IV. L'ACTION CULTURELLE ET ARTISTIQUE

Au sein du ministère des affaires étrangères, c'est la Direction générale de la coopération internationale et du développement qui est chargée de définir la politique artistique et culturelle de la France à l'étranger.

Cette politique est mise en oeuvre par le réseau des services et des établissements culturels français à l'étranger, avec le soutien de l'Association française d'action artistique (AFAA), opérateur commun du ministère des affaires étrangères et du ministère de la culture et de la communication.

A. LE RÉSEAU DES ÉTABLISSEMENTS CULTURELS

Bien que le rapport d'information réalisé par notre collègue Yves Dauge 9 ( * ) ait mis en évidence les faiblesses de cet outil et proposé d'intéressantes voies de réformes, la situation du réseau culturel français semble, année après année, se détériorer.

On assiste en effet à un étrange paradoxe : alors que le ministère souhaite étendre les missions assignées aux différents établissements du réseau, les moyens qui leur sont alloués, victimes d'importantes régulations budgétaires, ne cessent de diminuer.

Pour l'année 2004, les subventions de fonctionnement (titre III) allouées aux établissements culturels et aux instituts de recherche diminueront respectivement de 0,8 % (à 44,09 millions d'euros) et de 1,4 % (à 6,9 millions d'euros).

En revanche, les crédits d'intervention (titre IV) affectés à l'ensemble des établissements du réseau augmenteront de près de 10 % en 2004, passant de 58,8 millions d'euros à 64,7 millions d'euros en 2004.

1. Un réseau dense et diversifié...

Le réseau des établissements culturels français à l'étranger est chargé de mettre en oeuvre, dans les pays de résidence, la politique culturelle de la France dans le cadre des orientations définies par l'Ambassadeur.

Ce réseau comprend :

- 159 centres culturels répartis dans 90 pays, dont 148 établissements à autonomie financière ;

- 26 établissements de recherche ;

- 4 établissements franco-étrangers ;

- 1 135 alliances françaises présentes dans 138 pays dont 223 directement subventionnées par le ministère des affaires étrangères.

Le ministère des affaires étrangères s'est engagé dans la rénovation de ce réseau et dans la définition d'une nouvelle stratégie d'action culturelle associant l'ensemble des acteurs précités. Cette stratégie repose sur deux axes essentiels :

• créer des « centres de coopération et d'action culturelle »

Le ministère souhaite qu'une fonction de coopération soit clairement reconnue aux établissements culturels, afin de permettre à ces derniers de monter des projets de coopération, de multiplier les cofinancements et, le cas échéant, de participer aux appels d'offre des organisations multilatérales.

Dans le même temps, les établissements n'étant pas répartis de manière homogène dans l'ensemble du monde, il souhaite étudier la possibilité de donner aux services de coopération et d'action culturelle une autonomie financière leur permettant de gérer leurs crédits avec souplesse et efficacité.

L'objectif du ministère est d'aboutir, à l'horizon 2005, à la mise en place d'une forme unique d'établissement : des « centres de coopération et d'action culturelle » placés sous l'autorité des ambassadeurs, dotés de l'autonomie financière et investis d'une fonction de coopération, de « médiation » culturelle.

• Améliorer la collaboration entre les établissements et les alliances françaises...

L'ambition du ministère des affaires étrangères est de faire des alliances françaises un relais essentiel de notre action culturelle.

Il convient de signaler que d'importants progrès ont d'ores et déjà été accomplis dans ce sens ces dernières années, grâce à une concertation accrue avec l'Alliance Française de Paris, qui joue un rôle de tutelle des comités locaux, et à l'instauration, entre ces derniers et les ambassadeurs, de nouveaux « contrats de partenariat » soumettant l'aide aux projets des alliances à leur insertion dans le plan d'orientation culturelle du poste et permettant un meilleur contrôle de l'usage des subventions.

2. ...dont les moyens s'amenuisent.

Comme indiqué ci-dessus, les crédits du titre III alloués aux établissements culturels et aux instituts de recherche diminueront respectivement de 341 129 euros et de 100 000 euros.

Cette diminution résulte de deux mesures contradictoires :

- la revalorisation des grilles de rémunérations des personnels locaux (+ 2 millions d'euros) ;

- la rationalisation du réseau des établissements culturels (- 2,4 millions d'euros).

Les établissements culturels et de recherche « participeront donc à hauteur de 2,4 millions d'euros à l'objectif gouvernemental de réduction de la dépense publique » selon la formule employée par les services compétents du ministère des affaires étrangères dans la réponse aux questionnaires envoyés par votre rapporteur.

Il convient de rappeler que cette « participation » ne fait que s'ajouter à celles réalisées par ces établissements dans le cadre des régulations budgétaires successives.

En effet, votre rapporteur tient à souligner l'importance des régulations budgétaires qui ont frappé le réseau au cours des années écoulées, privant celui-ci des moyens financiers sensés lui permettre de relayer l'action culturelle de notre pays à l'étranger.

Ainsi, pour l'année 2002, 5 % des crédits inscrits au titre III et 20 % de ceux inscrits au titre IV ont été gelés. De même, en 2003, ces gels se sont élevés à 1 % des crédits du titre III et à 18 % de ceux du titre IV .

Dans ces conditions, votre rapporteur s'interroge sur l'opportunité de pénaliser une fois de plus un réseau qui, privé de moyens d'intervention à force de régulations budgétaires, ne sera bientôt plus qu'une coquille vide.

B. L'ASSOCIATION FRANÇAISE D'ACTION ARTISTIQUE

Pour mettre en oeuvre une politique artistique dynamique permettant de contribuer au développement de filières culturelles pérennes et d'établir des partenariats entre artistes et responsables culturels français et étrangers, la sous-direction de la coopération culturelle et artistique dispose d'un opérateur-relais, l'Association française d'action artistique (l'AFAA), auxquels sont délégués chaque année des crédits importants.

Les missions de l'association ont été redéfinies en 2000 et ont fait l'objet d'une convention entre l'Etat, représenté par les deux ministères concernés, et l'AFAA. Cette convention fixe les priorités suivantes :

- promouvoir la culture française à l'étranger ;

- privilégier les actions de coopération ;

- favoriser le développement culturel ;

- assurer un appui au réseau culturel français à l'étranger, en expertise, information, soutien logistique, formation et financement ;

- contribuer à la réciprocité des échanges culturels ;

- développer des opérations d'ingénierie culturelle ;

- développer le partenariat avec les collectivités territoriales.

De plus, une note annuelle d'orientation budgétaire, rédigée par la Direction générale de la coopération internationale et du développement (DGCID) en accord avec le ministère de la culture et de la coopération (MCC), fixe les objectifs pour l'année en cours. Le suivi des opérations est désormais facilité grâce aux tableaux géographisés et chiffrés que l'AFAA établit conformément à la demande formulée par le département dans sa note d'orientation 2003.

1. Les missions prioritaires de l'AFAA en 2003

a) Soutenir la programmation des postes diplomatiques

L'AFAA est chargée d'élaborer, en concertation avec les postes diplomatiques, des programmes pluriannuels par zone géographique ou aire de civilisation répondant aux thématiques et aux orientations définies par ses ministères de tutelle en matière de diffusion, d'échanges et de coopération culturels.

La Direction de la coopération culturelle et du français a engagé un processus de réflexion visant à généraliser, dans les années à venir, cette politique de « programmes » qui s'inscrit dans le schéma d'organisation de la prochaine application de la loi organique relative aux lois de finances.

Par ailleurs, l'Agence soutient les initiatives des postes diplomatiques dans le domaine de la coopération artistique (échanges entre écoles d'art, organisation de conservatoires itinérants), de l'ingénierie et du développement culturel (organisation et éventuelle prise en charge de missions d'experts). Elle met à leur disposition une expertise de l'offre culturelle française via son Centre de ressources, ses publications, son site Internet et ses fiches spectacles établies après concertation avec des commissions spécialisées réunissant des professionnels de chacune des disciplines artistiques.

Enfin, elle participe au fonctionnement des bureaux artistiques spécialisés (musique, arts plastiques) au Royaume-Uni, en Allemagne, au Japon, aux Etats-Unis, au Brésil et au Mexique et met en place des fonds spécialisés de soutien à la diffusion des oeuvres de jeunes créateurs (Etats-Unis, Asie), avec le concours de crédits publics et privés, tant français qu'étrangers.

b) Assurer la présence française dans les grandes manifestations artistiques internationales

L'AFAA assure la présence française dans les grandes manifestations artistiques internationales selon les priorités définies lors des réunions de cadrage sectoriel avec les différentes directions du ministère de la culture et de la communication et la Direction de la coopération culturelle et du français du ministère des affaires étrangères. 11 ( * )

c) Participer à des programmes de développement

Dans le cadre de la mission de développement culturel qui lui est assignée, l'AFAA soutient la promotion et la diffusion internationales des expressions culturelles des pays de la Zone de solidarité prioritaire.

A partir de sa fusion, le 1 er janvier 2000, avec l'association « Afrique en créations », l'AFAA a été chargée de la mise en oeuvre du programme de soutien à la création contemporaine africaine financé par le Fonds de solidarité prioritaire (FSP). Ce programme, qui s'est achevé en 2003, a permis un effet de levier sur la mobilisation des financements extérieurs qui a conduit au doublement du budget initial. Un nouveau projet FSP mobilisateur « appui aux expressions artistiques des pays de la ZSP » vient d'être mis en place.

Ses principales composantes sont les suivantes :

- renforcement des capacités professionnelles des opérateurs et des collectivités territoriales ;

- renforcement des capacités professionnelles des artistes et des différentes filières ;

- appui aux manifestations structurantes ;

- management du projet (expertise, évaluation).

d) Organiser les saisons culturelles étrangères en France et françaises à l'étranger

L'AFAA est l'opérateur du ministère des affaires étrangères et du ministère de la culture et de la communication pour la mise en oeuvre des saisons culturelles étrangères en France, manifestations décidées au plus haut niveau de l'Etat qui, dans un souci de réciprocité, permettent au pays invité de « présenter les différentes facettes de sa culture, d'en approfondir ou d'en renouveler la perception ». Le bureau des saisons, mis en place par l'AFAA, aide les commissariats français et étrangers à monter les projets qu'ils ont sélectionnés et les met en relation avec les opérateurs culturels français et les vingt-cinq collectivités territoriales avec lesquelles l'association a signé des conventions de partenariat. Elle gère le budget consacré par ses ministères de tutelle à ces opérations, la contribution financière étrangère au budget commun de communication et de soutien aux projets et les fonds issus du mécénat qu'elle a pour mission de rechercher.

Les saisons culturelles, financées à part égale par le ministère des affaires étrangères et le ministère de la culture et de la communication, sont un exemple de l'articulation de l'action des deux ministères. L'accueil en France des cultures étrangères, qui fait partie des missions du ministère de la culture et de la communication devient ainsi un instrument efficace de la diplomatie culturelle mise en oeuvre par le ministère des affaires étrangères.

Cependant, compte tenu du coût financier de ces saisons et de leur fréquence, qui en réduit l'impact médiatique, les ministres de la culture et des affaires étrangères ont demandé que plus aucun engagement de ce type ne soit pris avec nos partenaires étrangers. Un nouveau format, plus ciblé et d'une durée limitée, sera mis à l'étude pour l'accueil des cultures étrangères en France dans un cadre officiel.

CALENDRIER DES SAISONS ÉTRANGÈRES EN FRANCE

2003 : Djazaïr, année de l'Algérie

2003-2004 : Année de la Chine

De juin à décembre 2004 : Saison polonaise

2005 : Année du Brésil

De plus, l'AFAA a en charge, selon les mêmes modalités, l'organisation des années ou saisons culturelles françaises à l'étranger (année de la France en Chine en 2004-2005, journées françaises en Ukraine en 2004) et contribue à la participation française dans les grands événements internationaux (tricentenaire de Saint-Pétersbourg en 2003).

2. Les moyens et perspectives

Le budget primitif de l'AFAA s'est élevé à près de 21,78 millions d'euros . Il avait été prévu de maintenir la subvention du Département à hauteur de celles attribuées en 2001 et 2002 (15 008 605 euros) et de ne pas répercuter la baisse de 2,6 % des crédits de la DGCID, principalement en raison du poids budgétaire que représente l'organisation d'importantes saisons culturelles étrangères en France, en cours ou en préparation (Algérie, Chine, Pologne, Brésil).

Le gel de 18 % des crédits de la DGCID intervenu en cours d'année aurait conduit à diminuer cette subvention de 2,7 millions d'euros, alors même qu'il était demandé à l'AFAA de faire un effort supplémentaire pour les saisons algérienne (+ 0,1 million d'euros) et chinoise (+ 0,15 million d'euros) sur la subvention du ministère des affaires étrangères. Par décision du ministre, ce gel a été réduit à 0,7 million d'euros.

Le budget modifié pour 2003 s'élève désormais à 22,8 millions d'euros, soit une augmentation de 1 million d'euros par rapport au budget primitif due essentiellement à l'intégration des reports de crédits 2002 qui, techniquement, ne peuvent figurer dans le budget primitif. On note par ailleurs un apport supplémentaire de 0,1 million d'euros du ministère de la culture et de la communication, destiné à l'Année de l'Algérie, correspondant à l'effort demandé, en cours d'année, à l'AFAA sur la subvention du ministère des affaires étrangères puisque les deux ministères co-financent ces manifestations.

Ce budget intègre la première tranche du nouveau FSP « Appui aux expressions artistiques de la ZSP » (1,15 million d'euros) dont une grande partie de la mise en oeuvre a été confiée à l'AFAA dans la continuité du projet « Afrique en créations ».

Les frais de personnel représentent 17,5 % du budget modifié et l'ensemble des charges de structures (personnel, charges locatives, fonctionnement, etc.) 24,3 %.

Compte tenu des problèmes posés à l'association par le gel, en milieu d'exercice, d'une partie de la subvention 2003 du Département (2,7 millions d'euros envisagés ; 0,7 million d'euros effectivement gelés après arbitrage du ministère des affaires étrangères ), les ministères des affaires étrangères et de la culture et de la communication sont convenus d'engager une réflexion qui conduira à substituer à cette convention un « Contrat triennal d'objectifs et de moyens » qui permettra de prendre en compte les évolutions intervenues au cours des trois dernières années. Un audit de l'association précédera l'élaboration de ce contrat.

La note d'orientation 2004 sera établie en tenant compte des objectifs qui seront fixés dans les différentes disciplines artistiques lors des quatre réunions sectorielles prévues en septembre avec les différentes directions du ministère de la culture. Il sera demandé, en particulier, à l'AFAA, de poursuivre la mise en oeuvre de programmes pluriannuels par zone géographique ou aire de civilisation et, conformément aux décisions du Premier ministre, d'apporter une attention spéciale à la promotion à l'étranger de la création artistique dans la région Nord-Pas-de-Calais, dans le cadre de l'opération « Lille 2004, capitale européenne de la culture » (contribution du ministère des affaires étrangères fixée à 1 million d'euros).

L'AFAA aura aussi pour mission, en 2004, la coordination et la gestion de l'Année de la Chine en France et de la saison polonaise ainsi que la préparation de l'Année du Brésil (2005) qui pèseront lourdement sur son budget. Dans le même temps, elle aura à mettre en oeuvre et à gérer, en étroite collaboration avec le commissariat français, l'Année de la France en Chine (2004-2005). Cette opération nécessitera un financement public estimé à 10 millions d'euros.

* 9 10 Cf. rapport d'information de M. Yves Dauge, au nom de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale, sur les centres culturels français à l'étranger (n°2924,2000-2001).

* 11 En 2003, l'accent a été mis sur les manifestations suivantes : Tricentenaire de Saint-Pétersbourg, opération « France Danse » au Japon, 40 e anniversaire du Traité de l'Elysée, Bicentenaire de Berlioz, Biennales des arts plastiques de Venise, Berlin, Cuba et Istanbul, Biennale de la Photographie de Bamako, Rencontres chorégraphiques de l'Afrique et de l'Océan indien à Tananarive, Biennale d'architecture de Sao Paulo, 1 re Mostra internationale d'architecture de Rio, 1 re Biennale d'architecture de Rotterdam, foires d'art contemporain de Chicago, New-York ; Bâle et Cologne, principaux festivals internationaux des arts de la scène.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page