II. LE MALAISE DE LA GENDARMERIE
A. UNE ACTIVITÉ SOUS TRÈS FORTE TENSION
Les
statistiques d'activité de la gendarmerie en 2000 (101 000 000 heures
dont plus de la moitié consacrée à la défense
civile) n'enregistrent pas de variation majeure par rapport à
l'année précédente. Toutefois l'année 2001 devrait
être marquée par un surcroît de charges lié à
l'implication de la gendarmerie dans le cadre du passage à l'euro et du
plan Vigipirate. Au-delà de ces facteurs de caractère
conjoncturel, les données chiffrées ne doivent pas dissimuler les
profondes mutations auxquelles l'Arme se trouve confrontée dans
l'exercice de ces missions depuis au moins une décennie.
Ces évolutions reflètent pour une large part les transformations
de la société française : urbanisation, augmentation
de la population dans certaines zones autrefois consacrées aux seules
activités agricoles ou, au contraire, désertification de
territoires entiers. Si le cadre d'action de la gendarmerie s'est
modifié, l'échelle de ses interventions s'est également
élargie et doit prendre en compte de plus en plus la dimension
internationale : renforcement de la sécurité
intérieure au sein de l'Union européenne ou opérations de
maintien de la paix.
1. Les facteurs conjoncturels de l'accroissement des charges
.
L'implication de la gendarmerie dans le passage à l'euro fiduciaire
en 2002
Le passage à l'euro et l'importance des transferts de fonds qu'il
suscitera soulèvent un problème majeur de sécurité
publique. C'est pourquoi la gendarmerie, aux côtés de la police
nationale, connaîtra une mobilisation exceptionnelle des derniers mois de
2001 jusqu'à la fin février 2002, mais surtout entre le 15
décembre et le 15 janvier, période au cours de laquelle ses
moyens sont déjà traditionnellement très sollicités.
La contribution de l'Arme portera principalement sur quatre types de
missions :
- les escortes de transports de fonds ; certaines seront partagées
avec la police (transferts entre la Banque de France et les centres forts des
transporteurs de fonds, escortes de train entre les centres nationaux de
stockage et les centres départementaux de stockage), d'autres prises en
charge exclusivement par la gendarmerie (acheminement de toute la monnaie vers
les départements et collectivités territoriales d'outre-mer et
acheminement des billets vers les succursales de la Banque de France).
- les surveillances particulières au profit de succursales de la Banque
de France et des centres forts des transporteurs de fonds.
- la sécurité publique générale (surveillance de
quelque 50 000 établissements -banques, postes, Trésors
publics...- mais aussi des commerces sensibles -buralistes- ou des personnes
vulnérables).
- les missions de police judiciaire (protection contre le faux-monnayage et
lutte contre le blanchiment d'argent sale).
Par ailleurs, un plan d'action « formation euro » fixe
l'obligation pour tous les personnels de la gendarmerie de recevoir une
formation à l'euro
avant fin 2001 sous trois formes :
- formation générale sur le calendrier de mise en place et sur
les pièces et billets pour pouvoir renseigner les usagers ;
- formation spécifique avec mise en condition opérationnelle
organisée par le groupement de sécurité et d'intervention
de la gendarmerie nationale (GSIGN) à Versailles et par le centre
national d'entraînement des forces de gendarmerie (CNEFG) à
Saint-Astier pour les personnels effectuant les escortes ;
- formation à la lutte contre le faux-monnayage pour les unités
spécialisées en police judiciaire, en commun avec leurs
homologues de la police nationale.
Enfin, la gendarmerie s'est dotée de
matériels
spécifiques
: véhicules Expert, 206, Land Rover
blindées, casques, masques à gaz et gilets pare-balles
supplémentaires pour les personnels de la gendarmerie
départementale ; moyens de communication Rubis et GPS
destinés à assurer un suivi constant et précis des convois
par la chaîne de commandement gendarmerie.
Au plan opérationnel, les missions d'escorte de pièces ont
débuté dès le mois de juin 2001. A la fin du mois
d'octobre 2001, près de
10 000 gendarmes
auront été
employés sur les missions d'escorte, de garde, de sécurité
des transbordements, de sécurisation des itinéraires ou de
pilotage des convois.
A la fin des opérations -vers la mi-février 2002, lorsque la
remontée des francs aura été assurée-
65 000
gendarmes
auront, au total, participé aux diverses missions
liées à la mise en place de l'eurofiduciaire.
Le coût global est estimé à
13,20 millions d'euros pour
l'équipement et à 18,7 millions d'euros pour le fonctionnement
(dont 14,8 millions d'euros pour le versement d'une indemnité
forfaitaire exceptionnelle de 230 euros à 65 000 militaires de la
gendarmerie afin de compenser le surcoût d'activité lié
à la mise en place de l'eurofidiciaire).
.
La mobilisation de la gendarmerie dans le plan Vigipirate
Le plan Vigipirate renforcé ne s'est pas traduit par la mise en place de
moyens spécifiques dans la mesure où les missions de
sécurité intérieure constituent la vocation
première de la gendarmerie. Il s'est accompagné, en reanche,
d'une mobilisation accrue des personnels et du renforcement du dispositif de
sécurité autour de certains lieux
« sensibles ».
Ainsi la gendarmerie participe plus particulièrement au
côté d'autres formations :
- à la sécurité des aérodromes (300 en zone de
gendarmerie nationale) et des emprises aéroportuaires nationales. La
gendarmerie des transports aériens (1 060 personnels) a renforcé
les mesures de sécurité sur les 30 sites aéroportuaires
où elle est présente. Elle est, par ailleurs, soutenue dans cette
mission par des personnels du groupement blindé de la gendarmerie mobile
et, ponctuellement, par les gendarmes du GSIGN et de la Garde
Républicaine. La surveillance des autres aérodromes est
assurée par les personnels des compagnies de gendarmerie
départementale.
- à la sécurité extérieure des centrales
nucléaires (19 sites sur le territoire national) et à la
recherche du renseignement dans le aires spéciales de surveillance. Les
pelotons de surveillance et d'intervention (20) des zones concernées,
assurent une surveillance continue de ces sites et maintiennent une
réserve d'intervention (250 gendarmes par jour).
- à la sécurité extérieure et intérieure de
sites nucléaires de l'armée (8 sites). La gendarmerie de l'air (1
027), la gendarmerie maritime (1 175) et la gendarmerie de la
sécurité des armements nucléaires effectuent de
manière continue la surveillance de ces sites militaires.
- à la sécurisation des lignes SNCF et des transports urbains
dans le cadre de contrats locaux de sécurité (14) et notamment
dans les départements : Oise, Seine et Marne, Essonne, Nord-Pas de
Calais.
Par ailleurs, depuis la mise en place du plan Vigipirate renforcé, les
personnels de l'escadron de protection et d'intervention de la gendarmerie
nationale ont été amenés à intervenir plus
fréquemment pour des missions préventives et, notamment, des
fouilles de sites (chiens spécialisés).
Enfin, la gendarmerie départementale est intervenue à de
nombreuses reprises en protection des biens et des personnes pour de nombreuses
fausses alertes à la bombe, alertes à la poudre blanche,
dégradation de biens publics et vols de bouteilles de gaz.
L'augmentation du nombre d'enquêtes judiciaires suite à des
signalements suspects est elle aussi significative.
2. Les tendances structurelles à l'alourdissement des missions dans un contexte marqué par l'aggravation de la délinquance
Depuis plusieurs années, le champ d'action de la gendarmerie s'est élargi à de nouvelles missions. La part prise par l'Arme dans la sécurité des zones sensibles et dans les opérations de maintien de la paix apparaissent comme deux volets très différents des profondes évolutions qui concourent à façonner un nouveau visage de la gendarmerie. Dans le même temps, la gendarmerie doit poursuivre ses missions traditionnelles, essentielles, en particulier pour la sécurité des zones rurales. Il lui faut ainsi trouver un nouvel équilibre entre des responsabilités désormais très diverses.
a) Les responsabilités de l'Arme dans les zones sensibles
L'alourdissement des charges a pour arrière-plan l'augmentation en 2000 du nombre de crimes et délits constatés en particulier dans la zone de compétences de la gendarmerie (+ 9,45 %). Les statistiques font apparaître en particulier une recrudescence des affaires de stupéfiants (+ 15,5 %) et des vols (+ 10,36 %).
|
Police nationale |
Gendarmerie nationale |
Total tous services |
||||||
Faits constatés |
1999 |
2000 |
Variation |
1999 |
2000 |
Variation |
1999 |
2000 |
Variation |
Total des crimes et délits |
2 678 907 |
2 798 906 |
+ 4,48 % |
888 957 |
972 943 |
+ 9,45 % |
3 657 864 |
3 771 849 |
+ 5,72 % |
Délinquance de voie publique |
1 475 185 |
1 467 671 |
- 0,51 % |
424 096 |
469 838 |
+ 10,79 % |
1 899 281 |
1 937 509 |
+ 2,01 % |
Les
éléments dont on dispose pour le premier semestre 2001 ne
laissent pas d'inquiéter : ils montrent en effet une hausse des
infractions de l'ordre de 9,5 % en moyenne, dont 17,7 % dans la zone de
gendarmerie.
L'évolution de la délinquance dans la zone de compétence
de la gendarmerie s'explique dans une large mesure par l'augmentation de la
population, passée en dix ans de 11,9 millions d'habitants à 13
millions d'habitants, soit une progression de 8,7 % entre 1990 et 1999.
Du fait de l'urbanisation progressive de certains espaces ruraux, la
gendarmerie se trouve confrontée, dans ses zones de compétence
traditionnelles, aux formes, relativement nouvelles pour elle, d'une
criminalité propre aux villes et à leurs banlieues.
.
Le dispositif de la gendarmerie départementale dans les zones
sensibles
La gendarmerie compte 946 brigades en zone périurbaine, soit 26 %
des brigades territoriales réparties en trois catégories :
- 85 brigades territoriales très sensibles ;
- 100 brigades territoriales sensibles ;
- 761 brigades périurbaines normales.
Ces unités présentent plusieurs traits communs :
- en premier lieu, elles représentent
plus de la moitié des
crimes
et délits
constatés par la
gendarmerie.
|
BT périurbaines très sensibles |
BT périurbaines sensibles |
BT périurbaines normales |
Moyenne nationale des BT |
Crimes et délits totaux constatés par militaire |
59 |
44 |
28 |
26 |
Crimes et délits de voie publique constatés par militaire |
39 |
27 |
15 |
13 |
Ensuite, elles disposent d'effectifs renforcés . Ainsi, si le ratio général effectif/population en zone de gendarmerie est de un gendarme pour 1000 habitants, il a été relevé à 1 pour 900 pour les brigades périurbaines normales et à 1 pour 800 pour les brigades périurbaines sensibles et très sensibles.
|
Nombre |
Effectif professionnel |
Effectif non-professionnel |
Total |
BT périurbaines très sensibles |
|
|
|
|
BT périurbaines sensibles |
100 |
1 774 |
280 |
2 054 |
BT périurbaines normales |
761 |
8 603 |
1 339 |
9 942 |
Total BT périurbaines |
946 |
12 215 |
1 885 |
14 100 |
Les
renforcements d'effectif ont pour une très large part reposé,
depuis 1998, sur des redéploiements ou sur la substitution de
sous-officiers par des gendarmes adjoints dans les unités les moins
chargées. Alors que ce processus atteint aujourd'hui ses limites, les
unités périurbaines enregistrent encore un véritable
déficit d'effectifs.
Par ailleurs, la rémunération d'une partie des personnels des
unités périurbaines tient compte des contraintes
particulières liées aux missions de sécurité dans
les zones sensibles. D'une part, la
nouvelle bonification
indiciaire
au titre de la politique de la ville se traduit par
l'attribution de 30 points d'indice supplémentaires pour les commandants
de brigade, 20 points pour les autres gradés et 10 points pour les
gendarmes. En outre, les militaires de la gendarmerie devraient prochainement
bénéficier de
l'avantage spécifique
d'ancienneté
attribué aux personnels après trois
ans de service dans une unité compétente dans un quartier
difficile.
Toutefois, ce dispositif apparaît limité : d'une part, il ne
procure qu'un
avantage comparatif modeste
par rapport aux
rémunérations obtenues dans les autres unités, d'autre
part,
il ne s'applique pas à l'ensemble des unités sensibles
dans la mesure où la carte des zones périurbaines,
définies par la gendarmerie avant tout sur des critères
opérationnels, dépasse celle de la politique de la ville qui
ouvre droit à des avantages spécifiques.
L'organisation de la gendarmerie
a dû tenir compte de certaines
spécificités de son action dans les zones périurbaines.
Ainsi la coordination des unités s'effectue dans le cadre des
bassins
de délinquance
pour lesquels sont instituées des zones
d'intervention opérationnelle prioritaires. Elle privilégie la
capacité de regroupement et la mutualisation des moyens.
La spécificité des zones périurbaines a également
justifié la création d'une nouvelle structure, la
brigade
départementale de prévention de la délinquance
juvénile
(BPDJ). Quarante unités de ce type ont
été créées à ce jour. Elles
réunissent chacune 6 militaires : 1 adjudant, 1 maréchal des
logis chef et 4 gendarmes comprenant au moins un formateur relais antidrogue et
une femme. Ces personnels sont tous volontaires et rigoureusement
sélectionnés. Les brigades départementales de
prévention de la délinquance juvénile ont avant tout une
vocation préventive
fondée sur un contact régulier
avec les jeunes et le partenariat avec d'autres acteurs institutionnels. Quatre
brigades comptent dans leurs rangs des officiers de police judiciaire
habilités à l'exercice des attributions liées à
cette qualité. Dès lors, dans ces unités, les
activités de police judiciaire -de 60 à 80 % du temps de travail-
tendent à supplanter les missions de prévention. Cette
évolution traduit à la fois un besoin spécifique pour
lequel les structures traditionnelles ne sont pas toujours les mieux
adaptées mais aussi une dérive au regard du rôle initial
des BPDJ.
Une circulaire ministérielle d'avril 2001 a cherché à
recentrer l'activité des brigades sur leur rôle préventif,
mais elle maintient, en matière judiciaire, l'audition des mineurs
victimes et la participation à certaines enquêtes (recherches,
renseignements, contact avec la population dans le cadre d'une enquête).
.
Une pression particulière sur la gendarmerie mobile
Le Conseil de sécurité intérieure du 19 avril 1999 a
décidé de réorienter l'action d'une partie des forces
mobiles (escadrons de gendarmerie mobile -EGM-, compagnies républicaines
de sécurité) au profit des zones urbaines et périurbaines
les plus sensibles.
Les escadrons ne sont placés ni sous réquisition, ni sous le
régime de la demande de concours. Ils agissent sur ordre du
ministère de la défense pour assurer, dans les zones sensibles
fortement urbanisées, des missions de deux types : d'une part, la
surveillance générale ; d'autre part, les services d'ordre ou
d'intervention ponctuelle de sécurité publique. Aux neuf
escadrons engagés dans les départements de la Gironde, de
l'Isère, de Loire-Atlantique, de l'Oise, du Pas-de-Calais, du Bas-Rhin,
de Seine-et-Marne, des Yvelines, du Val d'Oise, se sont ajoutés, en
2001, trois escadrons en Eure-et-Loir, dans l'Hérault et le Var.
Le cadre et les conditions d'emploi des escadrons ont été
clarifiés en 2000 : les unités peuvent être
employées au-delà des missions de sécurisation
à
titre exceptionnel
pour des opérations de maintien de l'ordre ou, en
soutien, pour assurer les tâches et servitudes liées au
fonctionnement de la justice ainsi qu'à la police des étrangers.
Bien qu'il soit toujours difficile d'apprécier l'impact d'une action
principalement préventive, la présence des escadrons dans les
zones concernées a généralement suscité la
satisfaction des élus et de l'opinion.
Cependant, la fidélisation soulève encore deux
interrogations :
- en premier lieu, la
répartition des escadrons
-2/3 en zone de
police nationale, 1/3 en zone de gendarmerie- provoque un
déséquilibre de la présence policière
et une
progression de la délinquance dans les zones de gendarmerie. Du reste,
les préfets de l'Isère et de l'Oise ont choisi de conserver le
principe initial d'une répartition par moitié entre chacune des
deux zones.
- ensuite, la nouvelle charge liée à la fidélisation
interdit aux personnels de bénéficier des jours de repos et
permissions auxquels ils peuvent prétendre. La
réduction de la
durée de la mission
ramenée de 6 à 4 mois devrait
cependant permettre de mieux répartir la charge sur l'ensemble des
unités et de limiter l'usure des personnels.
D'une manière générale, la fidélisation aggrave le
suremploi
de la gendarmerie mobile observé depuis plusieurs
années.
Le nombre de jours de déplacement est ainsi passé de 204 en 1999
à 214 en 2000 et, sans doute, 224 en 2001 -alors qu'une saine gestion
conduirait à limiter ce nombre à 180. Cette évolution
apparaît préoccupante à plusieurs titres :
- elle réduit -en particulier lors de la période estivale-
le
nombre d'escadrons disponibles
pour exercer, à la demande du
gouvernement, des missions de sécurité publique. L'affectation de
trois unités supplémentaires en fidélisation aura ainsi
pour effet de supprimer de fait les capacités de réserve
gouvernementale de la gendarmerie mobile ;
- elle fait peser une
pression constante
sur les personnels dont les
droits statutaires à repos et permission sont sérieusement
affectés ;
- enfin, les conditions d'emploi pèsent sur le
temps
consacré
à la formation
, indispensable pourtant pour
préserver la capacité opérationnelle des unités, en
particulier dans le cadre des opérations de maintien de l'ordre. Alors
que chaque escadron bénéficie en principe de quatre semaines de
neutralisation pour la formation à la résidence ou en camp entre
mi-septembre et mi-juin, aucune unité n'a pu en pratique consacrer plus
de vingt jours à la formation. L'instruction, investissement capital
pour le maintien de la capacité opérationnelle, a ainsi
été reléguée au rôle de
variable
d'ajustement
.
Bilan de la formation (en jours/escadron) effective par les régions de gendarmerie mobile
Légion de gendarmerie mobile d'Ile de France |
20 |
Légion de gendarmerie mobile de Bordeaux |
16 |
Légion de gendarmerie mobile de Rennes |
19 |
Légion de gendarmerie mobile Lyon |
19 |
Légion de gendarmerie mobile de Marseille |
16 |
Légion de gendarmerie mobile de Metz |
15 |
Légion de gendarmerie mobile de Villeneuve d'Ascq |
17 |
A la
suite d'un audit réalisé en 2000, certaines améliorations
ont été apportées à compter du 1
er
mars
2001 à l'organisation et à l'équipement de la gendarmerie
mobile :
-
l'articulation des escadrons de gendarmerie mobile a été
modifiée.
En effet, face aux nouvelles menaces de troubles à
l'ordre public, caractérisées par une dispersion et une
mobilité accrues de petits groupes violents et parfois
coordonnés, les escadrons articulés jusqu'à présent
en trois pelotons adopteront désormais une structure quaternaire ;
- les
équipements des personnels
ont été
renforcés par des bâtons de protection à double
poignée latérale -en remplacement du FAMAS- et par de nouveaux
moyens de mobilité.
Ces adaptations ne paraissent cependant pas à la mesure des
difficultés rencontrées par la gendarmerie nationale.
b) Le poids des responsabilités hors de nos frontières
Au
1
er
août 2001, la gendarmerie comptait
1.028 militaires
à l'étranger.
Les contingents les plus importants (158 en
Bosnie, 215 au Kosovo) témoignent de l'engagement croissant de l'Arme
dans les opérations de maintien de la paix.
Cette ouverture sur l'extérieur représente une chance pour le
rayonnement du modèle français de sécurité, mais
aussi une charge supplémentaire à l'heure où la
progression des effectifs suffit à peine à satisfaire les besoins
de sécurité intérieure. Or, ces nouvelles missions
risquent de peser davantage encore à la suite de la mise en place d'une
force de police européenne
dont le principe a été
arrêté par le Conseil européen de Feira, au Portugal, en
juin 2000.
En ambassade |
12 |
Renfort sécurité au profit des représentations diplomatiques françaises (dont Algérie : 99) |
448 |
En coopération militaire technique |
86 |
En mission OTAN |
190 |
En mission ONU |
188 |
En prévôté temporaire |
6 |
En prévôté permanente |
75 |
Divers |
23 |
TOTAL |
1028 |
.
L'engagement de la gendarmerie au Kosovo
Les missions classiques de la gendarmerie -et, en particulier,
l'expérience acquise par la gendarmerie mobile en matière de
maintien de l'ordre- la destinent à jouer un rôle
privilégié dans les opérations de rétablissement et
de maintien de la paix dont le nombre s'est multiplié au cours de la
dernière décennie.
L'engagement de la gendarmerie au Kosovo -quelque 158 militaires- illustre les
différents modes d'action de l'Arme dans ce type d'opérations.
Elle intervient au sein de la KFOR, de la MINUK, mais aussi de la mission
française d'appui au tribunal pénal international.
-
Le dispositif déployé au sein de la KFOR
Le transfert de compétences de l'OTAN à l'ONU et la
priorité reconnue aux missions de maintien de l'ordre a conduit à
réorganiser le détachement gendarmerie a sein de la brigade
multinationale Nord.
Au sein de la KFOR, la gendarmerie est représentée par 9
officiers et 129 sous-officiers répartis entre diverses
composantes : d'une part, des experts intégrés aux
Etats-majors (6 officiers et sous-officiers), d'autre part, un
détachement de manoeuvre. Celui-ci comprend trois éléments
distincts :
1° Un escadron de gendarmerie mobile chargé d'assurer en
priorité des missions de maintien de l'ordre, mais aussi certaines
missions secondaires telles que la recherche de renseignement, la
sécurisation, l'îlotage, les contrôles routiers et les
escortes de convois. Dans le cadre des interventions de maintien de l'ordre,
cette unité est placée sous les ordres d'un officier
supérieur de gendarmerie responsable du commandement des unités
de maintien de l'ordre de la Brigade multinationale Nord, dont fait
également partie la compagnie de réserve opérationnelle de
l'armée de terre.
2° Un peloton de gendarmerie de surveillance et d'investigation.
3° 15 sous-officiers intégrés dans les brigades
prévôtales adaptées aux unités de l'armée de
terre déployées au Kosovo et en Macédoine
5(
*
)
.
-
Le dispositif déployé au sein de la mission de police
civile de l'ONU
Les personnels -78 officiers et sous-officiers-
expérimentés et aptes à travailler en langue anglaise,
sont insérés dans l'état-major principal et les
différents détachements de police. Ils ont d'abord vocation
à assumer l'ensemble des missions de police sur le Kosovo avant
d'exercer les missions traditionnelles de police civile internationale
(contrôle, formation et Conseil des polices locales).
- L'engagement au profit du tribunal pénal international pour
l'ex-Yougoslavie
La gendarmerie met à la disposition du tribunal pénal deux
experts en police scientifique et technique, ainsi qu'une équipe de
gendarmes spéléologues dans le cadre de missions de courte
durée (enquêtes sur les crimes de guerre).
Comme en témoigne la part prise par la gendarmerie au Kosovo, les
opérations de maintien de la paix intègrent de plus en plus,
au-delà des aspects proprement militaires, les
missions liées
à la sécurité intérieure
, indispensables dans
la perspective de restauration de l'Etat de droit.
Ces évolutions ont conduit à
mieux définir les liens
entre la gendarmerie et l'armée de terre
. Le rôle respectif
des deux forces a pu, en effet, donner lieu à des interprétations
divergentes. Il obéit désormais au principe mis en avant dans la
doctrine interarmées, d'emploi des forces en opérations :
« le bon effet, par le moyen adéquat, dans le meilleur cadre
espace-temps ». La complémentarité des dispositifs
gendarmerie et réserve de terre doit répondre à un
usage gradué
des forces :
- l'armée de terre représente le
dispositif de puissance
qui, après avoir contribué au contrôle global du terrain,
empêche le retour à l'affrontement général et
à des agressions de haute intensité ;
- la composante gendarmerie est déployée au plus tôt dans
le sillage du dispositif militaire de puissance pour assurer la
restauration
de la sécurité
publique (protection des personnes et des
biens, maintien de l'ordre, police judiciaire et renseignement d'ordre
général).
Les phénomènes de foule peuvent poser des problèmes de
frontières délicats. S'ils relèvent en priorité des
unités de gendarmerie, plus familières que l'armée de
terre du maintien de l'ordre, il est apparu nécessaire de doter les
unités de l'armée de terre de capacités d'autoprotection
afin de contenir les foules en attendant les unités policières
spécialisées. Par ailleurs, les risques de dérive
liés à l'emploi d'armes à feu doivent provoquer le
désengagement de la gendarmerie et la mise en place d'un dispositif
« armée de terre » mieux à même de
répondre à un niveau de violence de haute intensité.
.
Une force de police européenne
Le Conseil européen de Feira, réuni en juin 2000, a
décidé la mise en place d'une
force de police professionnelle
de 5.000 hommes dont 1.000 seraient projetables dans un délai de
30 jours.
Le Conseil européen de Nice, en décembre 2000, a retenu deux
concepts génériques d'emploi des forces de police :
- le renforcement des polices locales par des actions de formation,
d'entraînement, d'assistance, de contrôle et de conseil ;
- la restauration de la sécurité publique en substitution des
polices locales défaillantes et la réactivation des organes
judiciaires.
Une conférence ministérielle d'engagement de capacités en
matière de police s'est réunie à la fin du mois de
novembre sous présidence belge. Notre pays a confirmé à
cette occasion sa contribution globale de l'ordre de
810 personnels
-gendarmes et policiers.
Dans ce cadre, la gendarmerie prévoit de mettre à la disposition
des capacités globales de l'Union européenne
600 officiers et
sous-officiers
dont 300 devraient être plus spécialement
dévolus à un engagement dans le cadre de la capacité de
déploiement rapide ;
- les
300 gendarmes au titre du déploiement rapide
interviendront
sous la forme d'escadrons de gendarmerie mobile. Disposant de dotations propres
articulées en un groupement opérationnel polyvalent, elles
agiront en complète intéropérabilité avec des
forces de statut comparable (carabiniers italiens, guardia civil espagnole,
garde républicaine nationale portugaise, maréchaussée
néerlandaise). Les délais d'intervention de cette capacité
de réaction rapide pourront être très courts, comme le
montre de manière anticipée le déploiement d'un escadron
de gendarmerie mobile sous préavis de 24 heures au Kosovo ;
- en fonction de la situation, les 300 autres militaires pourront intervenir en
unités constituées ou dans le cadre de détachements
d'experts. Ils pourront être déployés à toutes les
étapes de la gestion d'une crise, depuis la phase de coercition
jusqu'à la phase de reconstruction, et participer aux missions de
renforcement des polices locales.
L'expérience tend à montrer qu'un déploiement de quatre
à six mois pour les unités intégrées et d'une
durée de six mois à un an pour les personnels
détachés en qualité d'experts apparaît satisfaisant.
Outre son implication dans la force de police européenne, la gendarmerie
pourrait jouer un rôle pilote dans le domaine de la
formation
en
matière de restauration de la sécurité publique. Avec le
Centre national d'entraînement des forces de gendarmerie de Saint-Astier,
elle dispose en effet d'une structure qui pourrait devenir le lieu
d'entraînement au maintien de l'ordre des autres forces de police
européenne dans la perspective de la mise en place de la force de police
européenne.
D'ores et déjà, des contingents de plus en plus nombreux des
forces de police de statut militaire bénéficient d'une formation
en France.
B. LES RISQUES D'UNE CRISE
L'accroissement des missions pèse de manière d'autant plus lourde que l'augmentation des effectifs de la gendarmerie n'a reposé que sur des volontaires et que les gains espérés des restructurations du dispositif atteignent aujourd'hui leurs limites. Aujourd'hui, il n'est plus possible de faire l'impasse sur l'augmentation des effectifs professionnels.
1. La fragilité des moyens
a) Le volontariat, seule ressource supplémentaire reconnue à la gendarmerie
L'augmentation des effectifs dont bénéficie la
gendarmerie provient du recrutement de volontaires. La loi de programmation
1997-2002 prévoit ainsi le remplacement des 12 014 gendarmes auxiliaires
issus du service national, par 16 232 gendarmes-adjoints volontaires. Ainsi,
paradoxalement, depuis la mise en oeuvre de la professionnalisation, la
gendarmerie, à la différence des armées, a vu ses
effectifs de non professionnels s'accroître. C'est dire l'importance de
cette nouvelle ressource pour l'Arme. Il y a là pour elle un double
défi quantitatif et qualitatif. Si le premier est en passe d'être
relevé, le second, en revanche, présente davantage d'incertitudes.
.
Le défi quantitatif en passe d'être relevé
Destinés à remplacer progressivement les appelés du
service national, les gendarmes adjoints sont recrutés pour une
durée d'un an sur la base d'un contrat renouvelable quatre fois.
La gendarmerie doit donc désormais prendre en charge
une tâche
nouvelle
: recruter des jeunes sur le marché de l'emploi dans
un contexte concurrentiel.
Les conditions matérielles déterminent pour une large part le
caractère attractif du volontariat. A cet égard, à la
lumière de l'expérience acquise depuis la mise en place du
volontariat, la gendarmerie a aménagé dans un sens plus favorable
la situation faite aux gendarmes auxiliaires. Si la rémunération
de base (5 046 F nets) reste inférieure à celles accordées
aux adjoints de sécurité (police nationale) et aux agents locaux
de médiation (collectivités territoriales principalement), qui,
les uns comme les autres, perçoivent le SMIC, les gendarmes adjoints
sont nourris, logés et habillés.
Il n'existe cependant pas toujours d'organismes d'alimentation à
proximité de l'unité dans laquelle ils sont affectés.
C'est pourquoi la gendarmerie étudie aujourd'hui la
généralisation de la
prime d'alimentation
-aujourd'hui
réservée aux seuls volontaires mariés. Par ailleurs, la
seule garantie de l'hébergement et non du logement pour le militaire
professionnel peut aussi constituer une contrainte. Dès lors, les
nouvelles opérations de construction et de réhabilitation de
casernes prévoient désormais la réalisation d'un module
d'hébergement individuel (une chambre et une salle d'eau privatives
représentant une surface de 14 m²). En outre, les
gendarmes-adjoints mariés ou chargés de famille peuvent
bénéficier du logement militaire ou des aides de droit commun en
matière de logement.
La perspective
d'intégration des gendarmes-adjoints dans les cadres
professionnels
de la gendarmerie représente également un
facteur incitatif décisif. De son côté, du reste, l'Arme a
tout intérêt à faire fructifier l'expérience acquise
par les intéressés. C'est pourquoi, si les volontaires
désireux de devenir sous-officiers de gendarmerie doivent naturellement
satisfaire aux épreuves de sélection habituelles, il est apparu
souhaitable de prendre en compte, parmi les critères de recrutement, la
manière de servir et les appréciations portées par les
échelons de commandement sur le gendarme adjoint. Parallèlement,
un dispositif de préparation aux tests d'entrée en école
de sous-officiers de gendarmerie a été mis en oeuvre en janvier
2001 au profit des gendarmes adjoints titulaires du diplôme de gendarme
adjoint et ayant obtenu un premier renouvellement de contrat.
Ceux qui n'auront pas été retenus en qualité de
sous-officier ou qui souhaitent choisir une autre orientation professionnelle
pourront, pour leur part, bénéficier des congés de
reconversion dès lors qu'ils auront accompli quatre ans de service,
conformément aux dispositions de la loi du 19 décembre 1996
relatives aux mesures d'accompagnement en faveur des militaires.
Les opérations de recrutement des volontaires ont commencé
à la fin de l'année 1998. Au 1
er
janvier 2001, 11 791
contrats avaient été signés sur 34 600 candidatures
présentées.
Le taux de sélection s'est
amélioré
au cours des dernières
années.
|
Candidatures déposées |
Contrats signés |
Taux de sélection |
2000 |
14 007 |
5 466 |
½ |
2001 (1 er semestre) |
6 700 |
2 241 |
1/3 |
Le taux
de renouvellement des contrats constitue un indicateur précieux de
l'intérêt suscité par le volontariat. En outre, il influe
sur le flux de recrutement dans la mesure où un taux élevé
réduit les besoins en incorporations.
Le taux de renouvellement apparaît aujourd'hui encourageant puisqu'il
dépasse 70 %.
.
Les aspects qualitatifs
Le renforcement du taux de sélection contribue à
l'amélioration de la qualité de ressource. Cependant, le
niveau scolaire
des gendarmes-adjoints demeure inférieur à
celui des gendarmes auxiliaires.
|
Gendarmes auxiliaires
|
Gendarmes adjoints
|
niveau inférieur au baccalauréat |
23,41 |
49,37 |
titulaire du baccalauréat |
49,31 |
45,39 |
niveau supérieur au baccalauréat |
27,28 |
6,24 |
La
qualité des gendarmes adjoints constitue un enjeu essentiel : ils
sont en effet investis de responsabilités importantes (ce que traduit le
choix d' « adjoint » de préférence à
l'ancienne formulation d' « auxiliaire »).
D'une part, rappelons-le, les adjoints sont susceptibles de servir
cinq
ans
dans la gendarmerie. D'autre part, ils ont vocation à recevoir
une affectation dans les
unités opérationnelles
de la
gendarmerie départementale, en particulier dans des brigades peu
chargées, en substitution de sous-officiers expérimentés
qui peuvent ainsi être redéployés vers des unités
périurbaines. De telles opérations de substitution ne sont
possibles que parce que les adjoints -à la différence des
auxiliaires- disposent de la qualité
d'agent de police judiciaire
adjoint
(APJA)
6(
*
)
. En
outre, ces compétences pourraient être étendues en
matière de lutte contre l'insécurité routière et
alignées sur celles des agents de la police municipale (pouvoir
d'injonction, de relevé d'identité et d'immobilisation du
véhicule) afin de constater la quasi-totalité des infractions au
code de la route, à l'exception notable du contrôle
d'alcoolémie
7(
*
)
.
Appelés à assumer des responsabilités souvent plus
importantes que les gendarmes auxiliaires, les gendarmes adjoints
possèdent cependant un niveau de qualification initial inférieur.
Dans ces conditions, la
formation
de ces personnels, après leur
recrutement, apparaît une priorité.
La formation initiale a d'abord été fixée à quatre
mois et demi : une période en école (Châteaulin, Tulle
ou Montargis) de dix semaines, puis une formation complémentaire en
unité de six semaines. Pendant cette deuxième phase, le gendarme
adjoint est placé sous la responsabilité d'un sous-officier
d'active « tuteur ».
Cette période de formation a cependant été jugée
insuffisante. C'est pourquoi
le stage en école a été
porté à douze semaines
. D'autres adaptations sont
envisagées : ainsi, au terme des huit premiers mois de service en
unité, les gendarmes adjoints qui renouvelleront leur contrat pourraient
bénéficier d'une formation complémentaire en école
de quatre semaines. La mise en oeuvre de ce nouveau module de formation
destiné à préparer les volontaires à l'exercice de
compétences accrues d'agent de police adjoint, dépendra toutefois
des capacités d'accueil des écoles de formation.
b) Les nouveaux modes d'organisation et leurs limites
Alors
que la loi de programmation 1997-2002 prévoit la suppression
régulière de postes de sous-officiers, la gendarmerie a
été appelée, dans le même temps, à
procéder à des créations ou à des renforcements
d'unités, en particulier dans les zones sensibles ainsi qu'à
répondre à des opérations interarmées. Ces deux
orientations requièrent des personnels professionnels. L'Arme a donc
dû chercher de nouvelles voies pour dégager les ressources dont
elle avait besoin.
. Les redéploiements d'unités
La gendarmerie a tiré aujourd'hui les leçons de l'échec du
plan de redéploiement de 1998, élaboré sur un mode
directif et sans réelle concertation. Certes, les redéploiements
se poursuivent aujourd'hui, mais à un rythme très ralenti et sur
des bases mieux fondées.
Dans les zones de police nationale, ils répondent à une logique
de rationalisation difficilement contestable : ils visent en effet
à ne conserver qu'une seule brigade territoriale par circonscription de
sécurité publique (CSP), voire par district de
sécurité publique lorsque plusieurs circonscriptions de
sécurité publique sont contiguës.
Au sein de la zone de gendarmerie,
le principe d'une brigade par canton
a été réaffirmé par les pouvoirs publics. Dans tous
les cas, le projet de dissolution est soumis à un examen au cas par cas,
sous l'égide du préfet et en étroite concertation avec les
élus concernés.
Bilan des dissolutions de brigades territoriales en 2001 : 9
5 brigades territoriales en zone de police nationale :
. Graville (Seine-Maritime)
. Harfleur (Seine-Maritime)
. Néris les Bains (Allier)
. Saint Cyr l'Ecole (Yvelines)
. Marly le Roi (Yvelines)
2 brigades territoriales et 2 postes permanents en zone de gendarmerie
nationale :
. Chateauneuf Val de Bargis (Nièvre)
. Prunelli di Fiumorbo (Haute Corse)
. Ravine des Cabris (La Réunion)
. Plateau Caillou (La Réunion)
Bilan des créations de brigades territoriales en zone de gendarmerie
nationale en 2001 : 5
. Méry sur Oise (Val d'Oise)
. Ravine des Cabris (La Réunion)
. Plateau Caillou(La Réunion)
. Tuamotu Centre (Polynésie française)
. Marignier (Haute-Savoie)
.
Le redéploiement des effectifs
Dans l'impossibilité de dégager les ressources d'effectifs
nécessaires par la dissolution d'unités, la gendarmerie s'est
trouvée, dès lors, contrainte de procéder à des
redéploiements « secs » de personnels ou à
des redéploiements avec substitution des sous-officiers de gendarmerie
par des gendarmes adjoints.
Ces substitutions ont concerné :
- en 1999 : 886 sous-officiers en gendarmerie départementale ;
- en 2000 : 1 350 officiers (dont 615 en gendarmerie
départementale, 670 en gendarmerie mobile, 65 à la Garde
républicaine) ;
- en 2001 : 197 sous-officiers (dont 167 en gendarmerie
départementale et 30 à la Garde républicaine).
Ces mouvements ont toutefois montré leurs limites. D'abord, un effectif
réduit à 5 professionnels + 1 adjoint expose la brigade à
de sérieuses difficultés de fonctionnement. En outre,
l'augmentation des effectifs des unités les plus chargées peut
entraîner un déplacement de la délinquance vers les zones
rurales. A la lumière de l'expérience, la gendarmerie
reconsidère d'ailleurs la réduction du nombre de militaires dans
les petites brigades.
Les modifications du dispositif de la gendarmerie se sont accompagnées
d'une
révision des méthodes d'intervention
afin de mieux
conjuguer les forces des différentes brigades. La
sectorisation
mise à l'oeuvre depuis 2000 repose ainsi sur la coordination des
moyens de plusieurs brigades implantées dans un périmètre
rapproché. L'expérience est entourée d'une double
garantie : maintien de conditions d'accueil satisfaisantes pour le public,
délai d'intervention n'excédant pas trente minutes.
S'il est nécessaire de poursuivre dans la voie d'une meilleure
utilisation des moyens de la gendarmerie, il serait illusoire de penser que les
progrès dans le domaine de la sécurité peuvent être
obtenus sans l'augmentation d'effectifs professionnels.
2. L'insatisfaction croissante des personnels
La
conjonction de l'accroissement des charges pesant sur la gendarmerie, d'une
part, de la réduction du temps de travail dans la société
civile, d'autre part, ne peut que susciter aujourd'hui un
climat de
tension
au sein des unités dont les conséquences ne sauraient
être sous estimées.
Un constat s'impose : les personnels supportent de moins en moins les
perturbations que provoque leur travail sur leur vie familiale.
Certes, la loi sur la réduction du temps de travail ne peut s'appliquer
aux militaires (les militaires « peuvent être appelés
à servir en tout temps et en tout lieu » aux termes de
l'article 12 de la loi du 13 juillet 1972 portant statut
général des militaires). Une instruction du
10 décembre 1979 portant application du règlement de
discipline générale des armées a d'ailleurs
précisé la portée de cette obligation :
« le service des militaires, s'il comporte une part de travail
accompli dans le cadre d'un programme déterminé et d'horaires
réguliers, s'étend aussi
sans restriction de temps et de lieu
d'activités
liées à la permanence de l'action, aux
missions ou aux obligations de présence que le commandement est
appelé à prescrire pour l'accomplissement de la
mission ».
Si la réduction du temps de travail est exclue, deux voies restent
possibles :
- une organisation plus pertinente des tâches afin d'alléger les
contraintes pesant sur les personnels mais l'équilibre avec les
impératifs du service public de la sécurité apparaît
alors délicat ;
- une contrepartie financière aux contraintes spécifiques qui
pèsent sur les personnels de la gendarmerie. La déception risque
d'être à la mesure des espoirs que les dotations de la loi de
finances pour 2002 ne paraissent pas en mesure de satisfaire.
a) L'aménagement des conditions de travail et ses limites
Dès 1999, le ministre de la défense avait
décidé la tenue, le 28 février 2000, d'une session
extraordinaire du Conseil de la fonction militaire gendarmerie (CFMG)
consacrée aux conditions de travail des gendarmes.
Les mesures adoptées alors comportaient une série
d'aménagements à l'organisation de la
gendarmerie
départementale
: les plages horaires d'accueil du public dans
les brigades ainsi que les conditions des transferts des appels vers les
centres opérationnels de la gendarmerie (COG) seraient
déterminés en fonction des spécificités locales.
Ces nouvelles dispositions se conjuguaient avec une modification des astreintes
des personnels. Tout en conservant la position en astreinte immédiate
pour une partie des effectifs, une
position d'astreinte sans
délai
était instituée pour les militaires dont la
présence n'apparaissait pas immédiatement indispensable pour le
service. Cette astreinte sans délai permet à quelques militaires
de s'absenter sous réserve de pouvoir être joints et de regagner
leur caserne au plus vite après l'appel du commandement et dans un
délai fixé par celui-ci. En outre, si les
nécessités du service n'y font pas obstacle, les militaires
devant effectuer un service de nuit programmé pourront être
placés en position d'astreinte à domicile l'après-midi
précédant ce service à partir de 16 heures.
Ce dispositif, il convient de le rappeler, avait été
complété, grâce à l'augmentation des effectifs
décidée par le CFMG de février 2000, par la
création de nouveaux pelotons de surveillance et d'intervention de la
gendarmerie (PSIG) et le renforcement des centres opérationnels de
groupement par 130 gendarmes. La création de PSIG dans les compagnies
qui jusqu'à présent n'en disposent pas, devait permettre aux
brigades à faible effectif de bénéficier réellement
de l'allègement des astreintes.
Pour la
gendarmerie mobile
, plusieurs mesures ont été
également adoptées : assurance de 8 heures de repos
lorsque le militaire est effectivement libéré de toute servitude,
attribution de l'intégralité du droit au repos acquis à
l'issue de la mission. En outre, les déplacements Outremer et en Corse
ouvriront droit, pour la fraction du séjour excédant quatre
semaines, à une majoration du repos hebdomadaire, afin d'assurer un
repos de 24 heures sur place et de 36 heures à la
résidence, par semaine supplémentaire. Enfin, la nouvelle
articulation quaternaire des escadrons vise également à
introduire un facteur de souplesse ; en effet, l'effectif d'emploi de
l'escadron, fixé expérimentalement à 75 militaires,
pourra contribuer à réduire les charges individuelles de jours de
déplacement.
Ces différentes mesures ont certes apporté un
assouplissement
apprécié des unités. Cependant, leur impact favorable
sur le moral des militaires tend à s'estomper, comme l'ont
souligné les rapports des commandants de légion et de
région transmis en juin 2001 à la direction
générale de la gendarmerie.
En effet, l'allégement des astreintes n'est pas réellement
applicable dans les unités les plus chargées, en particulier dans
les zones périurbaines. Sauf à peser sur la qualité du
service public de sécurité, auquel les militaires de la
gendarmerie sont par ailleurs très attachés, l'assouplissement de
l'organisation de l'activité ne saurait être
systématisé.
Les efforts pour rechercher une organisation plus rationnelle de certaines
missions doivent certes se poursuivre. Du reste, la réflexion
engagée en novembre 2000 sur « le temps d'activité et
d'obligation professionnelles des militaires » (TAOPM) afin de mieux
évaluer les surcharges et de favoriser les solutions visant à les
réduire a été à l'ordre du jour du Conseil
supérieur de la fonction militaire de l'automne. Cependant, compte tenu
des limites de l'exercice, les espoirs des personnels portent de manière
prioritaire sur une compensation de caractère financier.
b) Une compensation financière très attendue
Les
attentes des personnels de la gendarmerie vis-à-vis d'une contrepartie
financière se sont particulièrement aiguisées depuis le
passage aux 35 heures, le l
er
octobre 2001, de l'ensemble des
personnels civils du ministère de la défense.
Très concrètement, les gendarmes espèrent que les pouvoirs
publics pourront annoncer la mise en oeuvre en 2002 d'un
treizième
mois
. Toutefois, le projet de loi de finances pour 2002 n'a aucunement
prévu les dotations nécessaires à la prise en charge de
cette compensation financière. Ensuite, une revalorisation de cette
importance ne manquera pas de provoquer des effets en chaîne au sein des
armées et de peser sur les finances publiques. La perspective d'une
compensation financière de la disponibilité et des conditions de
vie et de travail s'inscrit dans le cadre de la revalorisation de la condition
de tous les militaires.
Lors du conseil de la fonction militaire gendarmerie, réuni le 14
novembre dernier, le ministre de la défense a présenté les
mesures liées à la réduction du temps d'activité et
d'obligation professionnelle des militaires : attribution de 13 jours de
temps libre avec extension aux services du samedi du complément
spécial pour charges militaires (soit actuellement 219 F par jour pour
un sous-officier) qui, en l'état, reste exclusif de toute
récupération.
Ce dispositif général a toutefois été adapté
pour la gendarmerie compte tenu, en effet, de l'impossibilité de fait
d'accorder à la gendarmerie départementale les 13 jours, ces
derniers seront remplacés par le versement d'une indemnité
journalière compensatoire de 500 à 540 F, soit un total de
6 500 F à 7 020 F.
Ces mesures restent en deçà des attentes des personnels. Dans ces
conditions, les réactions des personnels apparaissent difficilement
prévisibles.
A plus court terme, il est également impératif de prévoir
des mesures de valorisation différenciée afin de tenir compte des
charges particulières dont son investies certaines catégories de
gendarmes. Pour votre rapporteur, une double orientation devrait être
privilégiée :
- le renforcement et l'extension de la bonification indiciaire pour l'ensemble
des personnels appelés à servir dans les zones dites
« difficiles » ;
- la revalorisation des qualifications professionnelles de la police
judiciaire. Actuellement un gendarme diplômé OPJ
bénéficie d'une revalorisation différentielle de 68,99 F
pour une qualification obtenue après deux années de formation
juridique, la réussite d'un examen national (marqué par 50 %
d'échec) et le suivi d'un stage de qualification. La reconnaissance sous
une forme pécuniaire, d'une qualification qui s'exerce dans des
conditions souvent difficiles s'impose aujourd'hui.
La mise en place d'une indemnité spécifique pour la gendarmerie
constitue sans aucun doute un exercice délicat. L'Arme regarde du
côté des policiers qui assurent des missions comparables, mais
elle est aussi l'objet d'attention des trois armées qui récusent
tout « décrochage » de la gendarmerie s'agissant des
conditions de rémunération. Dans ces conditions, d'aucuns
prônent le détachement de la gendarmerie des forces armées
et sa fusion au sein d'une grande force de police intérieure. Ce serait
là, pourtant, une faute majeure. D'abord, parce que les personnels, dans
leur immense majorité, restent très attachés au statut
militaire. Ensuite, parce que la dualité des forces de
sécurité apparaît comme une garantie essentielle dans un
Etat de droit.
Sans doute, appelée à exercer sa mission directement au service
de nos concitoyens, la gendarmerie doit s'ouvrir davantage vers le monde civil.
Mais cette ouverture n'est en rien incompatible avec le caractère
militaire de l'institution.
A cet égard, les nouvelles modalités de recrutement des officiers
de gendarmerie présentent, pour l'avenir, plusieurs inconnues.
3. Les interrogations soulevées par la réforme du recrutement des officiers au regard de l'indispensable maintien du statut militaire
Depuis
1997, une réflexion a été conduite sur les
modalités de recrutement et de formation des officiers de gendarmerie
(« Commission Denizot »). Ces travaux inspirés par
la volonté de rapprocher davantage la gendarmerie de la
société au sein de laquelle elle évolue, ont conclu
à l'opportunité de puiser l'essentiel du recrutement parmi des
candidats issus du milieu universitaire, sélectionnés par
concours au niveau du diplôme de deuxième cycle. Ces propositions
devraient se concrétiser à compter du printemps 2002.
Actuellement la gendarmerie compte onze voies de recrutements
différentes. Un spécialiste de la gendarmerie, M. François
Dieu, a mis en évidence
l'hétérogénéité du corps des officiers
divisés en quatre classes hiérarchisées :
« l'élite militaro-technicienne » (officiers issus
des grandes écoles militaires, principalement l'école
spéciale militaire de Saint-Cyr), les « transfuges »
des armées, le « niveau intermédiaire »
(anciens officiers de réserve et sous-officiers de gendarmerie
titulaires d'un diplôme de second cycle), la
« troupe » (anciens sous-officiers et majors de
gendarmerie). Il paraissait opportun de favoriser une plus grande
homogénéité tout en ouvrant le recrutement sur le monde
civil.
Le schéma de recrutement reposera désormais sur trois grandes
voies :
- le
recrutement direct
se fera par un
concours unique autonome,
ouvert aux étudiants titulaires d'une maîtrise.
Il se
substituera aux recrutements opérés aux sorties des grandes
écoles -hormis Polytechnique qui demeure une voie de recrutement- ainsi
qu'au concours ouvert aux officiers de réserve et aux sous-officiers de
gendarmerie titulaires d'une licence. La montée en puissance de cette
filière s'effectuera jusqu'en 2006 pour atteindre un volume annuel de 50
officiers (en complément de cette voie sera maintenue la filière
« ORT » -officiers de réserve recrutés sur
titre- destinée à intégrer environ 5 officiers par an,
disposant d'une formation technique et scientifique de haut niveau) ;
- la
voie « semi directe »
ouverte aux
sous-officiers de gendarmerie détenant un diplôme de fin
d'études secondaires ainsi que d'une expérience professionnelle
avérée (le volume de recrutement annuel a été
fixé à 55) ;
- la
voie « semi directe tardive »
-filière
de recrutement au choix des lieutenants parmi les adjudants chefs ou majors de
gendarmerie, soit quelque 35 militaires chaque année.
Enfin, la filière de recrutement pour les officiers à
carrière courte (officiers sous contrat) réservée à
des personnes jeunes et hautement qualifiées, est également
maintenue (et son contingent a même été augmenté
pour être fixé à un volume annuel de 24 officiers).
Le projet conserve les proportions équivalentes entre recrutement
externe (40 %) et interne (50 %), les officiers provenant des armées et
des services représentant 10 %.
La modification des voies de recrutement requiert également la
réforme de la formation initiale et continue
des officiers de
gendarmerie. L'école des officiers de la gendarmerie nationale de Melun
chargée de la formation initiale et des cours d'application recevra les
élèves pour deux années : la première
largement consacrée à la formation militaire et d'officier ;
la seconde davantage axée sur la formation spécifique et la
préparation aux emplois.
L'enseignement renforcera la part dévolue aux disciplines
administratives et juridiques et s'ouvrira aux institutions et partenaires de
la gendarmerie, en particulier celle de la justice, de l'intérieur et
des douanes.
Les nouvelles conditions de recrutement et de formation ne conduiront-elles pas
à distendre les liens entre la gendarmerie et l'institution
militaire ?
Certaines garanties ont d'ores et déjà été
apportées pour prévenir une telle évolution.
Le
maintien du recrutement latéral
ouvert aux capitaines d'active
des trois armées et des services communs manifeste la volonté
d'ancrage aux armées.
Ensuite, les officiers seront placés dès le début de leur
formation sous
statut militaire
. Par ailleurs,
plus du tiers
de
la formation initiale devrait être commune avec les armées. Ainsi,
dès leur première année de formation, tous les officiers
de gendarmerie devraient suivre à Coëtquidan un module complet de
formation de niveau « chef de section ». Ils seront
également appelés à participer aux côtés des
officiers de recrutement direct des autres armées, à un
séminaire au cours duquel pourront être débattus les grands
problèmes de défense.
En outre, la
formation militaire
continue restera dispensée dans
un cadre interarmées, notamment au niveau du
collège
interarmées de défense
puis du
centre des hautes
études militaires
. Enfin, le ministère de la défense
s'est également engagé à accroître la participation
des officiers supérieurs de la gendarmerie nationale au sein des
états-majors d'armées, interarmées ou interalliés.
Il conviendra sans doute de rester vigilant sur la permanence du lien entre la
gendarmerie et les armées. Sous cette réserve, la diversification
du recrutement des officiers peut constituer un élément important
de l'adaptation de l'Arme à l'évolution de ses missions.