II. LE SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES
Votre rapporteur a régulièrement déploré que les profonds changements qui ont affecté depuis 1997 le service de santé des armées, et notamment ses difficultés en matière de recrutement et de réalisation des effectifs, n'aient pas été suffisamment pris en compte. Ces difficultés ont bénéficié d'un début de prise en considération en 2001 et un effort de redressement est poursuivi, bien que d'importantes difficultés demeurent.
A. LA REORGANISATION DU SERVICE DE SANTÉ : DES DIFFICULTÉS À MIEUX PRENDRE EN COMPTE
Comme
votre rapporteur l'avait exposé en 1999
2(
*
)
, l'action du service de santé
des armées s'inscrit aujourd'hui dans un contexte à bien des
égards très différent de celui des dernières
décennies :
- la suspension du service national fait disparaître la charge
considérable liée à la sélection et au suivi
médical des appelés tout en privant le service de l'apport
très important fourni par les médecins du contingent,
- les missions du service sont plus que jamais dominées par une
priorité -le soutien médical et chirurgical des forces
projetées- auquel il consacre une part croissante de ses moyens en
personnels et en matériels dans le cadre de nombreuses opérations
extérieures.
1. La poursuite de la restructuration du service
La
professionnalisation et la réduction du format des armées ont
conduit le service de santé des armées à diminuer son parc
hospitalier qui ne comportera plus que
9 hôpitaux d'instruction des
armées
. Après la fermeture du centre hospitalier Larrey
à Toulouse en 2001, le centre hospitalier Le Bas à Cherbourg,
dernier centre hospitalier des armées en fonctionnement, sera
fermé en 2002.
Après la fermeture de divers organismes de soutien
sanitaire,l'école nationale des officiers de réserve du service
de santé des armées (ENORSSA), située à Libourne
sera dissoute en juin 2002.
La
contraction du dispositif hospitalier
s'accompagne d'une
large
ouverture à la clientèle civile et au service public
, en vue
de conserver une activité variée, gage d'un maintien de la
compétence du personnel pour les missions de soutien médical au
profit des forces.
La
part du secteur civil
au sens strict (sans compter les familles de
militaires, les retraités et les civils de la défense nationale)
dans l'activité hospitalière du service de santé
est ainsi passée entre 1998 et 2000 de 47 % à
56 %
pour les consultations
, de 52 % à
62 % pour les
hospitalisations
, et de 59 % à
72 % pour
l'activité des services d'urgence
.
La participation des hôpitaux militaires au service public hospitalier
continue de progresser, notamment grâce à des
conventions de
complémentarité établies avec le secteur civil.
Les
hôpitaux militaires participent ainsi à la politique
d'optimisation de l'offre de soins.
Cette évolution contribue à maintenir les hôpitaux
militaires au meilleur niveau, mais votre rapporteur estime qu'un point
d'équilibre doit être défini afin de préserver le
caractère prioritaire des missions militaires du service, de même
que l'augmentation des ressources externes tirées de l'activité
hospitalière ne doivent pas provoquer une érosion des
crédits budgétaires qui fragiliserait le service.
2. Un fort déficit en médecins d'active et en personnels civils
Compte
tenu du rôle que jouaient les appelés du contingent pourvus d'une
formation médicale ou paramédicale dans le fonctionnement du
service de santé, la professionnalisation impose une politique de
recrutement de médecins et de personnels paramédicaux civils et
militaires, ainsi que la création d'un corps de chirurgiens dentistes
d'active actuellement inexistant.
En raison de la durée des études médicales, seul un
recrutement immédiat de médecins déjà formés
était de nature à satisfaire les besoins
générés par la disparition du contingent.
Ce
recrutement complémentaire se révèle pour le moment
très insuffisant
puisqu'en 1998, seuls 15% des postes offerts ont pu
être pourvus. En 1999, sur 48 postes offerts, 7 seulement ont
été pourvus, et en 2000, pour un même nombre de poses, 4
candidats seulement ont été retenus. Cette situation aggrave le
déficit déjà significatif en médecins d'active,
surtout au sein des forces.
Ce déficit se creuse d'autant plus que le phénomène
de
départ de médecins vers le secteur civil
, qui avait
régressé jusqu'en 1997, s'amplifie désormais, notamment
chez les chirurgiens, et surtout chez les radiologues et les
réanimateurs, spécialités cruciales pour le soutien des
forces.
Les résultats décevants du recrutement complémentaire de
médecins, pourtant indispensable, pose à l'évidence la
question de l'attractivité de la carrière médicale dans
les armées
. Un
plan de revalorisation
portant sur la
rémunération des gardes et l'élargissement de
l'accès au grade de médecin principal a été
entrepris cette année et sera poursuivi en 2002. Il est cependant
à craindre que
ces mesures, pour positives qu'elles soient, restent
encore très insuffisantes
pour attirer rapidement de nombreuses
candidatures et résorber un déficit qui risque de se creuser
davantage jusqu'à ce que le renforcement du recrutement initial en
école produise ses effets.
Le
fort déficit en personnels civils
, lié à des
départs massifs lors des restructurations et à
l'impossibilité de les remplacer en raison des contraintes
imposées au recrutement d'ouvriers et de fonctionnaires, est la seconde
source de difficultés dans la mise en oeuvre de la professionnalisation.
Elle crée, dans les hôpitaux des armées, des situations
tendues auxquelles pourrait seul remédier un nécessaire
assouplissement des conditions d'embauche.
Par ailleurs, les nombreux statuts des personnels paramédicaux, seront
à terme remplacée par deux statuts, l'un pour les militaires et
l'autre pour les civils, inspirés de la fonction publique
hospitalière.
Evolution des effectifs du service de santé des
armées au 1
er
juillet 2001
(effectifs inscrits au budget du service de santé des
armées)
Catégories |
Effectifs budgétaires 2001 |
Effectifs réalisés l er juillet 2001 |
Ecart |
Officiers |
3 315 |
2 929 |
- 386 |
dont médecins |
2 430 |
2 156 |
- 274 |
Sous-officiers |
3 121 |
3 132 |
+ 11 |
MDR engagés |
230 |
142 |
- 88 |
Appelés |
521 |
451 |
- 70 |
dont médecins |
104 |
171 |
+ 67 |
Volontaires |
181 |
140 |
- 41 |
Civils |
5 613 |
4 803 |
- 810 |
Fonctionnaires |
2 647 |
2 208 |
- 439 |
Ouvriers |
2 966 |
2 595 |
- 371 |
Total |
12 981 |
11 597 |
- 1 384 |
B. LE BUDGET DU SERVICE DE SANTÉ : PRÉPONDÉRANCE DES RESSOURCES EXTRA-BUDGÉTAIRES ET LÉGÈRE PROGRESSION DES CRÉDITS
Le budget du service de santé verra ses crédits budgétaires légèrement progresser en 2002, la part du financement du service par les recettes de l'activité hospitalière représentant les deux-tiers des ressources du service.
1. Le budget du service de santé pour 2002 : première augmentation depuis 1997
Le budget du service de santé connaîtra en 2002 , sa première augmentation depuis 1997, avec une progression de 1,7 % des crédits .
Evolution des crédits du service de santé
(en millions de francs)
|
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Rémunérations et charges sociales |
|
|
|
|
|
|
Fonctionnement courant |
114,8 |
84,8 |
55,7 |
36,5 |
36 |
35,6 |
Total titre III |
310,9 |
265,3 |
238,9 |
216,3 |
219,2 |
229,5 |
Equipement |
19,6 |
15,5 |
18,3 |
17,6 |
23,5 |
24,7 |
Infrastructures |
23,5 |
21,2 |
23,5 |
23,0 |
7,2 |
- |
Total titre V |
43,1 |
36,7 |
41,8 |
40,6 |
30,7 |
24,7 |
TOTAL |
354,0 |
302,0 |
280,7 |
256,9 |
249,9 |
254,2 |
Les
dépenses ordinaires
, qui constituent l'essentiel de ce budget et
avaient très fortement diminué depuis quatre ans,
progresseront de 4,7 %.
On rappellera que de 1998 à 2000, des
mesures d'économies
portant au total sur 95 millions d'euros
ont été
appliquées aux dépenses ordinaires du service de santé,
pour tenir compte des recettes externes de cessions de prestations
médicales, qui permettent, par la procédure de fonds de concours,
de compléter les ressources du service.
La
très forte réduction des crédits de fonctionnement
courant,
qui sont passés de 114 millions d'euros en 1997 à 36
millions d'euros en 2001, se ralentit, puisqu'avec 35,6 millions d'euros en
2002, ces crédits ne sont que légèrement en retrait par
rapport à l'an passé.
Les dépenses de rémunérations et de charges sociales
augmentent pour leur part de 5,9 %.
S'agissant des effectifs, l'application des mesures de programmation
entraîne la suppression de 31 postes d'officiers, de 50 postes de
sous-officiers et des 521 derniers postes d'appelés alors que 10 postes
de militaires du rang et 66 postes de volontaires seront
créés. Parallèlement, et « hors
programmation »,
200 postes de militaires infirmiers
et
techniciens des hôpitaux des armées (MITHA) sont
créés (+ 5,7 millions d'euros).
Il faut également signaler, bien que leurs rémunérations
soient couvertes par le budget du secrétariat général pour
l'administration, que
171 postes de personnels civils supplémentaires
seront créés en 2002
, dans le cadre de l'aménagement
et de la réduction du temps de travail, alors que 170 postes d'ouvriers
d'état seront transformés en postes de paramédicaux
civils. Ces mesures permettent au total de créer 61 postes de
techniciens paramédicaux civils, 16 postes de préparateurs en
pharmacie, 146 aides soignants et 118 agents de service hospitaliers.
Le budget 2002 incorpore également des
mesures
catégorielles
au bénéfice des personnels militaires
des services de santé. La
revalorisation du régime
indemnitaire des médecins
sera poursuivie (+ 1,7 millions
d'euros) alors que les
possibilités d'accès au grade de
médecin principal
seront élargies (+ 0,7 millions
d'euros). Le « pyramidage » des emplois de MITHA sera
amélioré.
En ce qui concerne les
dépenses en capital,
les crédits de
paiement se limitent à 24,7 millions d'euros pour 2002, soit une
diminution de 19,5 %.
Les autorisations de programme, en forte augmentation en 2001 au titre du
lancement de la
construction
du nouvel hôpital d'instruction
des armées Sainte Anne à Toulon,
reviennent à leur
niveau des années passées (29,4 millions d'euros). L'actuel
hôpital sera en effet transféré en 2006 dans un
bâtiment neuf sur le site de la caserne Grignan. Les premiers travaux
doivent débuter cet automne, la construction proprement dite
démarrant fin 2002. Le nouvel hôpital possédera une
capacité de 352 lits. Sur le site actuel seront regroupés,
à partir de 2006, les autres organismes du servi
ce de santé
présents sur Toulon ainsi que divers organismes communs.
2. La part prépondérante des ressources externes et la mise en place de la dotation globale
Le
financement du service de santé des armées repose sur deux
catégories de ressources :
- les
crédits budgétaires
provenant des titres III et V du
budget de la défense,
- les
produits d'un fonds de concours
qui regroupe les recettes des
services hospitaliers, tirées des prestations médicales
délivrées à leur clientèle, à l'exception
bien entendu de celles qui sont prises en charge par la défense
elle-même (soins consécutifs à une affection
contractée en service).
Le tableau ci-dessous retrace l'évolution des parts respectives de
chaque catégorie de ressources.
Evolution des ressources du service de santé
(en millions d'euros)
|
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
Ressources budgétaires |
377,2 |
302,3 |
280,9 |
256,9 |
250,0 |
Ressources externes |
350,5 |
388,4 |
401,9 |
498,3 |
461,8 |
Part des ressources externes |
48,2 % |
56,2 % |
58,9 % |
66,0 % |
64,9 % |
Total |
727,7 |
690,7 |
682,8 |
755,2 |
711,8 |
Ce
tableau montre
la progression sensible des recettes de cessions de
prestations médicales
au cours des dernières années,
et, du fait de la forte diminution des ressources budgétaires de 1998
à 2000, un
net accroissement de leur part dans le financement du
service de santé
, qui pour la première fois en 1998
dépassait 50 %, pour atteindre désormais les
deux tiers du
budget
.
Depuis le ler janvier 1999, la clé de répartition des produits de
fonds de concours a été établie à 90 % sur les
crédits de fonctionnement et à 10 % sur les crédits
d'investissement.
A partir du 1er janvier 2002, les ressources extérieures du service de
santé passera de l'actuel régime de remboursement des prestations
à celui de la
dotation globale de fonctionnement
, inspiré
du système en vigueur dans l'hospitalisation publique civile. Comme dans
le secteur civil, cette dotation sera versée par les organismes
d'assurance - maladie, une caisse-pivot unique étant toutefois
chargée de verser directement la dotation au ministère de la
défense, qui rattachera les crédits au budget du service de
santé par voie de fonds de concours, la répartition de la
dotation globale entre les différents établissements hospitaliers
s'effectuant au sein du service de santé. Par ailleurs, il est important
de noter que les hôpitaux des armées demeurent en dehors des
compétences des agences régionales d'hospitalisation. Ce ne sont
donc pas ces dernières qui fixeront le montant de la dotation globale,
mais les ministres de la santé et de la sécurité sociale,
en fonction de l'objectif national de dépenses d'assurance - maladie.