II. ENSEIGNEMENT
Action transversale par excellence, la promotion de l'enseignement français à l'étranger et auprès des étrangers fait l'objet d'un découpage et de restrictions budgétaires contestables en 2006.
Les amendements adoptés par l'Assemblée nationale et proposés par notre collègue M. Adrien Gouteyron au nom de la commission des finances devraient permettre de rendre à ces crédits la place et le niveau qui devraient être les leurs.
A. L'AGENCE POUR L'ENSEIGNEMENT FRANÇAIS À L'ÉTRANGER
Contrairement aux conclusions du rapport de M. André Ferrand sur les financements de l'enseignement français à l'étranger 17 ( * ) , remis au Premier ministre en juin 2004, qui préconisait de « donner à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) les moyens humains et financiers nécessaires à son renforcement », les crédits alloués à l'Agence diminuent de 0,6 % en 2006 passant de 325 millions d'euros en 2005 à 323 millions d'euros en 2006.
a) Une année 2006 marquée par les interrogations concernant les programmes immobiliers de l'Agence
L'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, établissement public créé par la loi du 6 juillet 1990, est chargée d'assurer la gestion de l'ensemble du réseau scolaire à l'étranger constituant, selon M. Cariot, « le plus important de nos acteurs culturels à l'extérieur. Son action est irremplaçable tant dans l'accompagnement des familles françaises expatriées que dans la diffusion de notre culture et de notre langue . »
LE RÉSEAU D'ENSEIGNEMENT FRANÇAIS À L'ÉTRANGER Le réseau d'enseignement français à l'étranger compte des établissements scolaires répartis dans trois catégories distinctes (homologués, conventionnés et en gestion directe). Pour faire partie de ce réseau, un établissement doit avoir demandé et obtenu une homologation de la part du ministère de l'éducation nationale français. Elle n'est accordée que si les conditions établies par le décret 93-1084 du 9 septembre 1993 sont respectées : - ouverture de l'établissement aux enfants français résidant hors de France, - enseignement respectant les programmes applicables dans les établissements d'enseignement public français, - préparation aux mêmes examens et diplômes qu'en France, - contrôle du respect de ces critères par l'Inspection générale de l'éducation nationale. Les établissements conventionnés et en gestion directe sont deux sous-catégories de cet ensemble des établissements homologués qui regroupe plus de 410 établissements dans 128 pays du monde. Les conventionnés (178 établissements) sont des établissements gérés par des associations de droit privé qui décident de passer avec l'agence pour l'enseignement français à l'étranger un accord portant sur les conditions d'affectation et de rémunération des agents titulaires, sur l'attribution de subventions et sur le versement de bourses pour les élèves français. Les établissements en gestion directe (73 au total), sont directement placés sous la tutelle de l'AEFE. Selon leur nature, ces établissements perçoivent des subventions versées par l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger qui assure également la rémunération des personnels titulaires grâce, d'une part, à la subvention qui lui est allouée par l'Etat français, et d'autre part grâce aux remontées que les établissements effectuent d'une partie des droits de scolarité demandés aux familles, droits de scolarité qui constituent une part non négligeable de leurs ressources. Les établissements simplement homologués n'ayant pas passé de convention avec l'agence ne bénéficient pas d'aide directe. Ils sont néanmoins, lorsqu'ils le souhaitent, associés aux actions de formation continue organisées par l'agence et bénéficient du conseil pédagogique des IEN détachés à l'étranger. La tutelle qu'exercent les ambassades est elle aussi fonction de la nature de l'établissement. Elle est très étroite pour les établissements en gestion directe qui dépendent directement de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. Concernant les établissements conventionnés, l'ambassadeur et/ou son conseiller de coopération et d'action culturelle sont membres de droit des conseils de gestion. |
(1) Un réseau bien géré
Le budget prévisionnel pour 2005 de l'Agence est de 589,8 millions d'euros. Il se décompose pour l'essentiel, en recettes, de la subvention du ministère des affaires étrangères évoquée ci-dessus et de recettes propres provenant de la participation des établissements de son réseau à la rémunération des personnels résidents qu'elle y détache 18 ( * ) , à hauteur de 248,7 millions d'euros dans son programme prévisionnel pour 2005.
Votre rapporteur souhaite en premier lieu souligner les résultats satisfaisants obtenus par l'Agence depuis sa création.
Au niveau des effectifs d'abord, ce réseau d'établissements accueille plus de 168 000 élèves, dont 88 000 sont étrangers, ce qui confirme son rôle déterminant dans la diffusion de la culture et de la langue françaises auprès des élèves nationaux.
Au niveau financier, ensuite, puisque celle-ci continue à dégager des excédents au fil des ans : 20 millions d'euros en 2003, 28 millions d'euros en 2004 et 7 millions d'euros en 2005.
(2) Un manque de visibilité concernant les programmes immobiliers
Votre rapporteur s'inquiète toutefois des modalités de financement envisagées pour la mise en oeuvre des programmes immobiliers de l'Agence.
D'une part, alors que le transfert de la compétence immobilière des établissements à gestion directe du ministère des affaires étrangères à l'Agence devrait concerner quinze établissements pour un coût estimé à près de 30 millions d'euros en 2006, aucune subvention d'investissement spécifique n'est inscrite au titre 5 du présent projet de loi de finances.
Ce programme visant à réhabiliter un certain nombre d'établissements, est d'autant plus nécessaire que l'état du réseau est loin d'être exemplaire. Comme l'indiquait le « rapport Ferrand » : « De toutes ses visites sur le terrain (40 établissements sur les 410), la mission garde comme souvenir certes une très grande disparité dans les situations mais surtout des besoins importants. Pour quelques établissements remarquables (Singapour, New York...) ou très corrects, combien d'autres sont peu pratiques, sous-équipés voire non conformes aux normes de sécurité ! Et encore ne s'agit-il que d'une comparaison avec le niveau moyen des établissements publics situés sur le territoire français. Une comparaison rationnelle avec certaines écoles étrangères privées (américaines, britanniques, australiennes...) est hélas, dans la plupart des cas, difficilement envisageable. »
D'autre part, aucune ligne budgétaire ne permet d'identifier le « nouveau programme ambitieux de développement de l'Agence en cours de définition » annoncé par le ministre au cours de la discussion des crédits de la mission « Action extérieure de l'État » à l'Assemblée nationale. En effet, aucune opération immobilière nouvelle n'est programmée en 2006 dans le programme 151 « Français à l'étranger et étrangers en France », seuls étant identifiés dans le programme 105 « Action de la France dans l'Europe et dans le monde » les 6 millions d'euros destinés à la construction du lycée Stendhal de Milan.
D'après les informations fournies à votre rapporteur, le recours au fonds de roulement 19 ( * ) de l'Agence serait envisagé en 2006 pour pourvoir aux charges issues du transfert de la compétence immobilière des établissements à gestion directe. Si cette solution est envisageable à titre transitoire, votre rapporteur souhaite qu'elle ne se traduise pas, in fine, par une hausse des frais de scolarité pour les familles. Plus généralement, il appelle le ministère des affaires étrangères à plus de transparence dans la programmation à venir des opérations immobilières d'envergure financées ou cofinancées grâce aux crédits de son budget.
Il se félicite, enfin, de l'initiative prise par le rapporteur spécial de la commission des finances visant à augmenter la subvention de l'Agence de 1,3 million d'euros.
(3) Un effort poursuivi en matière de bourses
Il convient de rappeler que l'AEFE apporte un soutien non négligeable aux familles françaises modestes par un système de bourses, dont le nombre est en augmentation. Il s'est élevé à 19 839 en 2005 contre 16 503 en 2000, pour un coût de 41 millions d'euros en 2005 contre 35 millions d'euros en 2000.
Le ministre des affaires étrangères a confirmé, lors du débat budgétaire à l'Assemblée nationale que l'effort engagé en ce sens serait poursuivi en 2006 et que la dotation pour les bourses de l'AEFE serait augmentée de 3 %, soit une mesure nouvelle de 1,3 million d'euros. Votre rapporteur regrette toutefois qu'un effort ne soit pas réalisé à destination des élèves étrangers afin de leur permettre de suivre ou de poursuivre leur scolarité au sein de ce réseau.
b) Un changement de nomenclature bienvenu
Notre réseau est un dispositif exceptionnel, fort de 410 établissements, le plus important réseau de ce type dans le monde dont le rôle ne se limite pas à assurer le service public de l'éducation aux expatriés français. Votre rapporteur tient en effet à souligner qu'en accueillant majoritairement des élèves locaux, le réseau demeure une pierre angulaire du rayonnement de la culture et de la langue françaises à l'étranger. Grâce à ces établissements, c'est le rayonnement mondial de notre pays que l'on assure.
Dans ces conditions, votre rapporteur se félicite de l'initiative prise par l'Assemblée nationale visant à faire passer la subvention versée à l'AEFE du programme 151 « Français à l'étranger et étrangers en France » vers le programme 185 « Rayonnement culturel et scientifique ».
* 17 « Financements de l'enseignement français à l'étranger : réagir et s'unir pour un nouvel élan », rapport remis au Premier ministre en juin 2004.
* 18 Recettes propres évaluées à 248,7 millions d'euros dans son programme prévisionnel pour 2005 auxquelles il faut ajouter 1,7 million d'euros au titre de la contribution Länder au fonctionnement des établissements franco-allemands.
* 19 Il était de 38,7 millions d'euros au 30 juin 2005.