Projet de loi de finances pour 2002 - Tome IV : Défense - Nucléaire, espace et services communs
FAURE (Jean)
AVIS 90 - TOME IV (2001-2002) - COMMISSION DES AFFAIRES ETRANGERES
Rapport au format Acrobat ( 256 Ko )Table des matières
- INTRODUCTION
-
CHAPITRE PREMIER -
LE NUCLÉAIRE, L'ESPACE ET LES SERVICES COMMUNS
DANS LE BUDGET DE LA DÉFENSE POUR 2002 -
CHAPITRE II -
LES QUESTIONS NUCLÉAIRES- I. LA DISSUASION NUCLÉAIRE DANS LE CONTEXTE GÉOSTRATÉGIQUE ACTUEL : PERMANENCE ET ÉVOLUTIONS
- II. LE DÉROULEMENT DES PROGRAMMES NUCLÉAIRES
- III. LES CRÉDITS DE LA DISSUASION NUCLÉAIRE : APRÈS UNE FORTE DÉCRUE, UNE REMONTÉE LIÉE À LA RÉALISATION DES GRANDS PROGRAMMES DE MODERNISATION DE NOS FORCES NUCLÉAIRES
-
CHAPITRE III -
L'ESPACE ET LE RENSEIGNEMENT MILITAIRES- I. L'ESPACE MILITAIRE
- II. LE RENSEIGNEMENT
-
CHAPITRE IV -
LES AUTRES ACTIONS COMMUNES- I. LA DÉLÉGATION GÉNÉRALE POUR L'ARMEMENT
- II. LE SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES
- III. LES AUTRES SERVICES COMMUNS
- EXAMEN EN COMMISSION
N° 90
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002
Annexe au procès-verbal de la séance du 22 novembre 2001
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 2002 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,
TOME IV
DÉFENSE - NUCLÉAIRE, ESPACE ET
SERVICES COMMUNS
Par M. Jean FAURE,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Xavier de Villepin, président ; MM. Michel Caldaguès, Guy Penne, André Dulait, Michel Pelchat, Mme Danielle Bidard-Reydet, M. André Boyer, vice-présidents ; MM. Simon Loueckhote, Daniel Goulet, André Rouvière, Jean-Pierre Masseret, secrétaires ; MM. Jean-Yves Autexier, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Jacques Blanc, Didier Borotra, Didier Boulaud, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Robert Del Picchia, Jean-Paul Delevoye, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Philippe François, Philippe de Gaulle, Mme Jacqueline Gourault, MM. Emmanuel Hamel, Christian de La Malène, René-Georges Laurin, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc, MM. Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Louis Moinard, Xavier Pintat, Jean-Pierre Plancade, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Henri Torre, André Vallet, Serge Vinçon.
Voir
les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème
législ.) :
3262
,
3320
à
3325
et T.A.
721
Sénat
:
86
et
87
(annexe n°
43
)
(2001-2002)
Lois de finances . |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Dans le cadre de ce rapport pour avis relatif au nucléaire, à
l'espace et aux services communs, votre commission des affaires
étrangères, de la défense et des forces armées
procède traditionnellement à l'examen des crédits du
budget de la défense au travers d'une double approche :
- elle analyse les orientations et le déroulement des programmes
concernant les forces nucléaires et les équipements spatiaux
militaires,
- elle examine l'ensemble des moyens budgétaires du ministère de
la défense ne relevant ni des trois armées, ni de la gendarmerie,
anciennement regroupés au sein d'une « section
commune ».
Ces deux approches se recoupent assez largement, car une part importante des
crédits du nucléaire et la quasi totalité de ceux relatifs
aux programmes spatiaux ne sont pas inclus dans les dotations des trois
armées, mais figurent au rang des actions communes, en particulier au
sein de l'agrégat « Etat-major des armées »,
créé en 1999.
Les moyens budgétaires de l'ancienne « section
commune » au sens strict s'élèvent pour 2002 à
7,7 milliards d'euros et représentent 26,7 % du budget de la
défense (hors pensions). Ils se répartissent en cinq
agrégats :
- la délégation générale pour l'armement (DGA) (2,1
milliards d'euros) , agrégat au sein duquel sont comptabilisées
les dépenses de personnel et de fonctionnement propres à la DGA,
ainsi que certains crédits d'équipement concernant pour
l'essentiel les études « amont » et les dotations
transférées au Commissariat à l'énergie atomique
(CEA) et au budget civil de recherche et développement (BCRD),
- le soutien interarmées (469 millions d'euros), qui recouvre
principalement le service de santé et le service des essences des
armées et les organismes interarmées tels que la direction
à l'information et à la communication du ministère de la
défense,
- le renseignement (288 millions d'euros), regroupant les crédits de la
direction générale de la sécurité extérieure
(DGSE), de la direction du renseignement militaire (DRM) et de la direction de
la protection et de la sécurité de la défense (DPSD),
- l'administration générale (3 milliards d'euros, hors pensions),
couvrant les dépenses de l'administration centrale et du contrôle
général des armées, ainsi que les
rémunérations des personnels civils de la défense,
- enfin, l'état-major des armées (1,9 milliard d'euros),
auquel sont affectés, outre divers crédits de fonctionnement, des
crédits d'équipement relevant de programmes spatiaux et
nucléaires.
Correspondant à la sixième et dernière annuité de
la loi de programmation militaire 1997-2002, le projet de budget de la
défense pour 2002 confirme les caractéristiques que notre
commission avait soulignées les années passées. La
progression des dépenses ordinaires se poursuit, principalement sous
l'effet d'une montée des dépenses de rémunérations
et de charges sociales, reflet de la mise en oeuvre de la professionnalisation,
mais aussi en raison de la remise à niveau des crédits de
fonctionnement courant, fortement comprimés en début de
programmation. Parallèlement, l'érosion des crédits
d'équipements s'accentue, amplifiant le net décrochage
opéré dès le budget 2000 non seulement par rapport aux
objectifs de la loi de programmation, mais aussi par rapport à ceux,
déjà révisés à la baisse, de la
« revue de programmes ».
C'est en gardant ces données générales à l'esprit,
et en tenant compte des impératifs qui, à partir de 2003,
conditionnent la poursuite de la modernisation de nos forces armées, que
votre rapporteur centrera son analyse sur quatre questions principales :
- les questions nucléaires, marquées, après plusieurs
années de réduction continue, par un relèvement des moyens
budgétaires consacrés à la poursuite des programmes de
modernisation de nos deux composantes et du programme de simulation,
- l'espace et le renseignement, qui continuent à ne se voir affecter
qu'un volume modeste de crédits,
- la délégation générale pour l'armement qui,
à travers la réforme de la gestion des programmes d'armement,
s'est trouvée au coeur de la mise en oeuvre de l'actuelle loi de
programmation mais qui n'a toujours pas rationalisé ses structures
industrielles,
- enfin le service de santé des armées, qui constitue l'un des
« points noirs » de la professionnalisation en raison
d'importants déficits en personnels, notamment médicaux.
CHAPITRE PREMIER -
LE NUCLÉAIRE, L'ESPACE ET LES SERVICES
COMMUNS
DANS LE BUDGET DE LA DÉFENSE POUR 2002
Avec
28,85 milliards d'euros, hors pensions, le budget de la défense
enregistrera une légère augmentation, de 0,17 %, en 2002.
Les dépenses ordinaires (16,45 milliards d'euros) progressent de
2,3 % alors que les dépenses en capital (12,39 milliards
d'euros) reculent de 2,5 %.
Votre rapporteur présentera les caractéristiques
générales de ce budget qui reste marqué, comme les deux
précédents, par une rupture des engagements pris à l'issue
de la « revue de programmes », puisque pour la
troisième année consécutive, les crédits
d'équipements resteront en deçà du niveau qui avait alors
été défini, niveau lui-même sensiblement
inférieur à celui prévu par la loi de programmation.
Les crédits de l'ancienne « section commune »
s'inscrivent dans ce contexte peu favorable, même si le relèvement
significatif des crédits du nucléaire, qui y sont en
majorité inscrits, compense la diminution affectant, au titre V, les
programmes spatiaux ou l'équipement classique.
I. UN BUDGET QUI ACCENTUE L'ÉROSION DE L'EFFORT NATIONAL D'ÉQUIPEMENT MILITAIRE
L'effort
réalisé au profit du titre III dans le projet de budget de la
défense pour 2002 semble s'opérer au détriment du titre V,
qui voit ses dotations pratiquement réduites d'autant.
Ce budget creuse donc l'écart déjà considérable
entre le montant des crédits d'équipement dont aura effectivement
disposé le ministère de la défense de 1997 à 2002
et le niveau qui avait été arrêté par la loi de
programmation militaire, puis corrigé par la « revue de
programmes ».
Ce fléchissement confirmé de l'effort d'équipement
militaire met notre pays en contradiction avec les exigences de la poursuite de
la modernisation de nos armées, qui appelleront des moyens
budgétaires beaucoup plus élevés après 2003, et
avec les évolutions de l'environnement international et
stratégique.
A. UN REDRESSEMENT DU TITRE III QUI S'EFFECTUE AU DÉTRIMENT DES CRÉDITS D'ÉQUIPEMENT
Evolution du budget de la défense depuis
1997
Crédits inscrits en loi de finances initiale (hors pensions)
(en milliards d'euros courants)
|
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2002/2001 |
Rémunérations et charges sociales |
11,848 |
12,267 |
12,626 |
12,813 |
12,906 |
13,199 |
+ 2,3 % |
Fonctionnement |
3,735 |
3,545 |
3,223 |
3,193 |
3,178 |
3,257 |
+ 2,5 % |
Titre III |
15,583 |
15,812 |
15,849 |
16,006 |
16,085 |
16,457 |
+ 2,3 % |
Titres V et VI |
13,523 |
12,348 |
13,110 |
12,646 |
12,718 |
12,395 |
- 2,5 % |
TOTAL |
29,106 |
28,160 |
28,959 |
28,652 |
28,803 |
28,853 |
+ 0,2 % |
.
Une légère progression inférieure à
l'érosion monétaire et à l'augmentation du budget
général
Compte tenu de l'érosion monétaire, le budget de la
défense pour 2002, qui progresse en valeur de 0,17 %,
connaîtra en réalité un recul de 1 % et se situera au
niveau le plus bas depuis 1997. Dans le même temps, le budget
général augmentera de 2%.
La
part du budget de la défense (hors pensions) dans le budget
général
, qui s'élevait à 11,04% en 2001, ne
sera plus que de
10,84% en 2002
. Le budget de la défense (hors
pensions) représentait 2,03% du PIB en 2000 et 1,97% en 2001. Il n'en
représentera plus que
1,89% du PIB en 2002
.
.
L'augmentation continue des dépenses de
rémunérations et charges sociales
Le budget pour 2002 confirme l'
augmentation continue des dépenses de
rémunérations et de charges sociales
depuis la mise en oeuvre
de la professionnalisation. Celles-ci ne représentaient que 40,7 % du
budget de la défense (hors pensions) en 1997, mais passeront à
45,7 % de ce même budget en 2002.
Cette progression tient peu aux évolutions d'effectifs des
armées
. L'effet mécanique des suppressions et
créations de postes prévues par la loi de programmation
entraîne une charge supplémentaire de l'ordre de 81 millions
d'euros. La création, non prévue en programmation, de 700 emplois
de sous-officiers de gendarmerie et de 371 emplois au profit du service de
santé des armées représente pour sa part 30 millions
d'euros. Un crédit supplémentaire de 17 millions d'euros est
également ouvert pour permettre le recrutement de 700 ouvriers sur
emplois vacants. Enfin, la création de 2 335 emplois contractuels,
dans le cadre de l'article 34 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2001,
correspond à des personnels actuellement employés
« hors budget » dans les quartiers ou les cercles de
garnison. Elle implique l'inscription au budget d'une dépense de
49 millions d'euros.
Parallèlement, un ajustement des crédits à la situation
réelle des personnels civils et militaires entraîne une
réduction de 104 millions d'euros des dépenses de
rémunérations et charges sociales. Une mesure de
réduction des effectifs civils
(suppression de 1 052 emplois
de civils et de 1 300 emplois d'ouvriers professionnels) provoque une
économie de 65 millions d'euros.
Les mesures salariales sous-tendent l'essentiel de la progression des
dépenses de rémunérations et charges sociales
. Elles
représentent près de 300 millions d'euros, dont 282 millions
d'euros pour la réévaluation des rémunérations
principales et 28 millions d'euros de mesures indicielles pour les bas
salaires. Les
mesures catégorielles spécifiques
pour les
personnels militaires et civils de la défense, particulièrement
les sous-officiers, représentent 51 millions d'euros, alors qu'en
application de la programmation, la dotation relative aux pécules est
réduite de près de 47 millions d'euros.
.
Une amorce de redressement des crédits de
fonctionnement
L'effet mécanique de la mise en oeuvre de la programmation
représente une diminution de 76,5 millions d'euros des besoins de
crédits de fonctionnement, mais ces derniers connaissent un
relèvement significatif de 2,5 %, soit près de
80 millions d'euros.
Diverses
mesures
contribuent à relever des dotations
fortement comprimées en début de loi de programmation :
- une réévaluation de la dotation des carburants (+ 29,2 millions
d'euros), calculée sur la base d'un baril à 22 dollars et d'un
dollar à 0,99 euro,
- un renforcement spécifique des moyens de la gendarmerie
(+ 60,7 millions d'euros),
- un relèvement des dotations consacrées à
l'activité des forces (+ 53,4 millions d'euros),
- diverses mesures représentant près de 70 millions d'euros
et concernant les moyens de fonctionnement généraux (+
33 millions d'euros), l'indemnité compensatrice versée
à la SNCF (+ 17,5 millions d'euros), l'externalisation au titre de
l'informatique et des télécommunications (+ 4,6 millions
d'euros).
En contrepartie, deux mesures viennent en atténuation des crédits
du titre III :
- une prorogation, à titre non reconductible, de l'économie
réalisée en 2001 sur la dotation d'alimentation grâce
à l'utilisation de la trésorerie du compte spécial du
Trésor relatif aux subsistances militaires (- 22,9 millions
d'euros),
- un nouveau transfert, pour un montant de 40,7 millions d'euros, de
crédits d'entretien programmé des matériels du titre III
au titre V.
.
Des dépenses en capital de nouveau inférieures
au montant prévu par la « revue de programmes »
Avec
12,395 milliards d'euros
,
les crédits de paiement des
titres V et VI se situent en recul de 2,5 % par rapport à 2001
.
Comme en 2001, ils englobent une dotation de 190,6 millions d'euros
destinée au budget civil de recherche et développement.
Lors de la présentation du projet de budget, le ministre de la
défense a précisé que les armées
bénéficieraient en outre en 2002 de
crédits de reports
à hauteur de 400 millions d'euros
, ce montant ayant
été retenu dès la construction du budget 2002.
Quant aux
autorisations de programme
, elles ne progressent que de
0,7 % et représentent
13 milliards d'euros
.
B. UN ÉCART CROISSANT AVEC LES OBJECTIFS DE LA LOI DE PROGRAMMATION EN MATIÈRE D'ÉQUIPEMENT
Le budget de la défense pour 2002 constitue le dernier élément permettant d'avoir une vision à peu près complète de ce qu'aura été l'application de la loi de programmation militaire 1997-2002. Ce premier bilan fait apparaître une évolution divergente entre le titre III et les dépenses en capital des titres V et VI.
Evolution des dépenses du titre III, hors
pensions
(en milliards d'euros courants)
|
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Loi de finances initiale |
15,58 |
15,81 |
15,85 |
16,01 |
16,08 |
16,45 |
Exécution budgétaire |
16,20 |
16,70 |
16,67 |
16,94 |
- |
- |
(Source : Cour des comptes)
Exprimée en francs 1995, l'annuité prévue par le titre III
par la loi de programmation devait être maintenue à
99 milliards de francs, soit 15,09 milliards d'euros, au cours des
6 années 1997-2002. Le tableau ci-dessus montre que les lois de
finances successives se sont inscrites dans cette perspective,
les
ressources effectivement allouées au titre III en gestion
budgétaire s'étant avérées systématiquement
supérieures d'environ 5 % aux crédits initiaux
du fait
notamment de la charge des opérations extérieures situées
chaque année entre 400 et 500 millions d'euros.
Si l'on isole le facteur « OPEX », correspondant à
des charges exceptionnelles bien que récurrentes, on voit donc qu'en ce
qui concerne le titre III, le projet de budget pour 2002, à l'image des
cinq budgets précédents, traduit une exécution rigoureuse,
voire légèrement supérieure, de la loi de programmation.
Observons toutefois qu'en dépit de l'absence de toute mesure
catégorielle spécifique aux armées entre 1997 et 2001, la
montée des rémunérations et charges sociales, du fait
notamment des mesures générales de revalorisation des salaires
dans la fonction publique, a nécessité des réductions plus
fortes que prévues des autres composants du titre III. Des
crédits d'entretien programmé de matériel ont ainsi
été transférés à plusieurs reprises au titre
V alors que parallèlement, les dotations de fonctionnement courant
étaient comprimées. A la suite d'une « revue du titre
III » a été amorcée, à partir du budget
2000, une remontée des moyens de fonctionnement qui se poursuivra en
2002.
Satisfaisante au titre III, l'exécution de la loi de programmation
militaire l'est beaucoup moins aux titres V et VI.
Evolution des dépenses des titres V et VI
(en milliards d'euros courants)
|
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Loi de finances initiale |
13,52 |
12,35 |
13,11 |
12,65 |
12,72 |
12,40 |
Crédits consommés* |
12,69 |
11,67 |
11,77 |
12,00 |
- |
- |
(Source : Cour des comptes)
*Les crédits consommés sont constitués de dépenses
exécutées par le ministère de la défense,
auxquelles sont ajoutés les montants des transferts au CEA et au titre
du BCRD.
Le tableau ci-dessus appelle trois commentaires :
. premièrement,
à l'exception de l'année 1997, toutes
les lois de finances initiales
comme le projet de loi de finances pour 2002
se sont systématiquement placées en retrait par rapport aux
montants prévus par la loi de programmation
. Le budget 1998 a
été marqué par une « encoche » de 1,27
milliard d'euros par rapport à la loi de programmation. Le budget 1999,
consécutif à la « revue de programmes », se
situait à mi-chemin entre le niveau de 1998 et le niveau requis par la
loi de programmation.
Le gouvernement s'était alors solennellement
engagé à stabiliser l'effort d'équipement jusqu'en
2002
1(
*
)
mais en 2000 comme en 2001, les
crédits votés ont été de nouveau réduits par
rapport à la « revue de programmes ». Il en ira de
même
en 2002, les crédits d'équipement atteignant en
volume leur plus bas niveau depuis six ans
.
. deuxièmement,
les crédits d'équipement effectivement
consommés ont été notablement inférieurs à
ceux inscrits dans ces lois de finances successives
, principalement en
raison d'
annulations de crédits
qui représentent, de 1997
à la fin novembre 2001,
5,2 milliards d'euros
. Ces annulations
ont servi à gager l'ouverture de crédits au titre III pour le
financement des OPEX et, dans une certaine mesure, la recapitalisation de GIAT
Industries.
. troisièmement enfin,
les crédits consommés englobent
une série de dépenses transférées sur les
crédits d'équipements
. Il s'agit d'une charge d'entretien
programmé des matériels auparavant supportée par le titre
III et surtout d'un
transfert au budget civil de recherche et de
développement
(630 millions d'euros de 1997 à 2001 auxquels
s'ajoutent 190 millions d'euros en 2002).
Lors de son audition devant votre commission le 18 octobre dernier, M. Yves
Gleizes, délégué général pour l'armement, a
considéré qu'au total, ces différentes opérations,
projet de budget pour 2002 inclus, aboutissaient à une
diminution de
ressources de 70 milliards de francs
(10,67 milliards d'euros)
par
rapport à la loi de programmation militaire
et
de 45 milliards de
francs
(6,86 milliards d'euros)
par rapport à la
« revue de programmes »
.
Le général Jean-Pierre Kelche, chef d'état-major des
armées, a, pour sa part, chiffré à
68 milliards de
francs
(10,37 milliards d'euros) les
encoches,
« bourrages » et annulations
opérés de
1997 à 2001 auxquels s'ajoute en 2002, une nouvelle encoche de 7,4
milliards de francs (1,13 milliard d'euros) par rapport à la
« revue de programmes » et de 11,7 milliards de francs
(1,78 milliard d'euros) par rapport à la loi de programmation, les
titres V et VI devant par ailleurs supporter une charge supplémentaire
d'entretien programmé des matériels (40,7 millions d'euros) et le
transfert précité au BCRD (190 millions d'euros). Au total, le
général Kelche a estimé que
ce sont environ 16 % des
crédits qui ont manqué aux armées
par rapport à
l'enveloppe prévue par la loi de programmation 1997-2002, soit
l'équivalent d'une année de programmation.
II. LES CRÉDITS DE L'ANCIENNE SECTION COMMUNE
A. PRÉSENTATION GÉNÉRALE
Pour 2002, les crédits de l'ancienne section commune se monteront à 7,7 milliards d'euros , soit une progression de 3,9 % par rapport à 2001. Leur part dans l'ensemble du budget de la défense (hors pensions) s'élève à 26,7 %.
Evolution des crédits de l'ancienne section commune
(en millions d'euros)
|
2001 |
2002 |
% |
TITRE III |
3 756 |
3 894 |
+ 3,7 |
DGA |
406 |
379 |
- 6,7 |
Soutien interarmées |
291 |
317 |
+ 9,2 |
Renseignement |
150 |
161 |
+ 7,7 |
Administration générale |
2 825 |
2 848 |
+ 0,8 |
Etat-major des armées |
84 |
189 |
+ 126,5 |
TITRES V ET VI |
3 667 |
3 817 |
+ 4,1 |
DGA |
1 724 |
1 726 |
+ 0,1 |
Soutien interarmées |
156 |
152 |
- 3,0 |
Renseignement |
125 |
127 |
+ 1,2 |
Administration générale |
137 |
139 |
+ 1,0 |
Etat-major des armées |
1 525 |
1 673 |
+ 9,7 |
TOTAL |
7 423 |
7 711 |
+ 3,9 |
DGA |
2 130 |
2 105 |
- 1,2 |
Soutien interarmées |
447 |
469 |
+ 4,9 |
Renseignement |
275 |
288 |
- 4,7 |
Administration générale |
2 962 |
2 987 |
+ 0,8 |
Etat-major des armées |
1 609 |
1 862 |
+ 15,8 |
Les
dépenses ordinaires
s'établissent à
3,9
milliards d'euros
, soit 3,7 % de plus qu'en 2001. Les crédits de
rémunérations et de charges sociales s'élèvent
à 3,1 milliards d'euros, soit 5,4 % de plus qu'en 2001, alors que
les dépenses de fonctionnement courant, avec 0,7 milliard d'euros,
ne progresseront que de 1,2 %.
Les
dépenses en capital
des titres V et VI progressent de 4,2 %,
passant de 3,7 milliards d'euros en 2001 à
3,8 milliards de
francs pour 2002
.
Ces évolutions ne sont pas en elles mêmes très
significatives compte tenu de
l'hétérogénéité des actions
concernées. En 2002, plusieurs changements de périmètre
contribuent à majorer les crédits des services communs, alors que
parallèlement, la forte augmentation des crédits consacrés
aux forces nucléaire se répercute sur les dépenses en
capital de la DGA et de l'État-major des armées.
B. ÉVOLUTION PAR AGRÉGAT
1. La délégation générale pour l'armement (DGA)
Les crédits regroupés sous l'agrégat DGA s'élèvent à 2,1 milliards d'euros , soit une diminution de 1,2 % par rapport à 2001. Les dépenses ordinaires s'établissent à 378 millions d'euros (- 6,7 %), alors que les dépenses en capital se montent à 1,7 milliard d'euros (+ 0,1 %).
Evolution des crédits de la DGA
(en millions d'euros)
|
2001 |
2002 |
% |
Rémunérations et charges sociales |
144,024 |
118,886 |
- 17,5 |
Fonctionnement |
262,239 |
259,987 |
- 0,9 |
Total dépenses ordinaires |
406,264 |
378,873 |
- 6,7 |
Titre V |
1 432,202 |
1 434,310 |
+ 0,1 |
Titre VI |
291,925 |
292,136 |
+ 0,1 |
Total dépenses en capital |
1 724,127 |
1 726,446 |
+ 0,1 |
TOTAL |
2 130,391 |
2 105,319 |
- 1,2 |
La forte
diminution des crédits de rémunérations et de charges
sociales traduit la diminution des effectifs militaires et des transferts
d'emplois vers désormais pris en charge par la subvention de
fonctionnement des écoles de la DGA, alors que les crédits de
fonctionnement, après une forte diminution les années
passées, sont stabilisées.
Les crédits d'études, d'équipement et d'infrastructure du
titre V, qui regroupent pour l'essentiel les crédits d'études
amont et les dotations transférées au commissariat à
l'énergie atomique, demeurent stables, de même que les
crédits du titre VI qui comportent une participation de la
défense au budget civil de recherche et de développement (BCRD)
équivalent à celle de 2001 (190 millions d'euros).
2. Le soutien interarmées
Les
crédits regroupés sous l'agrégat « soutien
interarmées » représentent
469 millions d'euros et
progressent de 4,9 %.
Ils englobent désormais les crédits relatifs à la poste
interarmées, auparavant répartis sur d'autres agrégats.
Evolution des crédits consacrés aux « soutiens interarmées »
(en millions d'euros)
|
2001 |
2002 |
% |
Rémunérations et charges sociales |
221,628 |
243,685 |
+ 10,0 |
Fonctionnement |
69,152 |
73,809 |
+ 6,7 |
Total dépenses ordinaires |
290,781 |
317,495 |
+ 9,2 |
Titre V |
58,591 |
55,006 |
- 6,1 |
Titre VI |
97,702 |
96,574 |
- 1,2 |
Total dépenses en capital |
156,293 |
151,580 |
- 3,0 |
TOTAL |
447,074 |
469,075 |
+ 4,9 |
Cet
agrégat regroupe uniquement :
.
le
budget de service de santé des armées
, qui se
monte à 254 millions d'euros, soit une
progression de 1,7 %
imputable pour l'essentiel à un renforcement des effectifs. Les
crédits de fonctionnement, fortement réduits les années
passées, sont stabilisés, alors que les ressources
extrabudgétaires liées à l'activité
hospitalière du service, rattachées en cours d'exercice de
crédits de fonds de concours, connaîtront un important changement
lié à l'application aux hôpitaux des armées du
régime de la dotation globale hospitalière.
.
le
budget du service des essences
, qui s'élève
à 92 millions d'euros, soit un niveau sensiblement supérieur (+
3,7 %) à celui de l'an passé.
.
le budget (hors frais de personnels) de la
Direction à
l'information et à la communication (DICOD
), qui se montera à
13,5 millions d'euros, soit légèrement moins qu'en 2001,
.
les
dépense d'équipement culturel et social
inscrites au titre VI, qui s'élèvent à 94,3 millions
d'euros, cette rubrique couvrant essentiellement la
subvention versée
par l'Etat au territoire de Polynésie française,
en
application de la convention pour le renforcement de son autonomie
économique, qui garantit au territoire, pendant dix ans, le maintien de
flux financiers compensant la fermeture du centre d'expérimentations du
Pacifique,
. les crédits de rémunération et de fonctionnement
relatifs à la
poste
interarmées
, auparavant
répartis entre les trois armées et la gendarmerie, qui
s'élèvent à 13 millions d'euros.
3. Le renseignement
Avec 288 millions d'euros , les crédits inscrits sous l'agrégat "Renseignement" progressent de 4,7 %. Les dépenses ordinaires s'élèvent à 161 millions d'euros, soit 7,7 % de plus qu'en 2001 alors que les dépenses en capital augmentent de 1,2 % et atteignent 127 millions d'euros.
Evolution des crédits consacrés au renseignement
(en millions d'euros)
|
2001 |
2002 |
% |
Rémunérations et charges sociales |
112,878 |
123,651 |
+ 9,5 |
Fonctionnement |
36,946 |
37,690 |
+ 2,0 |
Total dépenses ordinaires |
149,825 |
161,341 |
+ 7,7 |
Titre V |
125,539 |
127,095 |
+ 1,2 |
Titre VI |
- |
- |
- |
Total dépenses en capital |
125,539 |
127,095 |
+ 1,2 |
Total |
275,364 |
288,436 |
+ 4,7 |
Cet agrégat regroupe uniquement le budget de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), qui atteint 135,6 millions d'euros, ainsi que les crédits de fonctionnement et d'équipement de la Direction de protection et de sécurité de la défense , qui se montent à 11,8 millions d'euros, et de la Direction du renseignement militaire (DRM), qui représentent 17,3 millions d'euros.
4. L'administration générale
Les dépenses d'administration générale (hors pensions) atteignent 2,98 milliards d'euros , soit une progression de 0,8 % par rapport à 2001.
Evolution des crédits d'administration générale
(en millions d'euros)
|
2001 |
2002 |
% |
Rémunérations et charges sociales |
2 524,971 |
2 540,804 |
+ 0,6 |
Fonctionnement |
299,948 |
307,275 |
+ 2,4 |
Total dépenses ordinaires |
2 824,920 |
2 848,080 |
+ 0,8 |
Titre V |
101,371 |
93,693 |
- 7,6 |
Titre VI |
36,077 |
45,128 |
+ 25,1 |
Total dépenses en capital |
137,448 |
138,821 |
+ 1,0 |
Total |
2 962,368 |
2 986,901 |
+ 0,8 |
Cet
agrégat regroupe notamment :
. à hauteur de plus de
2,5 milliards d'euros
, les
dépenses de rémunérations et charges sociales de
l'ensemble des personnels civils
de la défense (80 995 postes en
2002) hormis ceux relevant de la zone comptes de commerce,
. l'
indemnité compensatrice versée à la SNCF
(150,6 millions de francs), qui augmente de 3 %,
. les frais de fonctionnement de l'administration centrale (plus de 100
millions d'euros),
. des dépenses d'études, d'équipement et d'infrastructure
aux titres V et VI qui s'élèvent à 138 millions d'euros et
qui progressent de 1 %. Outre des crédits d'infrastructure (45 millions
d'euros), ces dépenses englobent celles du
Fonds pour les
restructurations de la défense
(28,5 millions d'euros).
5. L'état-major des armées
Les crédits regroupés sous l'agrégat « Etat-major des armées », créé en 1999, s'élèvent à 1,9 milliard d'euros , soit 15,8 % de plus qu'en 2001, dont 189 millions d'euros au titre des dépenses ordinaires (+ 126,5 %) et 1,7 milliard d'euros au titre des dépenses en capital (+ 9,7 %).
Evolution des crédits consacrés à l'état-major des armées
(en millions d'euros)
|
2001 |
2002 |
% |
Rémunérations et charges sociales |
3,217 |
110,454 |
|
Fonctionnement |
80,506 |
79,165 |
- 1,7 |
Total dépenses ordinaires |
83,723 |
189,620 |
+ 126,5 |
Titre V |
1 525,017 |
1 670,348 |
+ 9,5 |
Titre VI |
- |
2,439 |
- |
Total dépenses en capital |
1 525,017 |
1 672,787 |
+ 9,7 |
Total |
1 608,740 |
1 862,407 |
+ 15,8 |
Les
dépenses concernant les
postes permanents à
l'étranger
(126 millions d'euros, 919 emplois) ont été
transférées à cet agrégat.
Les crédits d'équipement inscrits au titre V concernent
essentiellement
l'espace
et les
systèmes d'information et de
communication
(369 millions d'euros dont 176 millions d'euros pour le
programme d'observation spatiale Hélios II et 149 millions d'euros pour
le programme de télécommunications Syracuse III), et les
forces nucléaires
(1 068 millions d'euros, dont 551 millions
d'euros consacrés au missile stratégique M51 et 218 millions
d'euros transférés au commissariat à l'énergie
atomique au titre des charges nucléaires).
CHAPITRE II -
LES QUESTIONS NUCLÉAIRES
Alors
que les crédits consacrés à l'équipement classique
dans le budget de la défense pour 2002 subissent une forte diminution,
ceux relatifs à la dissuasion nucléaire connaîtront un vif
redressement : + 13 % pour les crédits de paiement et + 22,9 % pour
les autorisations de programme.
Cette situation fait suite à une diminution rapide des crédits du
nucléaire depuis une dizaine d'années, et singulièrement
au cours de l'actuelle loi de programmation.
Avant d'analyser plus en détail cette évolution, qui
répond à l'augmentation des besoins financiers pour la
réalisation de nos principaux programmes, votre rapporteur souhaite
replacer notre force de dissuasion dans le contexte stratégique
international. Il est clair que les événements du
11 septembre dernier et la matérialisation du risque terroriste,
mais aussi l'ensemble des questions liées à la
prolifération et à la contre-prolifération, conduisent
à s'interroger sur le sens profond de notre effort d'entretien et de
modernisation des forces nucléaires.
I. LA DISSUASION NUCLÉAIRE DANS LE CONTEXTE GÉOSTRATÉGIQUE ACTUEL : PERMANENCE ET ÉVOLUTIONS
En
frappant les Etats-Unis au coeur même de leur territoire national et en
leur infligeant un dommage massif, les attentats du 11 septembre ont
matérialisé, avec un degré d'intensité que l'on
aurait eu peine à imaginer, l'émergence de la menace terroriste.
La place désormais acquise par des organisations non-étatiques
dans les questions de sécurité internationale contribue, avec
d'autres évolutions telles que la prolifération dans le domaine
balistique et dans celui des armes de destruction massive, à modifier le
panorama stratégique mondial.
Un débat s'est ouvert, entre ceux qui décèlent une
« rupture », remettent en cause les analyses qui fondent
nos politiques de défense, et ceux qui ne voient dans les
événements actuels qu'une évolution très largement
prise en compte dans les concepts stratégiques définis dès
la fin de la guerre froide.
La dissuasion nucléaire est largement concernée par ce
débat. Faut-il voir dans les milliers de morts de New York et Washington
la démonstration qu'elle ne répond plus aux besoins de protection
face à ces menaces nouvelles ? Garde-t-elle au contraire sa
pertinence dans un contexte international où les menaces nouvelles
s'ajoutent -et ne se substituent en rien- aux menaces traditionnelles ?
Sans trancher ce débat qui dépasse largement le cadre de cet avis
budgétaire, votre rapporteur souhaiterait simplement rappeler une
réalité, à savoir que le monde reste dominé par le
fait nucléaire. La dissuasion nucléaire ne peut donc être
du jour au lendemain reléguée au rang des outils dépourvus
d'utilité. Cela ne signifie pas que, dans ses composantes comme dans la
doctrine qui la sous-tend, la dissuasion nucléaire doive restée
figée dans les choix opérés il y a plusieurs
décennies, aux temps de la guerre froide. Elle doit au contraire
s'adapter au nouveau contexte.
A. LE MONDE RESTE DOMINÉ PAR LE FAIT NUCLÉAIRE
S'il
semble indispensable de tirer tous les enseignements des
événements de septembre dernier, il serait dangereux d'en faire
le prisme unique de nos analyses. Comme nous avons pu le constater au cours de
la dernière décennie, les crises se succèdent sans
nécessairement se ressembler. Ce n'est donc pas à la
lumière de la dernière d'entre elles que notre politique de
défense doit être définie, mais en fonction de
données beaucoup plus permanentes intégrant toute la
variété des menaces.
Il n'est pas inutile de rappeler que, dès 1994, le
Livre blanc de la
défense
consacrait un long développement aux
«
vulnérabilités nouvelles »,
au
premier rang desquelles figure le terrorisme, considéré comme
«
la principale menace non militaire qui soit en mesure d'affecter
notre sécurité ».
Ce thème était
repris dans le rapport annexé de la loi de programmation militaire
1997-2002.
Aucune incompatibilité n'était donc ressentie entre la prise en
compte du risque terroriste et le maintien du concept de dissuasion
nucléaire, et ce pour deux raisons :
- il n'a jamais été dans la vocation de la dissuasion
nucléaire de parer à toutes les menaces, et notamment à la
menace terroriste,
- la menace terroriste n'est qu'une caractéristique, parmi d'autres,
d'un environnement international incertain où coexistent de nombreux
facteurs de risque et d'insécurité et dans lequel la dissuasion
nucléaire conserve sa pertinence comme garantie ultime des
intérêts vitaux.
Le monde reste en effet dominé par le fait nucléaire. Les deux
grandes puissances conservent des arsenaux considérables, bien qu'en
voie de réduction, et à leurs côtés, des puissances
nucléaires, reconnues ou non, renforcent les leurs.
Parallèlement, tous les instruments de désarmement
nucléaire et de non prolifération sont aujourd'hui au point mort.
• Les forces nucléaires des Etats-Unis et de la Russie :
réduction quantitative, amélioration qualitative
La réduction des armements nucléaires russes et américains
a été engagée dans le cadre des
accords START
.
L'accord START I, signé en 1991, avait défini pour chacun des
deux pays un niveau de 6 000 têtes nucléaires, objectif
pratiquement atteint aujourd'hui. La ratification par la Douma du traité
START II, le 14 avril 2000, bien que conditionné au respect par les
Etats-Unis du traité ABM, avait ouvert la voie à une nouvelle
diminution (3 000 têtes nucléaires pour la Russie et 3 500
pour les Etats-Unis à l'horizon 2007) et à la négociation
d'un nouveau traité START III, fixant des objectifs encore
inférieurs.
L'
arrivée de la nouvelle administration américaine
a
partiellement changé la donne. Le principe de réductions
très significatives va de pair, dans l'esprit des responsables
américains, avec le développement de moyens défensifs,
c'est à dire le système de défense anti-missiles. La mise
en oeuvre de ces réductions semble désormais liée à
la modification, voire à l'abandon du traité ABM, et paraît
plutôt envisagée sous la forme de
décisions
unilatérales
.
C'est dans ce contexte que lors de sa rencontre avec Vladimir Poutine, le 13
novembre dernier, le président Bush a annoncé son intention de
réduire des deux-tiers dans les dix années à venir les
forces nucléaires américaines
, qui ne comporteraient plus que
1 700 à 2 200 têtes nucléaires.
Le
même jour,
le président russe
, qui préconise depuis
plusieurs mois une réduction drastique des deux arsenaux à
hauteur de 1 500 têtes nucléaires,
a lui aussi
proposé de réduire d'au moins deux-tiers l'arsenal de son
pays
.
Ces annonces spectaculaires restent désormais à clarifier, la
Russie souhaitant leur formalisation dans un traité alors que les
Etats-Unis ont déjà fait part de leurs réticences
vis-à-vis de textes trop contraignants. Par ailleurs, toutes les
décisions en ce domaine restent suspendues au débat
américano-russe sur le devenir du traité ABM et le
déploiement de la défense antimissiles.
Afin d'
éviter tout contresens sur la signification de cette
importante inflexion des politiques américaine et russe
, votre
rapporteur croit utile d'apporter plusieurs précisions.
Tout d'abord, même si le principe de ces réductions est
confirmé dans les prochains mois,
les Etats-Unis et la Russie
continueront à disposer, pour plusieurs années encore, d'arsenaux
considérables
.
Pour ces deux pays, la poursuite de la réduction des arsenaux
engagée dans la dernière décennie répond au souci
premier de ne pas avoir à maintenir dans leurs forces nucléaires
un trop grand nombre d'
armes anciennes
dont les coûts de maintien
en condition pèsent lourdement sur les budgets sans pour autant que leur
fiabilité et leur sûreté soient parfaitement garanties.
Elle ne remet pas en cause les choix fondamentaux qui fondent l'architecture
même de ces forces nucléaires. Les deux pays continueront à
s'appuyer sur la flexibilité d'un arsenal fondé sur la triade
nucléaire : missiles balistiques sol/sol intercontinentaux,
sous-marins, bombardiers. Les Etats-Unis conservent par ailleurs
intégralement les possibilités de reconstituer un arsenal plus
important et, outre la triade, ils disposent d'une gamme d'armes
nucléaires de puissance variable prêtes à s'intégrer
dans leurs forces. Ils conservent également la possibilité de
retraiter des matières nucléaires en cas de besoin, ainsi que
d'effectuer des essais nucléaires, les installations étant
simplement « mises sous cocon ».
Mais surtout,
les Etats-Unis comme la Russie restent engagés dans des
programmes de modernisation de leurs forces nucléaires
qui doivent
en améliorer les performances.
Les Etats-Unis procèdent à de nombreuses améliorations sur
leur missile balistique sol/sol intercontinental Minuteman III, qui
bénéficiera d'un nouveau système de guidage et sera
doté de têtes nucléaires plus modernes. La composante
maritime verra quatre SNLE supplémentaires équipés du
missile Trident II alors qu'une nouvelle génération de SNLE et de
missiles balistiques sont à l'étude pour l'horizon 2015.
En Russie, les contraintes financières ne remettent pas en cause les
projets d'évolution de la composante sol/sol, avec la mise en place de
missiles Topol (SS27) plus performants, alors qu'un SNLE de nouvelle
génération, le Borey, équipé d'un nouveau missile
balistique, est en cours de construction. Un projet de bombardier à long
rayon d'action est également en cours d'élaboration pour un
horizon 2010.
• La montée en puissance des autres nations nucléaires
Parmi les puissances militaires reconnues, seule
la Chine n'a pas
diminué son arsenal nucléaire
qui, au contraire, irait
plutôt en augmentant, surtout qualitativement. Elle détiendrait
aujourd'hui environ 300 têtes nucléaires stratégiques,
auxquelles s'ajouteraient 150 têtes tactiques non
déployées. L'arsenal chinois comporte trois composantes
(aérienne, terrestre et sous-marine), mais repose surtout sur les moyens
basés au sol. Les
missiles balistiques sol-sol
à
propulsion liquide vont être
remplacés par des engins à
propulsion solide
: le missile Dongfong 21, de 1700 km de
portée, adapté à un lanceur mobile, le Dongfong 31, lui
aussi mobile, mais d'une portée de 8 000 km, testé avec
succès à l'été 1999 et le Dongfong 41, de
12 000 km de portée, qui pourrait emporter des charges multiples.
Un
SNLE de nouvelle génération
, équipé d'un
missile dérivé du Dongfong 31, remplacera vers 2005 l'unique SNLE
chinois, l'objectif étant, à terme de disposer de 4 à 6
SNLE. La Chine modernise également sa flotte de
bombardiers
stratégiques
.
Après les 5 essais nucléaires du mois de mai 1998, qui ont
confirmé ses capacités de production de matières
nucléaires et de réalisation d'armes, l'
Inde
semble
déterminée à développer un arsenal complet
dont la finalité principale est la dissuasion vis-à-vis de la
Chine. Elle poursuit la réalisation d'un ambitieux programme de mise au
point de missiles balistiques avec le Prithvi et surtout l'Agni, missile
stratégique à propulsion solide capable d'emporter une charge de
l'ordre d'une tonne sur une distance de 2 500 kilomètres. C'est la
dernière version de ce missile, l'Agni -2, qui a été
testée en vol en avril 1999.
Le
Pakistan
a lui aussi fait la démonstration de sa
capacité nucléaire militaire en procédant en mai 1998
à des expérimentations souterraines. Il entreprend la
réalisation de têtes pour missiles et a testé au mois
d'avril 1999, peu après le tir indien, un missile balistique Ghauri
à propulsion liquide, mis au point avec l'aide de la Corée du
Nord, d'une portée théorique de 1 500 kilomètres pour une
charge utile de 700 kg, ainsi qu'un missile à carburant solide Shaheen,
inspiré semble-t-il d'une technologie chinoise, d'une portée
théorique de 750 km pour une charge utile d'une tonne.
• Le blocage des instruments multilatéraux de désarmement
et de non-prolifération
L'année 2001 n'aura connu aucun progrès quant à la
perspective de mise en oeuvre des instruments multilatéraux de
désarmement et de prolifération.
La condition requise pour l'entrée en vigueur
du traité
d'interdiction complète des essais nucléaires
, à
savoir sa ratification par les 44 Etats membres de la Conférence du
désarmement possédant des capacités nucléaires de
recherche ou de production d'énergie, n'est toujours pas remplie.
L'Inde, le Pakistan et la Corée du Nord demeurent les trois seuls Etats,
parmi les 44 dont la ratification est requise, à n'avoir pas
signé le traité.
Bien que signataires, la Chine, l'Iran, Israël et l'Egypte ne l'ont pas
ratifié. Enfin, après son rejet par le Sénat le 13 octobre
1999, la ratification par les Etats-Unis est toujours en suspens.
D'autre part, la négociation d'un traité universel,
vérifiable et non discriminatoire d'
interdiction de production de
matières fissiles pour les armes nucléaires
(fissile
material cut-off treaty ou « cut-off »)
n'a toujours
pas pu démarrer, faute d'accord sur le mandat de négociation.
Des divergences sont en effet apparues, notamment entre les puissances
nucléaires reconnues et le groupe des pays non alignés, sur la
prise en compte ou non des stocks de matières fissiles
déjà constituées, les Etats-Unis, la France et le
Royaume-Uni souhaitant l'ouverture d'une négociation selon les termes du
mandat Shannon, agréé en 1995, qui n'inclut pas les stocks de
matières fissiles.
Enfin, la négociation d'un protocole de renforcement de la convention
d'interdiction des armes biologiques a évolué au mois
d'août dernier.
B. POUR UNE DISSUASION ADAPTÉE AU CONTEXTE STRATÉGIQUE INTERNATIONAL
Face aux
évolutions, mais aussi aux permanences de l'environnement international,
comment se présente notre force nationale de dissuasion ?
Tout d'abord, il faut rappeler que notre force de dissuasion est
désormais dimensionnée dans une logique de «
stricte
suffisance ».
La « stricte suffisance » peut se résumer en
trois caractéristiques
: la
permanence à la mer
d'un et, si nécessaire, de deux sous-marins
armés de missiles
stratégiques, une
composante aérienne
à la fois
plus visible et plus souple d'emploi, et des
moyens de simulation
qui
garantissent la fiabilité, et donc la crédibilité des
armes nucléaires en l'absence d'essais en vraie grandeur.
Ces trois éléments forment
un tout cohérent
et on
ne voit guère de palier inférieur à la stricte suffisance
ainsi définie. En deçà de ce palier, nous passerions sous
un seuil critique pour notre crédibilité.
Nos forces nucléaires ont vocation à doter la France de la
capacité d'infliger des dommages inacceptables à tout Etat qui
s'en prendrait à ses intérêts vitaux, «
en
toute circonstance et quelles que soient la localisation ou la nature de la
menace
», selon la formulation retenue le 8 juin dernier par le
Président de la République.
Si le scénario de la guerre froide, c'est à dire la menace d'une
agression aéroterrestre massive contre l'Europe, a peu de chances de se
reproduire à moyen terme, la manifestation d'une menace majeure ne peut
être totalement exclue, dans la mesure où subsisteront dans le
monde et pendant encore longtemps, des arsenaux nucléaires importants,
et d'autres en voie d'accroissement. Dans ce contexte, la dissuasion demeure la
garantie ultime de notre survie face à une toute puissance majeure
hostile et dotée des moyens de mettre en cause notre existence
même. C'est la première fonction de notre armement
nucléaire.
Mais comme l'a reconnu le Livre blanc de 1994, d'autres types de menaces sur
nos intérêts vitaux peuvent apparaître du fait de la
prolifération des armes de destruction massive. Le Président de
la République affirmait dès 1995 que «
seule la
force de dissuasion garantit la France contre l'éventuel recours
à des armes de destruction massive, quelle qu'en soit leur
nature »
. Le premier ministre rappelait en 1999 que l'arme
nucléaire permettait à la France «
de faire face aux
risques liés à l'existence d'armes de destruction massive et de
vecteurs balistiques, en préservant notre liberté de manoeuvre
face à une menace contre nos intérêts
vitaux »
. Dès lors, la modernisation de l'arsenal
nucléaire français doit «
désormais
prendre en considération les armes balistiques et de destruction
massive dont se dotent certaines puissances ».
Ainsi n'est-il
plus possible de résumer le concept français à une
dissuasion du faible au fort : il n'est pas exclu qu'en raison des
développements de la prolifération, des puissances
régionales soient à même, à l'avenir, de mettre en
cause nos intérêts vitaux. Cette idée a été
réaffirmée avec force par le Président de la
République dans son intervention du 8 juin 2001, et face au risque d'un
échec des politiques de non-prolifération, la France
considère que la meilleure réponse demeure celle de la dissuasion
nucléaire.
Le Président de la République a précisé que dans un
tel cas, «
le choix ne serait pas entre l'anéantissement
complet d'un pays ou l'inaction. Les dommages auxquels s'exposerait un
éventuel agresseur s'exerceraient en priorité sur ses centres de
pouvoir, politique, économique et militaire
». Il s'agit,
à cet égard, d'adapter la menace dissuasive à l'enjeu d'un
conflit qui ne serait pas, face à une puissance régionale, notre
survie même. Notre concept ne se résume plus à la
« dissuasion anti-cités » mais évolue vers
une dissuasion « adaptée » à la nature et
à la variété des menaces.
Cette formulation quelque peu nouvelle de la doctrine de la dissuasion
française doit bien entendu inspirer l'adaptation de nos outils de
dissuasion. Nos forces nucléaires doivent être en mesure de
menacer de manière crédible une plus large gamme d'objectifs,
afin de garantir la dissuasion en toutes circonstances. La modulation de la
puissance explosive des têtes nucléaires et le renforcement de
leurs capacités de pénétration, la variété
des types de vecteurs et l'amélioration de leur portée et de leur
précision, sont autant de paramètres qui sont d'ores et
déjà pris en compte pour l'évolution de notre dissuasion.
Ces différents éléments sont au centre des enjeux de la
modernisation de nos forces nucléaires au cours des quinze prochaines
années.
II. LE DÉROULEMENT DES PROGRAMMES NUCLÉAIRES
L'abandon de la composante sol-sol, la fermeture des usines de
production de matière fissile militaire, l'arrêt définitif
des essais nucléaires et le démantèlement des sites
d'expérimentation, la réduction du volume et de la posture
d'alerte des composantes sous-marine et aéroportée ont
entraîné une
forte contraction,
en
très peu
d'années,
de notre force de dissuasion nucléaire
,
ajustée au nouveau contexte stratégique «
dans le
strict respect des principes de suffisance et de
crédibilité
», selon les termes de la loi de
programmation.
Cette diminution unilatérale du format des forces nucléaires et
des moyens consacrés à la dissuasion rend d'autant plus
indispensable la réalisation des deux objectifs assignés à
nos programmes nucléaires :
- la modernisation et le renouvellement des composantes sous-marine et
aéroportée,
- la réussite du programme de simulation indispensable, et l'absence
d'essais en vraie grandeur, à la fiabilité et à la
sûreté des armes futures.
A. LA MODERNISATION ET LE RENOUVELLEMENT DES COMPOSANTES SOUS-MARINE ET AÉROPORTÉE
1. La Force océanique stratégique
Les
objectifs assignés à la force océanique stratégique
arrêtés par la loi de programmation prévoient :
- la réalisation de 4 sous-marins lanceurs d'engins de nouvelle
génération (SNLE-NG) appelés à prendre la suite des
SNLE de type « Redoutable » et caractérisés
notamment par une invulnérabilité accrue du fait de leur
discrétion acoustique,
- le remplacement du missile balistique M 4 en service sur les SNLE de type
« Redoutable » par le missile M 45 doté d'une
tête nucléaire nouvelle, la TN 75,
- puis à échéance plus lointaine, le remplacement du M 45
par un missile plus performant, le M 51, équipé dans un premier
temps de la TN 75 puis, en 2015, de la nouvelle tête océanique
(TNO).
Ces grands objectifs guident toujours la réalisation de nos programmes,
sous réserve de divers aménagements de calendrier.
La force océanique stratégique se compose aujourd'hui de
4 bâtiments
, nombre considéré comme le minimum
indispensable pour assurer, compte tenu des cycles d'entretien, la permanence
à la mer de 2 bâtiments si nécessaire, et ce afin de parer
la neutralisation éventuelle de l'un d'entre eux.
Le premier SNLE-NG, le Triomphant, est entré en service début
1997. Le deuxième, le Téméraire, a été admis
au service actif en décembre 1999. L'admission au service actif des
deux derniers SNLE-NG
est prévue à l'été 2004
pour le Vigilant et a été repoussée de 2008 à 2010
pour le Terrible, dont la commande est intervenue en 2000.
S'agissant des
missiles balistiques
, l'actuelle dotation de missiles M4
ne restera en service que sur l'Indomptable, dont le retrait du service actif
interviendra fin 2003. Les SNLE-NG Triomphant et Téméraire ont
été équipés, dès ou peu après leur
admission au service actif, du missile M 45 et de la tête
nucléaire TN 75 de capacité de pénétration
améliorée. Il en ira de même pour le Vigilant. L'autre SNLE
de génération actuelle, l'Inflexible, qui devrait demeurer en
service jusqu'à l'été 2007 a été
adapté ce printemps pour emporter le missile M 45.
A partir de 2010, la FOST sera dotée d'un nouveau missile, le
missile
M 51
, dont la portée avec un chargement complet en
têtes nucléaires sera de 6 000 km, contre 4 000 km pour le M
45, ce qui permettra d'augmenter les zones de patrouille. Les missiles M 51
seront équipés dans un premier temps de la tête
nucléaire TN 75 et des aides à la pénétration du
missile M45, puis, à partir de 2015, de la nouvelle tête
nucléaire océanique (TNO) et d'un nouveau système d'aide
à la pénétration.
Le calendrier de la modernisation de la FOST, tel qu'il vient d'être
décrit, appelle plusieurs commentaires.
Tout d'abord, il faut rappeler qu'à la suite de la « revue de
programmes », avait été décidée une
importante modification des échéances. La durée du
développement du missile M 51 a été réduite de
manière à pouvoir équiper directement le Terrible
dès son admission au service actif à l'été 2008.
Cet aménagement du calendrier, présentée comme une
opération exemplaire d'optimisation, devait se traduire par une
économie globale de l'ordre de 840 millions d'euros sur les
programmes SNLE-NG, M45 et M51.
Ce calendrier se trouve de nouveau remis en cause, trois ans à peine
après avoir été arrêté, du fait du
décalage de deux ans
, annoncé cette année, de
l'admission au service actif du 4
ème
SNLE-NG, le Terrible.
La première question qui se pose concerne les
conséquences
pour la FOST de ce décalage de deux années
. Sachant que le
retrait du service actif du dernier SNLE de génération actuelle,
l'Inflexible, a été repoussé à un an, jusqu'en
2007, la FOST ne comprendra plus que trois SNLE-NG entre 2007 et 2010. Cette
situation devrait être sans incidence sur le maintien de la permanence
à la mer dans les conditions requises puisque, durant cette
période, aucun des trois bâtiments ne sera immobilisé pour
un entretien de longue durée. En effet, l'indisponibilité pour
entretien périodique et réparation (IPER) du Vigilant, 3è
SNLE-NG admis au service actif, n'interviendra qu'en 2010, lors de
l'entrée en service du Terrible. La situation, avec trois
bâtiments de 2007 à 2010, ne devrait donc pas être
différente de celle que nous connaissons avec quatre bâtiments
dont un en IPER. Il faut toutefois souligner qu'après ce
réaménagement, lié à la contrainte
financière qui pèse sur le budget d'équipement de la
Marine, il ne reste guère de marge de manoeuvre, le respect des
nouvelles échéances devenant impératif.
Deuxièmement,
ce changement de calendrier brise la cohérence
des décisions prises en 1998 visant à optimiser la conduite des
programmes SNLE-NG et M51
. Il est tout particulièrement regrettable
qu'après avoir encouragé l'industriel à
accélérer de deux ans la livraison du M51, on lui impose de
revenir à la date de livraison initialement prévue. En
l'état actuel des choses, l'échéance de réalisation
des essais de M51, dont la logique avait été profondément
revue pour s'adapter au calendrier, n'est pas remise en cause. Mais il est
évident qu'un « trou » de deux ans entre les essais
et le début de la phase d'industrialisation ne pourrait que
désorganiser profondément l'industriel.
Votre rapporteur ne peut donc que déplorer
la perturbation qui vient
à nouveau d'affecter ce programme
, au risque de remettre en cause
une large partie des bénéfices liés au calendrier
« optimisé » défini en 1998.
Il est également regrettable qu'après les difficultés
survenues l'an passé sur la négociation de la deuxième
tranche de développement du M 51 entre EADS et la DGA, le budget 2002
fasse planer un nouvel élément d'incertitude sur le programme en
ne prévoyant pas les 1,2 milliard d'euros d'autorisations de programme
qui doivent y être affectés. Il semblerait que la mise en place de
ces autorisations de programme soit envisagée pour le début 2003,
ce qui ne produirait que quelques semaines de décalage avec
l'échéance contractuelle du 27 décembre 2002. Il en
résultera alors des pénalités pour le ministère de
la défense.
2. La composante aéroportée
La
composante aéroportée de notre force de dissuasion constitue le
complément nécessaire de la composante sous-marine et se
caractérise par une mobilité et une souplesse d'emploi permettant
de diversifier les modes de pénétration. Mise en oeuvre depuis le
sol ou depuis le porte-avions, elle peut contribuer de manière plus
visible à l'exercice de la dissuasion.
La composante aéroportée repose sur trois escadrons de Mirage
2000-N de l'armée de l'air et sur les Super-Etendard modernisés
de l'aéronavale, qui emportent le missile air sol moyenne portée
(ASMP), dont la portée varie de 300 km en haute altitude à 80 km
en basse altitude et qui est équipé de la tête
nucléaire TN 81.
La composante aéroportée sera entièrement
renouvelée à partir de 2007 par l'entrée en service des
Rafale Marine et Air, le remplacement de l'ASMP par l'ASMP
amélioré (ASMP-A) et le remplacement de la TN 81 par la nouvelle
tête nucléaire aéroportée (TNA).
Les tête nucléaires TN 81 commenceront à être
retirées du service en 2007 pour être remplacées par les
TNA.
La livraison du
vecteur ASMP-A
devrait intervenir à partir de
2007, le
lancement du stade de réalisation
ayant
été notifié en décembre 2000. Il
bénéficiera du vecteur à stratoréacteur VESTA, mais
à la suite de la suspension du programme de missile antinavires futur
(ANF), la remise en cause du développement simultané des deux
missiles rendra nécessaires des travaux complémentaires pour
l'ASMP-A. L'ASMP-A se caractérisera par une portée et une
capacité de pénétration des défenses nettement
supérieures à celles de l'ASMP.
L'ASMP-A équipera dans un premier temps un escadron de Mirage 2000-N, le
missile étant adapté à cet appareil. Dès 2008, un
escadron de Rafale Air sera équipé de l'ASMP-A, ainsi que la
flotille des Rafale marine. Le deuxième escadron de Rafale air sera mis
en service en 2015 et le troisième en 2017.
B. LE PROGRAMME DE SIMULATION
La mise en oeuvre du programme de simulation constitue le second impératif pour notre force de dissuasion car il conditionne la garantie de la fiabilité et de la sûreté des armes futures.
1. Les enjeux du programme de simulation
De
l'ensemble des puissances nucléaires reconnues, la France se distingue
en ayant à la fois renoncé juridiquement aux essais
nucléaires, en ratifiant le traité d'interdiction complète
des essais nucléaires, et renoncé matériellement et de
manière irréversible à sa capacité d'effectuer de
tels essais, en démantelant les installations du Centre
d'expérimentations du Pacifique.
Le programme de simulation apparaît dans ce contexte comme indispensable
à la garantie de la fiabilité et de la sûreté des
armes futures, c'est-à-dire de celles qui remplaceront les armes
actuelles sans avoir pu bénéficier des essais en vraie grandeur.
Votre rapporteur souhaite ici rappeler les
principaux enjeux de la
simulation
:
- les armes subissent des phénomènes de vieillissement des
charges qu'il importe de surveiller et dont il faut mesurer les incidences pour
y remédier. En l'absence d'essais, la simulation permettra
d'évaluer les conséquences du vieillissement des charges et
contribuera au maintien de la durée de vie des armes actuelles, telle
qu'elle est prévue jusqu'à leur remplacement ;
- les têtes nucléaires appelées à remplacer les
charges actuelles seront définies à partir des concepts
"robustes" testés lors de la dernière campagne d'essais, qui
toléreront des écarts de modélisation ou de
réalisation, limités par rapport aux engins testés. Mais
seule la simulation permettra de garantir la fiabilité et la
sûreté de ces charges nouvelles, garantie sans laquelle la
dissuasion n'aurait plus la même crédibilité.
- enfin, à plus long terme, les concepteurs des armes qui assureront le
renouvellement appartiendront à une génération n'ayant pas
été confrontée aux essais en grandeur réelle.
Au-delà des données recueillies lors de ces essais, la simulation
leur fournira des calculateurs et des moyens expérimentaux
adaptés (la machine radiographique AIRIX et le laser Mégajoule)
leur permettant de confronter leurs calculs à l'expérience.
C'est à cette triple nécessité que répond le
programme de simulation.
2. La mise en oeuvre du programme de simulation
La
simulation permettra de reproduire, à l'aide d'expériences et de
calculs, les phénomènes rencontrés au cours du
fonctionnement d'une charge nucléaire.
La mise en oeuvre du programme de simulation repose sur de
puissants moyens
de simulation numérique
fournis par des ordinateurs beaucoup plus
performants que ceux actuellement en service, et sur des
installations
expérimentales
permettant de valider les modèles physiques
décrivant les phénomènes essentiels du fonctionnement des
armes nucléaires : la machine radiographique AIRIX pour la visualisation
détaillée du comportement dynamique de l'arme, et le laser
Mégajoule pour l'étude des phénomènes physiques,
notamment thermonucléaires.
La
machine radiographique AIRIX
, située à Moronvilliers
dans la Marne, sera vouée à l'analyse de la dynamique des
matériaux et elle permettra d'étudier le fonctionnement non
nucléaire des armes, à l'aide d'expériences au cours
desquelles les matériaux nucléaires sont remplacés par des
matériaux inertes.
Projet de plus grande ampleur, le
laser Mégajoule
qui sera
installé au Barp, en Gironde, est pour sa part destiné à
l'étude du domaine thermonucléaire. Il permettra de
déclencher une combustion thermonucléaire sur une très
petite quantité de matière et de mesurer ainsi les processus
physiques élémentaires. Le développement du projet doit
s'effectuer en plusieurs étapes, avec tout d'abord la construction d'une
ligne d'intégration laser (LIL) qui devra valider et qualifier la
définition de la chaîne laser de base du laser Mégajoule.
Le
calendrier du programme de simulation
a été
arrêté en fonction de plusieurs critères : d'une part, la
relève des équipes de concepteurs actuels par des équipes
n'ayant pas connu les essais nucléaires, qui implique la mise à
disposition de ces dernières de moyens de simulation, et d'autre part
les échéances de remplacement des charges nucléaires
actuelles.
Dans le cadre du projet
Tera
, le CEA a commencé à se doter
de puissants moyens de calcul, indispensables à la production de
résultats dans un délai raisonnable. La machine Tera 5 terapflops
(5 milliards d'opérations par seconde), sera livrée en cette fin
d'année 2001, deux autres machines devant être livrées
d'ici 2009 pour atteindre une puissance de calcul de 100 teraflops.
En ce qui concerne le
laser Mégajoule
, la ligne
d'intégration laser, en cours de réalisation, devrait être
mise en service en mars 2002. La mise à disposition du laser
mégajoule à pleine puissance a été avancée
pour tenir compte des échéances de départ en retraite des
équipes de concepteurs. Elle est désormais prévue pour
2008, les premières expériences d'ignition et de combustion
thermonucléaire étant prévues pour fin 2010.
S'agissant de la
machine radiographique AIRIX
, une première phase
est désormais achevée avec la réalisation de
l'installation « un axe », opérationnelle depuis
décembre 2000. L'ensemble complet, qui implique la réalisation
d'un second axe, devrait être opérationnel en 2011, le lancement
de cette réalisation ayant été repoussée
au-delà de 2008, ce qui impliquera de réaliser les travaux sur
une durée inférieure à celle initialement prévue.
Ce décalage est la contrepartie de l'avancement du calendrier de mise en
service du laser mégajoule.
L'ensemble du programme de mise en place de moyens expérimentaux de
simulation représente un coût global de 5 milliards d'euros.
Depuis le lancement du programme, environ 750 millions d'euros ont
été engagés pour l'acquisition de ces moyens.
Pour 2002, le programme de simulation mobilisera environ 320 millions
d'euros de crédits de paiement, dont 140 pour le laser
mégajoule.
Votre rapporteur croit devoir souligner une nouvelle fois que la contrepartie
indispensable aux engagements internationaux souscrits par la France et
à ses initiatives unilatérales, réside dans le respect
scrupuleux de l'échéancier et des enveloppes financières
allouées à la simulation par la dernière loi de
programmation militaire. C'est en effet sur la simulation que reposera la
crédibilité de notre dissuasion, puisqu'elle seule permettra
d'évaluer le comportement des armes et d'en garantir la
fiabilité.
III. LES CRÉDITS DE LA DISSUASION NUCLÉAIRE : APRÈS UNE FORTE DÉCRUE, UNE REMONTÉE LIÉE À LA RÉALISATION DES GRANDS PROGRAMMES DE MODERNISATION DE NOS FORCES NUCLÉAIRES
La
diminution des ressources consacrées à la dissuasion
nucléaire au cours de la dernière décennie découle
logiquement de la révision de notre posture nucléaire. Ainsi, la
part du budget de la défense consacrée à la dissuasion
nucléaire, qui représentait encore 31,4 % du titre V en 1990, est
appelée à se stabiliser autour de 20 %.
Votre rapporteur a souligné au cours des trois dernières
années que cette diminution avait été beaucoup plus rapide
que ne le prévoyait la loi de programmation militaire 1997-2002. De
fait, en 2001, les crédits du nucléaire avaient atteint leur
point historiquement le plus bas, ne représentant plus que 18,7 % d'un
budget d'équipement de la défense lui-même inférieur
au niveau attendu.
Le projet de budget inverse la tendance, traduisant un fort redressement des
crédits lié à l'entrée en phase de
réalisation de nos principaux programmes.
A. L'ÉVOLUTION GÉNÉRALE : DES CRÉDITS EN REDRESSEMENT
Le
projet de budget pour 2002, par ailleurs en recul pour ce qui concerne
l'ensemble des crédits du titre V, se caractérise par un
vif
redressement des dotations consacrées à la dissuasion
nucléaire
:
- les autorisations de programme progressent de 22,9 % et
s'élèvent à 2,5 milliards d'euros ;
- les crédits de paiement approchent 2,7 milliards d'euros, soit 13 % de
plus qu'en 2001.
Le développement des programmes de missiles M51 et
ASMP-amélioré, la réalisation du laser Mégajoule,
le maintien en condition opérationnelle des SNLE ou encore la
réalisation des programmes de propulsion navale se conjuguent pour
justifier cette forte augmentation des besoins financiers, tant en
autorisations de programme qu'en crédits de paiement, pour 2002.
Ce redressement très significatif des dotations doit être
replacé dans
le contexte de la dernière dizaine
d'années écoulées
: celui d'une
décrue
rapide
et spectaculaire
des crédits affectés à la
dissuasion nucléaire
.
Évolution des dotations consacrées au
nucléaire depuis 1990
dans les lois de finances initiales
(en millions de francs courants)
|
Autorisations de programme |
% du titre V |
Crédits de paiement |
% du titre V |
1990 |
4 774,7 |
27,0 |
4 891,9 |
31,4 |
1991 |
4 776,7 |
27,0 |
4 736,0 |
30,1 |
1992 |
3 992,0 |
25,5 |
4 557,6 |
29,0 |
1993 |
3 227,1 |
21,2 |
4 031,8 |
25,7 |
1994 |
3 125,5 |
22,0 |
3 303,1 |
22,8 |
1995 |
2 967,3 |
20,5 |
3 162,5 |
21,9 |
1996 |
2 817,1 |
20,8 |
2 965,4 |
21,9 |
1997 |
3 066,7 |
22,7 |
2 919,3 |
21,6 |
1998 |
2 516,6 |
20,4 |
2 534,9 |
20,5 |
1999 |
2 033,1 |
15,5 |
2 534,3 |
19,3 |
2000 |
2 808,6 |
21,1 |
2 417,1 |
19,1 |
2001 |
2 049,4 |
15,9 |
2 373,3 |
18,7 |
2002 |
2 518,1 |
19,4 |
2 681,2 |
20,9 |
Ce
tableau montre qu'en monnaie courante, les crédits du nucléaire
demeureront en 2002 très sensiblement inférieurs à leur
niveau de 1997 et que leur remontée n'apparaît forte qu'en raison
du niveau très bas qu'ils avaient atteint en 2001.
Si l'on tient compte de l'érosion monétaire, on observe qu'en
2001, les autorisations de programme représentaient moins de 40 % de
leur niveau dix ans plus tôt, c'est-à-dire en 1991, la proportion
étant de 44 % pour les crédits de paiement. Les autorisations de
programme de 2001 ne représentaient que 70 % de celles de 1996, la
proportion étant de 76 % pour les crédits de paiement.
La forte augmentation de 2002 ne fera que replacer les crédits du
nucléaire à leur niveau de 1998, année où avait
été opérée une forte diminution par rapport au
budget précédent.
Il convient également de rappeler que la réduction des
crédits du nucléaire enregistrée ces dernières
années avait été beaucoup plus forte que ne le
prévoyait la loi de programmation.
Dès 1998, les crédits inscrits en loi de finances initiale
avaient nettement décroché par rapport à la loi de
programmation.
Au cours de l'exercice 1998, le nucléaire avait contribué pour
plus du quart à « l'encoche » opérée
dans les crédits d'équipement du budget de la défense. Un
abattement supérieur à 300 millions d'euros avait
été opéré, avec les conséquences
suivantes :
- pour la FOST, le décalage d'un an du 3e SNLE-NG, l'étalement de
l'adaptation opérationnelle des SNLE de génération
actuelle ainsi qu'une réduction des travaux et rechanges, un moratoire
d'un an sur le programme d'adaptation des SNLE-NG au missile M 51 et sur le
développement du missile lui-même,
- pour la direction des applications militaires du CEA, le ralentissement des
opérations de démantèlement de l'usine de production
d'uranium enrichi de Pierrelatte et de la récupération des
matières nucléaires, la réduction des programmes de
recherche-amont et des programmes de simulation effectués avec les
matériels actuels, ainsi que le décalage d'un certain nombre
d'expérimentations (non-nucléaires) liées à la mise
au point des charges de renouvellement.
Une
réduction de crédits supplémentaire
représentant pour les quatre annuités restant à courir de
la loi de programmation (1999-2002), une
économie globale de 518
millions d'euros
a été décidée dans le cadre de
la « revue de programmes ». Cet abattement a
représenté près de 5 % de l'enveloppe prévue
en programmation pour ces quatre annuités, ce qui ajouté à
"l'encoche" pratiquée en 1998 aboutissait à réduire de
5 % par rapport à la loi sur l'ensemble de la période
1997-2002, les crédits consacrés au nucléaire.
L'essentiel des économies résultait cependant d'une
optimisation des programmes SNLE-NG et M 51
, dont les calendriers
avaient été réaménagés.
La « revue de programmes » s'est également traduite
par une
réduction supplémentaire imposée aux
crédits de maintien en condition opérationnelle
et surtout
une
diminution de 20 % des crédits d'études amont
(hors CEA) consacrées à la dissuasion.
Votre rapporteur s'était inquiété de cette diminution plus
forte que prévue des crédits, notamment des conséquences
à moyen terme, des coupes réalisées dans le financement de
la recherche, qui ont conduit à une réduction de la gamme des
études. L'étalement des opérations d'assainissement des
usines de la vallée du Rhône ne lui paraissait pas opportun du
point de vue du coût pour les finances publiques.
En dépit de ces abattements, les échéances majeures
liées à nos grands programmes, et notamment à la mise en
oeuvre de la simulation, n'avaient pas été affectés.
Il faut donc aujourd'hui se féliciter que le budget pour 2002 prenne en
compte les besoins financiers liés à ces programmes majeurs.
Ce budget 2002 s'approche du niveau moyen (2,9 milliards d'euros par an) retenu
par le projet de loi de programmation militaire 2003-2008 pour les
crédits du nucléaire à partir de 2003.
Le redressement amorcé en 2002 devra donc être poursuivi et
conforté après 2003 pour préserver la cohérence
d'ensemble des différents axes de modernisation des forces militaires.
S'il n'y a pas lieu aujourd'hui de douter du respect, après 2003, de ces
impératifs, votre rapporteur ne peut passer sous silence deux motifs
d'inquiétude :
- le premier porte sur l'avenir même de la programmation militaire
2003-2008, les choix opérés, en matière de crédits
d'équipement, en 2002, rendant très difficile la transition entre
l'actuelle et la future loi de programmation ;
- le second porte sur le risque, déjà en partie
réalisé, de voir la préservation des crédits du
nucléaire s'opérer au prix de coupes très
sévères dans les crédits d'équipement classique.
Cette évolution défavorable du contexte financier de la
défense appelle, s'agissant de la dissuasion nucléaire, une
vigilance tout particulière.
B. LES DOTATIONS CONSACRÉES AUX FORCES NUCLÉAIRES EN 2002
Les dotations consacrées aux forces nucléaires sont, pour l'essentiel (plus de 98 %), regroupées au sein du chapitre 51-71, une part résiduelle figurant au chapitre 52-81 « Etudes », ainsi qu'au chapitre 54-41 « Infrastructures ». Elles sont réparties entre quatre gouverneurs de crédits : l'Etat-major des armées, la délégation générale pour l'armement, la Marine et l'armée de l'Air, une partie conséquente des crédits relevant de l'EMA et de la DGA étant cependant transférée au Commissariat à l'énergie atomique.
Evolution des dotations consacrées aux forces nucléaires
(en millions d'euros)
|
AP 2001 |
AP 2002 |
% |
CP 2001 |
CP 2002 |
% |
Armée de l'air |
84,8 |
206,4 |
+ 143,5 |
93,0 |
96,3 |
+ 3,6 |
Marine |
635,7 |
712,4 |
+ 12,1 |
600,1 |
665,0 |
+ 10,8 |
dont programme SNLE-NG |
289,8 |
280,6 |
- 3,2 |
295,3 |
282,6 |
- 4,3 |
FOST Hors SNLE |
316,8 |
218,6 |
- 31,0 |
268,3 |
166,6 |
- 37,9 |
DGA |
821,5 |
1 037,1 |
+ 26,3 |
820,4 |
851,6 |
+ 4,0 |
dont armement et propulsion nucléaires |
778,4 |
992,8 |
+ 27,5 |
778,4 |
809,4 |
+ 4,0 |
Etat-major des armées |
507,4 |
562,2 |
+ 10,8 |
859,8 |
1 068,4 |
+ 24,3 |
dont charges nucléaires |
227,6 |
225,0 |
- 1,1 |
218,5 |
217,9 |
- 0,3 |
missiles stratégiques |
159,3 |
165,1 |
+ 3,6 |
193,2 |
170,7 |
- 11,6 |
programme M51 |
53,9 |
71,7 |
+ 32,9 |
350,5 |
551,0 |
+ 57,2 |
Total |
2 049,3 |
2 518,1 |
+ 22,9 |
2 373,3 |
2 681,2 |
+ 13,0 |
1. Les crédits transférés au Commissariat à l'énergie atomique
Les
crédits transférés au Commissariat à
l'énergie atomique (CEA) sont destinés à financer trois
types de missions :
-
la conception, la fabrication et la maintenance des armes,
qui
constituent l'essentiel de l'activité militaire du CEA et comportent la
production de la tête nucléaire TN75 équipant les SNLE-NG,
le maintien en condition opérationnelle des têtes équipant
la FOST et la composante aéroportée, le retrait des têtes
de la composante sol-sol et des TN71 des SNLE de génération
actuelle, le développement des futures têtes nucléaires
océanique et aéroportée et enfin le développement
de la simulation et des grands équipements associés (laser
mégajoule, machine radiographique AIRIX),
- la
fourniture de matières
et surtout l'assainissement et le
démantèlement des anciennes usines de production de
matières fissiles de Marcoule et Pierrelatte.
- la mise au point des
systèmes de propulsion nucléaire
équipant les sous-marins et le porte-avions nucléaires.
Ces crédits sont exclusivement inscrits au titre V alors qu'il couvrent
pour une large part des dépenses de fonctionnement. Le CEA se trouve
donc placé, pour ses activités militaires, dans la même
situation qu'un industriel fournisseur des armées, alors que ses
activités civiles sont financées à la fois par des
crédits du titre III et des dépenses en capital.
Les crédits transférés au CEA pour les trois missions
armes, matières et propulsion navale, s'élèveront en 2002
à
1,3 milliard d'euros en autorisations de programme (+ 22,5 %)
et
1,1 milliard d'euros en crédits de paiement (+ 7,3 %).
Ce
relèvement significatif fait suite à plusieurs années
marquées par des moyens inférieurs d'environ 270 millions d'euros
à ceux prévus par la loi de programmation pour les missions
« armes » et « matières »
(« encoche » de 1998 et « revue de
programmes »).
La direction des applications militaires (DAM) du CEA a entrepris depuis 1996
une
profonde restructuration
et a réduit ses effectifs de
5 700 agents en 1996 à 4 500 aujourd'hui. Cette
réduction d'effectifs de 1 200 postes a essentiellement
concerné les sites de la région parisienne, les centres de
Vaujours, Monthléry et Limeil ayant été fermés,
seul subsistant, en Ile de France, le site de Bruyères le Chatel,
employant environ 2000 agents. Plus de la moitié des agents seront
désormais répartis sur les trois centres de province (Valduc, Le
Ripault et le Barp) où sont implantés les moyens lourds
d'expérimentation et de fabrication.
Le coût total de cette restructuration, qui a impliqué
plus de
2000 mobilités
, dont 1 500 à caractère
géographique, est évalué à 120 millions
d'euros. L'économie réalisée sur les dépenses de
soutien s'élèvera, pour 2001, à 44 millions d'euros,
la réduction cumulée des frais de soutien depuis 1996
s'élèvera à 183 millions d'euros, soit un gain
déjà très nettement supérieur au coût de la
restructuration.
Depuis le 1
er
janvier dernier, la DAM s'est vue rattachée la
gestion des programmes et activités de propulsion nucléaire
navale conduites par le service technique mixte des chaufferies
nucléaires de propulsion navale (STXN). Centrée dans un premier
temps sur les SNLE, cette activité s'est étendue aux sous-marins
nucléaires d'attaque et au porte-avions Charles-de-Gaulle.
Pour 2002, le budget transféré au CEA se répartira comme
suit :
- pour la
mission « armes »
, 802 millions d'euros en
autorisations de programme (+ 12,6 %) et 714 millions d'euros en crédits
de paiement (+ 3,1 %) ;
- pour la
mission « matières »,
246 millions
d'euros en autorisations de programme (+ 25,1 %) et 193 millions d'euros en
crédits de paiement (- 7,1 %) ;
- pour la
propulsion navale
, 253,7 millions d'euros en autorisations de
programme (+ 65 %) et 214,7 millions d'euros en crédits de paiement
(+ 47,7 %).
La préparation de la construction du bâtiment destiné
à abriter le laser mégajoule, les opérations de
démantèlement des usines de la vallée du Rhône et la
réalisation du réacteur à essais RES sont à
l'origine de cette augmentation des dotations.
S'agissant de l'
usine
de Marcoule
, qui assurait la production de
plutonium pour les programmes militaires mais également le retraitement
de combustibles de réacteurs civils, le démantèlement est
assuré par Cogema, la contribution financière du ministère
de la défense s'établissant au prorata des activités
passées réalisées à son profit, soit 40 %. Pour un
coût global des opérations de démantèlement et
d'assainissement évalué à 5,6 milliards d'euros hors
taxes, la part pesant sur le budget de la défense
s'élèverait donc à 2,3 milliards d'euros. Pour 2002, les
dotations prévues au budget de la défense
s'élèveront à 65,4 millions d'euros en autorisations de
programme et 40,2 millions d'euros en crédits de paiement.
En ce qui concerne les
usine d'enrichissement d'uranium de Pierrelatte
,
toutes les opérations de mise à l'arrêt définitif se
sont terminées fin 2000. Les opérations de
démantèlement doivent entrer en phase de réalisation
industrielle en septembre 2002, avec l'objectif de terminer les grands travaux
en 2007. Le coût total du programme est évalué à 478
millions d'euros. Pour 2002, les dotations s'élèveront à
66 millions d'euros en autorisations de programme et à 39,3 millions
d'euros en crédits de paiement.
Sur les deux sites de Marcoule et Pierrelatte, les personnels de la COGEMA ont
été reconvertis, dans la mesure du possible, dans les
opérations de démantèlement et d'assainissement, mais ils
demeurent aujourd'hui en nombre très supérieur au niveau
réel d'activité des sites, si bien que
les frais fixes
pèsent considérablement sur le coût des
opérations
. C'est la raison pour laquelle votre rapporteur regrette
que le parti ait été pris, pour des raisons budgétaires,
d'étaler ces opérations dans le temps alors qu'une bonne gestion
des fonds publics exigerait qu'elle soit accélérée, y
compris en engageant des financements autres que budgétaires.
En matière de propulsion navale, votre rapporteur insiste à
nouveau sur
le programme de réacteur à essais
(RES)
destiné à remplacer, au centre d'études nucléaires
de Cadarache, l'actuel réacteur d'essais (réacteur de nouvelle
génération : RNG), qui arrivera en fin de vie à
l'horizon 2004.
Un tel réacteur à terre est nécessaire pour
développer de nouveaux composants pour les chaufferies futures, dont, en
premier lieu, la chaufferie du sous-marin d'attaque futur Barracuda, et pour
qualifier les combustibles nucléaires ainsi que les
évolutions techniques des chaufferies nucléaires en service,
évolutions rendues nécessaires par l'expérience acquise
lors de l'exploitation, notamment pour améliorer la sûreté
des réacteurs.
Le RES doit être mis en service en 2007, date cohérente avec la
qualification des principaux composants de la chaufferie du Barracuda, dont
l'admission au service actif du premier exemplaire est prévue vers 2010.
Ce calendrier permettra la continuité des prestations actuellement
fournies par le RNG, dont l'arrêt définitif interviendra entre
2004 et 2006.
Ce programme, dont le coût global avoisinera 600 millions d'euros, se
voit affecter, en 2002, 102,3 millions d'euros d'autorisations de programme (+
204 %) et 53,8 millions d'euros de crédits de paiement (+ 56,9 %). Cette
forte progression des dotations est cohérente avec la montée en
puissance des besoins financiers liés à ce programme.
2. Les crédits consacrés à la force océanique stratégique et à la composante aéroportée
Les
crédits de paiement affectés à la
Force
océanique stratégique
, qui relèvent de la Marine,
s'élèveront à
665 millions d'euros
pour 2002, soit
une progression de 10,8 % et seront principalement consacrés à la
poursuite du
programme de construction des SNLE-NG
, qui absorbera
283
millions d'euros
de crédits de paiement en 2002 et aux
crédits d'entretien programmé du matériel de la FOST, de
l'ordre de 188 millions d'euros.
Les autorisations de programme progresseront pour leur part de 12,1 % et
s'élèveront à 712,4 millions d'euros, la dotation
d'autorisations de programme consacrée à la construction des
SNLE-NG, représentant 281 millions d'euros compte tenu du lancement
de la construction du Terrible, qui mobilisera 177 millions d'euros
d'autorisation de programme.
Les crédits de paiement relevant de l'
Armée de l'Air
et
consacrés au nucléaire se monteront à
96,3 millions
d'euros
en 2002
, contre 93 millions d'euros en 2001. Ces
crédits sont essentiellement consacrés à la maintenance et
à l'adaptation des appareils de la force aérienne
stratégique et de leurs systèmes de transmission, en particulier
les Mirage 2000-N.
En ce qui concerne
les systèmes d'armes
(hors têtes
nucléaires), les crédits de paiement prévus en 2002 au
titre du missile M45 s'élèvent à 9 millions d'euros
alors que
le développement du M51
bénéficiera de
71,7 millions d'euros d'autorisations de programme et de 551 millions
d'euros
de crédits de paiement.
Aucune dotation en autorisation
de programme pour l'affermissement de la première tranche conditionnelle
pour le missile M51 n'est prévue en 2002, la mise en place des
autorisations de programme nécessaires, qui s'élèvent
à 1,2 milliards d'euros, devait s'opérer début 2003 alors
que l'échéance contractuelle portait sur fin décembre
2002. L'ASMP amélioré sera doté de 44,2 millions d'euros
en autorisations de programme et de 104,2 millions d'euros en
crédits de paiement, dont 15,3 millions d'euros au titre du programme
VESTA.
Les
crédits d'études-amont de la DGA
consacrés au
nucléaire s'élèvent pour leur part à 39,2 millions
d'euros, soit
3,2 % de moins que l'an passé.
Par rapport
à 1999, la diminution de la dotation annuelle atteint 28 %. Votre
rapporteur rappelle que la « revue de programme » avait
abouti à une
réduction de 20 %
de ces dotations de
1999 à 2002.
CHAPITRE III -
L'ESPACE ET LE RENSEIGNEMENT MILITAIRES
Après la guerre du Golfe et le conflit du Kosovo, les
attentats du 11 septembre dernier et l'opération militaire en cours
en Afghanistan viennent une nouvelle fois d'illustrer le rôle majeur des
capacités humaines et techniques de renseignement et des
équipements spatiaux, tant dans la prévention que dans la gestion
des crises.
L'actuelle loi de programmation avait fait du renforcement de ces moyens une
orientation forte de notre politique de défense. En dépit des
efforts accomplis, qui permettent à la France de se placer au tout
premier rang en Europe pour le recueil de renseignement et les moyens de
communication, les résultats obtenus n'ont pas été aussi
loin qu'on pouvait l'espérer, du fait de la relative modestie des moyens
budgétaires alloués à ces différentes fonctions et
de la difficulté d'entraîner nos partenaires européens dans
des programmes dépassant nos strictes possibilités
financières nationales.
En matière spatiale, après l'abandon du projet franco-allemand
d'observation radar Horus, l'effort se concentre sur le renouvellement de nos
satellites de télécommunications et d'observation optique,
renvoyant à une coopération européenne encore balbutiante
d'éventuelles capacités supplémentaires en matière
d'observation tout temps, mais aussi dans des domaines clés tels que
l'écoute ou l'alerte avancée.
Le renforcement des moyens humains et techniques des services de renseignement
réalisé tout au long de la loi de programmation militaire se
poursuit quant à lui à un rythme lent mais régulier.
I. L'ESPACE MILITAIRE
Limité dans ses ambitions, le programme spatial
militaire
français s'est trouvé très fortement contrarié au
cours de la première partie de l'actuelle loi de programmation par la
défection de plusieurs de nos partenaires européens sur des
projets majeurs.
L'inclusion du renseignement de niveau stratégique et des moyens
spatiaux parmi les capacités prioritaires identifiées par les
quinze pays européens pour leur force de réaction rapide a
quelque peu atténué les craintes justifiées qui portaient
sur l'avenir du programme spatial français, l'Allemagne et l'Italie
ayant notamment manifesté l'intention de se doter de moyens
d'observation satellitaires complémentaires aux nôtres.
En termes budgétaires, après trois années de fort recul,
les crédits consacrés à l'espace poursuivent leur
redressement amorcé en 2001, principalement en raison de la
montée en puissance du programme satellitaire de
télécommunications Syracuse III. Pour autant, ces crédits
demeurent très en deçà de l'enveloppe financière
définie par la loi de programmation.
Cette modestie des moyens dévolus à l'espace laisse subsister
dans nos projets d'équipements d'importantes lacunes qui ne pourront
être comblées que par un appel à la coopération
européenne.
A. L'AVANCEMENT DU PROGRAMME SPATIAL FRANÇAIS : UN EFFORT CONCENTRÉ SUR LE RENOUVELLEMENT DE NOS SATELLITES DE TÉLÉCOMMUNICATIONS ET D'OBSERVATION OPTIQUE
1. Le programme spatial de télécommunications
La
nécessité de couvrir toutes les zones géographiques
où peuvent se dérouler des opérations, tout comme celle de
protéger les liaisons militaires, ont justifié le
développement de satellites de télécommunications
militaires aux côtés de moyens spatiaux civils couramment
utilisés par les armées.
Avec 4 satellites en orbite lancés entre 1991 et 1996 et 100 stations
sol mises en service entre 1992 et 1997,
le programme Syracuse II
couvre
les principaux besoins des armées en télécommunications
vers les théâtres d'opérations extérieures, besoins
qui exigent la permanence de 2 satellites opérationnels.
Le quatrième satellite, lancé en 1996, a fait l'objet d'actions
de complément afin de
prolonger sa durée de vie jusqu'en
2006
, date à laquelle le relais devra être entièrement
pris par le système successeur Syracuse III.
Du fait du retrait britannique du programme Trimilsatcom et de la
volonté allemande de retarder ses engagements,
la France doit faire
face seule,
du moins dans un premier temps,
à la mise au point de
Syracuse III
. Rappelons que ce programme doit assurer la continuité
du service -ce qui implique nécessairement la mise sur orbite du premier
satellite au plus tard fin 2003- tout en assurant une zone de couverture plus
large, en augmentant le nombre et le type de stations et en améliorant
la capacité de résistance à la guerre électronique.
La composante spatiale, qui devait comporter trois ou quatre satellites, selon
les hypothèses de coopération, serait
réduite à
deux satellites
dans le cadre d'un programme purement national, le nombre
de stations au sol étant de l'ordre de 500, parmi lesquelles de
nombreuses petites stations tactiques.
Les difficultés de la coopération européenne ont conduit
à prévoir
deux phases de réalisation
:
- une
première étape exclusivement sous maîtrise
nationale
en vue de mettre en orbite un premier satellite fin 2003 ;
au cours de cette période, l'Allemagne, qui recherche une garantie
d'accès à une capacité militaire, pourrait louer
l'accès au système français ;
- une seconde étape, indispensable pour satisfaire l'ensemble du besoin
opérationnel, doit compléter la constellation, avec un
deuxième satellite, à partir de la fin 2006. Cette étape
devra être conduite en coopération.
Cette situation nouvelle conduit à une
réévaluation du
coût du programme pour la France
, aujourd'hui estimé à
2,28 milliards d'euros, alors qu'il avait été chiffré
à 1,95 milliard d'euros en 1997 sur la base d'une coopération
trilatérale.
2. Le programme spatial d'observation
Le
système d'observation optique Hélios I est en service depuis 1995
et bénéficie, depuis décembre 1999, du
second satellite
Hélios I-B
, ce qui permet d'accroître la cadence de
renouvellement des images. Hélios I a été
réalisé en coopération avec l'Italie (à hauteur de
14,1 %) et l'Espagne (7 %). Chacun des partenaires bénéficie,
à hauteur de sa participation, d'un accès national et
confidentiel à la programmation et à l'exploitation, 20 % des
prises de vues étant toutefois communes aux trois pays.
La poursuite du programme vise à assurer la continuité du
système Hélios I par le système
Hélios
II
; le premier satellite Hélios II doit être prêt
au lancement au printemps 2004 et le deuxième satellite doit être
disponible à l'été 2005.
Hélios II
se caractérisera par des
performances bien
supérieures à celles d'Hélios I.
Les principaux
progrès seront les suivants :
- une
capacité infrarouge
permettant une observation de nuit et
par temps clair ainsi que la détection d'indices d'activités, de
jour comme de nuit ;
- une
amélioration de la résolution
(actuellement comprise
entre 1 et 2 mètres pour Hélios I) qui sera
inférieure au mètre et se déclinera selon deux modes,
la
haute résolution
, permettant la reconnaissance de tout
objectif d'intérêt militaire, et une capacité de prise de
vues à
très haute résolution
, dont le principe a
été arrêté au cours de l'année 2000 ;
- une
réduction de moitié des délais d'acquisition
et de mise à disposition de l'information alors que
le nombre de
prises de vues sera multiplié par trois.
3. Le budget spatial militaire
Lors du
vote de la loi de programmation militaire, l'objectif assigné sur les 6
années 1997-2002 pour le budget spatial militaire français se
situait à hauteur de 4 % du total des dépenses
d'équipement militaire, soit environ 520 millions d'euros par an, ce qui
représentait déjà, par rapport au début de la
décennie, une réduction de plus de 10 % des crédits.
Que ce soit en loi de finances initiale ou en exécution
budgétaire, les crédits alloués aux moyens spatiaux de
1997 à 2002 sont constamment restés en deçà de cet
objectif.
Crédits de paiement consacrés à l'espace
(en millions d'euros)
|
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Crédits inscrits en loi de finances initiale
|
503
|
474
|
413
|
350
|
416
|
451
|
Crédits consommés
|
475
|
473
|
374
|
321
|
- |
- |
Le
tableau ci-dessus montre qu'après un fort recul en 1999 et 2000, les
crédits relatifs à l'espace ont progressé en 2001 et
seront également notablement augmentés en 2002, sans pour autant
retrouver leur niveau du début de la loi de programmation.
Les
dotations consacrées à l'espace dans le budget 2002
s'établissent à
451 millions d'euros en crédits de
paiement et à 343,7 millions d'euros en autorisations de programme,
soit une hausse de 8,4 % des crédits de paiement et une diminution de
28,7 % des autorisations de programme.
Répartition des dotations entre les différents
programmes spatiaux en 2002
(en millions d'euros)
|
AP |
CP |
Syracuse II |
27,1 |
51,1 |
Syracuse III |
104,9 |
156,5 |
Hélios II |
29,3 |
24,2 |
Hélios III |
99,3 |
176,4 |
Pour 2002, l'essentiel des crédits de paiement seront consacrés aux coûts de fabrication d'Hélios II, qui reçoit une dotation sensiblement analogue à celle de 2001, et de Syracuse III, dont la dotation passe de 110 millions d'euros en 2001 à 156 millions d'euros en 2002.
B. PERSPECTIVES ET LIMITES DE LA COOPÉRATION EUROPÉENNE EN MATIÈRE SPATIALE
Hormis
les participations italienne et espagnole sur la construction d'Hélios
I, la coopération européenne en matière spatiale se limite
actuellement à des accords d'échanges de capacité sur les
satellites de télécommunications.
Ainsi, un accord a été signé entre le Royaume-Uni et la
France en 1995, sur une extension de couverture et une aide mutuelle en cas
d'indisponibilité de leurs satellites Syracuse (France) et Skynet
(Royaume-Uni). Il permet à l'une des parties d'utiliser les ressources
spatiales disponibles de l'autre partie.
Un arrangement a été signé avec la Belgique en novembre
1997 pour une location de ressources sur une charge utile Syracuse.
Au début de 1998, des contacts ont été pris avec l'Otan
pour un prêt éventuel de ressources sur Syracuse. Un arrangement
d'entraide et de secours mutuel a été signé à
l'automne 2000. Un arrangement du même type a été
signé avec l'Espagne en 2001.
S'agissant de la construction d'Hélios II, seule la Belgique a pour
l'instant manifesté, l'été dernier, son engagement,
à hauteur de 2,5 %, l'Espagne étant pour sa part susceptible
d'être associée à hauteur de 2,5 à 3 %.
Pour Syracuse III, l'échec du projet de coopération
franco-germano-britannique Trinilsatcom laisse la France seule pour la
réalisation du premier satellite devant assurer la continuité du
service. Pour la seconde phase (réalisation des stations utilisatrices,
de la composante système et des satellites complémentaires) une
coopération franco-allemande est espérée. Par ailleurs,
les Pays-Bas, en mars 2001, se sont montrés intéressés par
le principe d'une participation aux futures charges utiles Syracuse III.
Pour l'heure, les perspectives les plus concrètes concernent la mise en
oeuvre d'un système d'observation satellitaire européen
grâce à l'engagement allemand et italien dans l'imagerie radar. Si
elle se confirmait, cette perspective pallierait l'abandon du programme Horus
et permettrait l'accès de la France, via ses partenaires
européens, à une capacité d'observation « tout
temps ».
1. Vers un système d'observation satellitaire européen
Rappelant que les satellites de reconnaissance figuraient au
rang
des équipements clés pour doter les pays européens de
l'autonomie d'appréciation indispensable à la gestion civile et
militaire des crises, l'état-major des armées indiquait le 7
septembre dernier que les états-majors des armées allemandes,
espagnoles, italiennes et françaises avaient élaboré un
document précisant les besoins opérationnels communs pour un
système global européen d'observation par satellites à
des fins de sécurité et de défense.
Un tel système s'appuierait sur le programme Horus II
complété par deux systèmes en cours de
définition : le programme allemand Sar-Lupe et le programme italien
Cosmo-Skymed.
Le
programme allemand Sar-Lupe
est un projet de système
satellitaire, composé de quatre à six mini-satellites munis de
capteurs d'imagerie radar. La phase de définition s'est achevée
en mai 2001. L'objectif de mise en orbite du premier satellite est 2004 et la
constellation complète devrait être opérationnelle à
l'horizon 2006. Le coût prévisionnel du programme serait de 380
millions d'euros.
L'Italie
a étudié pour sa part un
programme de
constellation Cosmo-Skymed
associant des satellites radars et des
satellites optiques. Initialement dédié à une
activité civile, ce système a fait l'objet d'une étude
d'application militaire. Sur la base de ce programme et de son homologue
français Pléiades, des négociations se déroulent
pour examiner la possibilité d'une coopération franco-italienne
duale, sur la
réalisation conjointe d'un système d'observation
satellites optiques et radars.
Les satellites d'observation radar devraient
être mis en orbite entre 2003 et 2005. Le segment spatial optique est
constitué d'une partie du programme français Pléiades du
CNES. Les satellites d'observation optique de résolution
légèrement submétrique seraient déployés en
2005 et 2007. Le coût global du système est évalué
à 1 070 millions d'euros ( composante radar : 570 millions
d'euros, composante optique : 440 millions d'euros, segment sol ; 60
millions d'euros). La décision de poursuivre cette coopération
dépend des résultats de la phase de définition, attendus
à l'été 2002.
L'intérêt de la coopération autour de ces projets
réside essentiellement pour la France dans la possibilité
d'acquérir ainsi un accès aux capacités d'observation tout
temps, en offrant une alternative au projet d'observation radar Horus
abandonné faute d'accord franco-allemand.
2. Des lacunes à combler
Si
l'engagement allemand et italien se confirme, un pas supplémentaire
important pourra être franchi dans l'accession des pays européens
à une capacité spatiale minimale.
Toutefois, les seuls programmes de télécommunications et
d'observation ne couvrent pas toute l'étendue des besoins
opérationnels. Quatre autres domaines sont identifiés comme
importants pour une future défense spatiale européenne :
- la navigation par satellite,
- la surveillance de l'espace,
- l'écoute électronique,
- l'alerte avancée.
La localisation par satellite
contribue de plus en plus à
l'action militaire, que ce soit pour la définition des positions des
forces ou pour l'utilisation des armements modernes. Elle repose
essentiellement sur le GPS (Global positionning system) mis en oeuvre et
contrôlé par la défense américaine. La France
utilise le GPS en vertu d'un accord avec les Etats-Unis qui expire en 2015 et
qui lui permet un accès contrôlé crypté et garanti
en cas de crise. Cette dépendance a conduit les européens
à étudier le projet de navigation satellite Galileo. Bien
que directement intéressés par l'accès à un tel
système, en complément du GPS, il n'est pas pour l'instant
prévu de développer dans le cadre de Galileo un signal
spécial et sécurisé destiné aux utilisateurs
gouvernementaux. Le coût de développement de cette application
gouvernementale a été chiffré à 150 millions
d'euros sur 8 ans, le budget français de la défense ne pouvant en
tout état de cause supporter à lui seul cette charge.
La
surveillance de l'espace
vise à détecter et identifier
tous les objets spatiaux et participe de ce fait à la prévention
de la militarisation de l'espace et au renseignement sur l'activité
spatiale militaire. A l'issue de la « revue de
programmes », en 1998, la France a renoncé à
développer cette capacité, se trouvant dépendante, comme
les autres pays européens, des données fournies par la Russie ou
les Etats-Unis.
En matière d'
écoute électromagnétique,
la
France, en complément de ses moyens terrestres, navals et
aériens, a développé deux
démonstrateurs lancés avec Hélios IA et Hélios
IB. Le premier a fourni durant 5 ans des renseignements sur l'activité
radar et le second opère dans le domaine des radiocommunications. Par
ailleurs, dans le cadre du programme Essaim, le lancement de trois
micro-satellites destinés à l'écoute des communications
est prévu en 2004. Toutefois, aucune suite n'est pour le moment
envisagée pour ces programmes expérimentaux. Selon
l'état-major des armées, un éventuel programme spatial
européen d'écoute représenterait un coût de 1 220
millions d'euros répartis sur dix ans.
Enfin, dans un contexte profondément modifié depuis la fin de la
guerre froide, à l'heure où les capacités balistiques
à courte et à moyenne portée se développent dans de
nombreux pays, les
systèmes d'alerte avancée
seront
appelés à jouer un rôle majeur dans la protection contre
les menaces visant le territoire national ou les troupes
déployées.
Si les projets américains de défense antimissiles reposent sur
une importante composante spatiale, la France s'est limitée en la
matière à des études d'architecture. Elles visent
à mesurer la valeur d'un concept d'un ou plusieurs satellites
géostationnaires dotés de détecteurs infrarouge, capables
de détecter la phase propulsive des missiles balistiques de moyenne et
longue portée (au-dessus de 1 000 km de portée). Un tel
système, capable d'effectuer dès le temps de paix des missions de
renseignement et de contrôle de la prolifération balistique,
permettrait également de confirmer l'identification du pays lanceur. En
matière de trajectographie, l'utilisation de constellations importantes
de satellites infrarouge en orbite basse observant les objets sur fond d'espace
est nécessaire.
Par ailleurs, une
étude de faisabilité concernant la
défense antimissiles des troupes en opération
a
été lancée par l'OTAN. Cette étude, qui devrait
s'achever en 2004, sera menée par deux équipes industrielles. Une
partie de cette étude portera sur les systèmes d'alerte
avancée, basés dans l'espace ou par radar basé au sol. Les
Américains proposent de partager avec l'Alliance les données
provenant de leur système d'alerte avancée satellitaire futur
SBIRS.
En tout état de cause, et au-delà de ces études,
l'acquisition d'une capacité spatiale d'alerte avancée
apparaît désormais indispensable, mais son coût
-estimé à 760 millions d'euros sur 10 ans pour les seules
études- impose une coopération européenne.
Au total, l'état-major des armées a estimé que
l'acquisition d'une capacité spatiale européenne militaire
minimale mais performante dans l'ensemble des domaines intéressant la
défense représenterait un investissement de l'ordre de 8,3
milliards d'euros, soit un flux annuel moyen de 730 millions d'euros.
Coût d'une capacité spatiale militaire européenne
Applications |
Coût du programme
|
Durée de vie du programme |
Coût annuel
|
Telecom |
3 100 |
15 |
207 |
Observation |
2 300 |
10 |
230 |
Galileo |
150 |
8 |
19 |
Ecoute |
1 220 |
10 |
122 |
Surveillance espace |
760 |
10 |
76 |
Alerte avancée |
760 |
10 |
76 |
Total |
8 290 |
|
730 |
On constate que le coût annuel d'un tel système dépasse largement le niveau actuel du budget spatial militaire, et encore plus celui prévu par la prochaine loi de programmation militaire 2003-2008 (en moyenne 214 millions d'euros).
II. LE RENSEIGNEMENT
«
Outil principal de l'anticipation et de la
prévention des conflits, indispensable à la gestion des
crises »
, selon la loi de programmation militaire, le
renseignement devait bénéficier d'un effort particulier dans le
cadre de la modernisation des armées, tant en termes de moyens humains
que de moyens techniques.
La crise consécutive aux attentats du 11 septembre dernier conforte
cette analyse et justifie une amplification de l'effort qui ne se retrouve que
partiellement dans le projet de budget 2002.
A. L'ÉVOLUTION DES CAPACITÉS FRANÇAISES DANS LE DOMAINE DU RENSEIGNEMENT
En
dehors du domaine du renseignement stratégique, relevant des
systèmes d'observation satellitaire, plusieurs programmes sont
destinés à renforcer les capacités des armées pour
le recueil et l'exploitation du renseignement de théâtre ou du
renseignement tactique.
Dans le domaine du
renseignement d'origine
électromagnétique
, l'année 2000 aura vu la livraison
du
Sarigue-NG
(Système aéroporté du recueil
d'informations de guerre électronique de nouvelle
génération), qui a succédé au DC8 Sarigue. Mis en
oeuvre par l'escadron électronique de l'armée de l'air, cet
appareil à long rayon d'action est voué au recueil de
renseignements relatifs aux radiocommunications et aux radars. Une
capacité de prise d'images photographiques est envisagée
ultérieurement.
Le système complet devrait être
opérationnel en 2002
, soit deux ans après la date
prévue par la loi de programmation. Le programme
MINREM
(Moyen
interarmées navalisé de recherche électronique) est pour
sa part entré dans une première phase, avec le transfert sur le
Bougainville des moyens dont disposait le Berry, retiré du service actif
à la fin 1999. La seconde phase consistera à améliorer la
capacité d'écoute de ce bâtiment, afin d'adapter la charge
utile aux signaux des émetteurs de la nouvelle génération.
Quant au nouveau bâtiment destiné à remplacer le
Bougainville, sa commande est prévue pour cette fin d'année, le
choix de l'industriel venant d'être arrêté. Il s'agira d'un
bâtiment optimisé, dès sa conception, pour l'écoute
électronique, avec une capacité supérieure de traitement
de l'information. Sa livraison n'est envisagée que pour 2006, soit un
décalage de 2 ans par rapport à la loi de programmation
militaire. La rénovation des deux
transalls Gabriel
se poursuit
et devrait s'achever à l'horizon 2006. Par ailleurs, un nouveau
détachement autonome des transmissions devrait être mis en service
en 2001.
Le Bougainville et les transalls Gabriel contribuent actuellement à la
collecte du renseignement pour les opérations d'Afghanistan.
Pour le
renseignement d'origine image
, il est procédé
à l'expérimentation du
drone Hunter
de construction
israélienne, dont l'endurance est supérieure à 24 heures
et qui pourrait également être utilisé pour la
désignation d'objectif laser. L'armée de l'air doit par ailleurs
acquérir le système de
drone Eagle
, proposé par
EADS et l'israëlien IAI. Il permettra de disposer d'une capacité de
surveillance tout temps à longue distance. L'armée de l'air a
également initié un programme d'amélioration des
capacités de reconnaissance des avions de combat au travers de
l'acquisition du pod Presto qui équipera d'ici 2003 le Mirage F1 CR et,
dans une seconde phase, du programme « Reco NG » permettant
à partir de 2006, lors du retrait des Mirage IV P et des Jaguar, une
capacité de reconnaissance image de jour et de nuit, à distance
de sécurité et avec transmission des données en temps
réel.
S'agissant des
drones tactiques
, l'armée de terre a interrompu le
programme Brevel, cet aérodyne de conception ancienne ne permettant en
effet d'emporter qu'un seul type de capteur, ce qui en limitait l'usage
à un seul type de mission. En l'attente de la réalisation,
à l'horizon 2005, de drones tactiques multicapteurs multimissions, le
système Crécerelle actuellement en service sera prolongé.
Les moyens d'acquisition du renseignement du niveau opératif de
l'armée de terre sont regroupés au sein de la
brigade de
renseignement
. Celle-ci comporte actuellement deux unités de
recherche par moyens humains à long et très long rayon d'action
(2
ème
hussards, 13
ème
dragons
parachutistes), un groupement de recueil de l'information composé de
spécialistes en traitement de sources humaines, une unité de
recherche du renseignement d'origine image (61
ème
régiment d'artillerie) chargé de la mise en oeuvre des drones, et
deux formations de guerre électronique (44
ème
et
54
ème
régiments de transmissions). Devrait
également être rattaché pour emploi à la brigade de
renseignement un groupement de recherche aéromobile dont la
création est prévue au sein du 1
er
régiment
d'hélicoptères de combat et qui comportera notamment l'escadrille
d'hélicoptères de détection radar Horizon.
B. L'ÉVOLUTION DES MOYENS BUDGÉTAIRES CONSACRÉS AU RENSEIGNEMENT
Les crédits regroupés dans l'agrégat « renseignement » progresseront de 4,7 % en 2002.
Evolution des crédits de l'agrégat « Renseignement »
(en millions d'euros)
|
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Personnel |
87,6 |
91,8 |
99,4 |
105,3 |
112,9 |
123,6 |
Fonctionnement |
32,6 |
31,0 |
31,1 |
31,1 |
36,9 |
37,7 |
Titre III |
120,2 |
122,8 |
130,5 |
136,4 |
149,8 |
161,3 |
Titre V |
99,2 |
85,6 |
101,7 |
103,7 |
125,5 |
127,1 |
TOTAL |
219,4 |
208,4 |
232,2 |
240,1 |
275,3 |
288,4 |
N.B. : les chiffres ci-dessus incluent, à compter
de
2001, les crédits de la DRM.
Le budget 2002 se traduira par une
hausse de 9,5 % des dépenses
de rémunérations et charges sociales
, liée à
l'augmentation des effectifs, par une légère augmentation
des
crédits de fonctionnement
et par une
poursuite de l'augmentation
des crédits d'équipement.
Ces données ne traduisent cependant qu'imparfaitement l'évolution
des moyens consacrés au renseignement puisqu'ils ne recouvrent que la
rémunération des effectifs civils de la DGSE, son fonctionnement
courant et ses crédits d'équipement, les crédits de
fonctionnement (hors rémunération des personnels) et
d'équipement de la Direction de la protection et de la
sécurité de la défense (DPSD), ainsi que le budget de
fonctionnement et d'équipement de la Direction du Renseignement
Militaire.
Elles n'englobent pas les effectifs militaires de la DGSE, ni les programmes
d'équipement relevant de l'état-major des armées. Elles ne
couvrent pas davantage les moyens de renseignement propres à chaque
armée.
1. La direction générale de la sécurité extérieure
Chargée, selon les termes du décret n°
82-306 du
2 avril 1982 qui a procédé à sa création,
"de
rechercher et d'exploiter les renseignements intéressant la
sécurité de la France, ainsi que de détecter et
d'entraver, hors du territoire national, les activités d'espionnage
dirigées contre les intérêts français afin d'en
prévenir les conséquences",
la DGSE voit ses moyens
renforcés en 2002.
En ce qui concerne ses
effectifs
, les évolutions suivantes sont
enregistrées :
- la DGSE bénéficiera de la
création de 147 postes de
civils,
61 emplois supplémentaires étant en outre
créés à la suite de la transformation en postes de
contractuels d'emplois non budgétaires, en application de la loi
sur les personnels dits « Berkani ». Ces personnels
étaient jusqu'alors rémunérés sur les
crédits de fonctionnement. Les effectifs de civils, qui se montaient
à 2 647 agents en 1997, passent de 3 037 agents en 2001 à
3 244 agents en 2002,
- les effectifs militaires s'établiront à 1 367 hommes, soit
10 postes de moins qu'en 2001, correspondant à la suppression des postes
d'appelés.
Au total,
les effectifs civils et militaires de la DGSE
(seuls les
civils étant rémunérés sur le budget de cette
dernière)
passent de 4 414
à 4 611
agents de 2001
à 2002.
Il faut ajouter que le processus de la rénovation des statuts
particuliers des différents corps de fonctionnaires de la DGSE, qui
n'exigeait pas moins de 18 décrets, est achevé. Le projet de
décret concernant les agents non titulaires est en outre toujours
à l'étude. Indépendamment de la transposition à la
DGSE de mesures de portée générale, qui ont
justifié cette procédure lourde de modification statutaire,
d'autres mesures sont à l'étude, notamment la fusion de
différents corps, l'évolution du statut particulier des chefs
d'études et l'application de la loi relative à la
résorption de l'emploi précaire.
Sur le plan budgétaire, les
crédits de la DGSE
inscrits au
budget de la défense atteindront
259,3 millions d'euros
(+
4,9
%)
et
évolueront comme suit :
- les dépenses de
rémunérations et de charges sociales
s'élèveront à
123,6
millions d'euros
en
2002, soit 9,5 % de plus qu'en 2001 du fait de la création de 147 postes
civils auxquels s'ajoutent 61 emplois contractuels
« Berkani » ;
- les
crédits de fonctionnement courant
demeurent stables et se
monteront à
24,2 millions de francs
(- 0,1 %),
c'est-à-dire à un niveau inférieur d'environ 5 %
à ceux de 1997. Cette légère diminution provient du
transfert vers les rémunérations des crédits permettant
jusqu'alors de financer les emplois dits « Berkani »
(environ 400 000 euros). Il n'en demeure pas moins que l'absence de
relèvement de cette dotation de fonctionnement a imposé de
renoncer à certaines actions en matière de renouvellement de
matériel informatique , de mobilier et de formation des personnels.
- les
dotations d'équipement
s'élèvent à
59,3 millions d'euros en autorisations de programme (- 9,5 %) et
62,5 millions d'euros en crédits de paiement (- 17,2 %).
Près des deux tiers de ces autorisations de programme seront
consacrées à la recherche du renseignement technique, en
particulier les
renouvellements de calculateurs haute performance
et
l'équipement de recueil et d'exploitation du renseignement lié
à la réalisation d'un
nouveau
centre d'interception
.
- les
dotations d'infrastructure
s'élèveront à
36,6 millions d'euros en autorisations de programme (+ 8,1 %) et
à 48,9 millions d'euros en crédits de paiement (+
41,5 %). Environ les trois-quarts des dotations sont consacrées aux
travaux à Paris et en région parisienne sur le site du quartier
des Tourelles, de la caserne Mortier et du fort de Noisy. Le restant concerne
principalement l'aménagement et la rénovation des centres
d'interception existants, ainsi que la poursuite de la construction de nouveaux
centres.
Votre rapporteur rappelle enfin que le budget de la DGSE tel qu'il est
présenté n'inclut pas les
crédits provenant des fonds
spéciaux
inscrits au budget des services du Premier ministre, et
dont l'objet est de financer certaines activités opérationnelles.
Selon les informations récemment fournies par le Premier ministre et par
M. Logerot, premier président de la Cour des Comptes, ces fonds
spéciaux représentent, en loi de finances initiale,
un
crédit annuel de l'ordre de 30 millions d'euros
, auquel peuvent
s'ajouter, en cours d'année, des crédits supplémentaires
de l'ordre de 10 millions d'euros ouverts par des décrets de
répartition non publiés au Journal officiel. Le contrôle de
l'utilisation de ces fonds est assuré d'une part par les services
financiers de la DGSE elle-même et d'autre part par une commission
spéciale de vérification composée de hauts magistrats de
la Cour des comptes et du Conseil d'Etat.
Le Gouvernement a présenté devant l'Assemblée nationale
lors du débat sur les crédits des services généraux
du Premier ministre une
réforme des fonds spéciaux
visant
d'une part à appliquer le droit commun aux dépenses des cabinets
ministériels et à ne réserver les fonds spéciaux
qu'aux actions relevant des services de sécurité et de
renseignement, principalement la DGSE, et d'autre part à soumettre
l'usage de ces fonds au contrôle d'une commission composée de
parlementaires et de magistrats de la Cour des Comptes.
Un amendement adopté par l'Assemblée nationale, devenu
l'
article 77 du projet de loi de finances
, prévoit en effet que
les dépenses faites sur les crédits des fonds spéciaux
sont examinées
chaque année par une commission de
vérification composée de deux députés, deux
sénateurs et deux magistrats de la Cour des Comptes
. Les travaux de
cette commission sont secrets et consistent à vérifier tous les
justificatifs des dépenses opérées avec les fonds
spéciaux. Un rapport annuel sur l'emploi des fonds serait remis au
Président de la République, au Premier ministre et aux
présidents et aux rapporteurs généraux des commissions des
finances des deux assemblées.
Cette implication du Parlement dans la vérification de l'emploi, par la
DGSE, des fonds spéciaux, appelle de la part de votre rapporteur
plusieurs remarques :
- la DGSE étant le principal destinataire des fonds spéciaux, les
autres services de sécurité et de renseignement n'en
bénéficiant que marginalement, cette commission de
vérification sera donc quasi-exclusivement vouée à
examiner des dossiers liés aux activités de la DGSE,
- pour autant, cette vérification ne s'étendra pas à
toutes les activités de la DGSE, mais seulement à celles
financées sur fonds spéciaux, et elle présentera un
caractère essentiellement comptable et financier.
Tout en relevant que cette initiative, qui survient de manière
totalement inattendue, constitue la première application d'une
information du Parlement sur l'activité des services de renseignement,
votre rapporteur ne peut que constater qu'elle traduit une approche
sensiblement différente de celle qui avait inspiré la commission
des affaires étrangères et de la défense au cours des
dernières années, et qui visait à instaurer, dans le cadre
d'une instance à l'effectif réduit, une information et un
dialogue entre parlementaires et services de renseignement.
2. La direction du renseignement militaire (DRM)
La DRM a
été créée peu après la guerre du Golfe, en
1992, pour planifier, coordonner et conduire la recherche et l'exploitation du
renseignement militaire.
La loi de programmation a prévu un renforcement progressif des effectifs
de la DRM qui doivent augmenter d'environ 20 % sur la période pour
atteindre 1 760 agents en 2002.
Actuellement, les effectifs de la DRM se répartissent comme suit :
- environ 775 personnes relevant de l'administration centrale et
réparties entre Paris et la base de soutien à vocation
interarmées de Creil,
- 392 personnes travaillant au sein du
pôle de renseignement
,
situé à Creil et rattaché à la DRM, qui comporte 3
organismes : le centre de formation et d'interprétation
interarmées de l'imagerie (CF3I) qui emploie 199 personnes, le centre de
formation et d'exploitation des émissions
électromagnétiques (CF3E) qui emploie 173 personnes et
l'unité interarmées Hélios qui emploie 20 personnes.
- environ 268 personnes relevant de l'école interarmées du
renseignement et des études linguistiques de Strasbourg.
- près de 290 personnes réparties dans les détachements
avancés de transmissions installés en Afrique et outre-mer et
chargés de procéder à des interceptions.
L'augmentation des effectifs
en 2002 (+ 47 postes) permettra la
montée en puissance du centre de diffusion du renseignement et le
renforcement des personnels affectés au renseignement d'origine
électromagnétique, que ce soit à Creil au CF3E ou dans les
détachements avancés de transmissions qui devraient
bénéficier de la création d'une station nouvelle en
Nouvelle-Calédonie.
Les
crédits de la DRM
(hors rémunérations et
charges sociales) passeront de 17,5 à 17,3 millions d'euros, soit une
diminution de 1,3 %.
Les crédits de fonctionnement s'élèveront à 6,7
millions d'euros, soit 11,3 % de plus que l'an passé, ce qui permettra
de compenser partiellement les coûts d'externalisation liés
à la fin du service national et à la disparition de la ressource
en appelés.
Les crédits d'équipement s'élèveront à 10,5
millions d'euros contre 11,4 millions d'euros en 2001. Il semblerait que le
projet Sirius
, visant à optimiser la gestion et l'exploitation
des moyens de recherche électromagnétique, ne dispose plus de
financements au delà de 2002, ce qui conduirait à sa
suspension.
3. La direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD)
La DPSD
est chargée d'assurer les responsabilités incombant au
ministère de la défense en matière de protection et de
sécurité du personnel, des informations, des matériels et
des installations sensibles. Ses attributions couvrent notamment la
prévention et la recherche des atteintes à la défense
nationale.
Les crédits dévolus à la DPSD (hors
rémunérations et charges sociales) se monteront pour 2002
à
11,8 millions d'euros
, soit une hausse de 10,9 % par rapport
à 2001.
Les crédits de fonctionnement courant augmenteront de 1,1 % et se
monteront à 6,7 millions d'euros.
Les crédits d'équipement (fabrications et infrastructures) se
monteront à 5,1 millions d'euros, soit 1 million d'euros de plus (+
26,8 %) qu'en 2001.
La loi de programmation a prévu une diminution d'environ 10 % des
effectifs de la DPSD de 1997 à 2002. Dans cette optique, ceux-ci
passeront de 1 490 à 1 461 postes de 2001 à 2002. L'an prochain,
les 37 derniers postes d'appelés seront supprimés, ainsi que 6
postes d'officiers et 27 postes de sous-officiers, alors que 18 postes
d'engagés et 23 postes de civils seront créés (363 postes
en 2002).
La plupart des tâches dévolues aux appelés du contingent
seront redistribuées soit par un recours à la sous-traitance
(sécurité des installations, restauration, entretien des locaux),
soit par la mise en place de moyens techniques automatisés
(caméras, alarmes) assurant les fonctions de surveillance. Cette
politique nécessitera une augmentation des moyens de fonctionnement,
alors que parallèlement, la délocalisation de l'organisme central
de la DPSD de Paris à Vanves engendrera des besoins nouveaux
d'aménagement.
CHAPITRE IV -
LES AUTRES ACTIONS COMMUNES
I. LA DÉLÉGATION GÉNÉRALE POUR L'ARMEMENT
Les
crédits relevant de l'agrégat Délégation
générale pour l'armement (DGA) s'élèvent à
2,1 milliards d'euros pour 2002, soit une diminution de 1,2 % par rapport
à l'an passé. On ne saurait toutefois se limiter à cette
stricte approche budgétaire, d'autant qu'une part importante de ces
crédits sont transférés en cours d'exercice hors du
ministère de la défense, que ce soit au Commissariat à
l'énergie atomique ou au Centre national des études spatiales. Au
travers des programmes d'armement dont elle suit le déroulement, la DGA
est en effet appelée à gérer environ 80 % de l'ensemble
des crédits d'équipement des armées. La diminution de son
coût de fonctionnement et du coût d'acquisition des
équipements est au coeur des objectifs de la DGA depuis 1996.
Votre rapporteur fera le point sur les premiers résultats obtenus, avant
d'évoquer l'évolution des structures industrielles et des centres
d'expertise et d'essais relevant de la DGA puis de commenter l'évolution
des crédits pour 2002.
A. L'ÉVOLUTION DE LA GESTION DES PROGRAMMES D'ÉQUIPEMENT PAR LA DGA
Votre rapporteur souhaite effectuer un rapide bilan des résultats obtenus par la DGA sur trois points : la mise en oeuvre de nouvelles méthodes destinées à réduire le coût des programmes d'armement, la gestion de ces programmes et le développement de la coopération européenne.
1. Les nouvelles méthodes d'acquisition et la réduction des coûts
La DGA
s'était engagée dans une action volontariste de diminution du
coût des programmes d'armement, l'objectif s'échelonnant, selon
les programmes, entre 30 % d'économies pour ceux entrant en phase
de faisabilité et si possible jusqu'à 10 % pour ceux
déjà en phase de production.
Au 30 juin dernier, sur 93 programmes d'armement ou opérations
placés sous contrôle de gestion, le
montant des
réductions de coût
obtenues après la mise en oeuvre du
contrôle de gestion s'élevait à
9,8 milliards
d'euros
au coût des facteurs de 1999, soit
9,8 % des
dépenses qui restaient à engager sur ces programmes.
Ces
réductions de coût sont étalées sur toute la
durée de réalisation des programmes, soit, pour certains d'entre
eux, au-delà de 2010.
Elles ont été ont obtenues par diverses méthodes :
- la limitation des besoins au juste nécessaire pour l'exécution
des missions des forces armées, grâce à un travail en
« équipe intégrée » associant la DGA
et les états-majors concernés, et dans certains cas, l'industriel,
- l'amélioration de l'efficacité du processus d'acquisition et de
conduite des programmes,
- le développement de la mise en concurrence des industriels et la
passation de commandes globales pluriannuelles leur donnant une meilleure
visibilité de leur plan de charge.
Parmi les réductions de coût les plus importantes obtenues depuis
1997, la DGA cite :
- le
système principal PAAMS
de missile antiaérien pour
les frégates antiaériennes, pour lequel l'élargissement de
la coopération au Royaume-Uni a entraîné une
réduction de devis de 11,5 % ; l'allongement de la série des
missiles Aster, communs au PAAMS et à la famille sol-air futurs FSAF
entraîne une réduction du devis de ce dernier programme. Le
résultat de la négociation s'est traduit par un gain de 106,5
millions d'euros au coût des facteurs de janvier 1999. Le gain total
représente 28 % du coût de référence du
programme ;
- le
réseau de communication Rubis
de la gendarmerie pour lequel
l'optimisation des systèmes de transmission et de radiocommunication, de
la logistique initiale et des travaux d'infrastructure a permis une
réduction de 5,4 % du devis et 18,1 % du reste à
engager ;
- le
Rafale
, dont les gains sur la production se chiffrent à 1
722,6 millions d'euros aux coût des facteurs de janvier 1999, soit 8,1 %
du reste à engager de référence. Les principaux gains
obtenus résultent de la procédure des commandes globales et de la
négociation de Spectra et du lance-missiles MICA ;
- le
Tigre
dont les commandes globales de 80 machines et la
réduction du coût de série ainsi que les commandes
groupées des moteurs ont généré un gain global de
381,1 millions d'euros au coût des facteurs de janvier 1999. La
totalité des réductions acquises sur ce programme
représente 7,6 % du reste à engager de référence.
Le développement, à partir de 1997, des
commandes
pluriannuelles globales
, permettant d'engager plusieurs tranches de
fabrication ou plusieurs annuités de développement, ont
également permis des réductions de devis de la part des
industriels en contrepartie d'un engagement à plus long terme de l'Etat.
Le tableau ci-dessous récapitule l'ensemble des commandes globales
passées depuis 1997 et jusqu'à l'année 2000, pour un
montant total avoisinant 10 milliards d'euros.
Les commandes globales pluriannuelles depuis 1997
Matériel |
Volume de la commande |
Date |
Montant
|
Missile Apache antipiste |
100 missiles |
28-10-97 |
238 |
Missile Scalp EG |
500 MISSILES |
29-12-97 |
641 |
Torpille MU 90 |
300 torpilles |
23-12-97 |
277 |
Missile MICA |
225 missiles |
17-12-97 |
179 |
Stratoréacteur Vesta |
conception, réalisation et essais |
29-10-97 |
141 |
MTBA |
18 systèmes fixes d'équipement des bases aériennes et 6 systèmes déployables |
31-12-97 |
213 |
Système de missiles PAAMS |
5 années de développement |
23-6-98 |
168 |
Dépanneur Leclerc |
15 dépanneurs |
27-7-98 |
107 |
Missile M 51 |
deux années de développement |
5-8-98 |
579 |
MTGT |
99 systèmes de transmission des garnisons de l'armée de terre |
28-10-98 |
76 |
Char Leclerc |
88 chars (regroupant des commandes de 1997 et 1998) |
30-10-98 |
762 |
Rafale |
28 avions de combat |
9-6-99 |
1 433 |
Hélicoptères Tigre |
80 hélicoptères de combat |
18-6-99 |
1 448 |
Chasseurs de mines |
modernisation de 13 bâtiments |
1-10-99 |
91 |
Système de missiles PAAMS |
passage en coopération trinationale |
11-8-99 |
46 |
Hélicoptères NH 90 |
27 hélicoptères marine |
30-6-00 |
1 153 |
Missile AASM |
744 kits de munitions |
13-9-00 |
200 |
Missile MICA |
70 missiles |
27-12-00 |
275 |
VBCI |
65 véhicules blindés |
6-11-00 |
358 |
MTBA |
21 systèmes fixes |
28-12-00 |
107 |
M 51 |
2 années de développement |
27-12-00 |
1 258 |
Pour
2001
, les commandes globales doivent porter sur
20 Rafale
(823
millions d'euros) et de
50 avions de transport A 400 M
(6 662 millions
d'euros). S'agissant de l'A 400 M, la commande, si elle se confirme,
présentera un caractère global à plusieurs tires :
- tous les pays participants commanderont leurs avions par le même
contrat,
- tous les appareils prévus aujourd'hui par les pays participants seront
commandés en une seule fois,
- comme pour les appareils civils, la commande sera unique et regroupera le
développement et la production.
Ce programme devra normalement être confié à l'OCCAR.
Pour l'année 2002
, le projet de loi de finances prend en compte
les commandes globales suivantes :
-
MTGT (modernisation des moyens de transmissions des garnisons de
l'armée de terre)
: 52 systèmes de transmissions venant
compléter la commande globale passée en 1998 et permettant de
réaliser l'ensemble de l'équipement prévu,
-
famille de systèmes sol-air futurs (FSAF)
: 2
systèmes sol-air moyenne portée/terrestre (SAMP/T), 70 munitions
et les approvisionnements à long délai pour 10 systèmes.
Comme votre rapporteur l'a souligné l'an passé, le
développement, par ailleurs hautement souhaitable, de la
procédure des commandes globales pluriannuelles se traduit par une
tension accrue sur les autorisations de programme, le choix ayant
été fait de privilégier la mobilisation des autorisations
de programme disponibles, afin d'en résorber le stock, à la mise
en place d'autorisations de programme nouvelles, qui n'est intervenue que dans
des cas exceptionnels, comme l'A 400 M.
Cette méthode atteint aujourd'hui ses limites. Déjà, elle
a rencontré un certain nombre de difficultés, la passation de
commandes globales ayant imposé la désaffectation d'autorisations
de programme précédemment attribuées à certains
équipements. Il est clair que le stock d'autorisations de programme
disponibles, qui s'est considérablement résorbé ces
dernières années, s'approche aujourd'hui d'un plancher, la
contraction du « fonds de roulement » s'étant
déjà traduite par des difficultés de mobilisation
d'autorisations de programme.
Pour 2002, l'armée de terre devra renoncer à certaines commandes
prévues et en réduire d'autres pour financer la commande globale
du SAMP/T.
2. La gestion par la DGA des crédits d'équipement des armées
Depuis
1997, les conditions de gestion, par la DGA, des crédits
d'équipement des armées, a fortement évolué, en
raison de la réforme de la DGA elle-même, de la modification de la
nomenclature budgétaire, de la généralisation de la
comptabilité spéciale des investissements, de l'intervention d'un
contrôle financier déconcentré comme dans les
ministères civils, de la restructuration des opérations
budgétaires en opérations budgétaires d'investissement, de
l'instauration d'un lien formel entre autorisations de programme et
crédits de paiement et du déploiement, début 2000, d'un
nouvel outil de comptabilité (Nabucco).
Malgré ces nombreux changements, les conditions de la gestion des
crédits, marquée il y a encore trois ans par de fort reports de
charges et des intérêts moratoires, s'est améliorée.
Evolution des crédits d'équipement
gérés par la DGA
(en milliards d'euros)
Exercice |
Engagements |
Ressources disponibles |
Paiements |
Taux de consommation |
1995 |
9,38 |
9,86 |
8,84 |
89,6 % |
1996 |
7,21 |
9,74 |
9,38 |
96,2 % |
1997 |
9,86 |
9,79 |
9,30 |
95,0 % |
1998 |
9,83 |
8,77 |
8,42 |
96,0 % |
1999 |
10,82 |
8,78 |
8,40 |
95,7 % |
2000 |
13,74 |
8,77 |
8,40 |
95,5 % |
Quant aux intérêts moratoires, leur montant, qui s'élevait à 109 millions d'euros en 1996, n'était plus que de 31 millions d'euros en 1998, 24,68 millions d'euros en 1999 et 34,97 millions d'euros en 2000.
3. La coopération européenne sur les programmes d'armement
La DGA a
joué un rôle majeur dans la création de l'
organisme
conjoint de coopération en matière d'armement (OCCAR)
, qui
regroupe actuellement l'Allemagne, l'Italie, le Royaume-Uni et la France.
L'OCCAR a pour but d'améliorer la gestion des programmes en
coopération, par la mise en oeuvre de règles et de
procédures inspirées des meilleures pratiques en vigueur dans les
Etats-membres. Dans le domaine des acquisitions, les principes retenus (mise en
concurrence systématique dans tous les pays européens, extension
à la concurrence extra-européenne en cas de
réciprocité effective, abandon du juste retour industriel
programme par programme...) innovent totalement par rapport aux pratiques
traditionnelles de la coopération.
Le processus de ratification de la convention du 9 septembre 1998 s'est
achevé en 2000, l'OCCAR ayant acquis la personnalité juridique
internationale lui permettant de mettre en oeuvre ses principes d'acquisition
le 28 janvier 2001.
Le principe de l'adhésion des Pays-Bas et de la Belgique à
l'OCCAR a été accepté. La Suède se montre
également intéressée.
Parallèlement, dans le prolongement de la lettre d'intention sur les
restructurations des industries de défense
du 6 juillet
1998, la France, l'Allemagne, l'Italie, le Royaume-Uni, l'Espagne et la
Suède ont signé un
accord cadre
le 27 juillet 2000
à Farnborough. Cet accord offre un cadre politique et juridique commun
pour mettre en place un environnement favorable à l'édification
d'une industrie européenne plus compétitive et plus solide sur le
marché mondial de la défense et d'un marché
européen plus intégré.
Les mesures retenues dans l'accord sont schématiquement les
suivantes :
-
sécurité d'approvisionnement :
afin de maintenir
pour chaque Etat, à l'issue des opérations de restructuration
industrielle transnationale, une garantie d'approvisionnement en
matériels de défense, un principe d'interdépendance et de
confiance réciproque entre les gouvernements, reposant sur un engagement
de concertation préalable est posé ;
-
procédures d'exportation :
l' accord encourage la
recherche d'une convergence et d'une pérennité des politiques
d'exportation vers les pays tiers préservant le principe de
contrôle et prévoit une simplification des procédures
administratives et l'harmonisation des procédures pour la gestion des
réexportations ; les mesures prévues s'appliquent aux
transferts réalisés dans le cadre de programmes en
coopération intergouvernementaux et de coopérations industrielles
ayant fait l'objet d'un agrément préalable des Etats ; elles
portentsur l'établissement d'une
licence globale
couvrant tous
les transferts vers un pays signataire pour un usage national, et l'adoption de
principes régissant le contrôle des exportations vers des pays non
signataires (principe des destinations a priori autorisées),
-
sécurité de l'information :
les mesures visent
à assurer la protection de l'information classifiée dans les
sociétés de défense, notamment transnationales, tout en
harmonisant et en allégeant les réglementations nationales pour
faciliter la circulation de l'information ;
-
recherche et technologie :
l'accord prévoit un
échange d'informations entre les Etats sur leurs programmes et
politiques en matière de recherche et technologie, ainsi que la
possibilité de confier à une agence exécutive la gestion
de fonds de recherche délégués ;
-
traitement des informations techniques :
l'accord
prévoit des principes et mesures visant à réduire les
restrictions imposées à la communication et à
l'utilisation des informations techniques dans les sociétés
transnationales de défense ( non discrimination entre les
sociétés nationales et les autres pour l'accès à
l'information technique possédée par les Etats,
propriété de l'information dévolue au
générateur de celle-ci, aide au transfert de l'information lors
par exemple de la création ou de la restructuration d'une
société transnationale) ;
-
harmonisation des besoins opérationnels :
l'accord
organise la concertation entre Etats pour harmoniser le processus de
planification, de programmation, et d'acquisition des équipements
à partir d'analyses des besoins militaires.
L'accord cadre est désormais en vigueur entre les cinq pays l'ayant
ratifié durant le premier semestre de cette année, l'Italie
prévoyant de terminer son processus de ratification fin 2001. Cette
phase de mise en oeuvre devrait être terminée mi-2002.
L'accord cadre se traduira, pour la France, par des modifications de textes de
nature réglementaire ou par l'introduction de nouveaux outils (licence
globale). Ces modifications feront l'objet d'une période
d'expérimentation avant d'être définitivement
entérinées.
B. LES CENTRES D'EXPERTISE ET D'ESSAIS ET LES STRUCTURES INDUSTRIELLES DE LA DGA
La DGA a entrepris une délicate adaptation de ses activités industrielles, d'expertise et d'essais, qui se traduit par une forte déflation des effectifs, et qui est dominée par la question de l'avenir de la Direction des constructions navales (DCN), dont le principe d'un changement de statut a été arrêté cet été.
1. Les centres d'expertise et d'essais : un effort de diversification dans un contexte concurrentiel
Créée en 1997, la direction des centres
d'expertise et
d'essais, qui constitue désormais, en terme d'effectifs, la principale
direction de la DGA dans sa partie étatique, regroupe
20 centres de
recherche et d'études, d'évaluation, d'expertise et d'essais
qui dépendaient jusqu'alors de diverses directions.
Cette nouvelle organisation met en relief la mission assignée aux
centres d'expertise et d'essais, qui est celle de jouer le rôle de
prestataire de service au profit des autres directions de la DGA, mais aussi de
développer une activité commerciale d'expertise auprès de
clients extérieurs.
Par son poids en termes d'effectifs, la direction des centres d'expertise et
d'essais se situe au coeur de l'effort entrepris par la DGA pour réduire
son coût de fonctionnement. Pour 2001, son
coût d'intervention
est évalué à 543 millions d'euros
, soit 56 % de celui
de l'ensemble de la DGA.
Dans ce cadre, plusieurs orientations ont été retenues :
- développer la "culture du client", généraliser la
contractualisation et renforcer la présence auprès des services
de programmes de la DGA,
- fournir des prestations globales et développer des pôles
d'excellence,
- élargir la clientèle au delà du ministère de la
Défense afin de mieux rentabiliser les moyens d'essais et de s'exercer
à la concurrence : le
"chiffre d'affaires" de diversification
est
passé de 18,1 millions d'euros en 1997 à 46,7 millions
d'euros en 2000. Il se situera
autour de 50 millions d'euros en
2001
, ce qui reste encore loin de l'objectif de 75 millions d'euros qui
avait été assigné pour 2002.
Sur la période couverte par l'actuelle loi de programmation,
l'activité des centres d'expertise et d'essais devait être
marquée par une
diminution d'environ 20 % des besoins de la
défense française
, baisse qui atteindrait 30 % dans le
secteur de l'aéronautique, alors qu'une
concurrence de plus en plus
affirmée se développe entre les 150 centres d'expertise et
d'essais européens
. Ce contexte s'accompagne également d'une
évolution des techniques, les essais étant souvent
remplacés par des simulations moins consommatrices de main-d'oeuvre , et
par une maîtrise d'oeuvre croissante des industriels sur les
systèmes d'armes.
La DGA a donc entrepris une
forte réduction des effectifs
de la
direction des centres d'expertise et d'essais qui sont passés de
12 000 personnes début 1997 à 8 810 personnes mi-2001.
Cette évolution sera normalement réalisée
sans
fermeture de site
, compte tenu notamment des investissements qui y ont
été réalisés,
à l'exception du centre
d'essais en vol de Brétigny
, qui a été fermé en
1999 et dont les activités ont été réparties dans
les centres d'Istres et de Cazaux.
2. Le service de la maintenance aéronautique : quel avenir pour une structure spécifiquement militaire ?
Les
trois ateliers industriels de l'aéronautique de la DGA,
spécialisés dans la maintenance aéronautique militaire,
sont regroupés depuis 1997 au sein du service de la maintenance
aéronautique, directement rattaché au
délégué général pour l'armement.
Ils prennent en charge les activités de maintenance qui ne peuvent
être effectuées au sein des armées elles-mêmes,
à l'exclusion de celles qui en raison de leur complexité sont
directement confiées aux constructeurs.
L'atelier de Bordeaux est spécialisé dans la réparation
des moteurs d'aéronefs, celui de Clermont-Ferrand dans la maintenance et
la réparation d'aéronefs et d'équipements des
armées de l'air et de terre, et celui de Cuers-Pierrefeu, dans la
maintenance et la réparation d'aéronefs et d'équipements
de l'aéronautique navale.
Ces activités sont gérées sous
compte de commerce.
Au 31 décembre 2000, les effectifs des trois ateliers industriels de
l'aéronautique, qui étaient de 3 600 personnes en 1997, avaient
été ramenés à 3 306 personnes, dont 1 282
à Clermont-Ferrand, 1 055 à Bordeaux et 969 à
Cuers-Pierrefeu.
Dans son rapport sur les industries d'armement de l'Etat rendu public en
octobre dernier, la
Cour des Comptes
relève la
réduction constante de l'activité des ateliers industriels de
l'aéronautique
depuis vingt ans, du fait de la diminution du volume
des flottes aériennes, de la fiabilité supérieure des
appareils et de méthodes de réparation nouvelles, plus
économes en main d'oeuvre. Elle estime que cette tendance se poursuivra
et ne sera que très faiblement compensée par les marchés
obtenus auprès de clients extérieurs à la défense
française, si bien que
la diminution des effectifs des trois ateliers
lui semble inexorable
. La Cour des Comptes juge toutefois que les effectifs
ne sauraient passer sous un certain seuil sans provoquer, du fait du poids des
charges fixes, un
risque de détérioration de la
compétitivité
. Estimant que dans le même temps,
l'industrie française de réparation aéronautique dispose
de capacités surabondantes,
elle préconise un rapprochement
entre les ateliers industriels de l'aéronautique et les filiales
spécialisées des grands constructeurs français
,
notamment la Sogerma (EADS) et Sochata (SNECMA).
Dans sa réponse, le ministre de la défense estime pour sa part
que
« le maintien du SMA au sein du ministère de la
défense est une garantie de réactivité et d'optimisation
de la politique de maintenance des matériels qui équipent les
forces armées »
. Il souligne la bonne tenue des
performances économiques des ateliers industriels de
l'aéronautique, la réduction des effectifs s'opérant sans
perte de compétences et allant de pair avec un abaissement du poids
relatif des charges de structure. Le ministre illustre la
compétitivité du SMA en précisant que
« pour
la transformation du standard K1 en standard K2 du Mirage 2000, le prix
payé par le client au SMA a été inférieur à
la moitié du devis présenté par le
constructeur »
.
3. DCN : un changement de statut nécessaire mais tardif
L'adaptation rapide de la Direction des constructions navales
(DCN),
aujourd'hui transformée en service à compétence nationale
baptisé « DCN », constitue un enjeu
économique et social majeur pour le ministère de la
défense.
En raison de la baisse très importante de l'activité de
construction neuve au profit de la Marine nationale et du tassement des
activités d'entretien des bâtiments de la flotte,
l'avenir de
DCN repose sur la conquête de marchés à l'exportation et la
conclusion d'alliances industrielles, objectifs face auxquels son statut
d'administration et sa compétitivité industrielle constituent
deux handicaps très lourds.
Deuxième acteur de la construction navale militaire dans le monde,
reconnue pour sa haute technicité, DCN doit impérativement
opérer une profonde mutation si elle ne veut pas progressivement
s'affaiblir. Il lui faut à la fois
adapter ses effectifs à son
plan de charge
, pour trouver les conditions d'un équilibre
économique, et
opérer sa transformation
d'une
administration qu'elle est toujours en une entreprise compétitive.
Evolution du plan de charge de la DCN
(en millions d'heures )
|
1998 |
1999
|
2000 |
2001
|
2002
|
Etudes et constructions neuves |
7 204 |
4 458 |
3 351 |
3 743 |
4 624 |
Entretien |
5 985 |
6 641 |
5 190 |
5 924 |
5 433 |
Export et divers |
5 399 |
6 893 |
4 039 |
4 441 |
3 327 |
Total |
18 588 |
17 992 |
12 580 |
14 108 |
13 384 |
Face
à la réduction continue du plan de charge, DCN a entrepris une
réduction de ses effectifs
, qui sont passés de
21 000
agents début 1997
à 15 000 début 2001, l'effectif
prévisionnel pour la fin de cette année devant passer sous la
barre des 15 000 agents.
Cette réduction des effectifs a été obtenue par
trois
types de mesures
: le
dégagement des cadres
applicable
aux ouvriers ayant atteint l'âge de 55 ans et, depuis 1998, 52 ans,
moyennant le versement de pensions, allocations différentielles et
suppléments de pensions, les
départs volontaires
indemnisés
(indemnités de départ volontaire,
allocations chômage, indemnités diverses d'aide à la
création d'entreprises), et les mutations dans les armées et les
services communs avec maintien de la rémunération, qui ont
donné lieu au versement d'indemnités de mutation et de
déménagement et à la prise en charge de frais de formation.
Ces mesures sont financées par un
fonds d'adaptation industrielle
imputé sur le titre V de la Marine. Elles ont représenté
305 millions d'euros sur la période 1997-2000.
Les
dépenses prévisionnelles sont de
98 millions d'euros pour 2001
et de 96 millions d'euros pour 2002.
En ce qui concerne les
mutations vers les armées
, les
candidatures se sont surtout manifestées la première année
et
dès 1998
,
les candidatures se sont taries.
En effet,
aux problèmes géographiques s'ajoutent ceux liés aux
profils des postes proposés par les armées, souvent peu
qualifiés puisque destinés à remplacer des appelés.
Enfin, il est probable que la perspective d'un départ anticipé
dès 52 ans a découragé un certain nombre de candidatures.
En dépit des moyens financiers importants qui leur ont été
consacrées,
ces diverses mesures, fondées sur le volontariat,
se sont révélées insuffisantes pour atteindre un format
correspondant au plan de charge
, évalué aux alentours de 13
000 agents, sur la base du ratio minimal de 1 million de chiffre d'affaires par
agent.
Mais au delà du problème des effectifs se pose le problème
crucial des
modes de gestion
et de la
capacité de nouer des
alliances industrielles
.
Au cours de ses précédents rapports, votre rapporteur a
souligné les
handicaps que font peser sur DCN son statut actuel
.
Dans son rapport précité d'octobre 2001, la
Cour des
Comptes
en dresse un inventaire détaillé : gestion
fondée sur une
facturation au client des coûts- et bien souvent
des surcoûts - constatés
, et non sur une logique de
résultat,
graves insuffisances dans la gestion informatique des
pièces de rechanges et des munitions
, qui conduisent à
maintenir des stocks considérables tout en devant effectuer de
coûteux achats en urgence, répercutés sur les coûts
de maintien en condition opérationnelle des bâtiments de la
Marine,
cumul d'un sureffectif et d'un sous-encadrement
, notamment pour
les activités essentielles d'achats et de comptabilité,
mauvaise évaluation des devis pour les contrats à
l'exportation
, provoquant des pertes d'exploitation,
difficultés,
en raison du statut d'administration, à s'insérer dans les
restructurations de l'industrie européenne de la construction navale
.
L'an passé, votre rapporteur soulignait que la transformation de DCN en
service à compétence nationale
, retiré du
périmètre de la DGA et rattaché directement au ministre de
la Défense, ne modifiait en rien la nature de service industriel de
l'Etat qui caractérise DCN, et n'emportait
aucune conséquence
sur les modes de gestion
, bien que certains assouplissements en
matière de code des marchés publics, de règles d'embauche,
de règle de gestion et d'affectation du résultat aient
été envisagés dans le cadre d'une charte de gestion,
conclue entre le ministère de la Défense et celui de l'Economie
et des Finances. Il s'inquiétait de la lenteur des évolutions et
appelait à une transformation rapide du statut de DCN.
On ne peut donc que partager l'opinion de la Cour des Comptes lorsqu'elle
écrit :
« les évolutions nécessaires
pour assurer le destin de la DCN n'ont d'ores et déjà que trop
tardé »
.
Annoncée, le 6 juillet dernier, la
décision de doter DCN d'un
statut de société de plein exercice, détenue par l'Etat,
permet donc d'amorcer cette indispensable évolution
.
Cette transformation doit permettre à DCN d'appliquer des règles
de fonctionnement identiques à celles de ses concurrents et partenaires.
DCN ne sera plus soumise au code des marchés publics. Elle se fixera des
règles internes conformes à celles utilisées par les
industriels du secteur et pourra recruter les personnels, et en particulier les
cadres, dont elle a besoin, sous le régime de la convention collective
qui sera retenue. Les personnels actuels conserveront leur statut et seront mis
à disposition par l'Etat. Surtout, DCN pourra nouer directement des
alliances avec des partenaires industriels et commerciaux, notamment sous forme
de filiales communes qu'elle contrôlera directement.
Un contrat d'entreprise, couvrant une période transitoire d'au moins 5
ans après la création de la société,
précisera les objectifs de DCN et les modalités adoptées
par l'Etat pour accompagner son évolution.
La constitution de la société et l'apport de
l'Etat devraient intervenir au dernier trimestre 2002 et
la mise en
place opérationnelle de la société début 2003
.
La transformation du statut de DCN fait l'objet de l'
article 36 du projet de
loi de finances rectificative pour 2001
. Votre commission des affaires
étrangères et de la défense formulera un avis à
l'occasion de l'examen de cet article et décrira à cette occasion
le contexte dans lequel s'inscrit cette réforme, les
nécessités auxquelles elle répond mais aussi les limites
inhérentes à sa lente et tardive mise en oeuvre.
Pour l'heure, votre rapporteur souhaite simplement insister sur l'urgence qui
s'attache à la mise en oeuvre effective et rapide de cette
réforme, sachant qu'au delà du statut juridique de l'entreprise,
la réorganisation de sa gestion et l'adaptation de la politique des
ressources humaines aux exigences de compétitivité devront
être impérativement accélérées.
C. LE BUDGET DE LA DGA
1. L'évolution des crédits
Le
montant des crédits regroupés au sein de l'agrégat DGA
pour 2002 s'élève à
2,105
milliards d'euros
,
contre 2,130 milliards d'euros dans le budget 2001.
Les
dépenses ordinaires
, dont le périmètre a
fortement évolué, s'élèvent à 378,8 millions
d'euros
, soit une diminution de 6,7 %
par rapport à 2001.
Evolution des dépenses ordinaires de la DGA
(en millions d'euros)
|
2001 |
2002 |
% |
Rémunérations et charges sociales |
144,0 |
118,9 |
- 17,5 |
Fonctionnement courant |
142,3 |
128,8 |
- 9,5 |
Subventions de fonctionnement |
118,7 |
130,2 |
+ 9,7 |
Alimentation |
1,2 |
1,0 |
- 16,2 |
Total |
406,3 |
378,9 |
- 6,7 |
La forte
diminution des dépenses de
rémunérations et charges
sociales
, qui, il faut le rappeler, ne couvrent que l'emploi des personnels
militaires de la DGA, résulte de deux facteurs :
- la poursuite des
réductions d'effectifs
liées à
la programmation (suppression de 52 postes d'officiers, de 5 postes de
sous-officiers et des 22 derniers postes d'appelés ;
création de 44 postes de volontaires), qui représente une
économie d'environ 2,2 millions d'euros
- d'importants
changements de périmètre
, 86 emplois
concernant les postes permanents à l'étranger étant
transférés au budget de l'état-major des armées
(environ 11 millions d'euros) alors que les emplois relatifs aux écoles
de la DGA seront désormais financés sur la subvention de
fonctionnement de ces écoles.
Les
dépenses de fonctionnement courant
, qui n'ont cessé de
diminuer ces dernières années, connaîtront une
réduction de 9,5 % en 2002
sous l'effet :
- des mesures de réduction de format liées à la
programmation (- 6,5 millions d'euros)
- de la contractualisation d'agents auparavant rémunérés
sur les crédits de fonctionnement (- 2,5 millions d'euros) dans le cadre
de la loi sur la résorption de l'emploi précaire
- de diverses mesures de transfert vers d'autres budgets qui se traduisent par
une économie nette de 4,6 millions d'euros.
Les
subventions de fonctionnement
augmenteront de 9,7 %.
La subvention de fonctionnement à
l'Office national d'études
et de recherches aérospatiales (ONERA)
sera maintenue à son
niveau de 2001, soit 49,5 millions d'euros. Elle est complétée au
titre VI par une participation de 18 millions d'euros (inchangée) aux
dépenses d'investissement et de 35,2 millions d'euros (+ 2,6 %) aux
dépenses d'études. Globalement, les
crédits
affectés à l'ONERA s'élèveront donc à 102,7
millions de francs, soit 0,9 % de plus qu'en 2001.
La subvention de fonctionnement à
l'Ecole polytechnique
s'élèvera à 41,9 millions d'euros (inchangée),
alors que la subvention d'investissement se montera à 6,9 millions
d'euros (+53,4 %).
Les subventions de fonctionnement aux
écoles de la DGA
seront
nettement augmentées : 32,2 millions d'euros (+ 55,5 %) et couvriront
désormais les frais de personnels. Avec 7,2 millions d'euros les
subventions d'investissement diminueront de 28,4 %.
La
contribution française à l'OCCAR
est maintenue au
niveau de l'an passé, soit 2,4 millions d'euros.
Enfin, la participation aux dépenses de
l'Institut franco-allemand de
Saint-Louis,
imputée au titre VI, augmentera de 2,6 % et
s'élèvera à 17,8 millions d'euros.
Les
crédits du titre V
de la DGA s'élèveront
à
1,4 milliard d'euros
, soit 0,1 % de moins qu'en 2001.
Outre les crédits transférés à la direction des
applications militaires du CEA, qui augmenteront de près de 4 %, le
principal poste de dépenses du titre V est constitué des
études-amont
, regroupées depuis 1998 sous la
responsabilité de la DGA, qui bénéficieront en 2001 de
438 millions d'euros
de crédits, soit 3,8 % de moins qu'en 2001.
Les crédits d'infrastructure, qui se monteront à 167,7 millions
d'euros, diminueront de 5,7 %.
Enfin, rappelons que sur le titre VI de la DGA est imputée une dotation
de 191 millions d'euros transférée au
budget civil de
recherche et de développement
, et ce, en contradiction avec les
dispositions de la loi de programmation, qui fait suite à celles de 76,2
millions d'euros en 1998, 137,2 millions d'euros en 1999, 228,7 millions
d'euros en 2000 et 191 millions d'euros en 2001.
2. La poursuite de la réduction des effectifs
Le tableau suivant retrace l'évolution des effectifs budgétaires de la DGA de 2001 à 2002, en distinguant les personnels relevant du budget de l'Etat proprement dit, et ceux relevant des comptes de commerce, ces derniers ne comportant plus les personnels de DCN, sortis du périmètre de la DGA depuis la transformation en service à compétence nationale.
Evolution des effectifs de la DGA
|
Zone budgétaire 2001 |
Compte de commerce 2001 |
Total
|
Zone budgétaire 2002 |
Compte de commerce 2002 |
Total
|
Officiers |
2 388 |
804 |
3 192 |
1 826 |
792 |
2 618 |
Sous-officiers |
882 |
2 |
884 |
1 577 |
2 |
1 579 |
Volontaires |
182 |
0 |
182 |
226 |
0 |
226 |
Contingent |
0 |
0 |
22 |
0 |
0 |
0 |
Total militaires |
3 452 |
828 |
4 280 |
3 620 |
794 |
4 423 |
Titulaires |
5 401 |
3 221 |
8 622 |
5 209 |
2 875 |
8 084 |
Contractuels |
2 989 |
1 429 |
4 418 |
2 808 |
1 665 |
4 473 |
Ouvriers |
4 605 |
14 236 |
18 841 |
4 347 |
14 071 |
18 418 |
Total civils |
12 995 |
18 886 |
31 881 |
12 364 |
18 611 |
30 975 |
TOTAL GÉNÉRAL |
16 447 |
19 714 |
36 161 |
15 993 |
19 405 |
35 398 |
(1)
l'évolution de la répartition entre officiers et sous-officiers
est due à la réforme de la scolarité des
élèves de Polytechnique : à compter de 2002 les
élèves sont tous sous-officiers et une 4
e
année
est créée.
On observera qu'en 2002, une
réduction globale de 763 postes
sera
appliquée à la DGA, dont 454 postes sur la zone budgétaire
et 309 postes sur la zone compte de commerce.
Cette déflation des effectifs touchera les personnels ouvriers (- 423
postes) et les personnels civils non ouvriers (- 483 postes), alors que les
effectifs des personnels militaires progressent de 143 postes (- 22 postes
d'appelés, + 121 postes d'officiers et sous-officiers, + 44 postes de
volontaires).
La diminution s'effectue par l'exploitation de l'ensemble des
possibilités de départ basées sur le volontariat ou les
mesures d'âge : préretraites, départs volontaires
indemnisés, reclassements au sein d'autres administrations, mutations
vers les armées et services communs.
On peut également signaler la montée en puissance des postes de
volontaires (226 postes en 2002, soit un peu moins que l'objectif initial de
300) destinés à des profils de poste de « haut
niveau » analogues à ceux occupés par les scientifiques
du contingent.
3. La réduction du « coût d'intervention » de la DGA
La DGA a
pour objectif de réduire son « coût
d'intervention », notion économique qui retrace le coût
de ses structures permanentes participant à son activité propre
et des moyens mis en oeuvre pur assurer leur fonctionnement.
Tel que calculé par la DGA, le coût d'intervention
s'établira à
972 millions d'euros en 2001
, soit une
diminution de 23 % en euros constants par rapport à 1996.
La DGA entend obtenir une
réduction des ces dépenses de
l'ordre de 30 %
sur la durée de la programmation
grâce :
- à la
maîtrise des dépenses de
rémunérations et charges sociales,
liée à la
déflation des effectifs
, qui a déjà concerné
4 300 personnes de 1997 à fin 2000,
- à la réduction des dépenses de fonctionnement
courant
(politique de rationalisation systématique du soutien par le
regroupement des moyens au sein d'un établissement central de soutien,
le resserrement des surfaces occupées, le redimensionnement du parc
informatique, l'adaptation de la politique d'achat),
qui atteint
environ 30 % (60 millions d'euros) par rapport à 1996,
-
au contrôle centralisé des
investissements,
afin
d'évaluer l'opportunité et le coût de toutes les
opérations significatives, étant précisé que le
flux des investissements techniques a diminué de 45 millions d'euros
depuis 1996.
L'objectif pour la fin 2002 est d'atteindre un coût d'intervention de
l'ordre de 900 millions d'euros.
II. LE SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES
Votre rapporteur a régulièrement déploré que les profonds changements qui ont affecté depuis 1997 le service de santé des armées, et notamment ses difficultés en matière de recrutement et de réalisation des effectifs, n'aient pas été suffisamment pris en compte. Ces difficultés ont bénéficié d'un début de prise en considération en 2001 et un effort de redressement est poursuivi, bien que d'importantes difficultés demeurent.
A. LA REORGANISATION DU SERVICE DE SANTÉ : DES DIFFICULTÉS À MIEUX PRENDRE EN COMPTE
Comme
votre rapporteur l'avait exposé en 1999
2(
*
)
, l'action du service de santé des armées
s'inscrit aujourd'hui dans un contexte à bien des égards
très différent de celui des dernières
décennies :
- la suspension du service national fait disparaître la charge
considérable liée à la sélection et au suivi
médical des appelés tout en privant le service de l'apport
très important fourni par les médecins du contingent,
- les missions du service sont plus que jamais dominées par une
priorité -le soutien médical et chirurgical des forces
projetées- auquel il consacre une part croissante de ses moyens en
personnels et en matériels dans le cadre de nombreuses opérations
extérieures.
1. La poursuite de la restructuration du service
La
professionnalisation et la réduction du format des armées ont
conduit le service de santé des armées à diminuer son parc
hospitalier qui ne comportera plus que
9 hôpitaux d'instruction des
armées
. Après la fermeture du centre hospitalier Larrey
à Toulouse en 2001, le centre hospitalier Le Bas à Cherbourg,
dernier centre hospitalier des armées en fonctionnement, sera
fermé en 2002.
Après la fermeture de divers organismes de soutien
sanitaire,l'école nationale des officiers de réserve du service
de santé des armées (ENORSSA), située à Libourne
sera dissoute en juin 2002.
La
contraction du dispositif hospitalier
s'accompagne d'une
large
ouverture à la clientèle civile et au service public
, en vue
de conserver une activité variée, gage d'un maintien de la
compétence du personnel pour les missions de soutien médical au
profit des forces.
La
part du secteur civil
au sens strict (sans compter les familles de
militaires, les retraités et les civils de la défense nationale)
dans l'activité hospitalière du service de santé
est ainsi passée entre 1998 et 2000 de 47 % à
56 %
pour les consultations
, de 52 % à
62 % pour les
hospitalisations
, et de 59 % à
72 % pour
l'activité des services d'urgence
.
La participation des hôpitaux militaires au service public hospitalier
continue de progresser, notamment grâce à des
conventions de
complémentarité établies avec le secteur civil.
Les
hôpitaux militaires participent ainsi à la politique
d'optimisation de l'offre de soins.
Cette évolution contribue à maintenir les hôpitaux
militaires au meilleur niveau, mais votre rapporteur estime qu'un point
d'équilibre doit être défini afin de préserver le
caractère prioritaire des missions militaires du service, de même
que l'augmentation des ressources externes tirées de l'activité
hospitalière ne doivent pas provoquer une érosion des
crédits budgétaires qui fragiliserait le service.
2. Un fort déficit en médecins d'active et en personnels civils
Compte
tenu du rôle que jouaient les appelés du contingent pourvus d'une
formation médicale ou paramédicale dans le fonctionnement du
service de santé, la professionnalisation impose une politique de
recrutement de médecins et de personnels paramédicaux civils et
militaires, ainsi que la création d'un corps de chirurgiens dentistes
d'active actuellement inexistant.
En raison de la durée des études médicales, seul un
recrutement immédiat de médecins déjà formés
était de nature à satisfaire les besoins
générés par la disparition du contingent.
Ce
recrutement complémentaire se révèle pour le moment
très insuffisant
puisqu'en 1998, seuls 15% des postes offerts ont pu
être pourvus. En 1999, sur 48 postes offerts, 7 seulement ont
été pourvus, et en 2000, pour un même nombre de poses, 4
candidats seulement ont été retenus. Cette situation aggrave le
déficit déjà significatif en médecins d'active,
surtout au sein des forces.
Ce déficit se creuse d'autant plus que le phénomène
de
départ de médecins vers le secteur civil
, qui avait
régressé jusqu'en 1997, s'amplifie désormais, notamment
chez les chirurgiens, et surtout chez les radiologues et les
réanimateurs, spécialités cruciales pour le soutien des
forces.
Les résultats décevants du recrutement complémentaire de
médecins, pourtant indispensable, pose à l'évidence la
question de l'attractivité de la carrière médicale dans
les armées
. Un
plan de revalorisation
portant sur la
rémunération des gardes et l'élargissement de
l'accès au grade de médecin principal a été
entrepris cette année et sera poursuivi en 2002. Il est cependant
à craindre que
ces mesures, pour positives qu'elles soient, restent
encore très insuffisantes
pour attirer rapidement de nombreuses
candidatures et résorber un déficit qui risque de se creuser
davantage jusqu'à ce que le renforcement du recrutement initial en
école produise ses effets.
Le
fort déficit en personnels civils
, lié à des
départs massifs lors des restructurations et à
l'impossibilité de les remplacer en raison des contraintes
imposées au recrutement d'ouvriers et de fonctionnaires, est la seconde
source de difficultés dans la mise en oeuvre de la professionnalisation.
Elle crée, dans les hôpitaux des armées, des situations
tendues auxquelles pourrait seul remédier un nécessaire
assouplissement des conditions d'embauche.
Par ailleurs, les nombreux statuts des personnels paramédicaux, seront
à terme remplacée par deux statuts, l'un pour les militaires et
l'autre pour les civils, inspirés de la fonction publique
hospitalière.
Evolution des effectifs du service de santé des
armées au 1
er
juillet 2001
(effectifs inscrits au budget du service de santé des
armées)
Catégories |
Effectifs budgétaires 2001 |
Effectifs réalisés l er juillet 2001 |
Ecart |
Officiers |
3 315 |
2 929 |
- 386 |
dont médecins |
2 430 |
2 156 |
- 274 |
Sous-officiers |
3 121 |
3 132 |
+ 11 |
MDR engagés |
230 |
142 |
- 88 |
Appelés |
521 |
451 |
- 70 |
dont médecins |
104 |
171 |
+ 67 |
Volontaires |
181 |
140 |
- 41 |
Civils |
5 613 |
4 803 |
- 810 |
Fonctionnaires |
2 647 |
2 208 |
- 439 |
Ouvriers |
2 966 |
2 595 |
- 371 |
Total |
12 981 |
11 597 |
- 1 384 |
B. LE BUDGET DU SERVICE DE SANTÉ : PRÉPONDÉRANCE DES RESSOURCES EXTRA-BUDGÉTAIRES ET LÉGÈRE PROGRESSION DES CRÉDITS
Le budget du service de santé verra ses crédits budgétaires légèrement progresser en 2002, la part du financement du service par les recettes de l'activité hospitalière représentant les deux-tiers des ressources du service.
1. Le budget du service de santé pour 2002 : première augmentation depuis 1997
Le budget du service de santé connaîtra en 2002 , sa première augmentation depuis 1997, avec une progression de 1,7 % des crédits .
Evolution des crédits du service de santé
(en millions de francs)
|
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Rémunérations et charges sociales |
|
|
|
|
|
|
Fonctionnement courant |
114,8 |
84,8 |
55,7 |
36,5 |
36 |
35,6 |
Total titre III |
310,9 |
265,3 |
238,9 |
216,3 |
219,2 |
229,5 |
Equipement |
19,6 |
15,5 |
18,3 |
17,6 |
23,5 |
24,7 |
Infrastructures |
23,5 |
21,2 |
23,5 |
23,0 |
7,2 |
- |
Total titre V |
43,1 |
36,7 |
41,8 |
40,6 |
30,7 |
24,7 |
TOTAL |
354,0 |
302,0 |
280,7 |
256,9 |
249,9 |
254,2 |
Les
dépenses ordinaires
, qui constituent l'essentiel de ce budget et
avaient très fortement diminué depuis quatre ans,
progresseront de 4,7 %.
On rappellera que de 1998 à 2000, des
mesures d'économies
portant au total sur 95 millions d'euros
ont été
appliquées aux dépenses ordinaires du service de santé,
pour tenir compte des recettes externes de cessions de prestations
médicales, qui permettent, par la procédure de fonds de concours,
de compléter les ressources du service.
La
très forte réduction des crédits de fonctionnement
courant,
qui sont passés de 114 millions d'euros en 1997 à 36
millions d'euros en 2001, se ralentit, puisqu'avec 35,6 millions d'euros en
2002, ces crédits ne sont que légèrement en retrait par
rapport à l'an passé.
Les dépenses de rémunérations et de charges sociales
augmentent pour leur part de 5,9 %.
S'agissant des effectifs, l'application des mesures de programmation
entraîne la suppression de 31 postes d'officiers, de 50 postes de
sous-officiers et des 521 derniers postes d'appelés alors que 10 postes
de militaires du rang et 66 postes de volontaires seront
créés. Parallèlement, et « hors
programmation »,
200 postes de militaires infirmiers
et
techniciens des hôpitaux des armées (MITHA) sont
créés (+ 5,7 millions d'euros).
Il faut également signaler, bien que leurs rémunérations
soient couvertes par le budget du secrétariat général pour
l'administration, que
171 postes de personnels civils supplémentaires
seront créés en 2002
, dans le cadre de l'aménagement
et de la réduction du temps de travail, alors que 170 postes d'ouvriers
d'état seront transformés en postes de paramédicaux
civils. Ces mesures permettent au total de créer 61 postes de
techniciens paramédicaux civils, 16 postes de préparateurs en
pharmacie, 146 aides soignants et 118 agents de service hospitaliers.
Le budget 2002 incorpore également des
mesures
catégorielles
au bénéfice des personnels militaires
des services de santé. La
revalorisation du régime
indemnitaire des médecins
sera poursuivie (+ 1,7 millions
d'euros) alors que les
possibilités d'accès au grade de
médecin principal
seront élargies (+ 0,7 millions
d'euros). Le « pyramidage » des emplois de MITHA sera
amélioré.
En ce qui concerne les
dépenses en capital,
les crédits de
paiement se limitent à 24,7 millions d'euros pour 2002, soit une
diminution de 19,5 %.
Les autorisations de programme, en forte augmentation en 2001 au titre du
lancement de la
construction
du nouvel hôpital d'instruction
des armées Sainte Anne à Toulon,
reviennent à leur
niveau des années passées (29,4 millions d'euros). L'actuel
hôpital sera en effet transféré en 2006 dans un
bâtiment neuf sur le site de la caserne Grignan. Les premiers travaux
doivent débuter cet automne, la construction proprement dite
démarrant fin 2002. Le nouvel hôpital possédera une
capacité de 352 lits. Sur le site actuel seront regroupés,
à partir de 2006, les autres organismes du servi
ce de santé
présents sur Toulon ainsi que divers organismes communs.
2. La part prépondérante des ressources externes et la mise en place de la dotation globale
Le
financement du service de santé des armées repose sur deux
catégories de ressources :
- les
crédits budgétaires
provenant des titres III et V du
budget de la défense,
- les
produits d'un fonds de concours
qui regroupe les recettes des
services hospitaliers, tirées des prestations médicales
délivrées à leur clientèle, à l'exception
bien entendu de celles qui sont prises en charge par la défense
elle-même (soins consécutifs à une affection
contractée en service).
Le tableau ci-dessous retrace l'évolution des parts respectives de
chaque catégorie de ressources.
Evolution des ressources du service de santé
(en millions d'euros)
|
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
Ressources budgétaires |
377,2 |
302,3 |
280,9 |
256,9 |
250,0 |
Ressources externes |
350,5 |
388,4 |
401,9 |
498,3 |
461,8 |
Part des ressources externes |
48,2 % |
56,2 % |
58,9 % |
66,0 % |
64,9 % |
Total |
727,7 |
690,7 |
682,8 |
755,2 |
711,8 |
Ce
tableau montre
la progression sensible des recettes de cessions de
prestations médicales
au cours des dernières années,
et, du fait de la forte diminution des ressources budgétaires de 1998
à 2000, un
net accroissement de leur part dans le financement du
service de santé
, qui pour la première fois en 1998
dépassait 50 %, pour atteindre désormais les
deux tiers du
budget
.
Depuis le ler janvier 1999, la clé de répartition des produits de
fonds de concours a été établie à 90 % sur les
crédits de fonctionnement et à 10 % sur les crédits
d'investissement.
A partir du 1er janvier 2002, les ressources extérieures du service de
santé passera de l'actuel régime de remboursement des prestations
à celui de la
dotation globale de fonctionnement
, inspiré
du système en vigueur dans l'hospitalisation publique civile. Comme dans
le secteur civil, cette dotation sera versée par les organismes
d'assurance - maladie, une caisse-pivot unique étant toutefois
chargée de verser directement la dotation au ministère de la
défense, qui rattachera les crédits au budget du service de
santé par voie de fonds de concours, la répartition de la
dotation globale entre les différents établissements hospitaliers
s'effectuant au sein du service de santé. Par ailleurs, il est important
de noter que les hôpitaux des armées demeurent en dehors des
compétences des agences régionales d'hospitalisation. Ce ne sont
donc pas ces dernières qui fixeront le montant de la dotation globale,
mais les ministres de la santé et de la sécurité sociale,
en fonction de l'objectif national de dépenses d'assurance - maladie.
III. LES AUTRES SERVICES COMMUNS
A. LE SERVICE DES ESSENCES DES ARMÉES
Chargé du ravitaillement des forces en produits
pétroliers, le service des essences est un service interarmées
qui exerce son activité dans deux grands domaines :
- la cession de produits pétroliers aux armées et le soutien
logistique "carburants" des forces engagées en opérations
extérieures ou lors des manoeuvres et exercices.
- l'expertise dans son domaine de compétence technique
(définition des spécifications et homologation de produits
pétroliers nécessaires aux armées ; définition,
réalisation, gestion et soutien des matériels pétroliers ;
contrôle technique, notamment des infrastructures et des véhicules
de transport de produits pétroliers).
Les crédits
du service des essences
progresseront de 3,7 % en
2002 et passeront de 88,7 à 92 millions d'euros.
Les
dépenses de rémunérations et charges sociales
s'élèveront à 39,8 millions d'euros, soit 2,7 % de
plus qu'en 2001.
Cette augmentation traduit la progression des effectifs militaires du service,
avec la création de 18 postes de militaires du rang engagés. La
diminution des effectifs de personnel civil (983 au lieu de 990) est quant
à elle sans incidence sur le budget du service, ces personnels
étant rémunérés par la direction de la fonction
militaire et du personnel civil.
Evolution des effectifs du service des essences
|
2001 |
2002 |
Officiers
|
223
|
223
|
Total |
2 385 |
2 399 |
Le
service des essences a retenu, en ce qui concerne ses personnels, une
priorité à la "militarisation
", une partie des postes de
personnels civils ouvriers et la totalité des postes d'appelés
étant transformés en postes de militaires du rang sous contrat,
et ce en vue de
disposer des effectifs militaires nécessaires au
soutien des forces en opérations extérieures
. Les effectifs
engagés par le service des essences sur les théâtres
d'opérations extérieures dépassent
régulièrement 100 personnes depuis 5 ans, avec des pointes
à 170 personnes.
Les dépenses de fonctionnement courant s'établissent à
22,6 millions d'euros, soit 0,5 % de moins qu'en 2001.
Les crédits d'équipements s'élèveront à 14,7
millions d'euros (+ 12,8 %) et les crédits d'infrastructure
à 14,8 millions d'euros (+ 2,3 %).
L'augmentation du nombre de véhicules pétroliers engagés
en opérations extérieures (22 % des véhicules
projetables du service), et l'obligation de mise aux normes des installations
de stockage provoque
de fortes contraintes
sur le titre V
qui, si
elles perdurent, pourraient conduire à revoir le dimensionnement des
moyens pétroliers projetables et à retarder la mise en
conformité des installations.
Les
enseignements tirés des opérations extérieures
ont conduit le service à
redéfinir les matériels
dont il dispose. Dans certaines conditions d'emploi, les ensembles
"tracteurs/semi-remorque citerne" se sont révélés peu
adaptés. Le service des essences souhaite disposer de matériels
plus "rustiques" utilisables en métropole comme sur les
théâtres extérieurs, et interopérables avec les
armées alliées. Il est ainsi équipé depuis 1996 de
véhicules nouveaux : un avitailleur rustique, aérotransportable
avec remorque et un camion citerne à forte motricité et tous
chemins pouvant tracter une remorque, dont les derniers exemplaires ont
été livrés en 1999. L'armée de terre a
également commencé à obtenir la livraison de
véhicules citerne sur châssis TRM aptes au ravitaillement des
chars Leclerc et à l'avitaillement des hélicoptères.
L'adaptation du service des essences entraîne également une
profonde réorganisation de ses infrastructures.
La totalité des dépôts situés en Allemagne a
été fermée, ainsi que certains sites de métropole,
notamment ceux de faible capacité ou ceux dont la mise en
conformité avec les règles de protection de l'environnement
s'avère trop coûteuse. Le service des essences privilégie
la rénovation de certains sites, dotés de plus grandes
capacités et mis à niveau, et si possible raccordés
à des moyens de transport massif (oléoduc, voie ferrée).
Les moyens sont regroupés autour de pôles fonctionnels :
- la base pétrolière interarmées de
Chalon-sur-Saône, pour la formation et l'entraînement des
personnels,
- un pôle de soutien technique par regroupement autour du magasin central
de Montereau des fonctions de réparation des matériels
exercées par les trois ateliers lourds du service.
Au cours de l'année 2000, les stocks de carburants sont passés de
591 000 m
3
le 1er janvier 2000 à 495 600
m
3
le 1er janvier 2001
. Ils sont remontés
à 518 000 m
3
en juillet dernier.
B. LA DÉLÉGATION À L'INFORMATION ET À LA COMMUNICATION DE LA DÉFENSE (DICOD)
Créée en juillet 1998, la
délégation
à l'information et à la communication de la Défense
(DICOD) a remplacé le service d'information et de relations publiques
des armées (SIRPA).
La direction en a été confiée à un civil, qui a
rang de directeur d'administration centrale, qui exerce en outre les fonctions
de porte-parole du ministère et qui est assisté d'un
délégué-adjoint issu pour sa part des rangs militaires.
Le
décret du 27 juillet 1998
portant création de la DICOD
précise ses attributions et indique notamment que l'action des
différents organismes d'information et de communication placés
sous l'autorité du chef de l'état-major des armées, du
délégué général pour l'armement, des chefs
d'état-major des trois armées et du directeur
général de la gendarmerie doit s'inscrire dans le cadre de la
politique générale définie par la DICOD.
Il précise également que
"lorsque, pour faire face à
une situation de crise, l'emploi opérationnel des forces est
envisagé ou décidé, l'information relative à cet
emploi est centralisée et conduite, selon les directives du ministre de
la défense, par la DICOD. Dans le cadre de ces directives, le chef
d'état-major des armées conçoit et conduit la
communication de l'ensemble de la chaîne opérationnelle et donne
des instructions à la DICOD"
.
La réforme de la politique de communication du ministère s'est
poursuivie en 2001, avec la
modification du statut de l'Etablissement
cinématographique et photographique des armées (ECPA)
3(
*
)
.
Afin de confirmer la distinction entre la
maîtrise d'ouvrage de cette politique et la maîtrise d'oeuvre de la
réalisation des instruments de communication, l'ECPA a été
transformé en établissement public national à
caractère administratif, sous la nouvelle appellation d'Etablissement de
communication et de production audiovisuelle de défense (ECPAD).
Pour 2002, le
budget de la DICOD
s'élèvera à 13,46
millions d'euros (- 0,4 %), dont 4,69 millions d'euros pour l'ECPAD,
répartis comme suit :
- crédits de fonctionnement : 10,41 millions d'euros dont 2,43 millions
d'euros pour les crédits de fonctionnement de l'ECPAD.
- équipement : 2,52 millions d'euros
- infrastructure : 0,53 millions d'euros.
Le marché d'édition des revues de la défense,
réalisé par la DICOD au profit des armées, directions et
services à la suite de la dissolution de l'ADDIM, a été
passé pour une durée d'un an (1
er
juillet 2000 au
30 juin 2001). Un nouveau marché, tenant compte des enseignements
du précédent, a été passé pour trois ans
à compter du 1
er
juillet 2001.
L'ECPAD a disposé d'une dotation accrue en 2001, en vue de faire face
à l'acquisition d'équipements techniques destinés à
sa nouvelle activité : l'effort de numérisation notamment
sera intensifié puis poursuivi sur plusieurs années. Il est
précisé que la dotation pour 2000 a été
abondée d'un complément de 1 million d'euros permettant
l'acquisition d'un télécinéma (0,91 million d'euros) et le
financement d'une étude sur la numérisation (0,091 million
d'euros).
Les effectifs budgétaires de la DICOD (ECPAD inclus) sont passés
de 584 à 595 emplois de 2000 à 2001. Pour 2002, l'effectif
budgétaire représente 632 postes dont 240 pour la DICOD
proprement dite et 392 pour l'ECPAD. Ces 632 postes se répartissent
entre 380 postes militaires et 252 postes civils.
EXAMEN EN COMMISSION
La
commission des affaires étrangères de la défense et des
forces armées a examiné le présent rapport pour avis lors
de sa réunion du 22 novembre 2001.
A la suite de l'exposé du rapporteur pour avis, M. Michel
Caldaguès s'est inquiété des conséquences du retard
de livraison du quatrième SNLE-NG, repoussé de 2008 à
2010, compte tenu du calendrier du retrait des SNLE de génération
actuelle.
M. André Dulait a demandé si la présence de
médecins était prévue lors de la journée d'appel de
préparation à la défense.
M. Christian de La Malène s'est interrogé sur les raisons de
l' insuccès du recrutement direct de médecins dans le
secteur civil par le service de santé des armées.
M. Jean-Yves Autexier a demandé des précisions sur le respect des
dotations consacrées au programme de simulation.
M. André Boyer, constatant le départ vers le secteur civil de
nombreux médecins des armées, s'est demandé s'ils
étaient soumis au respect d'une durée minimale d'engagement.
M. Robert Del Picchia a souligné l'impact de la suppression du service
national sur le service de santé des armées, compte tenu du
rôle qu'y jouaient les médecins appelés.
M. Xavier de Villepin, président, a évoqué la
réduction des arsenaux nucléaires annoncée par les
dirigeants américains et russes, en se demandant si elle pouvait avoir
des incidences sur les autres puissances nucléaires. Il a fait allusion,
ainsi que M. Philippe de Gaulle, aux informations selon lesquelles les
Etats-Unis n'avaient pas renoncé définitivement à
réaliser des essais nucléaires.
Il a demandé si, dans le domaine spatial militaire, un accord
était envisagé avec la Russie. Il a souhaité obtenir des
précisions sur les annulations de crédits intervenues en 2001 sur
le budget de la défense. Enfin, il s'est interrogé sur le
rôle de la commission de contrôle des fonds spéciaux
alloués aux services du renseignement dont la création est
envisagée au travers d'un amendement au projet de loi de finances
adopté par l'Assemblée nationale. Il a rappelé, à
ce propos, le souhait exprimé depuis longtemps par la commission de voir
renforcer l'information du Parlement sur l'organisation et le fonctionnement de
ces services.
A la suite de ces interventions, M. Jean Faure, rapporteur pour avis, a
apporté les précisions suivantes :
- la prolongation en service du dernier SNLE de génération
actuelle et l'aménagement des calendriers d'entretien doivent permettre
de faire face aux conséquences du décalage de deux ans de la
livraison du quatrième SNLE-NG ;
- le programme de simulation recevra les dotations prévues, ce qui
permet le respect des échéances de réalisation des
équipements, en particulier le laser mégajoule ;
- le coût du maintien en condition des arsenaux considérables
édifiés par la Russie et les Etats-Unis explique en grande partie
la volonté des deux pays de réduire le volume de leur armement
nucléaire ; une telle réduction n'a pas lieu de remettre en
cause la dimension de la force de dissuasion française, fondée
sur la stricte suffisance ;
- à la différence de la France, qui a testé lors de sa
dernière campagne d'essais nucléaires des charges robustes, les
Etats-Unis possèdent des charges nucléaires soumises à des
variations plus significatives ; c'est sur ce fondement que certains
spécialistes américains préconisent de ne pas renoncer
définitivement aux essais nucléaires en vraie grandeur,
même si le programme de simulation américain n'est pas remis en
cause ;
- aucun bilan médical n'est effectué lors de la journée
d'appel de préparation à la défense ;
- les obligations de mobilité, la participation fréquente aux
opérations extérieures et la relative modicité des
rémunérations sont autant de facteurs qui limitent
l'attractivité de la carrière dans le service de santé des
armées aux yeux de ceux qui se destinent à la
médecine ;
- le départ anticipé de médecins des armées vers le
secteur civil se constate souvent après 25 ans de carrière,
lorsque les intéressés peuvent procéder à la
liquidation de leur pension de retraite ;
- au cours de l'année 2001, le budget de la défense a subi deux
importantes annulations de crédits d'équipement, à hauteur
de 3,3 milliards de francs en octobre et de 2,4 milliards de francs en
novembre ;
- dans le domaine spatial, l'éventualité d'autoriser des
lancements de la fusée russe Soyouz depuis Kourou fait l'objet de
discussions avec nos partenaires au sein de l'Agence spatiale européenne.
*
* *
La
commission a ensuite examiné l'ensemble des crédits du
ministère de la défense pour 2002.
M. Xavier de Villepin, président, a rappelé que le projet de
budget de la défense pour 2002 prend en compte, au titre III et de
façon positive, les exigences de la professionnalisation. Il
prévoit à cet effet un abondement substantiel des crédits
liés à la condition militaire, ainsi qu'à
l'entraînement des forces. Cependant, a-t-il déploré, le
projet n'apporte aucune marge de manoeuvre pour tout ce qui relève des
crédits d'équipement.
La condition militaire, et notamment les mesures catégorielles en faveur
des sous-officiers, sont un des aspects positifs des crédits du titre
III. Ils permettent également d'améliorer les normes
d'entraînement des trois armées, qui constituaient un sujet de
préoccupation depuis plusieurs années.
Le titre V, en revanche, n'est plus à la hauteur des besoins. Si l'on
excepte le nucléaire, judicieusement préservé et
renforcé, ce titre, pour ce qui est des forces classiques, s'inscrit
dans la logique des diverses encoches qui ont affecté plusieurs
annuités de l'actuelle programmation. Il rend par ailleurs
irréaliste la transition avec le niveau de la première
annuité telle que définie dans le projet de loi de programmation
2003-2008.
Enfin, le niveau des crédits de paiement du projet 2002 n'est
guère compatible avec l'état des engagements
réalisés depuis 1998 qui auraient justifié, au contraire,
a souligné M. Xavier de Villepin, président, écarter
l'octroi d'une marge de gestion accrue pour les armées. Les
autorisations de programmes, pour leur part, n'augmentent pas de façon
suffisante. Pour l'armée de terre, notamment, certaines commandes ne
pourront être passées au moment prévu, entraînant de
nouveaux retards.
Concluant une programmation 1997-2002 qui aura, au fil des encoches et des
annulations, manqué de l'équivalent budgétaire d'une
annuité, ce projet de budget de la défense pour 2002, a
estimé M. Xavier de Villepin, président, est d'autant plus
critiquable -en dépit des efforts importants consentis sur le titre III-
qu'il intervient à un moment où la situation internationale
requiert une disponibilité accrue de nos forces dont on sait qu'elles
seront, à moyen terme, confrontées à des lacunes
capacitaires importantes comme, notamment, le transport aérien ou les
hélicoptères de transport de troupe.
Autant de raisons qui, a conclu M. Xavier de Villepin, président, le
conduisaient à émettre un avis défavorable à
l'adoption de ces crédits.
M. Jean-Pierre Masseret n'a pas contesté les préoccupations
exprimées dans le constat formulé par M. Xavier de Villepin,
président. Il a toutefois estimé, d'une part, qu'une
appréciation rigoureuse des crédits devait tenir compte des
conséquences de la décision de professionnaliser nos forces et
que, d'autre part, l'actuelle loi de programmation militaire avait
-après certes une revue de programmes- à peu près atteint
ses objectifs, ce qui ne s'était pas produit souvent dans le
passé.
Pour M. Jean-Pierre Masseret, c'est la décision, qu'il a jugée
improvisée, de professionnaliser les forces qui affectait aujourd'hui
les crédits d'équipement. Chacun savait le surcoût que ne
manquerait pas d'entraîner cette réforme qui a quand même
été menée à bien. Dans un cadre budgétaire
global nécessairement contraint, l'incidence de la professionnalisation
ne pouvait que peser sur le titre V.
Cela étant, a poursuivi M. Jean-Pierre Masseret, ce constat ne devait
pas empêcher d'identifier les difficultés capacitaires qui
pouvaient affecter le rôle de nos forces dans le monde ou dans le cadre
d'une défense européenne que la France, à son avis,
était bien seule à vouloir réellement promouvoir.
Prenant ainsi en compte que les objectifs majeurs de la programmation avaient
été atteints en dépit du coût de la
professionnalisation et rendant hommage aux personnels des forces
armées, M. Jean-Pierre Masseret a indiqué que le groupe
socialiste voterait les crédits de défense pour 2002.
M. Michel Caldaguès s'est élevé contre une forme de
chantage moral selon lequel un rejet des crédits de défense
porterait atteinte au moral des armées. C'était bien
plutôt, selon lui, si le Parlement se montrait aveugle et
négligent dans ses analyses que ce moral pouvait être
légitimement atteint. Pour M. Michel Caldaguès, un mauvais budget
légitimait un vote négatif.
M. Michel Caldaguès s'est déclaré inquiet de ce que la loi
de programmation militaire, en s'assignant un modèle d'armée, au
demeurant cohérent, à l'horizon 2015, avait sacrifié le
moyen terme, renvoyant à plus tard les exigences capacitaires
indispensables à bref délai. Ainsi, à l'horizon 2008, ce
constat capacitaire lui apparaissait consternant et directement lié,
notamment, au non-respect de l'engagement, inclus dans la loi de programmation
militaire, de crédits d'équipement constants, alors même
que la plus grande partie de la période couverte par la loi avait
coïncidé avec une relative embellie budgétaire. M. Michel
Caldaguès a estimé que nos forces se trouvaient cruellement
démunies dans de trop nombreux domaines : risque de non-permanence
de notre composante nucléaire navale, de défaut de permanence
dans le transport stratégique -dont la capacité future
dépendait d'une décision allemande- enfin non-permanence du
groupe aéronaval. Que restait-il sinon une situation dramatique, du fait
du non-respect d'une loi de programmation pourtant votée par la
représentation nationale ?
Enfin, M. Michel Caldaguès a contesté le raisonnement tendant
à faire porter à la professionnalisation la responsabilité
de la situation. Elle était la seule réussite de cette
programmation et ce n'est pas elle qui avait conduit à l'état
actuel des crédits d'équipement.
M. Michel Caldaguès a alors indiqué qu'il se joindrait à
l'avis défavorable proposé par M. Xavier de Villepin,
président.
M. Jean-Yves Autexier a relevé l'effort consenti sur l'espace, la
communication, le renseignement ainsi que la réaffirmation d'une
dissuasion indépendante. Il a cependant souligné les
conséquences négatives de la décision, prise, a-t-il
estimé, dans l'improvisation, de mettre un terme au service national. On
recueillait à présent, a-t-il poursuivi, les fruits amers de la
programmation. Celle-ci avait eu deux objectifs : la professionnalisation
tout d'abord, qui dans un contexte de diminution de la croissance ne pouvait
que peser sur les crédits d'équipement. Ensuite, la configuration
de nos forces en vue de leur projection pour des opérations
extérieures : or, celles-ci ne relevaient pas toujours de
l'intérêt national et s'avéraient par ailleurs
excessivement coûteuses. Relevant cependant que malgré une marge
de manoeuvre réduite les objectifs essentiels avaient été
préservés, M. Jean-Yves Autexier a indiqué que le groupe
communiste républicain et citoyen s'abstiendrait sur les crédits
de la défense pour 2002.
M. Jean-Guy Branger a rappelé qu'il y a plus de vingt ans, les
crédits de défense correspondaient à 3,5 % du PIB. A
l'époque, chacun estimait qu'un taux de 4 % était
nécessaire pour le bon fonctionnement et un équipement
adapté des forces armées. Aujourd'hui la part de la
défense dans le PIB était ramenée à moins de
2 % . Cela illustrait, a estimé M. Jean-Guy Branger, un manque
de volonté politique et il relevait de la responsabilité de la
représentation nationale d'expliquer à l'opinion les
conséquences très négatives de cette insuffisance.
La commission a alors émis un avis défavorable à
l'adoption des crédits de défense figurant dans le projet de loi
de finances pour 2002.
1
« Les crédits
d'équipement
de la Défense s'élèveront ainsi à 85 milliards de
francs constants pour les quatre prochaines années, à mi-chemin
entre le niveau nominal de la programmation et le montant inscrit au budget de
1998 ».
Lionel Jospin - Saint Mandrier - 3 avril 1998.
2
Le service de santé des armées : les
défis de la professionnalisation - rapport d'information n°458,
1998-1999 - 23 juin 1999.
3
Décret n° 2001-347 du 18 avril 2001.