VI. LE PROGRAMME « INTERVENTIONS TERRITORIALES DE L'ÉTAT »
Le programme des interventions territoriales de l'Etat (PITE) rassemble des actions régionales ou interrégionales, de nature interministérielle qui correspondent à des projets d'envergure de portée nationale et nécessitent une gestion déconcentrée. Il donne lieu à la constitution de budgets opérationnels de programme (BOP) confiés aux préfets de région territorialement compétents.
* Il se distingue des autres programmes de la mission « Politique des territoires » par certaines particularités . Ainsi, le pilotage de chacune de ses actions est assuré par le ministre responsable de la politique publique dont relèvent les objectifs finaux de l'action (appelé « ministre référent »), même si le Secrétaire général du ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire (MIAT) reste le responsable du programme du point de vue budgétaire. Les ressources du PITE sont, en outre, issues des programmes budgétaires correspondant à ces différentes politiques publiques. Enfin, la fongibilité des crédits ne s'applique pas au niveau du programme, mais seulement au niveau de chacune des actions.
Vos rapporteurs pour avis tiennent à exprimer leur réserve à l'égard de ce programme qui, sous le prétexte de faciliter une gestion interministérielle, rassemble des actions pour le moins disparates et qui, en dépit des différentes politiques qu'elles sont censées mettre en oeuvre, possèdent pourtant souvent une dimension prioritaire (environnement pour le plan Loire, agriculture et forêt pour la filière bois en Auvergne Limousin, transports pour l'action « Rhin et bande rhénane »...), comme en témoigne la notion de « ministre référent ». En outre, leur nature est très proche des projets interministériels financés par l'action n° 3 du programme « Aménagement du territoire », avec lequel une fusion aurait pu être envisagée.
* Le PITE est doté, pour 2006, de 134,8 millions d'euros en AE et 81,2 millions d'euros en CP , contre respectivement 38,4 et 31,8 millions d'euros pour 2005, soit de substantielles augmentations de 251 % et 155,3 %.
Il bénéficiera aussi d'un fonds de concours à hauteur de 14,2 millions d'euros en AE et 4,1 millions d'euros en CP, spécifique à l'action « plan Loire grandeur nature », constitué par les apports des collectivités territoriales.
* Ses dépenses sont pour l'essentiel des dépenses d'investissement et surtout d'intervention (à hauteur de 98,9 % en AE et de 98,4 % en CP).
* Huit actions composent le PITE, qui sont retracées dans l'encadré suivant :
Les actions du programme « Interventions territoriales de l'Etat » Action n° 1 : « Le Rhin et la bande rhénane (Alsace) » Elle vise à améliorer dans cette région l'efficacité du transport fluvial, la maîtrise des risques d'inondation et des risques liés à la navigation, à préserver la biodiversité, conformément aux engagements de la France concernant les zones humides et à la directive Natura 2000 et, enfin, à développer les projets transfrontaliers. Elle comprend des crédits d'études et de communication ainsi que des crédits d'intervention en faveur de projets locaux (ex : aménagement de terminaux de conteneurs à Mulhouse et à Strasbourg). 2,9 millions d'euros en AE et 1,9 million d'euros en CP sont destinés à cette action. Action n° 2 : « L'eau et l'agriculture en Bretagne » Elle a pour objet la reconquête de la qualité des eaux. C'est pourquoi elle tend à inciter les agriculteurs à adapter leurs exploitations et leurs modes de production pour limiter les atteintes à l'environnement. Elle comporte une dimension « expertise » et vise à l'adoption de mesures réglementaires correctives. Elle est dotée de 16,9 millions d'euros en AE et de 8 millions d'euros en CP. Action n° 3 : Le « plan Loire grandeur nature » (Centre) Constituant la deuxième phase de la mise en oeuvre du « plan Loire grandeur nature » adopté en 1994, cette action vise à prévenir le risque d'inondations, à améliorer la gestion de la ressource en eau et des espaces naturels et ruraux de la vallée de la Loire et à mettre en valeur leur patrimoine naturel, historique et paysager, dans une optique de développement durable. Cette action est dotée de 16,4 millions d'euros en AE et de 6,8 millions d'euros en CP. Action n° 4 : « Le programme exceptionnel d'investissements en faveur de la Corse » Elle vise à poursuivre la mise en oeuvre du programme d'investissements institué par la loi du 22 janvier 2002 en vue d'une remise à niveau des équipements publics structurants de l'île (routes, ports de commerce, établissements d'enseignement secondaire et supérieur, services collectifs dans le domaine de la santé, du sport, de la culture...). Elle reçoit 45,9 millions d'euros en AE et 18 millions d'euros en CP. Action n° 5 : « La filière bois en Auvergne-Limousin » Elle vise à accompagner la modernisation de l'outil industriel de cette filière par la dynamisation de l'activité de production des propriétaires forestiers, par la recherche de plus larges débouchés pour le bois et ses co-produits et, enfin, par une valorisation des fonctions environnementale, sociétale et touristique de la forêt. 9,4 millions d'euros en AE et 4,7 millions d'euros en CP lui sont consacrés. Action n° 6 : « Le plan gouvernemental pour le Marais poitevin » (Poitou-Charentes) Cette action concerne l'application du plan pour le marais poitevin adopté en juin 2002, qui vise notamment à restaurer son caractère de zone humide, conformément à la directive Natura 2000, et à reconquérir pour cette région le label de parc naturel régional. Les AE de cette action s'élèvent à 5,8 millions d'euros et les CP à 5,5 millions d'euros. Action n° 7 : « Le plan Durance multi-usages » (Provence-Alpes-Côte d'Azur) Elle vise à un meilleur partage des ressources en eau de la rivière Durance entre les différents usages (hydroélectricité, irrigation, alimentation industrielle et urbaine, restauration des milieux aquatiques, tourisme...), dans une perspective de développement durable. Une enveloppe de 3,4 millions d'euros en AE et de 2,2 millions d'euros en CP est prévue pour cette action. Action n° 8 : « L'accueil des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes » Cette action entend assurer une meilleure maîtrise des flux migratoires, dynamiser la politique d'accueil et faciliter l'intégration des étrangers en situation régulière. Les AE et les CP s'établissent à 34 millions d'euros. |
Les enveloppes budgétaires les plus importantes sont destinées à l'action n° 4 (programme exceptionnel d'investissements en faveur de la Corse) dotée de 45,9 millions d'euros en AE (34 % des AE du PITE) et 18 millions en CP, et à l'action n° 8 (accueil des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes) qui reçoit 34 millions d'euros en AE (25,2 % des AE du PITE) et la même somme en CP.
Ce programme ne finance directement aucun emploi budgétaire.
* Le PITE affiche huit objectifs correspondant très exactement aux huit actions , même si leur portée peut apparaître parfois plus restreinte que le champ d'application des actions correspondantes.
Les objectifs du programme « Interventions territoriales de l'Etat » Objectif n° 1 : « Améliorer l'efficacité et la sécurité du transport fluvial ainsi que l'intermodalité voie fluviale/voie ferrée, en préservant la biodiversité de la bande rhénane » Correspondant à l'action n° 1, cet objectif vise à améliorer l'intermodalité rail/fleuve dans la bande rhénane. L'indicateur retenu mesure la part du rail dans le pré-acheminement et le post-acheminement des conteneurs sur les plateformes trimodales des ports alsaciens, avec une cible de 24 % en 2006. Objectif n° 2 : « Reconquérir la qualité des eaux en Bretagne » Correspondant à l'action n° 2, cet objectif est assorti d'un indicateur recensant la proportion des stations de mesure pour lesquelles la limite de 50 mg/litre est dépassée (cible de 18 % en 2006). Objectif n° 3 : « Réduire les dommages par l'amélioration des mesures de sauvegarde au plus près des populations exposées » Correspondant à l'action n° 3 (plan « Loire grandeur nature »), il comporte un indicateur dénombrant le nombre de communes couvertes par un plan communal de sauvegarde contre les inondations par rapport au nombre total de communes situées en zone inondable. Objectif n° 4 : « Aider la Corse à surmonter les handicaps naturels que constituent son relief et son insularité et résorber son déficit en équipements et services collectifs » Correspondant à l'action n° 4 (investissements en Corse), cet objectif possède un indicateur censé établir l'évolution des délais de réalisation des projets mis en oeuvre dans le cadre de ce programme. Objectif n° 5 : « Dynamiser la récolte forestière et améliorer la valorisation optimale du bois et de ses coproduits » Cet objectif retient deux des trois axes prioritaires de l'action n° 3 : dynamiser la récolte forestière et améliorer la valorisation du bois et de ses coproduits. L'indicateur proposé mesure l'évolution de la valeur ajoutée de la branche « exploitation et première transformation du bois ». Objectif n° 6 : « Préserver la biodiversité, les habitats et réhabiliter le caractère de zone humide du marais poitevin » Reprenant pour partie les différents volets de l'action n° 6, cet objectif compte un indicateur qui tend à mesurer la surface des prairies dans la zone du marais poitevin (cible : 33.000 hectares pour 2006). Objectif n° 7 : « Réduire les dommages par l'amélioration des ouvrages et des dispositifs de prévention dans une approche de développement durable » Correspondant à l'action n° 7 (plan Durance), cet objectif vise à prévenir les risques liés à l'eau (inondations, atteintes aux milieux aquatiques, insuffisance de la ressource en eau pour l'agriculture, l'industrie et les usages urbains...). Son indicateur se concentre, quant à lui, sur le seul risque d'inondations puisqu'il évalue l'efficacité des projets subventionnés de prévention des inondations (nombre d'habitants de zones inondables ayant bénéficié d'une baisse d'aléa grâce à des mesures subventionnées de prévention). Objectif n° 8 : « Améliorer la prise en charge sociale des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes » Cet objectif, relatif à l'action n° 8, vise à améliorer les délais de traitement des demandes d'asile, les conditions d'hébergement et l'accompagnement social, l'organisation de l'accès aux droits des réfugiés ainsi que l'efficacité des reconduites à la frontière. L'indicateur retenu mesure la proportion de demandeurs d'asile hébergés en centre d'accueil des demandeurs d'asile (CADA) ou dans le cadre du dispositif d'accueil d'urgence des demandeurs d'asile (AUDA) sur l'ensemble des demandeurs d'asile hébergés en Rhône-Alpes. |
Le choix de faire correspondre exactement les objectifs et les actions , s'il s'explique par la difficulté de définir des priorités transversales compte tenu de la forte spécificité des projets, se traduit par une certaine redondance et, dans une certaine mesure, par une utilité très relative des objectifs . En outre, leur intitulé, se voulant très englobant, manque parfois de clarté et de sens, à l'image de celui du « plan Loire grandeur nature » (« réduire les dommages par l'amélioration des mesures de sauvegarde au plus près des populations exposées »).
Pour chaque objectif, un seul indicateur a été retenu, ce qui est bien souvent insuffisant pour l'évaluation . Par exemple, alors que le « bleu budgétaire » souligne que le principal enjeu de l'action et de l'objectif n° 8 est la réduction du délai de traitement des demandes d'asile, l'indicateur retenu concerne les conditions d'hébergement des demandeurs d'asile. Ne serait-il pas opportun de compléter celui-ci par un indicateur relatif au délai de traitement des demandes ?
Par ailleurs, seuls trois des huit indicateurs comportent des résultats et des prévisions chiffrées , ce qui n'est pas satisfaisant. Ainsi, bien que le « bleu » mette l'accent sur la nécessité de respecter les délais de réalisation des investissements dans le cadre de l'objectif n° 8 (« programme exceptionnel d'investissements en Corse »), l'indicateur « évolution des délais de réalisation des projets » n'est ni construit, ni renseigné.