de plans stratégiques pour la période 2004-2008 , consacrés à des priorités sanitaires identifiées : le cancer, de loin le plan le plus abouti et le mieux doté, la violence et les conduites addictives, les risques environnementaux, les maladies chroniques et les maladies rares. Le programme national nutrition-santé (PNNS), les plans santé mentale et de lutte contre la maladie d'Alzheimer, ainsi que les actions menées dans le cadre de la lutte contre le VIH/Sida complètent cette nouvelle organisation de la politique de santé.
La place prépondérante du plan cancer ne permet pas, en 2006, de doter les autres plans de manière satisfaisante et les met, de fait, à la charge de l'assurance maladie , ce que votre commission regrette.
Les actions « déterminants de santé », « pathologies à forte morbidité/mortalité » et « qualité de la vie et handicaps » du programme « santé publique et prévention » regroupent les crédits étatiques destinés à la mise en oeuvre de ces plans. Leur découpage correspond aux trois types de préventions définis par l'OMS : la prévention primaire qui consiste à éviter la survenance de la maladie en agissant sur les déterminants endogènes ou exogènes ; la prévention secondaire pour dépister et prendre en charge le plus précocement possible ; enfin, la prévention tertiaire qui vise à limiter les incapacités des personnes malades ou handicapées.
1. Modifier les comportements à risque et limiter les risques environnementaux
L'action « déterminants de santé » rassemble les politiques d'information et d'éducation sur les risques de santé « évitables » , car liés à des comportements ou à un environnement à risque. Plusieurs partenaires et opérateurs sont associés au ministère de la santé pour leur mise en oeuvre : l'Inpes, la MILDT, la CNAM, les professionnels de santé, mais aussi les associations de prévention et de lutte contre les conduites addictives. Cette action est dotée, en 2006, de 34,7 millions d'euros, soit une diminution de 6 % . Hors la subvention à l'Inpes pour 7,4 millions d'euros et les dépenses de fonctionnement (essentiellement des dépenses de communication), 27 millions d'euros servent au développement des actions visant les principaux déterminants de santé.
Les déterminants de santé ont été fixés à six par le rapport annexé à la loi relative à la politique de santé publique : la tabac, l'alcool, les traumatismes par accidents et violences, la toxicomanie, la nutrition et l'activité physique, l'environnement.
a) Les résultats encourageants de la lutte contre les pratiques à risque
Le plan de lutte contre les drogues illicites, le tabac et l'alcool, recouvre la majorité des actions menées sur ces trois déterminants de santé pour la période 2004-2008, une partie étant intégrée au plan « cancer ».
• Des actions visant à réduire la consommation d'alcool et à prévenir le risque d' alcoolisme ont été mises en oeuvre dès les années 1950. Elles ont progressivement contribué à la diminution générale de la consommation et des risques afférents. Très largement en tête du classement mondial des pays en termes de consommation d'alcool par habitant au début des années 1960, la France se situe désormais au sixième rang. Ainsi, la consommation moyenne par habitant de plus de quinze ans est passée de 26 litres d'alcool pur en 1962, à 13,2 litres en 2003, soit une diminution de moitié en quarante ans.
La consommation addictive (supérieure à trois verres par jour pour les hommes et à deux pour les femmes selon l'OMS) touche toutefois encore 18 % des hommes et 6 % des femmes . Les décès liés à une dépendance alcoolique (cirrhose du foie et cancer des voies aéro-digestives supérieures) se sont élevés à 23.000 en 2000. Toutefois, parallèlement à la baisse de la consommation, ces pathologies ont diminué de façon continue depuis le début des années 1960.
Le plan quinquennal fixe deux objectifs à la poursuite de la politique de lutte contre l'alcoolisme : abaisser les consommations régulières aux seuils définis par l'OMS et faire évoluer et respecter la législation. La loi du 9 août 2004 a en effet considérablement renforcé le dispositif législatif fixé par la loi du 10 janvier 1991 dite « loi Evin ». En outre, à l'initiative de notre collègue Anne-Marie Payet, la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées rend obligatoire, sur les conditionnements d'alcool, la présence de messages sanitaires destinés aux femmes enceintes.
A partir de 2005, le plan, jusqu'alors nettement axé sur la lutte contre le tabac, a réorienté ses actions en faveur de la lutte contre l'alcoolisme. En 2006, cette évolution se poursuit avec, en particulier, un effort en matière de diffusion des bonnes pratiques à l'attention des professionnels de santé en vue de développer le repérage précoce des consommations problématiques.
• Pour ce qui concerne la lutte contre le tabagisme , le plan a la charge de confirmer et de renforcer les premiers résultats encourageants des politiques menées. On rappellera que le tabac constitue encore aujourd'hui la première cause de mortalité évitable, avec 66.000 décès par an.
L'engagement avait été pris, lors de la Journée mondiale sans tabac de 2003, de réduire le tabagisme des jeunes de 30 % et celui des adultes de 20 %, en cinq ans. Moins d'un an après, plus de la moitié de l'objectif avait déjà été atteint, puisque d'après l'enquête Inpes/Ipsos de décembre 2003 comparé au précédent Baromètre Santé de 1999, la prévalence du tabagisme avait chuté de 12 % dans la population générale et de 18 % chez les femmes et les jeunes. Cette évolution est confirmée par le Baromètre santé 2004.
Du fait des mesures fiscales mises en oeuvre, les ventes de cigarettes ont chuté de 21 % entre 2003 et 2004. Parallèlement, les ventes de médicaments pour l'aide à l'arrêt du tabac ont augmenté de moitié et une progression du nombre de consultations de tabacologie a été observée.
Outre l'instrument fiscal, la politique de lutte contre le tabagisme s'appuie essentiellement sur le renforcement des avertissements sanitaires sur les paquets de cigarettes, en application de l'arrêté du 5 mars 2003, et sur les emballages de papier à rouler à partir de 2006 (arrêté du 27 mai 2004). Des restrictions législatives ont également été adoptées, comme l'interdiction de la vente de tabac aux mineurs de moins de seize ans.
Pour 2006, les actions s'inscriront dans la continuité des objectifs fixés par le plan quinquennal : empêcher ou retarder la première cigarette, inciter et aider les fumeurs à arrêter, protéger les non fumeurs et faire évoluer et appliquer la législation. Il conviendra également de respecter au mieux les objectifs de la loi relative à la politique de santé publique : abaisser la prévalence du tabagisme de 33 % à 25 % chez les hommes et de 26 % à 20 % chez les femmes d'ici à 2008 et réduire le tabagisme passif dans les établissements scolaires, les lieux de loisirs et l'environnement professionnel.
Pour mener à bien la partie du plan consacrée au tabac et à l'alcool, le projet de budget pour 2006 prévoit 4,7 millions d'euros.
• Le volet consacré à la lutte contre la toxicomanie est doté, pour sa part, de 13,3 millions d'euros destinés au soutien des réseaux toxicomanie-ville-hôpital, des structures d'accueil pour toxicomanes en situation précaire, des unités pour les personnes sortant de prison, des ateliers d'aide à l'insertion et des équipes mobiles de proximité. Il s'agit aussi de financer des programmes d'échange de seringues et la mise à disposition de matériel d'injection stérile.
Votre commission soutient très largement l'ensemble des mesures de ce plan. Elle s'étonne toutefois de leur imputation budgétaire sur le programme « santé publique et prévention ». Il lui semblerait, en effet, compte tenu du pilotage de ce plan par la MILDT, plus conforme à la sincérité budgétaire d' intégrer ces crédits, soit 18 millions d'euros, au programme « drogue et toxicomanie ». Elle vous proposera un amendement en ce sens.
b) Vers un second programme national nutrition-santé
Le PNNS a été lancé en 2001. Axé sur la prévention primaire, le dépistage et la prise en charge précoce des personnes en surpoids, il a pour objectif de réduire de 20 %, à échéance 2005, la prévalence du surpoids et de l'obésité chez les adultes et d'interrompre l'augmentation de celle des enfants.
Les axes stratégiques du programme
national nutrition-santé
- informer et orienter les consommateurs vers les choix alimentaires sains ;
- prévenir, dépister et prendre en charge les troubles nutritionnels ;
- impliquer l'industrie agroalimentaire et la restauration collective dans la lutte contre l'obésité ;
- mettre en place des systèmes de surveillance nutritionnelle de la population ;
- développer la recherche en nutrition humaine ;
- engager des actions de santé publique
destinées à des groupes spécifiques.
Ce programme a fait l'objet d'actions variées depuis cinq ans, notamment plusieurs campagnes de communication lancées par l'Inpes sur le thème du « bien manger ». Il a également contribué à une prise de conscience des politiques. La loi du 9 août 2004 a ainsi rendu obligatoire, sous peine du paiement d'une contribution à l'Inpes, une information sanitaire liée aux publicités pour des produits caloriques et interdit les distributeurs de boissons et de produits alimentaires dans les écoles, à compter du 1 er septembre 2005.
Outre la contribution annuelle de l'assurance maladie, qui s'établit à 5 millions d'euros, et les crédits de l'Inpes consacrés aux campagnes sur l'alimentation, le PNNS dispose, pour 2006, de 3,5 millions d'euros . Avec la fin du programme initial, une mission de préfiguration, qui rendra ses conclusions à la fin de l'année 2005, a été chargée de réfléchir à la mise en oeuvre d'un second PNNS.
Votre commission a, dans le cadre de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé (Opeps) à cette occasion, travaillé sur le thème de l'obésité. L'étude commandée à l'Inserm a fait état de lacunes dans l'évaluation des actions , pourtant novatrices, menées dans le cadre du PNNS 1 ( * ) . De fait, leurs résultats sur la prévalence de l'obésité et du surpoids ne sont pas encore connus. Votre commission souhaite donc que le prochain PNNS inscrive l'évaluation au coeur de ses objectifs , afin d'en mesurer plus sûrement l'efficacité.
c) La montée en charge progressive du plan national de santé environnementale
Le PNSE a été lancé le 21 juin 2004 pour la période 2004-2008. Il est piloté par les ministères de l'environnement, de la santé, du travail et de la recherche et poursuit trois objectifs prioritaires : garantir un air et une eau de bonne qualité, prévenir les pathologies d'origine environnementale, notamment les cancers, mieux informer le public et protéger les populations sensibles (enfants, femmes enceintes et personnes âgées).
Le plan est organisé autour de quarante-cinq actions. Au terme de sa première année d'existence, des avancées ont été obtenues pour la moitié d'entre elles. Ainsi, le recensement de l'ensemble des tours aéroréfrigérantes a été effectué dans le cadre de la prévention de la légionellose ; la gratuité des examens médicaux a été instaurée par arrêté ministériel du 18 janvier 2005 pour favoriser le dépistage du saturnisme chez l'enfant et la femme enceinte ; un programme d'action pour réduire les émissions aériennes de substances toxiques est également engagé.
La mise en place de l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset), qui dispose de missions plus larges que l'ancienne l'Afsse, et le renforcement de l'InVS en santé au travail devraient, en outre, permettre de nouvelles avancées dans ce domaine.
Une évaluation de l'état d'avancement du PNSE est prévue au mois de décembre 2005 et un comité d'évaluation sera mis en place pour identifier les avancées et les insuffisances du plan et réorienter ses actions. Votre commission se réjouit de cette initiative et souhaite la voir étendue à l'ensemble des plans de santé publique en cours.
Pour 2006, l'action « déterminants de santé » du programme « santé publique et prévention » dote le PNSE de deux millions d'euros . Ils seront notamment consacrés à la mise en place des dispositifs de surveillance et de lutte contre les intoxications au monoxyde de carbone et contre le saturnisme, ainsi qu'à l'information du public sur la prévention des risques sanitaires environnementaux (bruit, légionelles, etc.).
d) Le lancement annoncé du plan « violence et santé »
S'il est difficile de mesurer quantitativement la progression du niveau de violence, on sait que les manifestations de la violence ont beaucoup évolué. Elles sont aujourd'hui moins physiques ou accidentelles et davantage sexuelles et psychiques. Dans tous les cas, l'exposition à des phénomènes de violences constitue un facteur de risque de pathologies, notamment en matière de santé mentale.
Le rapport mondial sur la violence et la santé, paru en 2002 sous l'égide de l'OMS, indique que le coût de la violence serait considérable du fait des répercussions sur la santé des victimes et de leur prise en charge par les établissements de santé. La premières des neuf recommandations formulées par l'OMS invite donc les Etats à élaborer et mettre en oeuvre un plan d'action national pour la prévention de la violence. Dès le mois de février 2003, le ministre de la santé a confié au HCSP une étude sur les conditions d'application de cette recommandation. La loi du 9 août 2004 a finalement abouti à la création d'un plan « violence et santé ». Un comité d'orientation interministériel a ensuite coordonné les travaux de six commissions thématiques chargées de définir les orientations du plan. Son rapport à été remis au ministre au mois de septembre 2005.
Le plan « violence et santé » doit être mis en oeuvre à partir du début de l'année 2006 et constituera l'un des volets des plans régionaux de santé publique (PRSP). Pour assurer son évaluation au regard des objectifs définis, le comité d'orientation interministériel deviendra un comité de suivi.
Le nouveau plan est doté, pour 2006, de 3,5 millions d'euros pour la mise en place des premières actions, dont une étude sur les conséquences de la violence sur la santé et une campagne d'information.
2. Mieux prévenir et prendre en charge les pathologies
L'action « pathologies à forte morbidité/mortalité » rassemble les mesures visant à diminuer la mortalité prématurée et la morbidité évitable en différant la survenance des pathologies, essentiellement le cancer et le VIH/Sida. Elle concentre, avec 190,4 millions d'euros, plus de 73 % des moyens du programme . Ces crédits augmentent de 30,3 %, sous l'effet de deux changements de périmètre de sens contraires :
- la prise en charge par l'Etat, aux termes de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, de plusieurs actions de prévention sanitaire (dépistage des cancers, vaccinations, lutte contre la tuberculose et les infections sexuellement transmissibles), jusqu'alors assurées par les départements. Ceux-ci peuvent toutefois poursuivre ces activités s'ils ont passé une convention avec l'Etat avant le 31 juillet 2005. 41,7 millions d'euros sont inscrits à cet effet en 2006 ;
- le transfert des centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues (Caarud) à l'assurance maladie, qui permet une économie de 14,9 millions d'euros pour le budget de la santé.
L'Inpes, l'INCa, mais aussi l'agence nationale de recherche contre le sida (ANRS), le conseil national du sida (CNS) et diverses associations nationales contribuent à la mise en oeuvre de cette action.
a) La lutte contre le cancer, une priorité absolue des pouvoirs publics
Le plan de lutte contre le cancer, chantier présidentiel annoncé en 2002, a été engagé en 2003 pour la période allant jusqu'en 2007. Il comporte soixante-dix mesures relatives à tous les aspects de la lutte contre la maladie :
- la prévention des facteurs de risque (tabac, alcool, facteurs environnementaux) ;
- le développement du dépistage du cancer du sein, du cancer cervico-utérin et du cancer colorectal ;
- la mise en oeuvre du programme thérapeutique individuel issu d'une concertation pluridisciplinaire dans le cadre d'un réseau de soins ;
- le renforcement de l'accompagnement par une information sur les structures de prise en charge du cancer ;
- l'amélioration de la formation des professionnels ;
- le renforcement de la recherche.
L'objectif est de développer le dépistage précoce et la prise en charge des malades pour diminuer le nombre de décès liés à cette maladie.
En 2005, outre la création de l'INCa, plusieurs mesures ont été financées :
- des kiosques d'information ont été ouverts dans certaines villes et centres commerciaux, en partenariat avec les communes, les conseils généraux, les centres de lutte contre le cancer, les associations et les réseaux de cancérologie. Ils offrent une information sur la maladie ainsi qu'un soutien psychologique aux malades et à leurs proches ;
- des « espaces rencontre information », animés par la Ligue contre le cancer, ont été créés au sein d'établissements de santé ;
- des guides d'information, destinés aux patients, ont été diffusés dans les centres de lutte contre le cancer ;
Le budget alloué par l'Etat à la lutte contre le cancer est ainsi passé de 5 millions d'euros en 2002 à 41,1 millions d'euros en 2003, à 49,7 millions d'euros en 2004 puis à 74,5 millions d'euros en 2005, avec la mise en oeuvre progressive du plan « cancer ».
En 2006, le ministère de la santé consacrera 96,5 millions d'euros à la lutte contre le cancer, dont 45,2 millions pour la subvention de l'INCa. Les 49,3 millions d'euros restants seront répartis comme suit :
- 25 millions d'euros pour les structures de dépistage (poursuite de la montée en charge du dépistage du cancer du sein et généralisation sur l'ensemble du territoire du dépistage du cancer colorectal), en partenariat avec l'assurance maladie et les conseils généraux qui ont conservé cette compétence ;
- 8,5 millions d'euros pour l'expérimentation du maintien à domicile des malades dans trois départements ;
- 15,8 millions d'euros pour les autres actions du plan (formation des professionnels, information du public, subventions aux associations).
Cet effort budgétaire de l'Etat est accompagné par l'assurance maladie qui assume la mise en oeuvre des mesures relatives à l'amélioration de la prise en charge des personnes atteintes d'un cancer, tant en matière d'organisation des soins que de traitements.
b) Les efforts ne doivent pas être relâchés pour la lutte contre le VIH/Sida
Le programme national 2005-2008, élaboré en lien avec les professionnels de santé et les partenaires associatifs, a pris, en 2005, la relève du plan précédent mis en oeuvre en 2001. La lutte contre le VIH/Sida demeure en effet une priorité de santé publique. L'objectif fixé par la loi du 9 août 2004, réduire de 20 % l'incidence des cas de sida en cinq ans , est à cet égard ambitieux.
En effet, l'apparition de nouveaux cas chez les populations à risque, migrants d'origine sub-saharienne et homosexuels, justifie de poursuivre les actions menées.
L'évolution des cas de
VIH/Sida
En France, le système de surveillance du sida repose depuis 1982 sur la déclaration obligatoire des praticiens auprès de l'InVS. De nouvelles procédures ont été mises en place en 2003 pour assurer l'anonymat des déclarations à la source.
En 2004, le nombre de nouveaux cas de sida s'est élevé à 1.015. Après une forte diminution entre 1996 (4.011 nouveaux cas) et 1998 (1.926 nouveaux cas) liée à l'introduction des trithérapies, la baisse a été plus lente. Le nombre des décès annuels s'est élevé à 302 en 2004. De fait, les nouveaux cas restant supérieur aux décès, le nombre des personnes vivantes ayant développé un sida continue d'augmenter d'environ 5 % par an. Elles étaient 25.600 en 2004.
La proportion de cas de sida chez des personnes originaires d'un pays d'Afrique subsaharienne est en augmentation (25 % en 2004 soit le double de celle de 1998), notamment chez les femmes (37 % de femmes d'Afrique subsaharienne parmi l'ensemble des femmes atteintes) que chez les hommes (19 %).
La situation épidémiologique est aussi préoccupante chez les homosexuels avec la résurgence de la syphilis, l'émergence de la lymphogranulomatose vénérienne, la recrudescence des pratiques à risque observée dans les enquêtes comportementales depuis 2000 et l'augmentation des cas d'hépatites C aiguës.
En l'absence de vaccin et de traitement éradiquant l'infection, la politique de lutte contre le VIH/Sida vise à réduire sa transmission et à optimiser la prise en charge des malades et des 100.000 personnes séropositives. Le nouveau programme comporte cinq domaines d'intervention : prévention, dépistage, suivi et prise en charge thérapeutique, solidarité et lutte contre les discriminations, mise en oeuvre et pilotage. Il permettra la poursuite des mesures mises en oeuvre depuis plusieurs années : le développement de l'accès aux préservatifs, l'incitation au dépistage, l'information sur les conduites à risque et les actions ciblées sur les populations à risque.
En 2006, 36,3 millions d'euros seront consacrés par le ministère de la santé à la lutte contre le VIH/Sida pour le soutien aux associations nationales qui oeuvrent dans ce domaine, le financement de programmes de prévention, d'actions de formation des professionnels de santé et de prise en charge extrahospitalière des malades.
L'assurance maladie, hors dépenses médicales, contribue également aux actions de lutte contre le VIH/Sida, via le FNPEIS et le financement des appartements de coordination thérapeutique.
c) Des moyens plus limités pour les autres pathologies
Les crédits consacrés à la lutte contre les autres pathologies du programme sont, en revanche, bien plus modestes.
• Ainsi, le nouveau programme national « hépatites virales B et C » 2006-2009 dispose, pour 2006, de 3,2 millions d'euros pour la mise en oeuvre de campagnes d'information pour le dépistage, d'actions de prévention des contaminations dans les activités de soins et pour le soutien aux réseaux de prise en charge des malades. Le programme de prévention de l'hépatite B en milieu pénitentiaire sera également renforcé. 500.000 personnes sont aujourd'hui infectées par l'hépatite C et 150.000 par l'hépatite B, qui sont la cause de multiples complications (cirrhose et cancer notamment) et de plusieurs milliers de décès chaque année.
• Le plan santé mentale est doté de 5,8 millions d'euros, destinés notamment à des actions de formation au repérage des troubles psychiques chez les enfants et de prévention du suicide.
Le plan psychiatrie et santé mentale
2005-2008
Annoncé en Conseil des ministres le 20 avril 2005, à la suite des évènements dramatiques intervenus à Pau, le plan santé mentale est articulé autour de cinq axes. Il présente des objectifs ambitieux en termes de prévention, de réorganisation et de décloisonnement des prises en charge sanitaire et sociale, d'amélioration de la formation et de la qualité des pratiques ainsi que dans les domaines de l'évaluation et de la recherche.
Le premier axe vise à décloisonner les prises en charge grâce à :
- l'amélioration du recours aux soins par la diffusion d'informations régulières sur la psychiatrie et la santé mentale ;
- le développement des alternatives à l'hospitalisation (soins ambulatoires dans le cadre des centres médico-psychologiques et psychiatrie de liaison) ;
- la revalorisation et l'adaptation de l'hospitalisation en psychiatrie ;
- le développement d'une offre sociale et médico-sociale adaptée et complémentaire des soins nécessaires. Il s'agit notamment d'apporter des réponses aux patients hospitalisés qui pourraient être pris en charge en soins externes, s'il leur était possible de bénéficier d'un accompagnement et/ou d'un hébergement adapté.
Le deuxième axe concerne le renforcement des droits des malades et de leurs proches :
- en veillant à leur pleine participation dans les processus décisionnels et institutionnels ;
- en augmentant les subventions aux associations d'usagers et de familles ;
- en élargissant les compétences des commissions départementales des hospitalisations psychiatriques à certaines pratiques réalisées en hospitalisation libre ;
- en réfléchissant à une réforme du dispositif d'hospitalisation sans consentement.
Le troisième axe vise à développer la qualité des soins et la recherche :
- en diffusant les bonnes pratiques et le bon usage du médicament, notamment des psychotropes, en lien avec la HAS ;
- en orientant la recherche sur l'épidémiologie en psychiatrie et santé mentale pour mieux appréhender les besoins.
Le quatrième axe regroupe des programmes spécifiques sur la période 2005-2008 :
- l'amélioration de la prise en charge de la dépression et la stratégie nationale d'action contre le suicide ;
- le programme coordonné Santé - Justice en faveur des détenus, notamment la prise en charge des auteurs d'agressions sexuelles ;
- le développement d'actions sur des populations spécifiques : enfants et adolescents, personnes âgées, personnes en situation précaire.
Enfin, le cinquième axe concerne le suivi et l'évaluation du plan avec la mise en place d'un comité national de suivi du plan en octobre 2005.
• Enfin, les autres plans rattachés à l'action « pathologies à forte morbidité/mortalité » (maladies rares, autres maladies infectieuses - notamment la cellule Creuzfeldt-Jacob et le plan de lutte contre la résistance aux antibiotiques -, santé bucco-dentaire, maladies cardio-vasculaires) se partageront 1,2 million d'euros. Cette somme paraît très insuffisante à votre commission comparée à l'ensemble des mesures à mettre en oeuvre dans le cadre de ces programmes, notamment pour ce qui concerne les maladies rares, dont l'étude, le dépistage et la prise en charge méritent d'être améliorés. De fait, 20 millions par an pendant quatre ans devaient être versés par l'Etat au plan « maladies rares » : la promesse, prise lors de son lancement, est loin d'être tenue...
3. Réduire les risques de handicap et en limiter les conséquences
La quatrième action du programme « santé publique et prévention », intitulée « qualité de la vie et handicap » recouvre la prévention tertiaire de la typologie de l'OMS. Elle concerne des pathologies moins morbides, qui peuvent entraîner des handicaps pour les personnes qui en sont atteintes. Il s'agit de réduire leur gravité grâce à une amélioration des prises en charge.
Avec une dotation de 6,1 millions d'euros , c'est, de loin, l'action la plus modeste du programme, même si ses crédits augmentent en 2006 de près de 60 %. Les mesures qu'elle recouvre concernent tous les âges de la vie :
• en matière de périnatalité , les actions menées visent à améliorer la santé des femmes enceintes et celle du foetus, en limitant les expositions nocives, et à réduire le nombre de grossesses non désirées en facilitant l'accès à la contraception et à l'interruption volontaire de grossesse (IVG). Le plan périnatalité sera doté de 1,57 million d'euros en 2006, soit un effort quasi nul par rapport au 270 millions d'euros prévus sur quatre ans. Encore une fois, l'assurance maladie devrait être largement mise à contribution.
Selon le Planning familial, des inégalités persistent en matière d'accès à l'IVG, notamment pour les migrantes et les jeunes mineures. Par ailleurs, les délais d'intervention sont encore longs dans les régions Ile-de-France et PACA. Votre commission souhaite qu'un effort particulier soit mené en 2006 pour améliorer ces situations.
Les enfants sont concernés par le dépistage des troubles de l'apprentissage et des difficultés visuelles et auditives , mené en lien avec l'éducation nationale. Un nouveau carnet de santé verra également le jour en 2006. 250.000 euros seront consacrés à ces programmes par le ministère ;
• pour la population adulte, des actions sont mises en oeuvre en matière de prévention, de dépistage et de prise en charge du diabète, des maladies rénales et du sang, des affections musculo-squelettiques et des maladies chroniques .
Une dotation de 970.000 euros contribuera à la mise en oeuvre, en 2006, du plan national pour l'amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques. Il devra renforcer la prévention et la formation des professionnels de santé en la matière ;
• les personnes âgées sont concernées par les mesures prévues en matière de lutte contre la maladie d'Alzheimer et, plus généralement, les maladies liées au vieillissement (ostéoporose, troubles ostéo-articulaires, problèmes de vision et d'audition). Il s'agit de répondre aux enjeux du vieillissement de la population et aux problèmes de santé qui en constituent le corollaire, en cherchant à augmenter l'espérance de vie en bonne santé.
Le plan de lutte contre la maladie d'Alzheimer, essentiellement financé par l'assurance maladie, bénéficiera ainsi de 660.000 euros pour le développement de l'accompagnement personnalisé des 800.000 malades et de leurs aidants. Une partie des crédits (250.000 euros) sera en outre consacrée au développement des soins palliatifs et à l'information des professionnels de santé et du grand public sur cette question.
* 1 Gérard Dériot « Obésité : comprendre, prévenir, aider ». OPEPS, rapport n° 8 (2004-2005).